Images de page
PDF
ePub
[ocr errors]
[ocr errors]

qui, de quelque manière que ce soit, ou par une complaisance coupable pour eux-mêmes, ou par une vaine gloire, ou par aveuglement et par attachement à une doctrine corrompue, recueillent « où ils ne doivent pas (1). » Le saint docteur rapporte ensuite la succession des évêques de Rome depuis saint Pierre jusqu'à Éleuthère, son douzième successeur, qui occupait alors le saint-siége. Or, on ne pouvait certainement enseigner d'une manière plus expresse la nécessité du ministère apostolique, qu'il regarde comme une marque positive de la véritable Église, comme une propriété distinctive par laquelle il confond les hérétiques et les schismatiques, de quelque lieu qu'ils viennent, quelles que soient leurs

erreurs.

"

941. Tertullien: « Les apôtres prêchèrent la foi en Jésus-Christ; « ils établirent d'abord des églises dans la Judée; ensuite, s'étant partagé l'univers, ils annoncèrent la même foi et la même doc<< trine aux nations, et fondèrent des églises dans les villes. C'est « de ces églises que les autres ont reçu la semence de la doctrine, et qu'elles la reçoivent encore tous les jours à mesure qu'elles se «forment. C'est par cette raison qu'elles sont réputées apostoliques, « étant elles-mêmes filles des églises fondées par les apótres. Tout participe à la nature de son origine (2).

"

[ocr errors]

942. « Si quelques hérésies osent se reporter aux temps apostoliques, pour paraître transmises par les apôtres, prétendant « qu'elles ont été sous eux, nous pouvons leur dire qu'elles produisent donc l'origine de leurs églises; qu'elles nous mon<< trent la suite et la succession de leurs évêques, de sorte que leurs premiers évêques aient pour auteur ou prédécesseur un des « apôtres ou des hommes apostoliques qui ont persévéré jusqu'à la fin dans la communion des apôtres. C'est de cette « manière que les Églises apostoliques établissent leur filiation. « Ainsi l'Église de Smyrne rapporte que Polycarpe y a été placé « par Jean, et l'Église de Rome produit Clément ordonné par « Pierre. Toutes les autres Églises nous montrent de même ceux que les apôtres ont établis leurs évêques, et par le canal de

[ocr errors]

(1) Habemus annumerare eos qui ab apostolis instituti sunt episcopi in Ecclesiis, et successores eorum usque ad nos... Ecclesiæ (romanæ) eam quam habet ab apostolis traditionem et annuntiatam hominibus fidem, per successiones episcoporum pervenientem usque ad nos, indicantes, confundinius eos qui quoquo modo... præterquam quod oportet, colligunt. Ibidem, liv. m, c. 1. — (2) Voyez le texte dans le livre des Prescriptions, no xx.

"

[ocr errors]
[ocr errors]

1

* qui elles ont reçu la semence de la doctrine apostolique. Que « les hérétiques nous montrent quelque chose de semblable (1). Pour vous qui voulez, sur l'affaire de votre salut, satisfaire une curiosité légitime, parcourez les Églises apostoliques dans lesquelles président encore les chaires des apôtres aux lieux qu'ils a occupèrent, dans lesquelles on récite encore leurs lettres origi«nales, qui rappellent leurs voix et représentent leurs personnes. - Êtes-vous près de l'Achaïe? vous avez Corinthe; si vous n'êtes - pas éloigné de la Macédoine, vous avez Philippes et Thessalo⚫nique. Si vous allez en Asie, vous avez Éphèse. Si vous touchez " à l'Italie, vous avez Rome, dont l'autorité est si près de nous (2). » Il était donc reconnu, du temps de Tertullien, que le ministère apostolique consiste dans la succession non interrompue des évêques sur les siéges établis par les apôtres ou leurs succes

seurs.

943. Origène, répondant aux hérétiques qui prétendaient avoir pour eux les saintes Écritures et la parole de vérité, « Nous ne de«vons pas les croire, dit-il, ni nous éloigner de la tradition primitive de l'Église. Nous ne devons croire que conformément à ce « que les Églises de Dieu nous ont transmis par la succession (3). » On voit encore ici la succession des évêques donnée comme une marque de la vraie doctrine.

"

[ocr errors]

"

[ocr errors]

944. Saint Cyprien, réfutant Novatien qui avait introduit un schisme dans l'Église de Rome, lui dit qu'il n'est point évêque et « qu'il ne peut être regardé comme tel, lui qui, au mépris de la tra«dition évangélique et apostolique, ne succédant à personne, est né de lui-même. Peut-il être tenu pour pasteur, celui qui, tandis « qu'il existe un véritable pasteur qui préside dans l'Église en vertu « d'une ordination divine et d'une succession légitime, se montre « l'ennemi de la paix du Seigneur et de l'unité, commençant " par lui-même, ne descendant de personne (4)? » Le saint évèque de Carthage donne évidemment ici pour marque de l'Église de Dieu la succession des évêques, puisqu'il regarde Novatien comme schismatique, par cela même qu'il ne succédait à personne, n'ayant pas été canoniquement élu évêque de Rome.

945. Saint Epiphane, après avoir donné la liste des pontifes rò

(1) Ibidem, no XXXII. (2) Ibidem, n° XXXVI. (3) Voyez, ci-dessus, le no 341. — (4) Novatianus in Ecclesia non est, nec episcopus computari potest, qui, evangelica et apostolica traditione contempta, nemini succedens, a seipso ortus est. Lettre LXXXVI.

mains, ajoute : «< Personne ne doit s'étonner que j'aie parcouru avec « tant de soin tous ces noms; car par là se montre la vérité cer

[ocr errors]

taine et exacte (1). » La succession des évêques est donc, au jugement de ce docteur, une note de la vraie Église.

946. Saint Optat, écrivant contre Parménien, donatiste : « Vous n'ignorez pas, lui dit-il, que dans la ville de Rome la chaire épis"copale a été donnée premièrement à Pierre, et que dans cette chaire « a été assís Pierre, le chef de tous les apôtres; d'où il a été appelé Céphas, afin que par cette chaire unique on gardát l'unité; que chaque apôtre ne prétendît pas avoir la sienne, et que celui« là fût regardé comme prévaricateur et comme schismatique, qui oserait élever une autre chaire contre cette chaire unique. Saint << Pierre s'est donc assis le premier dans cette chaire unique, qui est « la première en prérogatives. Lin lui a succédé. Ici saint Optat fait l'énumération des successeurs de saint Pierre, puis il ajoute :

"

α

་་

[ocr errors]

Montrez l'origine de votre chaire, vous qui voulez avoir chez vous << la sainte Église. Vous dites que vous avez un parti dans la ville « de Rome; mais ce que vous y avez est une branche de votre erreur, qui vient de la souche du mensonge, et non du trône de fa vérité. Car si on demande à Macrobe où il est assis, dira-t-il que « c'est dans la chaire de saint Pierre? Je ne sais pas même s'il l'a jamais vue (2). » Parlant ensuite de Victor de Garbie, qui fut envoyé pour présider les assemblées des donatistes qui se trouvaient à Rome, il dit : « Il fut là comme un fils sans père, comme un sui« vant sans chef, un disciple sans maître, un successeur sans prédécesseur, un pasteur sans troupeau, un évêque sans peuple (3). » C'est donc, suivant saint Optat, l'origine apostolique de la chaire épiscopale, prouvée par la succession des évêques, qui distingue l'Eglise de Jésus-Christ des sociétés hérétiques où schismatiques.

་་

947. Saint Augustin, parcourant la suite des évêques de Rome à commencer par saint Pierre, dit qu'on ne trouve pas un donatiste parmi eux : In hoc ordine successionis nullus donatista episcopus invenitur (4). a Hésiterons-nous, s'écrie-t-il dans un autre endroit, à nous renfermer dans le sein de cette Église qui, malgré « les vains aboiements des hérétiques, a obtenu la suprême majesté,

་་

1) Per hæc (nomina Romanorum pontificum) perpetua, certa, accurataque veritas ostenditur. Hérésie xxvi, c. VI. —(2) Liv. 1, du schisme des donatistes, C. HI et IV. (3) Erat ibi filius sine patre, tiro sine principe, discipulus sine magistro, sequens sine antecedente, inquilinus sine domo, hospes sine hospitio, pastor sine grege, episcopus sine populo. Ibidem, c. IV. — (4) Lettre CLXV, c. I.

.

« par la succession de ses évêques sur la chaire apostolique (1)? » Exposant les divers motifs qui le retiennent dans l'Eglise catholique, il ajoute : « J'y suis retenu par la succession des évéques « sur cette chaire de saint Pierre, à qui le Seigneur a recommandé « de paître ses brebis, jusqu'au pontife qui l'occupe aujourd'hui (2). » Le même docteur donne, pour moyen de discerner l'authenticité des livres saints, d'examiner quels sont ceux qui ont été transmis par les successions des évêques. « Si les livres, dit-il, qui portent en tête les noms d'André et de Jean étaient véritable<«ment d'eux, ils seraient reçus par l'Église, qui, depuis leur temps « jusqu'au nôtre, persévère dans les successions constantes des évê«ques (3). Aussi saint Augustin nous représente la succession non interrompue des évêques comme essentielle à la véritable Église, comme une marque qui la distingue des sociétés hérétiques, comme le moyen de connaître la doctrine des apôtres, de discerner même les livres saints de ceux qui ne le sont pas.

[ocr errors]

"

948. Nous disons donc, d'après l'Écriture et la tradition, que l'Église de Dieu possède, comme une propriété qui lui est essentielle, le ministère que Jésus-Christ a conféré à ses apôtres, que les apôtres ont fait passer aux évêques qu'ils ont établis, avec ordre de le transmettre à leurs successeurs, et de le perpétuer, par une succession non interrompue, jusqu'à la fin des temps: Allez, enseignez toutes les nations. Voilà que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles.

949. Mais pour continuer la chaîne qui remonte jusqu'aux apôtres, il ne suffit pas d'avoir le pouvoir d'ordre, il faut de plus le pouvoir de juridiction; il faut avoir été institué évêque d'un siége selon les règles canoniques. Comme l'Église est dépositaire du ministère apostolique, c'est à elle, c'est aux évêques, et principalement au pape qui en est le chef, qu'il appartient de régler le mode dont il doit être transmis. Que l'on parcoure l'histoire ecclésiastique; qu'on remonte au berceau du christianisme, on verra cons

(1) Dubitabimus nos hujus Ecclesiæ condere gremio, quæ, usque ad confessionem generis humani, ab apostolica sede, per successiones episcoporum, frustra hæreticis circum latrantibus, culmen auctoritatis obtinuit. De utilitate credendi, c. xvn, no 35. — (2) In Ecclesia catholica me tenet, ab ipsa sede Petri apostoli, cui pascendas oves post resurrectionem Dominus commendavit, usque ad præsentem episcopatum, successio sacerdotum. Contre la lettre Fundamenti, c. iv, no 5. — (3) Quæ si illorum essent, recepta essent ab Ecclesia quæ, ab illorum temporibus, per successiones episcoporum certissimas usque ad nostra et deinceps tempora. perseverat. Liv 1 contra advers, legis et prophetarum, c. xx, no 39.

tamment les évêques et les prêtres puiser à la même source la mission et juridiction nécessaire au ministère apostolique. Ce ministère n'a jamais été exercé que sur des titres émanés de la même origine, et conférés conformément aux règles de l'Église. Ces titres n'ont pas toujours été les mêmes; il y en a de perpétuels et de transitoires, d'ordinaires et de délégués, de plus ou de moins étendus. La manière d'être pourvu de ces titres a aussi varié suivant le temps et les lieux. On a vu tantôt des élections sous différentes formes, tantôt des présentations qui remplaçaient les élections. Mais ce qui n'a jamais varié et ce qui ne variera jamais, ce qui a toujours été reçu comme dogme catholique, c'est que l'Église seule, en vertu du droit inhérent à sa constitution, détermine le mode de transmission relativement au pouvoir de juridiction. On n'a jamais regardé comme ayant un titre légitime quiconque n'en avait pas un qui fût conforme aux règlements alors en vigueur dans l'Église. Il a toujours été reconnu dans l'Église, que « tous ceux qui osent s'ingérer dans l'exercice du saint ministère, de leur propre autorité, ou qui n'y ont été appelés que par le peuple ou par la puis« sance séculière et par les magistrats, ne sont pas des ministres de l'Église, mais des voleurs et des larrons, qui ne sont pas entrés par la porte (1). Anathème à celui qui dira que ceux qui « n'ont été légitimement ordonnés ni envoyés par la puissance ecclésiastique et canonique, mais qui viennent d'ailleurs, sont de légitimes ministres de la parole et des sacrements (2)! »

[ocr errors]
[ocr errors]

"

[ocr errors]

CHAPITRE IX.

L'Eglise romaine réunil-elle toutes les propriétés de l'Église de Jésus-Christ?

950. Les propriétés de l'Église de Jésus-Christ sont l'autorité de l'enseignement, la visibilité et la perpétuité, l'unité, la sainteté, la catholicité et l'apostolicité. La vraie Église est juge suprême des controverses en matière de religion; elle est visible et perpétuelle, une, sainte, catholique et apostolique: Credo in unam, sanctam, catholicam et apostolicam Ecclesiam. Or, l'Église romaine réunit toutes ces propriétés; les trois premières, qui sont

(1) Concile de Trente, sess. XXIII, C. IV. — (2) Ibidem, can vi

« PrécédentContinuer »