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natures des biens, meubles ou immeubles, acquêts, conquêts, ou propres, pour établir le droit matrimonial sur les uns, et ne pas l'établir sur les autres, ou pour l'établir, d'une manière inégale, sur les diverses espèces.

Il faut toujours suivre cette distinction, pour régler le droit matrimonial, même dans une succession ouverte sous l'empire du Code Napoléon: le droit doit être toujours réglé, conformément à la loi existante lors du mariage. Autrement la volonté des époux ne serait plus exécutée; et les droits irrévocables qu'avait conférés la loi ancienne, seraient sou détruits, ou changés, par la loi nouvelle.

Il y a cependant une exception qu'il est important de faire remarquer, à l'égard des droits matrimoniaux qui avaient été établis les coutumes, par ou exclusivement sur les biens nobles et les fiefs, ou, d'une manière inégale, sur les biens nobles et les roturiers.

Les lois relatives à la suppression de la féodalité, contiennent à l'égard de ces droits, des dispositions particulières qui ont dérogé aux principes généraux. Nous les avons développées et nous en avons fait l'application aux droits statutaires des époux, dans l'art. Douaires, S. III, no. 3 et 4.

DROITS STATUTAIRES.

Les droits purement statutaires, c'est-à-dire, ceux qui étaient établis en vertu et par la seule autorité des lois existantes, sont-ils abolis par l'abrogation de ces lois, ou subsistent-ils sous l'empire d'une loi nouvelle, avec tous les effets qui leur avaient été conférés? Voyez l'article Droits acquis.

EFFET RÉTROACTIF DE LA LOI.

Voyez l'article Droits acquis.

ENFANS NATURELS.

Il serait inutile de remonter aux principes de la législation romaine sur les enfans naturels, puisque ces principes ne furent pas adoptés en France. Seulement, dans quelques coutumes de la Flandre et dans le ressort du parlement de Grenoble, on admettait les bâtards simples à la succession de leur mère, conformément à la disposition du droit romain.

Mais, dans tous les autres pays de droit écrit et de coutume, les enfans naturels étaient exclus de toutes les successions, à l'exception sculement. de celles de leurs enfans légitimes.

Ils n'avaient droit qu'à des alimens sur les successions de leurs père et

mère.

Cependant ceux qui n'étaient ni adultérins ni incestueux, pouvaient recevoir de leurs parens, des libéralités modiques.

Tel était le droit commun de la France; mais il fut bien changé par les lois intervenues pendant la révolution.

Un décret du 4 juin 1795, donna aux enfans nés hors mariage, le droit de succéder à leurs père et mère, dans la forme qui serait déterminée.

Cette forme fut réglée par la loi du 12 brumaire an 2, dont nous ne rappellerons que deux dispositions principales.

Par les articles I et 2, les enfans actuellement existans, nés hors mariage, sont admis aux successions de leurs père et mère, ouvertes depuis le 14 juillet 1789, et ils prennent les mêmes droits de successibilité, que les enfans légitimes: ils sont également admis aux successions qui s'ouvriront à l'avenir, sous la réserve portée par l'art. 10.

Cet article 10 porte textuellement qu'à l'égard des enfans nés hors du mariage, dont le père et la mère seront encore existans lors de la prɔmulgation du Code civil, leur état et leurs droits seront, en tous points, réglés par les dispositions du Code.

Il ne tarda pas à s'élever de nombreuses contestations sur l'interprétation de ces articles: elles eurent pour objet, de faire décider si l'état et les droits des enfans naturels dont les père et mère n'étaient morts que depuis la publication de la loi du 12 brumaire, et avant l'émission du Code civil, devaient être réglés suivant les dispositions de cette loi, ou s'il fallait attendre que le Code civil eût été décrété, pour les régler conformément aux dispositions qu'il ferait sur cette matière.

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Le tribunal de cassation pensa d'abord que, jusqu'à la promulgation du Code, la loi du 12 brumaire devait régir, à l'égard des enfans nés hors mariage, toutes les successions ouvertes sous son empire.、

Ensuite, revenant sur ses pas, il décida que la loi du 12 brumaire avait bien réglé l'état et les droits des enfans naturels dont les père et mère étaient décédés avant sa publication; qu'elle avait bien aussi disposé que l'état et les droits des enfans naturels dont les père et mère seraient

encore existans lors de la promulgation du Code civil, seraient réglés par ce Code; mais qu'elle n'avait rien statué sur l'état et les droits des enfans naturels dont les père et mère décéderaient depuis sa publication jusqu'à la promulgation du Code civil; qu'en conséquence, il y avait une lacune sur ce point, et que dès lors il était nécessaire de surseoir jusqu'à ce que le législateur se fût expliqué.

Les autres tribunaux furent aussi divisés sur cette question, et la même division existait entre les jurisconsultes.

Une loi précise était donc nécessaire pour terminer cette controverse, à l'instant où le Code civil a été publié, et tel a été l'objet de la loi transitoire, du 14 floréal an 11, qui a statué, par son article premier, que l'état et les droits des enfans nés hors mariage, dont les père et mère sont morts depuis la promulgation de la loi du 12 brumaire an 2, jusqu'à la promulgation des titres du Code civil, sur la paternité et la filiation, et sur les successions, seraient réglés de la manière prescrite par ces titres.

Mais cette loi ne s'étant occupée que du sort des enfans dont les père et mère étaient décédés avant la publication des titres du Code civil, on a élevé un grand nombre de questions sur l'état et les droits des enfans naturels nés et reconnus avant le Code, mais dont les père et mère ont survécu à la publication des titres sur la paternité et la filiation et sur les

successions.

Nous devons nous borner à l'examen de ces questions, celles qui sont relatives aux successions ouvertes avant le Code étant étrangères au plan de notre ouvrage ; mais comme les unes et les autres ont souvent des points communs de décision, la discussion des premières s'appliquera presque toujours aux secondes, et d'ailleurs nous aurons souvent à parler de la loi du 14 floréal.

§. I.

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Par quelle loi doivent être régis l'état et les droits des enfans naturels nés avant ou sous la loi du 12 brumaire an 2 reconnus avant ou sous cette loi, mais dont les père et mère ne sont décédés que postérieurement à la publication des titres du Code Napoléon, sur la paternité et la filiation, et sur les successions?

Nous examinerons 1°. quelle est la loi qui doit régir l'état de ces enfans naturels; 2°. quelles sont les formes et les conditions de la recon

naissance légale qui constitue l'état ; 3°. quels sont les droits qui appartiennent aux enfans naturels, quelle que soit l'époque à laquelle ils ont été légalement reconnus, lorsque les père et mère sont morts sous l'empire du Code Napoléon.

De l'état des enfans naturels dont les père et mère sont décédés après la publication du titre du Code, sur la paternité et la filiation. L'art. 756 du Code, n'accorde de droits aux enfans naturels, sur les biens de leur père ou mère décédés, que lorsqu'ils ont été légalement reconnus, et cette expression légalement, prouve, d'une manière incontestable, que le Code a exigé une reconnaissance conforme à la loi : on verra, par la suite, combien il eût été dangereux d'admettre indistinctement toute espèce de reconnaissances, comme suffisantes pour constituer l'état et pour conférer des droits.

Mais quelle est la loi en conformité de laquelle doit avoir été faite la reconnaissance, pour qu'elle soit réputée légale et suffisante?

Au premier aperçu, on peut croire que la loi qui doit régir, est celle sous l'empire de laquelle a été faite la reconnaissance.

Mais, d'abord, il n'avait rien été statué par les lois antérieures à celle du 12 brumaire, sur les reconnaissances d'enfans naturels, et si le législateur ne s'en était pas occupé, c'est qu'il n'avait pas accordé d'état à l'enfant naturel, même reconnu par ses père et mère; qu'il ne lui avait pas accordé plus de droits qu'à celui qui était méconnu par ses parens; l'un et l'autre étaient confondus dans la même classe, n'ayant égaleque ment droit qu'à de simples alimens ; et qu'ainsi les reconnaissances étant absolument sans effet aux yeux de la loi, il était inutile d'en régler le mode.

La loi du 12 brumaire an 2, est donc la première qui ait donné un état aux enfans naturels reconnus, et qui ait réglé la fornie des reconnaissances dont elle a fait dépendre cet état.

de ceux

Mais nous avons déjà vu qu'elle n'a réglé l'état et les droits que des enfans naturels dont les père et mère étaient décédés avant sa publication, et qu'elle n'a pas même compris dans ses dispositions, les enfans naturels dont les père et mère décéderaient jusqu'à la promulgation du Code civil.

Il fallait donc une loi particulière pour régler l'état de ces enfans dont ls père et mère avaient survécu, et cette loi n'a été rendue qu'après le Code.

Il est donc certain que jusqu'au Code, il n'existait aucune loi qui eût réglé l'état des enfans naturels dont les père et mère sont décédés après la publication de la loi du 12 brumaire an 2, et conséquemment on ne peut pas dire que Pétat de ces enfans et le mode de leur reconnaissance, doivent être régis par la loi existante au moment où la reconnaissance a été faite,

Aussi, lorsqu'il a été question de régler l'état des enfans naturels dont les père et mère étaient décédés depuis la promulgation de la loi du 12 brumaire an 2, jusqu'à la promulgation des titres du Code sur la paternité et la filiation et sur les successions, qu'a fait le législateur?

Comme il n'existait pas encore de loi précise sur la matière, et que celle du 12 brumaire, avait été purement transitoire pour les successions ouvertes avant sa promulgation, le législateur à décrété, le 14 floréal an 11, que l'état et les droits qui étaient en suspens à l'égard des enfanş naturels, seraient réglés conformément aux titres déjà publiés du Code Napoléon.

Ainsi, d'après cette loi du 14 floréal, on n'a pu considérer comme légalement reconnus, et comme étant habiles à réclamer les droits fixés par l'art. 757 du Code, que ceux des enfans naturels qui avaient été reconnus conformément aux règles adoptées par le Code, et c'est, en effet, ce qu'ont décidé constamment et uniformément tous les tribunaux de l'empire.

Pourrait-il en être autrement, à l'égard des enfans naturels dont les père et mère ont survécu à la publication des titres du Code?

Les mêmes motifs qui ont fait admettre qu'à l'égard des enfans naturels dont les père et mère étaient décédés depuis la loi du 12 brumaire jusqu'à la publication du Code Napoléon, l'état et les droits seraient réglés conformément aux dispositions du Code, ne s'appliquent-ils, et avec bien plus de force encore, aux enfans naturels dont les père et mère ne sont décédés qu'après la publication du Code? Ne serait-il pas même contradictoire que le Code réglát l'état des premiers, et ne réglât pas P'état des seconds?

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