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accompagnent leurs prières de leurs bonnes œuvres. C'est ainsi que le centurion Corneille mérita d'être exaucé. « Il faisait beaucoup d'aumônes au peuple, dit l'Écriture, et priait toujours Dieu. Un jour donc qu'il était en oraison vers les trois heures après midi, un ange lui apparut, pour lui rendre témoignage du mérite de ses bonnes œuvres, et lui dit : «< Corneille, vos prières et vos aumônes sont montées en la présence de Dieu et il s'en est souvenu. » Car les prières accompagnées du mérite des bonnes œuvres montent bientôt à Dieu. C'est ainsi que l'ange Raphaël rendit un pareil témoignage à Tobie qui s'appliquait continuellement à la prière et à des œuvres de charité : « Il est glorieux, dit-il, de publier les œuvres de Dieu. Car lorsque vous priiez avec Sara j'ai présenté vos oraisons à Dieu. Et parce que vous ensevelissiez charitablement les morts et n'avez point fait difficulté de sortir de table et de quitter votre dîner pour en enterrer un, j'ai été envoyé pour vous tenter; et Dieu m'envoie maintenant pour vous guérir avec Sara votre belle-fille. Car je suis Raphaël, l'un des sept bons anges, qui sont continuellement présents devant Dieu. » Le Seigneur nous enseigne encore la même chose par la bouche d'Isaïe: « Rompez, dit-il, tous les nœuds de l'injustice; abandonnez vos commerces criminels; laissez en repos les misérables et ne les opprimez plus; faites part du pain que vous mangez à ceux qui ont faim, et retirez les pauvres dans votre maison; donnez des vêtements à ceux qui sont nus, et ne méprisez point ceux de votre nation; et alors votre lumière brillera comme l'aurore, vous serez bientôt superbement paré, votre justice marchera devant vous, et la splendeur de Dieu vous environnera. Alors le Seigneur vous exaucera quand vous l'invoquerez, et à peine aurez-vous ouvert la bouche qu'il dira: Me voici. » Voilà comment Dieu promet d'écouter et de secourir ceux qui dégagent leur cœur de toute injustice, et qui font l'aumône à ses serviteurs comme il l'a commandé. Et véritablement ceux qui exécutent ce que

Dieu leur ordonne méritent bien que Dieu fasse ce qu'ils lui demandent. Le bienheureux apôtre saint Paul, ayant été assisté par les fidèles dans une nécessité pressante, appelle ces actions de charité des sacrifices : « Je suis comblé, dit-il, de vos biens, et j'ai reçu ce que vous m'avez envoyé par Épaphrodite, comme un excellent parfum et comme un sacrifice très-agréable à Dieu. » Car avoir pitié des pauvres c'est prêter à Dieu à intérêt, et donner aux plus petits c'est donner à Dieu même et lui offrir un sacrifice spirituel d'encens et de parfums. Quant au temps de la prière, nous voyons que ces trois enfants de Babylone que la fermeté de leur foi rendit victorieux dans leur captivité même, observaient avec Daniel l'heure de Tierce, de Sexte et de None, comme pour figurer le mystère de la Trinité, qui devait être révélé dans les derniers temps. Car il y a trois heures depuis la première jusqu'à Tierce, trois depuis Tierce jusqu'à Sexte, et trois depuis Sexte jusqu'à None, de telle sorte que chaque intervalle d'une de ces heures à l'autre marque la Trinité, et toutes les trois prises ensemble l'accomplissent. C'est ainsi que les adorateurs du vrai Dieu distinguaient autrefois le temps de leurs prières, et l'on a vu clairement depuis, que cela était une figure de ce qui devait arriver. Car ce fut à l'heure de Tierce que le Saint-Esprit descendit sur les disciples et les remplit de grâce comme Notre-Seigneur le leur avait promis. Ce fut à l'heure de Sexte que saint Pierre étant monté au haut de la maison où il était, Dieu lui apprit de vive voix et par une vision à admettre indifféremment tout le monde au baptême, parce qu'auparavant il faisait difficulté de le donner aux Gentils. Et enfin Notre-Seigneur ayant été crucifié à l'heure de Sexte, ce fut à l'heure de None qu'il lava nos péchés dans son sang, et qu'il consomma sa victoire par sa mort pour nous racheter et nous vivifier. Mais maintenant, les temps de la prière se sont multipliés avec les mystères. Car il faut prier aussi le matin afin de célébrer la mé

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moire de la résurrection de Notre-Seigneur. Aussi voyonsnous que ce temps a été marqué par le Saint-Esprit dans les Psaumes : Vous êtes mon roi et mon Dieu, dit David; car c'est à vous, Seigneur, que j'adresserai ma prière, et je vous ferai entendre ma voix dès le matin. Dès le matin jeme présenterai devant vous et vous contemplerai. » Le Seigneur dit encore par un autre prophète : « Ils viendront vers moi de grand matin, disant : Allons, retournons au Seigneur notre Dieu. » Nous sommes encore obligés de prier sur la fin du jour quand le soleil se couche. Car comme Jésus-Christ est le vrai jour et le vrai soleil, c'est alors que nous devons demander qu'il nous éclaire, c'est-à-dire qu'il hâte son avénement pour nous donner la grâce de la lumière éternelle. Or que Jésus-Christ soit le jour, le Saint-Esprit le déclare dans les Psaumes quand il dit « La pierre que les architectes ont rejetée a été faite la principale pierre de l'angle. Elle a été ainsi placée par le Seigneur, et nous le voyons avec étonnement. C'est lui qui est le jour qu'a fait le Seigneur; marchons et nous réjouissons en lui. » Et qu'il soit un soleil, le prophète Malachie le témoigne par ces paroles : « Le soleil de justice se lèvera pour vous qui craignez la majesté du Seigneur, et vous trouverez votre guérison sous ses ailes. » Puis donc que, selon l'Écriture, Jésus-Christ est le vrai jour et le vrai soleil, et que les chrétiens sont dans JésusChrist, il n'y a point d'heure du jour où nous ne devions prier Dieu. Et quand la nuit vient, elle ne nous en doit point empêcher, parce que la nuit même est lumineuse pour les enfants de lumière. En effet, quand peut être sans lumière celui qui porte la lumière dans son cœur? ou quand ne fait-il pas jour et soleil pour celui de qui Jésus-Christ est le soleil et le jour? Ainsi, puisque nous sommes toujours en Jésus-Christ, c'est-à-dire dans la lumière, nous ne devons pas même durant la nuit cesser de prier. C'est ainsi qu'Anne, cette sainte veuve, veillait et priait sans relâche pour attirer sur elle les grâces de

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Dieu, comme l'Evangile le témoigne « Elle ne sortait point du temple, dit l'Évangéliste, servant Dieu nuit et jour par ses jeûnes et par ses prières. » C'est aux Gentils qui n'ont pas encore été éclairés de cette lumière, et aux Juifs qui l'ont perdue et qui marchent dans les ténèbres, à voir ce qu'ils ont à faire : mais pour nous, qui sommes toujours dans la lumière du Seigneur, et qui savons ce que nous avons commencé à être par la grâce que nous avons reçue, ne mettons point de différence entre la nuit et le jour. Croyons toujours marcher dans la lumière; que les ténèbres d'où nous sommes sortis ne nous fassent plus d'obstacle; que la nuit ne fasse point tort à nos prières et ne serve point de prétexte à potre paresse. Ayant été spirituellement renouvelés et régénérés par la miséricorde de Dieu, anticipons dès ici-bas l'état où nous serons un jour. Et comme dans le paradis il n'y aura plus qu'un jour qui ne sera suivi d'aucune nuit, veillons dès à présent durant la nuit comme durant le jour. Là nous prierons Dieu et le remercierons sans cesse; ne cessons done point ici de le prier et de le remercier. (Saint Cyprien. De l'Oraison dominicale, Traité IV•.)

XXII. DE LA CHARITÉ.

SAINT JÉRÔME A ASELLA.

Je ne serais pas sage si je me flattais de pouvoir vous marquer toute la reconnaissance que je vous dois. Car il n'y a que Dieu qui soit à même de vous en donner une récompense proportionnée à vos mérites. Pour moi, je me sens si peu digne de l'amitié que vous me témoignez en Jésus-Christ, que je n'aurais jamais pu croire, ni même souhaiter que vous m'en donnassiez des preuves si manifestes. Quoique je passe dans l'esprit de quelques-uns pour un scélérat et pour un homme plongé dans toutes sortes de crimes (ce qui est encore peu dire d'un pécheur tel que moi), c'est néanmoins en user d'une manière bien chrétienne que de juger favorablement, comme vous faites, de ceux qui sont véritablement méchants. Car il est toujours très-dangereux de « condamner le serviteur d'autrui; » et celui qui par malice empoisonne les bonnes actions des autres, a bien de la peine à obtenir le pardon de sa médisance. Un jour, un jour viendra où nous gémirons, vous et moi, des tourments auxquels plusieurs seront condamnés.

On m'accuse d'être un infàme, un fourbe, un homme artificieux, un menteur, un magicien. Lequel vaut mieux d'imputer faussement tous ces crimes à un innocent et d'ajouter foi à une si noire calomnie, ou de ne le vouloir pas croire lors même qu'il en est vraisemblablement coupable? Quelques-uns me baisaient les mains, tandis qu'ils déchiraient ma réputation de la manière la plus cruelle et la plus impitoyable. Ils me témoignaient de bouche qu'ils prenaient part à mes peines, et dans le fond du cœur ils se réjouissaient de mes disgrâces. Mais le Sei

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