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plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire, ou à ne pas faire quelque chose. >>

On distingue deux espèces de conventions, celles qui sont pures et simples, et celles qui sont conditionnelles.

Les conventions pures et simples sont celles dont l'exécution n'est sou→ mise à aucune condition.

Les conventions conditionnelles sont celles qu'on fait dépendre d'un événement futur et incertain.

Il y a plusieurs espèces de conditions.

La condition suspensive est celle qui ne fait que suspendre l'exécution de l'obligation, jusqu'à ce que l'événement dont on l'a fait dépendre, arrive ou n'arrive pas.

La condition résolutoire est celle qui fait cesser l'obligation, selon què l'événement arrivera ou n'arrivera pas.

La condition casuelle est celle qui dépend du hasard, et n'est au pouvoir d'aucune des parties qui ont contracté.

La condition potestative est celle qui est au pouvoir de la partie envers laquelle a été contractée l'obligation.

La condition mixte est celle qui dépend tout à la fois de la volonté de celui envers qui l'obligation a été contractée, et de la volonté d'un tiers.

Si la condition était entièrement au pouvoir de la personne qui s'est obligée, elle serait nulle, ainsi que l'obligation elle-même. Il n'y a d'exception à cet égard, que pour les donations faites en faveur des époux, pår leur contrat de mariage.

La nature et les effets de ces diverses espèces de conditions, se trouvent parfaitement développés dans le Traité des Lois civiles; par Domat, et dans le Traité des Obligations, pär Pothier.

Il s'agit maintenant d'examiner si les conventions, soit pures et simples; soit conditionnelles, antérieures à la publication du Code Napoléon, doivent être régies par les dispositions du Code, lorsqu'elles s'exécutent sous son empire, ou si elles ne doivent pas être toujours régies par les lois qui étaient en vigueur, au moment de leur confection.

Il ne peut y avoir de doute, quant aux conventions pures et simples.. Ces conventions étant définitives et consommées, dès le moment où elleš

ont été faites, ne peuvent être régies par aucune autre loi que celle qui existait au moment de leur confection.

Peu importe même que Fobligation, n'ayant été contractée qu'avec un terme ou délai convenu pour son exécution, l'échéance du terme n'ait eu lieu que sous l'empire du Code, puisqu'il est évident que l'exécution, se rapportant toujours à la convention elle-même, ne peut être régie par des règles différentes, et qu'il est bien certain que les parties qui, en contractant d'une manière définitive, ont néanmoins renvoyé l'exécution du contrat à un terme convenu, ont eu l'intention et la volonté, que le contrat fût tonjours exécuté conformément à la loi sous l'empire de laquelle se faisaient leurs conventions; on ne peut supposer qu'elles aient voulu former un engagement dont elles n'auraient pas connu les effets, et qu'elles s'en soient rapportées à une loi future dont elles ne pouvaient prévoir les dispositions. Cette supposition serait en contradiction manifeste avec le caractère et l'essence d'une convention qui est toujours nécessairement fixe et précise au moment où elle se forme, puisqu'elle est le résultat de ce que les parties ont voulu et arrêté entr'elles.

Quoique ces raisons s'appliquent également aux conventions conditionnelles, puisqu'il faut toujours, si l'on ne veut pas violer le contrat, en revenir à ce que les parties ont voulu au moment où elles ont stipulé, on peut dire cependant que les conventions conditionnelles n'ayant été consommées qu'à l'époque où la condition a été accomplie, puisqu'elles étaient jusqu'alors incertaines, elles ne peuvent être régies que par la loi existante au moment de l'accomplissement de la condition.

On peut ajouter 1o. à l'égard de la convention soumise à une condition suspensive, que, jusqu'à l'accomplissement de cette condition, il n'était encore rien du par la partie obligée, qu'il y avait seulement espérance qu'il serait dû pendente conditione, nundùm debetur, sed spes est debitum iri; qu'en conséquence le paiement, fait par erreur avant l'accomplissement de la condition, était sujet à répétition, condictione indebiti, 1. 16, ff. de cond. ind.; que, d'ailleurs, si la chose qui faisait l'objet de l'obligation conditionnelle, périssait entièrement avant l'accomplissement de la condition, il n'y avait plus d'obligation, et qu'ainsi elle ne se réalisait, elle ne se consommait, qu'au moment où la condition était accomplie.

2o. A l'égard de la convention soumise à une condition résolutoire

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qu'elle n'existait réellement qu'au moment où la condition s'accomplissait, puisqu'elle pouvait être annulée, comme elle pouvait être confirmée, par l'événement auquel on l'avait soumise, et qu'ainsi se trouvant jusqu'alors dans un état de non existence, elle ne commençait réellement qu'au moment où arrivait l'événement qui la réalisait.

Pour répondre à cette objection, il suffit de rappeler les anciens principes sur les effets des conditions.

Suivant ces principes que tous les auteurs ont professés, qui ont été constamment suivis, et que le Code Napoléon a consacrés de nouveau, lorsque la condition s'accomplissait, elle remontait, par un effet rétroactif, au moment du contrat, comme si elle s'était réalisée au moment même, et l'obligation s'exécutait, comme si elle avait été pure et simple, et qu'il n'eut pas été apposé de condition.

Cùm enim semel conditio extitit, perindè habetur, ac si illo tempore quo stipulatio interposita est, sine conditione facta esset. Leg. 11, §. 1, ff. qui pot.

L'art. 1179 du Code Napoléon, dit également que la condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté.

« L'accomplissement de la condition suspensive, dit Pothier, Traité des Obligations, part. 2, chap. 3, n°. 220, a un effet rétroactif au tems que l'engagement a été contracté, et le droit qui résulte de l'engagement, est censé avoir été acquis à celui envers qui il a été contracté, dès le tems du contrat. L, 18, L. 144, §. 1, ff. de reg. jur.

<< De là vient, ajoute-t-il, que, si le créancier meurt avant l'existence de la condition, quoiqu'il n'eût pas encore un droit de créance formé, mais une simple espérance, néanmoins si la condition existe depuis sa mort, il sera censé avoir transmis à son héritier le droit de créance résultant de l'engagement contracté envers lui, parce qu'au moyen de l'effet rétroactif de la condition, le droit sera censé lui avoir été acquis dès le tems du contrat, et par conséquent avoir été transmis à son héritier. »

Quant à la condition résolutoire, elle ne suspendait pas même l'exécution de l'obligation: le contrat n'en était pas moins pur et simple dans son principe; dès ce moment il s'exécutait pleinement, et ce n'était pas son effet qui était suspendu par la condition, puisqu'il n'était arrêté que par l'événement; c'était la condition seule qui restait en suspens. «Les conditions résolutoires, dit encore Pothier, loco citato, n°. 224,

sont celles qui sont apposées, non pour suspendre l'obligation jusqu'à l'accomplissement, mais pour la faire cesser, lorsqu'elles s'accomplissent; une obligation coi tractée sous une condition résolutoire, est donc parfaite dès l'instant du contrat: le créancier peut en poursuivre le paie

ment. >>

« Dans les conventions déjà accomplies, dit Domat, mais qui peuvent être résolues par l'événement d'une condition, toutes choses demeurent cependant dans l'état de la convention, et l'effet de la condition est en suspens, jusqu'à ce qu'elle arrive. Ainsi, s'il est dit qu'une vente accomplie sera résolue, en cas que, dans un certain tems, un tiers donne un plus haut prix de la chose vendue, l'acheteur jusque-là demeure le maître : il prescrit, il jouit, et, si la chose périt, il en souffre la perte. »

«La condition résolutoire, dit également l'art. 1183 du Code Napoléon, est celle qui, lorsqu'elle s'accomplit, opère la révocation de l'obligation, et qui remet les choses au même état que si elle n'avait pas existé elle ne suspend pas l'exécution de l'obligation, elle oblige seulement le créancier à restituer ce qu'il a reçu, dans le cas où l'événement, prévu par la condition, arrive. »

En appliquant ces principes à la question que nous examinons, la solution ne présente plus de difficultés..

Puisqu'en matière de condition suspensive, l'accomplissement de la condition a un effet rétroactif au tems où la convention a été faite, et que le droit qui résulte de la convention, est censé avoir été acquis à celui envers qui il a été contracté, dès le tems même du contrat ; puisqu'en matière de condition résolutoire, le contrat n'est pas moins pur et simple dans son principe, qu'il s'exécute et produit tous ses effets jusqu'à l'accomplissement de la condition et que l'événement qui arrive, ayant également un effet rétroactif, annulle ou confirme le contrat dès. son origine, comme s'il fût arrivé au moment même de la convention on ne peut donc pas dire, soit dans l'un soit dans l'autre cas, que la convention n'ait été consommée et réalisée qu'au moment de l'accomplissement de la condition, et conséquemment on ne peut pas en conclure que les effets de la convention ne doivent être régis que par la loi en vigueur au moment où la condition s'est accomplie.

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Par la raison contraire, il faut décider qu'ils doivent être régis par la loi existante au moment où la convention a été conclue, puisque tout est

reporté à ce moment, par l'effet rétroactif que produit l'accomplissement de la condition, puisqu'en ce cas la convention doit être considérée, comme si elle avait été pure et simple dès son origine, comme s'il n'y avait pas eu de condition, et qu'en un mot le droit est censé avoir été acquis à l'instant même du contrat, et non pas seulement au moment où la condition s'est accomplie.

C'est ainsi qu'en matière d'institution contractuelle, quoique le droit de l'institué ne se réalise, et ne produise d'effets, qu'à la mort de l'instituant, qu'ainsi son exercice se trouve suspendu jusqu'à cette époque, et que même il puisse être entièrement anéanti par la faculté que conserve l'instituant d'aliéner, à titre onéreux, la totalité des biens compris dans l'institution, néanmoins comme le droit est acquis au moment du contrat, il est régi, dans tous ses effets, par la loi existante au moment de l'institution, et non par la loi en vigueur à l'époque du décès de l'instituant. (Voyez les articles Donation, Institution contractuelle, Rapport et Réduction.)

D'ailleurs, tout contrat est essentiellement une convention irrévocable; c'est-à-dire, que les parties qui se sont obligées dans un contrat, ne peuvent être maîtresses de rompre leurs engagemens, engagemens, sans le consentcment des personnes envers lesquelles elles se sont obligées ; et c'est pourquoi la convention serait absolument nulle, si elle était soumise à une condition qui dépendît uniquement de la volonté de celui qui a contracté l'obligation.

<< L'obligation, dit Pothier, loco citato, no. 205, est juris vinculum quo necessitate astringimur, et renferme essentiellement une nécessité de donner ou de faire quelque chose. »

<< II est, dit encore Pothier, n°. 47, de l'essence des conventions qui consistent à promettre quelque chose, qu'elles produisent, dans la personne qui a fait la promesse, une obligation qui l'oblige à s'en acquitter; d'où il suit que n'y ayant rien de plus contradictoire avec cette obligation, que l'entière liberté qui lui serait laissée de faire ou de ne pas faire ce qu'elle a promis, la convention qui lui laisserait cette entière liberté, serait absolument nulle par défaut de lien. »

Or, le contrat étant une convention irrévocable, il est certain que tous ses effets doivent être constamment régis par la loi existante au moment où il a été fait, puisqu'il est hors de doute que les parties ont eu la volonté

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