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dans les trois premiers siècles, comme l'ont prétendu les chefs de la réforme, que l'Église romaine a eu des saints; le monde, en devenant chrétien, ne l'a point rendue stérile; jamais elle n'a cessé d'enfanter des justes. Sans parler de ce grand nombre de fidèles qui, dans tous les états, se sont sanctifiés sans sortir des voies ordinaires, sans pousser la sainteté jusqu'à l'héroïsme, l'histoire nous offre une multitude de pontifes, d'évêques, de prètres, de religieux, de vierges, de simples fidèles de tout rang, qui dans les différents âges de l'Église ont lutté contre la corruption de leur siècle, et se sont fait admirer par leur dévouement pour la foi, par leur zèle pour le salut de leurs frères, par cet esprit de sacrifice et d'abnégation qui confond tout à la fois les mauvais chrétiens et les ennemis de la religion catholique. De tout temps, même de nos jours, on voit dans l'Église romaine des martyrs et des confesseurs de la foi, des justes en qui le Seigneur se plaît, tandis qu'ils sont sur la terre, à manifester les prodiges de sa grâce, comme il se plaît, après leur mort, à révéler leur gloire par les prodiges de sa toute-puissance. On sait avec quelle circonspection l'Eglise procède à la canonisation des saints, avec quelle maturité elle examine les miracles opérés par leur intercession. Il n'est aucun fait mieux constaté que les faits surnaturels sur lesquels elle s'appuie, quand il s'agit pour elle de proclamer la sainteté des héros du christianisme, et de permettre d'honorer leur mémoire. Nous ne parlons pas de ces miracles que certains auteurs ignorants et crédules ont adoptés sans examen : la critique a su les distinguer de ceux qui sont tellement avérés, tellement prouvés par des témoignages publics et contemporains, par l'enchaînement des faits, qu'on ne peut les révoquer en doute sans ébranler les fondements de l'histoire (1).

957. Quand nous disons que l'Église romaine est sainte dans une partie de ses membres, nous convenons par là même qu'elle ne l'est pas dans tous. Nous l'avons vu plus haut (2), elle comprend dans son sein tous les chrétiens bons ou méchants, justes ou pécheurs, qui sont unis entre eux par la profession d'une même foi, par la participation des mêmes sacrements et la soumission aux mêmes pasteurs, principalement au souverain pontife. Il y a eu et il y aura toujours des abus et des scandales dans l'Église, même de la part de quelques-uns de ses ministres; Judas, le

(1) Voyez le savant Traité de Benoit XIV, De Beatificatione et canonizatione servorum Dei. ·(2) Voyez le n° 921.

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traitre Judas, était un des douze apôtres de Jésus-Christ. Tout prêtre, tout évêque, tout pontife, est pris parmi les hommes: omnis pontifex ex hominibus assumptus (1); le prêtre, l'évêque, le pontife, sont donc sujets aux passions et aux faiblesses humaines. Mais les fautes dont ils peuvent se rendre coupables ne sauraient nuire à la sainteté de l'Église, puisqu'elle les condamne, et qu'elle a constamment mis en œuvre tous les moyens possibles pour les prévenir ou les faire cesser. D'ailleurs, soyez justes, et vous conviendrez que le clergé catholique a toujours été riche en grands hommes; et que c'est autant par la sagesse de ses règlements et par ses vertus, que par la culture des lettres et des sciences, qu'il a civilisé le monde. Pour ne parler que de l'Église de Rome, la mère et la maîtresse des autres Églises, combien d'hommes éminents n'a-t-on pas vus sur le trône de ses pontifes? Couronne glorieuse pour cette Eglise, toute resplendissante de sainteté, de dévouement pour la religion, de fermeté contre l'erreur et la corruption des mœurs, de sagesse dans le choix du temps et des moyens pour la réforme des abus, de zèle pour l'abolition de l'esclavage et la liberté des peuples. Vous êtes étonné qu'il y ait eu des papes indignes de ce nom; mais ne devriez-vous pas l'être bien davantage qu'il y en ait eu si peu dans une aussi longue succession, dans l'intervalle de dix-huit siècles? surtout si vous considérez que l'on doit chercher la cause des mauvais choix principalement dans les discordes civiles et dans les triomphes passagers des factions, qui voulaient disposer de la papauté à leur profit.

958. Nous dirons donc aux ennemis de l'Église ce que saint Augustin disait aux hérétiques de son temps: « Ne mettrez-vous « pas un terme à vos invectives contre l'Église catholique? Ses dé«sordres, que vous censurez si amèrement, elle les condamne « comme vous; et ceux qui en sont coupables, elle travaille sans « cesse à les corriger, pour en faire des enfants dignes d'elle........ Pourquoi donc ces attaques si passionnées? Pourquoi vous lais« ser aveugler par l'esprit de parti? Que gagnerez-vous à défendre « si péniblement l'erreur? L'Église n'est ni un champ sans fruit, << ni une aire sans froment; cherchez les fruits, cherchez le bon grain; vous serez étonnés vous-mêmes de leur abondance (2). Si << nous avons dans quelques scandales publics de justes sujets de

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douleur, il est aussi d'admirables vertus dont le spectacle doit

(1) Lettre aux Hébreux, c. v, v. 1. — (2) Liv. 1, Des mœurs de l'Église catholique, c. iv et v.

<<nous consoler. Cette lie épaisse, qui attriste vos regards, ne doit

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point faire haïr le pressoir d'où sort en même temps l'huile

pure dont la flamme brillante éclaire la maison de Dieu (1). »

ARTICLE V.

L'Eglise romaine est catholique.

959. L'Église romaine est répandue dans tout l'univers; elle étend son empire en Europe, en Asie, en Afrique, en Amérique, dans l'Océanie, dans toutes les parties du monde; et il n'est aucune société chrétienne, séparée de sa communion, qui soit aussi universellement répandue qu'elle. Ii ne s'agit pas de savoir si l'Église romaine l'emporte, par le nombre de ses membres, sur toutes les autres communions réunies ensemble, mais bien sur chacune d'elles prise isolément. Or il n'est aucune de ces communions, hérétiques ou schismatiques, qui puisse être comparée à l'Église romaine sous le rapport de l'universalité; il n'en est aucune, quelle que soit sa diffusion sur le globe, qui ait autant de chrétiens pour elle qu'il y a de catholiques romains. Jamais aucune société d'hérétiques n'a été et ne sera aussi universelle que la communion à laquelle nous avons le bonheur d'appartenir; car il est constant qu'une secte ne se répand que pour se diviser en plusieurs autres sectes, aussi opposées les unes aux autres qu'elles le sont à l'Église romaine. Ainsi, par exemple, les protestants, fussent-ils beaucoup plus nombreux qu'ils ne le sont, parce qu'ils seront toujours divisés entre eux, que les uns seront luthériens, les autres calvinistes, les autres anglicans, les autres enfin toute autre chose, anabaptistes, arminiens, gomaristes, piétistes, méthodistes, sociniens, rationalistes, ne pourraient jamais former une seule et même Église qui fùt catholique; une Eglise qui enseignât partout la même doctrine, qui administrât partout les mêmes sacrements, qui eût partout le même ministère. Ceux qui ont secoué le joug de la foi tombent infailliblement dans l'anarchie, n'ayant, généralement, plus rien de commun entre eux que la haine pour l'Eglise qui les a frappés d'anathème. Ainsi, à partir de la vraie notion de la catholicité, l'Église romaine est la seule qui soit vraiment catholique, la seule qui ait été catholique dans tous les temps.

(1) Lettre LXXVIII.

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ARTICLE VI.

L'Église romaine est apostolique.

960. L'Église catholique romaine est apostolique : elle l'est sous le double rapport de la doctrine et du ministère. D'abord, elle est apostolique sous le rapport de la doctrine: ce qu'elle croit, elle l'a toujours cru; elle n'a jamais enseigné d'autres vérités que celles qui lui ont été transmises par les apôtres, de vive voix ou par écrit; il n'est aucun dogme, dans l'enseignement de l'Église catholique, en faveur duquel on ne puisse invoquer une croyance aussi ancienne que le christianisme; aucun article, dont on puisse expliquer l'origine sans remonter aux apôtres. De l'aveu des protesfants, l'Eglise primitive a conservé pure, sans mélange d'erreur, la doctrine de Jésus-Christ; durant les trois premiers siècles, elle a été fidèle, disent-ils, au mandat de son divin Maître, qui lui avait confié le dépôt de la foi. Or, sa croyance n'a pu souffrir la moindre altération, ni au quatrième siècle, ni dans les siècles suivants. En effet, indépendamment de la parole de Notre-Seigneur, qui a promis d'être tous les jours, avec ses apôtres et leurs successeurs, enseignants et baptisants, jusqu'à la consommation des siècles (1), si vous ouvrez l'histoire, yous y verrez l'Église romaine constamment opposée à toute innovation en matière de religion. Toujours et partout elle invoque contre les novateurs les traditions apostoliques. Jamais elle ne s'est écartée de cette règle par laquelle elle a confondu toutes les hérésies, Nihil innovetur, nisi quod traditum est. Ce sont les paroles du pape saint Étienne contre l'erreur des rebaptisants. « Ce grand homme, dit Vincent de Lérins, "comprenait bien que la piété ne permettait point de recevoir d'au«<tre doctrine que celle qui nous est venue de la foi de nos prédé«cesseurs, et que nous sommes obligés de la transmettre aux « autres avec la mème fidélité que nous l'avons reçue. Il était persuadé qu'il ne faut pas mener la religion par où nous voulons, «< mais la suivre partout où elle nous mène; et que le caractère de la religion chrétienne est de conserver fidèlement les saintes maximes que nous ont laissées nos pères, et non pas de faire passer les nôtres à la postérité (2). » On ne peut donc supposer que l'Église romaine ait introduit ni même toléré aucun changement

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dans la foi.

(1) Saint Matthien, c. xxvm, v. 20.

(2) Commonitoire, no 1.

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961. D'ailleurs, si elle n'a pas toujours eu la même croyance, si son enseignement s'est altéré, qu'on nous dise donc comment cette altération a pu devenir universelle. Si, comme le prétendent les protestants, les dogmes de la présence réelle, par exemple, de la confession sacramentelle, de l'invocation des saints, de la prière pour les morts, sont des dogmes inventés par les catholiques, qu'on nous montre donc depuis quand ils ont paru dans le monde, quels en sont les auteurs, par quels moyens ils se sont répandus dans tout l'univers. Il serait bien étonnant qu'on ignorât ceux qui auraient ajouté ces dogmes à la foi primitive, tandis que l'on connaît les Arius, les Macédonius, les Pélage, les Nestorius, les Eutychès, et généralement tous ceux qui ont tenté de porter atteinte à l'intégrité de la doctrine catholique. On ne se persuadera point que des changements dans la foi de nos pères aient pu s'opérer sans bruit, sans difficulté, sans contradiction; on ne se persuadera point que les Grecs et les Latins, entre lesquels il y a toujours eu plus ou moins de rivalités, se soient accordés à reconnaître comme apostoliques des vérités qui n'étaient point reçues partout comme venant des apôtres. Enfin, c'est un fait constant qu'il y a toujours eu des hérésies. Or, comment supposer que l'Église, qui s'est constamment opposée à toute nouveauté, ait osé innover elle-même, en présence des novateurs qu'elle avait condamnés? N'aurait-elle pas craint qu'on lui reprochât en face de faire ce qu'elle reprochait aux autres? Le moindre changement de sa part, sur un point dogmatique, n'eût-il pas été un sujet de triomphe pour ses ennemis? Il est donc démontré que l'Église catholique romaine a toujours eu la mème croyance; que sa doctrine par conséquent ne peut venir que des apôtres : « Quod universa tenet Ecclesia, dit saint Augustin, « nec conciliis institutum, sed semper retentum est, non nisi auctoritate apostolica traditum rectissime creditur (1).

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962. L'Église romaine est apostolique quant à la doctrine; elle l'est également quant au ministère. La succession de ses pasteurs commence aux apôtres, et vient jusqu'à nous sans interruption. « Je suis retenu dans l'Église, disait saint Augustin, par la suc« cession des pontifes sur la chaire de saint Pierre, depuis cet apôtre à qui le Seigneur a confié ses brebis, jusqu'au pape ac«tuel (2). Avant l'évêque d'Hippone, saint Epiphane, saint Optat, Tertullien, saint Irénée, prouvaient aux hérétiques de leur temps l'apostolicité de l'Eglise romaine par la succession non

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(1) Du Baptême, contre les donatistes, liv. iv, c. XXIV.

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