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Déjà même on commence à reconnoître le Pere dans le Fils, & vous n'avez, pour ainfi dire, articulé vos premieres paroles, que pour exprimer des fentimens de religion, de charité pour les pauvres, & de bonté pour les autres

hommes.

Ne font-ce pas là les précieux germes des vertus les plus éclatantes ? Et peut-il être douteux, MONSEIGNEUR, que tant d'heureufes difpofitions, foutenues par un fi bel exemple,& cultivées par les foins & par les Leçons des plus excellents maitres dans l'art de former l'efprit & le cœur, ne faffent un jour également admirer en vous le Prince & le Chrétien.

Quelle gloire pour moi, MONSEIGNEUR, fi vous daignez faire ufage de ce livre que MONSEIGNEUR LE DUC D'ORLEANS a bien voulu me permettre de vous offrir! Mon ambition feroit fatisfaite, & j'aurois à m'applaudir toute ma vie, de vous avoir fourni la matiere d'une partie de vos premieres études. J'aurai du moins eu l'honneur de vous donner une marque publique de mon zele, & du profond refpect avec lequel je fuis,

MONSEIGNEUR,

Votre très-humble & très-obéiffant ferviteur, RESTAUT.

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PRÉFAC E.

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E titre de cet Ouvrage annonce affez que je m'y fuis propofé de travailler pour ceux qui n'ont jamais appris notre langue par regles, & fur tout pour les jeunes gens que l'on destine à étudier la langue latine. Il me femble que la lenteur des progrès qu'ils y font ordinairement, pourroit être attribuée à l'ignorance des principes que j'entreprends de développer.

Il y a dans chaque langue deux efpeces de principes. Les uns font généraux & communs à toutes les langues, parce qu'ils font pris dans la nature même des chofes, & dans les différentes opérations dont l'efprit de l'homme eft capable: tels que font les définitions & l'ufage des noms, des verbes, & de la plupart des autres parties du difcours. Les autres principes font ceux qui ne regardent que les mots ou la maniere de s'exprimer, & qui font propres à chaque langue en particulier.

Tout le monde convient que l'on n'avance dans quelque fcience que ce

puiffe être, qu'autant qu'on en a étudié & approfondi les véritables principes: ce qui me donne lieu d'affurer, après l'excellent Auteur de la maniere d'enfeigner & d'étudier les Belles - Lettres, que la méthode la plus courte & en même temps la plus folide d'apprendre une langue, eft de s'y préparer par une connoiffance exacte & raifonnée de fes principes généraux & particuliers, en les appliquant à la langue que l'on fait déjà par habitude: & je n'ai formé le projet de cet ouvrage, que pour entrer dans les vues du même Auteur qui en parlant de la langue françoife, dit qu'il feroit à fouhaiter que l'on composat exprès pour les jeunes gens, une Grammaire abrégée qui ne renfermat que les regles & les réflexions les plus néceffaires.

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En effet dès qu'un jeune homme, ou toute autre perfonne, poffede par raisonnement ce que les langues ont de commun entr'elles, & fait expliquer dans la fienne par des définitions précises, tous les termes & toutes les difficultés grammaticales que lui refte-t-il à faire pour paffer à une langue étrangere, finon de fubftituer de nouvelles expreffions à celles dont il connoît déjà la valeur & la nature? Ce ne fera plus alors qu'un jeu

* M. Rollin.

de mémoire. Le jugement & la réflexion auront fait leurs plus grands efforts, & il ne fera plus befoin que d'une légere attention pour observer en quoi les deux langues, celle que l'on fait, & celle que l'on apprend, fe reffemblent ou different l'une de l'autre.

Il s'en faut bien que les jeunes gens trouvent cette facilité dans la méthode qu'on leur fait fuivre ordinairement. A peine favent-ils lire, que fans leur avoir donné aucune notion de leur langue naturelle, on les met tout d'un coup dans les principes d'une langue qui leur eft abfolument étrangere, & dont ils ne parviennent à entendre les regles, qu'après bien des années de peines & de travaux. Au lieu que fi on leur apprenoit ces mêmes regles, en en ne les appliquant qu'à une langue qui leur eft familiere, il feroit. beaucoup plus aifé de les leur faire concevoir , parce qu'ils ne trouveroient rien dans les explications qu'on leur en donneroit, ni dans les exemples dont on se ferviroit pour leur en faciliter l'intelligence, qui ne fût à leur portée.

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D'ailleurs quels livres leur met-on entre les mains pour étudier les principes de la langue latine? Des Rudiments qui pour la plupart font fi peu méthodiques,

& où les définitions des termes font fi peu exactes & fi mal expliquées, que tout le fruit qu'ils en remportent pour l'ordinaire, fe réduit à une routine de mots où la mémoire a beaucoup plus de part que le jugement. L'expérience ne confirme que trop cette vérité & l'on voit fou-. vent des écoliers de Rhétorique, qui fe trouvent embarraffés dès qu'on leur fait quelques queftions fur les premiers principes de la Grammaire & cela fans doute, parce qu'ils n'en ont jamais fait une étude méthodique. Il eft encore plus or dinaire d'en trouver qui n'ont aucune connoiffance des regles de la langue françoife, & qui en écrivant péchent contre l'orthographe dans les points les plus effentiels enforte que s'il leur arrive quelquefois de parler ou de compofer correctement dans l'une & dans l'autre langue, on peut dire que c'est fouvent plutôt un effet du hafard & de l'habitude, que de la connoiffance des principes.

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C'est donc dans le deffein de prévenir ces inconvénients , que j'ai entrepris cet ouvrage, que l'on ne doit pas mettre au nombre de ces méthodes fyftématiques, & de ces plans finguliers, tels qu'on en voit quelquefois paroître, qui n'aboutiffent pour la plupart qu'à faire connoître à leurs

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