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mes bornes? Comment osez-vous semer et recueillir ici à discré<tion? C'est mon bien, c'est ma possession; je possède depuis longtemps, je possède avant vous, je succède à ceux qui ont possédé les premiers je suis l'héritière des apôtres (1).

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977. Dira-t-on qu'à défaut d'une succession apostolique de l'ordination et de l'institution canonique, les chefs de la Réforme ont reçu immédiatement de Dieu la mission nécessaire pour réformer l'Eglise? Mais de deux choses l'une: ou l'Église avait encore alors le ministère apostolique, ou ce ministère n'existait plus. Dans le premier cas, les auteurs de la réformation auraient dû se pourvoir auprès de l'Église pour en recevoir la mission ordinaire, ou se soumettre à son jugement; ce qu'ils n'ont pas fait. Dans le second cas, il faudra faire mentir Jésus-Christ, qui a promis d'être avec les apôtres et leurs successeurs jusqu'à la consommation des siècles. D'ailleurs, si on prétend que Luther, Calvin, Henri VIII, ont été envoyés de Dieu comme autrefois les prophètes et les apôtres, ne sommes-nous pas en droit d'exiger qu'ils nous présentent leurs lettres de créance, les titres de leur mission? Nous dirons donc ce que Tertullien disait de certains hérétiques de son temps: « Qu'ils <«< nous montrent de quelle autorité ils se produisent; qu'ils prou« vent qu'ils sont de nouveaux apôtres; que Jésus-Christ est des« cendu une seconde fois sur la terre, qu'il a enseigné de nouveau, qu'il a été crucifié de nouveau, qu'il est mort de nouveau, qu'il <«<est ressuscité de nouveau, et qu'il leur a donné le pouvoir d'opé«rer des miracles, comme il en a opéré lui-même : c'est à ces traits que nous reconnaissons les vrais apótres de Jésus-Christ. Mais je ne dois pas taire les prodiges de ces nouveaux apôtres, .malheureux imitateurs des apôtres de Notre-Seigneur. Ceux-ci «< rendaient la vie aux morts, et les autres donnent la mort aux vivants: Illi de mortuis vivos faciebant, isti de vivis mortuos fa« ciunt (2). »

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Concluons. Le protestantisme n'a ni l'apostolicité, ni la catholicité, ni la sainteté, ni l'unité, qui sont des marques positives de la véritable Église; i! n'a pas même la visibilité, ni la perpétuité, ni l'autorité de l'enseignement, qui en sont les marques négatives: donc le protestantisme n'est point l'Église de Jésus-Christ.

(1) Des Prescriptions, n° xxxy. — (2) Des Prescriptions, n° xxx.

ARTICLE II.

L'Église grecque n'a pas toutes les propriétés qui sont essentielles à la véritable Église.

978. On appelle Église grecque l'Église composée de chrétiens soumis au patriarche de Constantinople, et séparés de la communion de l'Église romaine. Le schisme des Grecs remonte à Photius, qui, après avoir usurpé le siége de Constantinople en 857, prit le titre de patriarche œcuménique ou universel, méconnaissant l'autorité du pape, qui s'était déclaré en faveur d'Ignace, le patriarche légitime. Mais ce schisme ne fut consommé que vers le milieu du onzième siècle, par Michel Cérularius, patriarche de la même ville. Les Grecs refusent au pape la suprématie de droit divin sur l'Église universelle, et reprochent à l'Église catholique l'addition du mot Filioque, qu'elle a faite au symbole de Nicée et de Constantinople, pour exprimer que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils.

979. Or, évidemment, l'Église grecque ou photienne ne réunit pas tous les caractères qui distinguent l'Église de Jésus-Christ. D'abord, elle n'a pas l'unité de doctrine, puisqu'elle n'admet plus les dogmes qu'elle admettait avant la révolte de Photius et de Michel Cérularius touchant la suprématie du pape et la procession du Saint-Esprit; ni l'unité de gouvernement, puisqu'elle n'est plus unie au chef de l'Église, qu'elle ne tient plus à la chaire de Pierre, d'où est sortie l'unité du ministère pastoral. Chez les Grecs, les uns reconnaissent pour chef de la religion le patriarche de Constantinople; les autres, le patriarche d'Antioche; ceux-ci, le patriarche d'Alexandrie; ceux-là, le patriarche de Jérusalem; d'autres enfin, comme les Russes ou Moscovites, ne dépendent plus que d'euxmêmes ou des souverains. L'état des Grecs sous la domination des Turcs est un véritable esclavage: ils peuvent, il est vrai, élire des patriarches et des évêques, mais ni les patriarches ni les évêques ne peuvent entrer en fonctions sans une commission expresse du Grand Seigneur. L'Église grecque n'a donc pas l'unité qui caractérise l'Église de Jésus-Christ; elle n'a pas non plus la catholicité, car elle n'est point répandue dans toutes les parties du monde; et, fùtelle plus répandue qu'elle ne l'est, elle ne serait pas pour cela catholique; elle est beaucoup moins nombreuse que l'Église romaine, surtout si on considère qu'elle n'est pas en Orient ce qu'elle est en Russie. Quoique l'Église russe ait une grande affinité dans la doctrine et dans le culte avec les autres Eglises grecques, cependant

elle ne forme pas un seul et mème corps avec ces Églises : c'est une Église nationale, indépendante de tout patriarche étranger, et restreinte au seul empire dont elle porte le nom. Depuis Pierre le Grand, l'Église des Russes est à peu près séparée de l'Église de Constantinople, comme celle-ci est séparée de l'Église romaine depuis Michel Cérularius. Enfin, l'Église grecque n'est point apostolique; elle ne l'est ni pour la doctrine ni pour le ministère. Elle ne l'est point pour la doctrine, puisqu'elle n'enseigne pas tout ce qu'ont enseigné les apôtres; elle n'admet plus dans le pape le titre de chef de l'Eglise universelle, ni la tradition apostolique touchant la procession du Saint-Esprit, ex Patre Filioque. Elle ne l'est point quant au ministère, puisqu'elle ne reconnaît pas, dans l'évêque de Rome, la principauté du successeur de saint Pierre, prince des apôtres. Ainsi done l'Église grecque n'a ni l'apostolicité, ni la catholicité, ni l'unité, qui sont autant de caractères distinctifs, de marques positives de la vraie Église : donc elle n'est point l'Église de Jésus-Christ, ni même une portion de l'Eglise de Jésus-Christ. D'ailleurs, les Églises protestantes n'appartiennent pas non plus à la véritable Église : donc l'Église romaine seule est la vraie Église, l'Église de Jésus-Christ, hors de laquelle il n'y a pas de salut (1).

ARTICLE III.

Du retour de nos frères séparés à l'Église catholique.

980. Il n'y a qu'une Eglise, hors de laquelle on ne peut être sauvé c'est l'Église catholique, apostolique, romaine; elle seule réunit tous les caractères de l'Eglise de Jésus-Christ : c'est donc un devoir, un devoir indispensable pour tous ceux de nos frères qui en sont séparés, soit par l'hérésie, soit par le schisme, de chercher à rentrer dans sa communion. Cette Église est l'arche du salut : bien différente de celle de Noé, qui n'était que pour ce patriarche et sa famille, elle est ouverte à tous les hommes; elle ne s'élève au-dessus des montagnes, suivant l'expression des prophètes, que pour ètre à la vue de toutes les nations. Malheur à ceux qui se détournent pour ne pas la voir, ou qui restent dans l'indifférence! Nous l'avons vu (2), la maxime, Toutes les religions sont bonnes, est aussi absurde qu'impie, aussi déplorable que la négation de toute religion. Qu'est-ce qui pourrait donc, à défaut de l'indifférentisme, retenir encore ceux de nos frères qui sont nés dans le protestantisme? Serait-ce cette autre maxime : Un honnête homme ne

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change pas de religion? A coup sûr, vous ne la trouverez point dans la Bible, à moins que vous ne supposiez que c'est d'après cette maxime que les Juifs ont crucifié Jésus-Christ, pour avoir substitué l'Évangile à la loi de Moyse. Un honnéte homme ne change pas de religion: vous condamnerez donc, et les apôtres pour avoir travaillé à la conversion des païens, et les païens eux-mêmes pour avoir renoncé au culte des idoles, et embrassé le culte du vrai Dieu? Un honnéte homme ne change pas de religion que direz-vous donc de Luther et de Calvin? n'ont-ils pas changé de religion en introduisant la Réforme? Lorsque le comte de Stolberg, célèbre écrivain d'Allemagne, se fut converti à la religion catholique, un prince protestant lui dit : Je n'aime pas ceux qui changent de religion. — Ni moi non plus, répondit le comte; car si nos ancêtres n'en avaient pas changé il y a trois siècles, je n'aurais pas été obligé d'en chan"ger aujourd'hui. Ainsi, qu'on y prenne garde, la maxime, Un honnéte homme ne change point de religion, n'est que la condamnation du protestantisme lui-même, comme le dit M. Laval, qui avait été ministre protestant avant sa conversion : « La seule reli"gion, continue-t-il, qui ait droit de dire, Ne changez pas, est <«< celle qui n'a jamais changé. Mais que fut le protestantisme à son origine, sinon un grand changement dans la religion? Qu'est-il dans toute son histoire, qu'une suite de changements où l'on voit « les dogmes, les confessions de foi, les sectes, perpétuellement «< varier? Pourquoi le protestantisme, qui change sans cesse, vou. drait-il nous défendre de retourner à l'Église, qui n'a jamais changé? Pourquoi demeurerions-nous obstinément attachés à << toutes ses inconstances? Et rentrer dans l'Église, qu'est-ce autre chose que mettre fin pour soi à tous ces changements, pour se reposer enfin dans l'antique foi? C'est lui qui a voulu en changer; « nous ne faisons qu'y revenir. Sans doute si on quittait une secte « pour rentrer dans une autre, ce serait une chose bien vaine; car << toutes les sectes protestantes étant également dépourvues d'autorité, on retrouverait dans toutes les mêmes incertitudes : mais << sortir du protestantisme pour rentrer dans l'Église catholique, c'est passer des variations à la croyance invariable, des divisions

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« à l'unité, de l'erreur qui est d'hier à la vérité qui est de tous les

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temps; c'est passer du doute à la foi, c'est sortir de la mort « pour recouvrer la vie (1). »

(1) Lettre de M. Laval, ci-devant ministre à Condé-sur-Noireau.

DEUXIÈME PARTIE.

DES PRÉROGATIVES DE L'ÉGLISE.

981. Les principales prérogatives de l'Église sont le droit d'enseigner et le droit de se gouverner elle-même; le droit de prononcer en dernier ressort sur les questions qui intéressent la religion, et le droit de régler par des lois ce qui concerne l'institution de ses ministres, l'administration des sacrements, la célébration du culte divin, et généralement tout ce qu'elle juge utile au bien spirituel ou à l'édification des fidèles et du clergé. Avec la mission pour enseigner, l'Église a reçu de Jésus-Christ tous les pouvoirs nécessaires à son gouvernement: soit qu'elle enseigne, soit qu'elle ordonne, parce qu'elle enseigne et qu'elle ordonne au nom de Dieu, nous devons tous lui être soumis, tous, grands et petits, princes et sujets; son autorité dans l'enseignement est infaillible, sa puissance en ce qui tient à son gouvernement est souveraine; et parce que l'une et l'autre sont inhérentes à sa constitution native, elle est, dans l'exercice de ces deux prérogatives, absolument indépendante de la puissance temporelle. Quoique nous ayons déjà parlé de l'existence et de la nécessité d'un tribunal suprême et infaillible dans l'Église pour terminer les controverses en matière de religion, il est nécessaire de revenir sur cet article et de résoudre toutes les questions qui s'y rapportent; ce que nous ferons le plus brièvement possible; après quoi nous établirons le pouvoir législatif de l'Église, et son indépendance en tout ce qui est du ressort de la religion.

CHAPITRE PREMIER.

De l'infaillibilité de l'Église.

982. L'infaillibilité de l'Église consiste dans l'impossibilité que

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