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que

à l'abri de toute espèce d'atteinte de la part de la demanderesse, qui avait été mariée et dotée en 1767; que, quoique d'après les dispositions de cette coutume, les donations faites à quelques-uns des enfans, soient sujettes au rapport, lors de l'ouverture de la succession, il n'y avait néanmoins que les enfans mâles qui eussent le droit, en qualité d'héritiers, de demander le rapport, pour faire cesser à leur égard l'inégalité ; qu'il n'en était pas de même à l'égard des filles qui avaient été mariées, puisque la coutume les excluait formellement de ce droit ; la révocabilité des donations, par le moyen du rapport, n'était par conséquent pas absolue; qu'elle était uniquement relative aux intérêts des males; que, par conséquent, le tribunal dont le jugement est attaqué, s'est conformé aux vrais principes, en déterminant le sort de la donation dont il s'agit, d'après les droits que les lois, en vigueur à l'époque de cette donation, attribuaient irrévocablement aux parties; -que les lois relatives au nouvel ordre de succéder, étaient sans application à la cause, dès que les défendeurs avaient déclaré qu'ils s'en tenaient à la donation dont il s'agit, et qu'ils n'entendaient pas s'immiscer dans la succession

du

Autre arrêt de la section des requêtes de la cour de cassation 4 mai 1807, également rendu contre une fille normande, qui avait reçu, en se mariant, sa dot ou mariage avenant, dont le père avait fait ensuite démission de tous ses biens au profit de ses trois fils, et qui réclamait dans la succession une part de ces biens. « Attendu, porte l'arrêt, que la dame Mignot, la coutume tenant, n'aurait pu faire prononcer la révocabilité de la donation en question, parce qu'elle était irrévocable à son égard, n'étant pas héritière et ayant reçu sa dot, mariage avenant, parce que les articles de la coutume par elle invoqués aujourd'hui, sous la législation nouvelle, lui étaient alors étrangers, et que les frères, admis comme héritiers, pouvaient seuls les invoquer en cette qualité ; - Attendu que la dame Mignot, venant en vertu des lois nouvelles, comme héritière à la succession de son père, en l'an 8, doit nécessairement se soumettre à l'autorité de ces mêmes lois qui, comme celle du 18 pluviose an 5, art. 1o., ont maintenu l'irrévocabilité acquise des donations de la nature de celle dont il s'agit; qu'ainsi ses frères ont pu renoncer à la qualité d'héritiers, pour s'en tenir, dans l'espèce, à ladite donation. »

Il est évident, que les motifs de ces arrêts doivent s'appliquer sous l'empire du Code Napoléon, comme sous l'empire de la loi du 17 nivose

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an 2, puisque le Code, par son art. 2, comme la loi du 18 pluviose an 5, par son art. 1o., a maintenu toutes les dispositions irrévocables faites avant sa promulgation; qu'en conséquence les démissions de biens irrévocables doivent être exécutées dans les successions ouvertes sous l'empire du Code, comme elles durent l'être dans les successions ouvertes sous l'empire de la loi du 17 nivose; et qu'ainsi les individus qui n'ont acquis la qualité d'héritiers qu'en vertu des lois postérieures à ces démissions, ne peuvent pas plus, sous l'empire du Code, qu'ils ne l'auraient pu sous la loi du 17 nivose, réclamer une portion héréditaire dans les biens donnés irrévocablement par les démettans, parce qu'ils feraient également rétroagir leurs droits sur des choses qui étaient définitivement acquises aux démissionnaires.

Il ne peut donc y avoir d'exception à cette règle générale, sous l'empire du Code, comme sous la loi du 17 mivose, que dans deux

cas,

1o. Lorsqu'il y a lieu à révocation de la donation, pour cause de survenance d'enfans, ainsi que nous l'avons expliqué dans le §. 1o. du présent article ;

2o. Lorsque la loi qui était en vigueur au moment de la démission irrévocable, obligeait les démissionnaires qui se trouvaient héritiers du démettant, au moment de sa mort, à rapporter à la succession les biens donnés, soit en cas d'acceptation de l'hérédité, soit en cas de renonciation.

Ainsi, une démission, même irrévocable, ayant été faite sous l'empire de l'une des coutumes d'égalité parfaite, où l'héritier, soit en ligne directe, soit en ligne collatérale, était tenu de rapporter, lors même qu'il renonçait à la succession, les démissionnaires qui se trouveraient héritiers du démettant au moment de son décès, arrivé sous l'empire du Code, ne pourraient conserver le bénéfice de la démission, même en renonçant à la succession, et seraient tenus de rapporter, même en faveur des héritiers qui n'auraient acquis cette qualité, qu'en vertu de lois postérieures à la démission. Mais, dans les coutumes où le rapport n'était dû qu'en faveur des mâles, les démissionnaires conserveraient les biens au préjudice des filles, ainsi que l'ont décidé les arrêts de la cour de cassation.

Ils les conserveraient en ligne collatérale, dans les coutumes où il n'était dû qu'en ligne directe.

Ils les conserveraient en renonçant à la succession, dans les coutumes où il n'était dû que par les héritiers qui acceptaient.

mais

En matière de démission irrévocable, ce n'est pas la loi existante au moment du décès du démettant, qui régit la matière des rapports, toujours la loi en vigueur au moment où la disposition a été faite. C'est encore ce qu'ont décidé les arrêts de la cour de cassation, précédemment cités.

Et c'est, au surplus, une règle commune à toutes les dispositions irrévocables. (Voyez ci-après l'article Rapport à succession).

DÉVOLUTION COUTUMIÈRE.

Lorsque, dans les coutumes de dévolution, la totalité des biens acquis pendant un premier mariage, avait été dévolue, par le décès du père, à l'enfant issu de ce mariage, et que la mère avait convolé, si l'enfant du premier lit n'est mort qu'après la loi du 19 avril 18c5, ( 29 germinal an 11), ses descendans ont-ils dú prendre, dans sa succession, tous les biens qui lui avaient été dévolus, et même la portion qui devait en appartenir à la mère, comme commune avec son premier mari; ou bien cette portion n'a-t-elle pas dû rester à la mère, dès l'instant de la mort de son enfant du premier lit, pour étre partagée également, après son décès, entre tous ses enfans des deux lits, ou leurs représentans?

Cette question est évidemment subordonnée à celle de savoir si la dévolution rendait l'enfant propriétaire, à l'instant même où elle s'opérait, de tous les biens dévolus, ou si, au contraire, le survivant des conjoints conservait la propriété de la portion de ces biens, à laquelle il avait droit, mais avec la condition seulement de ne pouvoir aliéner ni hypothéquer.,

Au premier cas, il est évident que tous les biens dévolus faisaient partie de la succession de l'enfant; au second cas, ils appartenaient à la succession du survivant des père et mère.

.

La dévolution était un lien qui, après la mort d'un des conjoints, et dans le cas où il y avait des enfans, affectait les biens du survivant, acquis pendant le mariage, de manière qu'il ne pouvait en disposer, et qu'il était obligé de les conserver aux enfans issus de ce mariage, à l'exclusion de ceux qu'il pourrait avoir de mariages subséquens..

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Ce droit avait lieu dans le Limbourg, dans le Hainaut, dans le pays de Liége et dans une partie du Brabant.

Il avait été admis par les coutumes d'Arras, de Bapaume, du pays de Laloeu et de Namur.

· Il était aussi connu dans quelques villes d'Alsace, telles que Colmar et Landau.

Il y avait encore quelques dispositions analogues à la dévolution, dans les coutumes du Cambrésis et du chef-lieu de Valenciennes, et dans celle de Metz.

Mais il était reconnu par les meilleurs auteurs, que, dans tous ces pays, excepté seulement la coutume du pays de Lalou, la dévolution n'était pas une succession actuelle, puisqu'on ne peut être héritier d'un homme vivant; qu'elle n'était qu'une destination légale de la succession future du père, ou de la mère, en faveur de leurs enfans communs ; qu'ainsi ce n'était pas les enfans qui étaient propriétaires des biens dévolus, qu'ils n'y avaient qu'un droit expectatif, et que c'était toujours le père, ou la mère, qui demeurait propriétaire des biens dévolus ; que seulement la propriété n'était qu'imparfaite dans ses mains, puisqu'elle n'était pas accompagnée de la faculté d'aliéner, et que c'était pourquoi on l'appelait propriété bridée.

De là il résultait que, si un ou plusieurs enfans venaient à mourir avant leur père, la succession de celui-ci devait être entièrement partagée entre ceux qui restaient, suivant les lois des successions directes, et non suivant les lois des successions collatérales, parce que les enfans survivant ne trouvaient pas les biens dévolus, dans les successions de leurs frères, mais dans celle de leur père.

Tels sont les principes qu'on trouve établis dans le Traité de Stockmans de jure devolutionis, chap. 1, n°. 2, 3, 4 et 5; chap. 5, no. 1 ; chap. 6, n°.4; dans les Consultations civiles de Wamès, centurie 6, §. 58; dans les divers ouvrages de Peckius, dans ceux du président Evrard; en un mot, dans tous les auteurs belges.

Stockmans cite un arrêt conforme, rendu par la cour féodale de Brabant, le 17 juin 1659.

Le droit de dévolution fut aboli en France par la loi du 8 avril 1791, et par celles des 5 brumaire et 17 nivose an 2: il a été également aboli par l'art. 745 du Code Napoléon.a miar a me

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Mais il subsista, après la loi du 8 avril 1791, dans plusieurs pays qui font aujourd'hui partie de la France, et qui n'y furent réunis qu'après cette loi. La suppression du droit de dévolution n'a eu lieu dans ces pays, que par la publication qui y a été faite successivement des lois qui en prononçaient l'abrogation.

Cependant il s'éleva des doutes sur l'interprétation de la loi du 8 avril

1791.

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Le commissaire du pouvoir exécutif près le tribunal du district de Weissembourg, consulta la Convention nationale sur le point de savoir si, d'après la 3o. partie de l'art. 1o. de cette loi, les enfans d'un second mariage devaient, dans les coutumes de dévolution, partager également avec ceux du premier, les biens dont leur père commun s'était trouvé en possession au moment où cette loi avait été promulguée, mais qui dès lors étaient dévolus aux enfans du premier lit.

an 2,

La Convention nationale répondit, par un décret du 18 vendémiaire 1o. que la 3o. partie de l'art. 1°, de la loi du 8 avril 1791, avait été spécialement faite pour abolir les coutumes de dévolution ; 2o. que les effets de cette loi devaient avoir lieu sur les biens meubles et immeubles, qui, à l'époque de sa publication, étaient frappés de dévolution dans la main de l'époux survivant avec enfans.

La même question a encore été présentée, après la loi du 17 nivose an 2, à la cour de cassation, et y a été décidée de la même manière, par deux arrêts des 8 messidor an 11, et 10 nivose an 13.

« Attendu, est-il dit dans le premier arrêt, que la dévolution, telle qu'elle est établie dans la coutume du Limbourg, par les art. 1, 3, 4 et 6, chap. 3, tit. 11, ne donnait aux enfans qu'un droit d'expectative sur les biens dévolus, que ce droit n'expropriait pas l'époux survivant, et que les enfans n'étaient investis de la propriété de ces biens, que par le décès du survivant de leurs père et mère. »

« Considérant, porte le second arrêt du 10 nivose an 13, que la dévolution, telle qu'elle est établie par le statut du mundat de Weissembourg, n'expropriait pas l'époux survivant, des biens dont il était propriétaire lors de la dissolution de son mariage; que, si les enfans acquéraient, par les effets de la dévolution, une expectative de ces biens tellement fondée qu'elle eût pu leur donner le droit de s'opposer aux ventes que l'époux survivant eût voulu en faire, dans d'autres cas que ceux dans lesquels le

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