Images de page
PDF
ePub

An de Rome 636

Sardons, les Consuarani, les Bébryces, les Toulousains & les Lutévains. Les Sardons (Sardones) s'étendoient sur toute la côte du Roussillon, depuis Cervera jusques à Salces dans l'espace de soixante-quatre milles. La ville principale de ces peuples étoit Ruscino, qu'on appelle à présent la Tour de Roussillon, située à demi-lieue de Perpignan. Elle étoit proche d'une rivière de même ' nom qu'on appeloit aussi Vernodubre, & qu'on nomme aujourd'hui Tet. Polybe fait mention de cette ville & de la rivière de même nom au sujet du passage d'Annibal. Ruscino devint colonie romaine, comme il paroît par les médailles qui nous restent. Du temps de Pline, cette ville n'avoit que l'usage du droit latin 3; c'est d'elle que le comté de Roussillon a emprunté son nom. Elle fut détruite par les Sarrasins & ruinée une seconde fois par les Normands, en sorte que de tous ses édifices il ne reste plus aujourd'hui qu'une tour.

La ville de Perpignan, qui s'est accrue des ruines de Ruscino, est une ancienne ville municipale située à deux milles de cette dernière ; le nom 5 de

sent avoir exploité les premiers les lavages d'or 14,
jusqu'à l'extrémité orientale de la chaîne où Ptolé-
mée leur attribue les villes phéniciennes ou ibérien-
nes de Roschino & d'Iliberris. Il y a toute raison de
croire pourtant que ces villes, alors opulentes, ne
leur appartenaient, comme celle de Narbonne, qu'à
titre de vassales ou de tributaires, car tous les an-
ciens nous représentent les Volkes Tectosages comme
une population essentiellement agricole, établie de
temps immémorial dans l'intérieur de l'isthme, loin
des côtes & de la mer, qu'ils n'atteignaient d'aucun
côté. Strabon, dont le témoignage toujours grave
se trouve confirmé ici par celui de Mela & de Pline,
déclare à deux reprises « que leurs possessions at-
teignaient du côté du sud, en le franchissant sur
quelques points, le versant septentrional du mont
Kemmène (les Cévennes), qui leur servait de limite
jusqu'aux promontoires des Pyrénées, où on les re-
trouvait mêlés à des populations de nationalité
différente. >>>

14 De là sans doute la réputation du pays des Tolosates, regardé par tous les anciens comme un pays riche en or: Hoλúχρυσόν τι νέμονται γήν... ἡ χώρα πολύχρυσος οὖσα. (STRAB. lib. 4. c. 1, § 13.)

15 Voici les deux passages de Strabon que nous nous sommes bornés à traduire en les réunissant. Ils sont probablement empruntés au Traité de l'Océan (şi 'xtavos) du philosophe Posidonius, que Strabon paraît avoir suivi pour tout ce qui touche aux Volkes Tectosages : Πρὸς δὲ τὸ Κέμμενον ὄρος συνάπτοντες, ἐπιλαμβάνοντες δὲ καὶ τὸ νότιον πλευρὸν αὐτοῦ μέχρι τῶν ἀκρο τηρίων οἰκοῦσι τῶν τι Ουαλκῶν οἱ Τεκτοσάγες καλούμενοι καὶ ἄλλοι τινές (STRAB. lib. 4, C. 1, § 12.) — Εφάπτονται δὲ μικρὰ καὶ τοῦ προσ αρκτίου πλευροῦ τῶν Κεμμένων. (STRAB. 1. 4, C. 1, § 13. - Les peuples de nationalité différente, que Strabon place sans les nommer à la suite des Arécomikes entre les Pyrénées, les Cévennes (Corbières) & la mer, ne peuvent être que les Kynètes, les Cérétains (Ceretani) & les Sordes 'Sordi, Sordones), signalés par tous les géographes anciens sur cette côte basse que dominent à l'ouest les promontoires des Pyrénées. (Voyez Festus Avienus, Ora maritim. v. 552-574, & Mela, I. 2, c. 5.) Quant à Pline, c'est après avoir décrit, sans nom

Ils y vivaient encore à l'époque de leur décadence, la seule que nous atteignions par des témoignages contemporains, dispersés dans de grands villages ouverts qui ont conservé longtemps leur physionomie celtique comme leurs noms, & dont les terres passaient avec juste raison pour les plus fertiles du pays entre les deux mers. [E. B.]

2

' Voir Marca Hispanica, p. 18, 303 & 328.

Vaillant, Numismata imperatorum in coloniis, &c. 3 Pline, 1. 3, n. 5.

4 Voir Marca Hispanica, p. 21 & 458.

5 Marca (p. 18, 303 & 328) & dom Vaissete sont tombés, à propos de Perpignan, dans une grave erreur. Cette ville, qui n'était qu'une simple villa, un domaine, au neuvième siècle, n'existait point du temps des Romains. La ville romaine était à côté, c'était Ruscino, la capitale des Sardons, que Pomponius Mela nous apprend avoir été érigée en colonie romaine (lib. 2, c. 5), titre qui lui est assuré d'ailleurs par des monnaies trouvées dans les environs de l'emplacement qu'elle occupait'. Pline dit seulement qu'elle jouissait du droit latin (lib. 3, c. 4). Cette ville, qui avait eu beaucoup à souffrir des courses des Sarrasins au huitième siècle, fut entièrement détruite en 859 par les Normands. A côté, s'éleva la ville de Perpignan. L'erreur de de Marca, de dom Vaissete & de plusieurs autres, qui font de Perpignan un municipe romain, sous le nom de Fla

rer les Volkes, tout le littoral depuis le pays des Sardons jusqu'à Narbonne & Agde qu'il aborde la contrée des Volkes Tectosages Agatha, quondam Massiliensium, & regio Volcarum Tectosagum, » située, comme il le dit plus join, dans l'intérieur des terres « in mediterraneo. » (PLINE, 1. 3, c. 15.)

Voici la médaille que Vaillant (Numismata imperatorum in coloniis, municipiis, &c.] a publice le premier : Face: imperator Caesar Augustus: tête d'Auguste sans couronne. Revers: Colonia Ruscino Legio VI. Deux aigles legio.

naires.

Perpignan, qu'elle porte depuis environ le commencement du dixième siècle, a succédé à celui de Flavius Ebusus qu'elle avoit anciennement.

Illiberis', autre ville des Sardons, dont Polybe fait mention, & à laquelle Pline, & après lui Ptolémée, donnent le rang au-dessus de Ruscino, étoit autrefois très-considérable; mais elle étoit si fort déchue de son ancienne splendeur, vers le milieu du premier siècle de l'ère chrétienne2, qu'à peine trouvoit-on quelque vestige de ce qu'elle avoit été auparavant. Elle étoit située, suivant Polybe, sur une rivière de même nom, qu'on appela dans la suite Tech, Tecum. On attribue à Constantin ou aux empereurs ses enfans3 le rétablissement de cette ville sous le nom d'Hélène ou Elne (Helena), en mémoire de l'impératrice de ce nom, mère du même Constantin. Saint Jérôme, Eutrope & Orose sont les plus anciens auteurs qui en fassent mention sous ce dernier nom. L'itinéraire de l'empereur Théodose & les tables de Peutinger lui donnent cependant encore celui d'Illiberis, ce qui peut donner lieu de croire qu'elle conserva son ancien nom après son rétablissement, du moins durant quelque temps. Quelques auteurs confondent mal à propos cette ville avec celle de Collioure (Caucoliberis), dans le même pays, qui est beaucoup plus moderne. On prétend qu'elle étoit colonie ou ville municipale sous l'empire d'Antonin Pie & sous ses

[blocks in formation]

Mais cette inscription se rapporte à Ivica, la principale ville des Baléares, appelée en latin Ebusus. Elle est restée longtemps encastrée dans le mur de la maison de Jean Devi, mort à Perpignan en 1569. Jean Devi avait été gouverneur des îles Baléares, comme le dit son épitaphe, qui se voit dans la chapelle du Christ du vieux Saint-Jean, à Perpignan: JOAN. DEVI GUBERNATOR ET CAPITANEUS GENERALIS EBUSI 1569. — Jean Devi avait donc rapporté d'Ivica comme un souvenir des fonctions qu'il y avait exercées, & encastré dans un des murs de sa maison cette inscription, qui attribue à une famille de Cornelii, cliens de la gens Cornelia, la construction d'un aqueduc: telle est la cause de

cette erreur. Fossa, dans un mémoire pour l'ordre
des avocats de Perpignan contre la bourgeoisie de cette
ville, a le premier démontré que le municipe de Fla-
vius Ebusus n'a jamais existé en Roussillon. [E. M.]

'Un numismatiste contemporain (M. Aloïs Heiss)
prétend non sans de bonnes raisons que les monnaies
ibériennes de la Gaule & de l'Espagne ne remon-
tent pas au delà du temps de Sertorius, qui les aurait
frappées suivant le système monétaire des Romains,
en les inscrivant de légendes ibériennes. Mais peut-
on en dire autant des noms tout ibériens d'Iliberris
& de plusieurs autres villes gauloises, que les géo-
graphes romains & grecs avaient trouvées déjà en
pleine décadence (V. la Note CXIV)? Dans l'Aqui-
taine elle-mème, que Strabon rattache ethnographi-
quement à l'Espagne, est-il admissible que les villes
de Vasate (Bazas), d'Elimberris (Auch) & de Cala-
gorris (Cazères) aient pris ou reçu, un demi-siècle
avant notre ère, des noms ibériens d'apparence, qui
auraient supplanté, on ne sait trop comment, des
noms antérieurs tombés en désuétude? L'espèce de
domination que Sertorius paraît avoir exercée sur
toute cette région de l'ancienne Gaule, devenue une
province de son empire ibéro-romain, ne tient-
elle pas au contraire aux antiques affinités de
mœurs, de langue & de race, qui unissaient les po-
pulations des deux versants des Pyrénées, & que
Strabon a si bien indiquées? (STRAB. 1. 4, c. 2, 21.)
[E. B.]

[blocks in formation]

An de Rome 636

636

Éd. origin. t. I, p. 54.

successeurs, ce qui n'est pas bien certain'. Elle n'est pas moins différente de la ville d'Elvire (Illiberis) dans la Bétique, fameuse par le concile qui y fut tenu au commencement du quatrième siècle. La ville d'Illiberis ou d'Elne en Roussillon est aujourd'hui très-peu considérable, surtout depuis la translation de son siége épiscopal à Perpignan.

La fontaine & l'étang de Salses (Fons Salsulae), qu'on voit sur la même côte & que ses salines ont rendu fameux, étoient connus des anciens. Cet étang communique avec celui de Leucate, & c'est de la petite rivière de Sordus, qui prenoit sa source dans le même étang, que les Sordons ou Sardons ont tiré leur nom2. On a bâti dans la suite, près de la fontaine de Salses, un château avec une ville qui porte le même nom. Les anciens itinéraires font mention de Combusta, Ad Centuriones & Ad Stabulum, qui peut-être faisoient partie du pays des Sardons. M. de Marca3 croit que le premier est Rivesaltes, le second Céret, & le troisième Boulou, dans le Roussillon. Pour ce qui regarde la ville de Collioure (Caucoliberis), elle n'est connue que depuis le septième siècle.

Le

[merged small][ocr errors]

pays des Sardons étoit séparé de l'Espagne, dont il étoit frontière, par le promontoire, le temple & le port de Vénus, & par les trophées de Pompée,

[ocr errors]

Voyez tome II, Note IX.

* Festus Avienus, Descriptio orae maritimae.
Marca Hispanica, p. 52 & seq.

* Nous avons déjà remarqué la physionomie tout
ibérienne des noms d'Iliberris & de Caucoliberis,
qu'il serait difficile, étymologiquement parlant,
d'attribuer aux peuples de race celtique & même à
ceux de race ligye, dont les traces s'affaiblissent
du reste à mesure que l'on s'éloigne des Alpes &
du Rhône. Les Sordes ou Sordons, auxquels ces
deux villes appartenaient, de l'aveu de tous les
géographes anciens', seraient eux-mêmes des peu-
ples de race ibérienne, s'il faut en juger par la
position de leur pays, contigu aux passages orien-
taux des Pyrénées, & par les inductions de l'his-
toire, qui nous montre toute la côte à l'ouest du
Rhône colonisée très-anciennement par des popu-
lations sorties de la péninsule ibérique. Il faut
ajouter à ces diverses raisons que la ville d'Iliber-
ris, un instant puissante & riche, comme nous l'as-
surent les géographes anciens, était déjà en plein
déclin aux époques historiques; circonstance qui

• Inde est ora Sordonum & parva flumina Telis & Techis... Colonia Ruscino, vicus Eliberri. (MɛLA. 1. 2, c. 5.) — In ora regio Sardonum... flumina Tecum, Vernodubrum (nom celtique d'apparence), oppida Eliberis (SILLIG: Eliseberae).. Ruscino Latinorum (PLIN. 3, c. 45]. Sordus inde... | Populus agebat inter avios locos. (AVIENUS: (ra marit. v. 552-553).

Vicus Eliberri, magnae quondam urbis & magnarum opum tenue vestigium. (MELA, 1. 2, c. 5: PLIN. 1. 3, c. 4 [5].)

s'expliquerait elle-même par l'établissement des peuples volkes & par les révolutions que cet établissement aurait produites au pied des Pyrénées.

Les noms du fleuve Sordus & de l'étang Sordice, situés l'un & l'autre sur le même rivage, ont d'incontestables affinités avec celui du peuple que l'on retrouve, encore longtemps après, appliqué comme dénomination générique aux populations de race mêlée qui habitaient la grande île de Sardaigne. La mer qui baigne les côtes de cette île à l'ouest & au sud était connue elle-même sous le nom de mer des Sardons. Mais il y a tout lieu de croire, quoi qu'en disent les Bénédictins, que les navigateurs grecs n'ont fait ici, suivant leur habitude, qu'appliquer au cours d'eau dont ils apercevaient les bouches le nom du pays que ce cours d'eau traversait. C'est ainsi que nous avons vu sur cette même côte le fleuve Atax, le Télis (Tetis, la Tet), & le Tichis (le Tec), désignés sous les noms de Narbón, de Roscinus & d'Iliberris, sans autre raison que l'existence de villes marchandes ou de ports situés au-dessus de leurs embouchures*.

[blocks in formation]

dressés sur le sommet des Pyrénées, dans l'endroit appelé le Col de Pertus, environ à cinq lieues de Cervera & autant de Céret, dans le Valespir. Le célèbre promontoire de Vénus, qui divisoit les Gaules d'avec l'Espagne depuis Cervera, avoit deux caps, entre lesquels étoit le port. Le temple de cette déesse étoit bâti dans l'endroit où on voit aujourd'hui le monastère de Saint-Pierre de Rodes.

XIII. Les Consuarani.

Les Consuarani, que quelques auteurs confondent mal à propos avec les Consoranni, dont ils étoient fort différens, habitoient dans la partie du Roussillon qu'on appelle aujourd'hui le Valespir & dans le comté de Conflant3. Ces peuples s'étendoient jusques à la source de la rivière d'Aude, dans le Capcir, & non au delà. Leurs anciennes villes nous sont inconnues*. Si le lieu anciennement appelé Ad Centuriones, & dont il est fait mention dans les itinéraires, est le même que Céret, dans le Valespir, comme on croit, il devoit appartenir à ces peuples.

[blocks in formation]

S'il faut s'en rapporter à quelques anciens, on appeloit Bébryces (Bebryces),

L'Èbre lui-même (Iberus), le plus grand fleuve du rivage au delà des Pyrénées, devait probablement son nom à un peuple ou à un groupe de peuples (16fpot) que Polybe place en effet au nord-est de la péninsule.

Quant à la ville de Roscino, dont Movers croyait le nom phénicien d'origine3, nous n'avons guère d'autre indication sur sa fondation que cette étymologie contestable qui ne nous apprend rien sur son histoire, antérieure elle-même à l'époque grecque ou romaine. [E. B.]

[ocr errors]
[ocr errors]

Marca Hispanica, p. 52 & seq.

Ibid. p. 17, 27 & 212.

Voyez tome II, Note VIII, n. 15.

• Marca Hispanica, p. 17, 27 & 212.

La ville de Narbonne, dont l'origine & les commencements échappent à l'histoire, comme ceux de beaucoup de villes célèbres, était déjà connue de l'historien Hécatée, un des devanciers d'Hérodote, qui la signale comme le marché le plus important de la côte entre les Pyrénées & les bouches du Rhône, où commençaient alors les établissements des Massaliotes'. Le titre de ville celtique, sous lequel le vieil historien la désigne', ne permet

[blocks in formation]

pas de douter que le peuple des Celtes ou Keltes ne
formât dès cette époque la population dominante3
du littoral, & que la ville marchande (uróptov) ne
fut comprise dans les limites du territoire occupé
ou envahi par eux. Il semble même impliquer que
sa population était déjà celtique de langue & de
culture, si elle ne l'était point d'origine, comme
il y a plus d'une raison de le supposer. Mais on
ignore absolument quel était à cette époque le ré-
gime intérieur de la cité & dans quels termes elle
vivait avec les tribus prépondérantes du littoral,
qui paraissent s'en être disputé le patronage ou la

de la côte qui s'étendait depuis Narbôn & le fleuve Nar-
bôn jusqu'aux Pyrénées : ̓Απὸ δὲ τοῦ Νάρβωνος καὶ τὰ περὶ
τοῦτον Κελτοί νέμονται μέχρι τῶν προσαγορευομένων Πυρηναίων ὁρῶν
(POLYB. lib. 3, c. 37), sans excepter les villes d'Iliberris &
de Roscino, habitées, dit-il, par les Keltes: katolxoupévaç úm
Kitov, (POLYB. lib. 34, ap. Athen. lib. 8, c. 2.)

3 Les monnaies celtiques à légende grecque (& sans nom
de vi le) des rois KAIANTOAOC, PITANTIC & BITOVIOC (M. B.),
que l'on trouve sur tout le littoral, depuis la Garonne jus-
qu'aux bouches du Rhône, appartiendraient, suivant toute
apparence, aux chefs (RIX, RIGIS, RIGES - – BALAEVE) de quel-
ques-unes de ces tribus prépondérantes. Mais comment éta-
bir qu'elles aient appartenu aux tribus celtiques de race &
de langue, arrivées les premières dans le Midi plutôt qu'à
celles des Volkes-Tectosages ou Arécomiques & même à la
nation puissante des Arvernes, dont le nom de BITOVIOC (BI-
TOVTOC BITVIT) rappelle involontairement la domination
momentanée. (Voyez page 76, note 4.) - Quant à l'histoire
légendaire des Bebrykes & des Eiésykes, dont nous avons
discuté ailleurs les textes contradictoires, c'est avec intention
que nous l'avons complétement écartée de ces recherches.

An de Rome 636

An de Rome 636

dans les temps les plus reculés, les peuples des environs de Narbonne; mais il paroît que ces auteurs se sont trompés & qu'il n'y a jamais eu véritablement

possession, comme le faisaient à des époques plus récentes les deux nations gauloises des Volkes Tectosages & Arécomiques.

Les historiens grecs qui la désignent déjà sous le nom de Náp6wv, écrit à très peu de chose près comme nous l'écrivons aujourd'hui, tenaient évidemment ce nom des indigènes ou des marins qui avaient trafiqué avec eux. Son emplacement, qui ne paraît point avoir changé depuis plus de deux mille ans, répondrait lui-même, assez exactement, à celui qu'occupait la cité ou la ville proprement dite, avant l'annexion du bourg qui ne remonte pas au delà du treizième siècle de notre ère. Il y a même plus d'une raison de croire qu'elle avait dès cette époque son enceinte de murailles construite, suivant l'usage du temps, de gros blocs rectangulaires appareillés sans ciment, & que cette enceinte aura traversé sans grands remaniements toute la période romaine, comme les murailles cyclopéennes des villes étrusques que les Romains ne paraissent pas avoir reconstruites non plus en devenant les maîtres du pays. Ce serait à cette enceinte, antérieure ici à la conquête romaine, que ferait allusion le poëte Sidoine Apollinaire, dans un passage trop peu remarqué de son épître à Consentius, où il nous montre la ville de Narbonne assiégée à deux reprises, & assiégée sans succès par les Wisigoths, dont les machines n'avaient réussi, dit-il, qu'à ébrécher ou à disjoindre les quartiers de rocher dont ses murailles étaient bâties:

Quassatos geris ictibus molares'.

(SIDON. APOLL. Epist. ad Cons. v. 61.) Mais elle était alors située au milieu de lagunes

4 Nápбwv, Náp Saves (4), comme l'écrivent Hécatée, Pythéas, Polybe, Posidonius, Strabon. - Ce n'est qu'à l'époque romaine que ce nom s'adoucit & s'abrege tout à la fois (Narbo, Narboni) en devenant masculin (Narbo Martius) pour reprendre, au temps d'Ammien Marcellin, sa forme féminine (Narbona). Hécatée, qui déduisait de ce nom de ville l'ethnique Nepais comme nous l'apprend Etienne de Byzance (Εκαταίος δὲ Ναρβαίους αυτούς φησι. HECAT. Fragm. n. 15), lui donnait évidemment pour radical ies quatre lettres Narb, en détachant de ce radical la finale on, one, ona, comme dans le nom géographique de Magalona (Mag-al-ona), une autre ville très-ancienne de la côte dont la physionomie est plus franche.nent celtique encor: que celle de Narb.na.

5 On s'expliquerait ainsi comment on n'a jamais trouvé à Narbonne de murs romains de moyen ou de petit appareil, analogues à ceux que possédaient & que possèdent encore la plupart des cités romaines de la Gaule méridionale, depuis Dax (Aquae Tarbellicae) & Saint-Lizier (Civita (onsoranorum) jusqu'à \ienna & Lugdunum, qui remontent l'une & l'autre à une époque antérieure à Auguste.. Les murailles modernes de la ville, qui ont été remanices bien des fois,

qui couvraient encore la plus grande partie des plaines basses dont elle occupe à peu près le centre & qui donnaient à ce riche bassin l'aspect d'un vaste lac parsemé d'îles, les unes déjà cultivées, les autres verdoyantes ou encore vaseuses. Un fleuve torrentueux, l'Atax, dont le nom paraît celtique luimême, se frayait, non sans peine, sa route & son lit au milieu de ces lagunes envahies déjà par ses atterrissements. C'est lui que les navigateurs grecs désignaient dans leurs livres de bord (nepinλoug) sous le nom caractéristique de Narbôn, confondant, comme ils le font souvent, le fleuve inconnu dont ils apercevaient les bouches avec la ville maritime qui lui servait de port'. Ses eaux, que l'exhaussement continu du sol a fini par détourner de leur

comme on le sait, du septième au dix-septième siècle, auraient été elles-mêmes reconstruites en partie, comme les deux quais de la Robine, à l'aide de ces puissants matériaux (molares) mêlés aux revêtements des grands monuments antiques (arènes, théâtre, &c.) & aux innombrables débris de tombeaux qui jonchaient le sol des grandes routes depuis la chute du paganisme.

6 Les textes de Strabon (lib. 4, c. 1, § 6), de Méla (lib. 2, c. 5) & de Pline (lib. 3, c. 4), les plus anciens que nous puissions invoquer ici, ne permettent point de douter que cette lagune ne fût déjà réduite de leur temps aux étangs de Bages, de Sige in & de Gruissan, qui couvrent encore toute la partie inférieure du bassin narbonnais. Quoiqu'ils la désignent sous les noms différents de kipun Napbavitis (STRAB.), de laus Rubresus (MELA) & de lacus Rubrensis (PLIN.), ils s'accordent à remarquer que le fleuve atteignait la ville avant de tomber dans l'étang qui lui sert encore d'estuaire: pày οὖν Νάρβων ὑπέρκειται τῶν τοῦ ̓Ατακος ἐκβολῶν καὶ τῆς λίμνης τῆς Ναρ Ewvitlog(Stran.lib. 4. c. 1, §6). ... Nisi ubi Narb mnem attingit, nusquam navigabilis... Lacus accipit eum kubresus novine, spatiosus admodum (MELA, 1.2, c. 5). Mais il ne faut pas oublier qu'il existait encore à l'époque romaine, au-dessus de la ville, de nombreuses flaques d'eau plus ou moins salées, dans lesquelles il est difficile de voir autre chose que des lais de la lag ine qui aurait couvert, à une époque beaucoup plus ancienne, tout le fond du bassin. A l'époque des grandes crues de l'Aude, qui paraissent avoir vivement frappé les anciens eux-mêmes (V. POMPON. MELA, I. 1.), le fleuve, en s'étendant par degrés, réunit les unes aux autres les nappes aujourd'hui distinctes de Sigean, de Gruissan, de l'Etang-Salé, de Marestaing, de Livière, &c., & la ville se retrouve pour un moment la metropole insulaire d'une petite mer intéricu e, dont les eaux rougeâtres (lacus kubresus, Rubren is) s'étendent d'un côté jusqu'aux montagnes arides de la Clappe, de l'autre jusqu'à la chaine de collines ctagées qui marquent la limite de la terre ferme.

7 ...μεταξὺ τοῦ τε Τανάϊδος ποταμοῦ καὶ τοῦ Νάρβωνος, ὃς οὐ που λὺν ἀπέχει τόπον ὡς πρὸς δύσεις ἀπὸ Μασσαλίας καὶ τῶν τοῦ Ἰοδα το στομάτων, δι' ὧν εἰς τὸ Σαρδόνιον πέλαγος ἐξισιν ὁ προειρημένος ποταμός. (POLYB. List. lib. 3, c. 37)... Meta shy Bupivey grain, lwg to Ναρβωνος ποταμού, πεδίον εἶναι... (Potre. lib. 34. εpυd Athen lib. 8, c. 2)... C'est ainsi que les villes ibériennes ou phéniciennes d'Iliberris & de Roscino, situées à peu de distance de Narbon (dont le nom n'aurait rien de phénicien, suivant Movers die Phoeni ier, II, 2, p. 614 & 654), avaient donné leurs noms aux cours d'eau pyrénéens qui baignoient ou battaient leurs murs: ... Thebepviv xai réexavov (mcsepele), féovnaç mapà mikug daw.bpeng (POLYB. lib. 34, c. 10, ap. Athen. lib. 8, c. 2.)

« PrécédentContinuer »