Images de page
PDF
ePub

tions de la part de mineurs, et que, d'ailleurs, ces adoptions, s'il en existait, seraient annulables de droit, suivant les règles générales et communes à tous les contrats.

Seulement l'article 4 de la loi du 25 germinal, a donné à l'adoptant un moyen de faire réduire les droits accordés à l'adopté par le Code Napoléon, lorsqu'il n'avait pas été dans son intention de conférer des droits

aussi considérables.

Mais s'il a fallu une disposition précise de la loi, pour faire admettre, en faveur de l'adoptant, une simple modification au contrat, à plus forte raison encore, une disposition précise eût été nécessaire pour autoriser l'adoptant à le rompre entièrement.

Tout cela prouve que le législateur a considéré les adoptions faites avant la loi du 23 mars 1803, comme de véritables contrats synallagmatiques, qui obligeaient également et l'adoptant et l'adopté, l'un et l'autre majeurs,

Ces adoptions n'étaient donc pas plus révocables de la part des adoptans, avant la loi du 25 germinal an 11, qu'elles ne l'ont été depuis; car il a toujours été de maxime certaine, que les contrats ne pouvaient être révoqués que du consentement mutuel des parties contractantes, ou pour les causes que la loi autorisait.

Et comme il n'y avait pas de loi qui autorisât, pour des causes particulières, la révocation des adoptions, il s'ensuit que cette révocation ne pouvait avoir lieu que pour les causes communes à tous les contrats en général; savoir: le dol, la violence, l'erreur sur la

tion, la minorité, etc.

personne, l'interdic

Les adoptions ne furent donc jamais révocables ad nutum.

M. le conseiller d'état Berlier l'a dit d'une manière bien positive, dans son exposé des motifs de la loi du 25 germinal :

« Les anciennes adoptions, a-t-il dit, ont, pour la plupart, été dirigées sur des mineurs, non à titre de tutelle officieuse (institution dont l'idée est tout-à-fait nouvelle, et dont le nom n'avait pas encore été prononcé), mais à titre d'adoption parfaite.

>> Dans cette situation, il a paru jnste, non d'assimiler les anciennes adoptions à la tutelle officieuse, ( ce qui tendrait à dénaturer le contrat que l'on a voulu former, mais, en laissant subsister l'adoption, de réserver au mineur la faculté d'y renoncer.

» Peu de mineurs sans doute en useront; mais le principe sera respecté ; car le consentement est la base essentielle de tout contrat, et il est surtout nécessaire dans un acte aussi important que celui de l'adoption: or ce consentement formel ou tacite est un acte de majeur.

» Au reste, l'adoptant lui-même n'aura point à se plaindre de cette disposition; car elle était dans l'opinion commune et dans tous les projets du tems.

[ocr errors]

>> Cette heureuse combinaison, qui fait de l'adoption un contrat entre majeurs, bien qu'elle tire son origine de services rendus à un mineur n'existait point encore: elle n'avait pas même été aperçue, et l'on ne voyait dans l'adoption conférée à un mineur, qu'un acte qui, PARFAIT ET IRRÉVOCABLE DE LA PART DE L'ADOPTANT, restait néanmoins sujet à la ratification formelle ou tacite de l'adopté à l'époque de sa majorité. » Déjà la cour de cassation a formellement décidé la question dans l'espèce suivante:

Par actes devant notaires, des 7 et 9 pluviose an 4, James Margnat et Françoise Tixier, son épouse, adoptèrent Antoine Tixier et Maric Faure, enfans de 14 à 15 ans.

Bientôt ils se repentirent d'avoir adopté Marie Faure, et ils révo– quèrent son adoption, pour cause d'ingratitude, par deux actes, l'un du 4 ventose an 5, fait devant un officier de l'état civil, l'autre du 16 du même mois, reçu par un notaire.

Ils citèrent même ladite Marie Faure et ses père et mère naturels, pour se concilier sur la demande en révocation qu'ils se proposaient de former; mais il paraît qu'il ne fut donné aucune suite à cette citation.

James Margnat étant mort, après avoir institué sa femme son héritière universelle, celle-ci épousa, en secondes noces, le sieur Savouroux. Par testament du 20 ventôse an 12, elle institua son nouvel époux, son légataire universel, et décéda cinq mois après.

Alors, Marie Faure réclama les droits qui lui étaient attribués par le Code, dans la succession de sa mère adoptive.

Savouroux lui ayant opposé la révocation de l'adoption qui avait été faite en sa faveur, elle répondit par le principe de l'irrévocabilité.

La cour d'appel de Riom décida que l'adoption était irrévocable de sa nature, et qu'en conséquence Marie Faure avait droit, nonobstant la révocation, à la succession de Françoise Tixier.

Savouroux s'étant pourvu en cassation, s'efforça d'établir que les adoptions avaient pu être valablement révoquées avant la promulgation du Code Napoléon.

Il dit que, chez les Romains, l'adoption étant regardée comme une imitation parfaite de la nature, elle devait être essentiellement irrévocable, parce que la nature ne permet pas qu'un père cesse d'être le père de son

fils;

Mais que, chez nous, l'adoption n'était pas une imitation de la nature, et qu'elle avait même des caractères absolument opposés, puisque l'enfant adopté, en entrant dans la famille de son père adoptif, ne cessait pas de faire partie de la famille de son père naturel, et qu'ainsi on ne devait pas considérer l'adoption, dans nos principes, comme étant irrévocable, pour ressembler à la nature;

Que, dans le fait, elle n'était que purement civile; que c'était un simple bienfait accordé à des enfans, et qui était, de sa nature, révocable comme tous les autres dons de biens à venir, faits hors contrats de mariage;

tait

Qu'à la vérité l'adoption, parmi nous, était irrévocable, depuis la promulgation du Code Napoléon; mais que ce n'était pas une conséquence de sa nature, que c'était l'effet d'une disposition positive, et que cette disposition ne se trouvant pas dans les lois antérieures au Code, il en résulque les adoptions antérieures au Code, étaient de nature révocable; Qu'en effet, dans les premiers tems, ce n'était qu'un essai qu'on voulait faire, et qu'il était bien juste que cet essai ne liât pas irrévocablement ; que le mode n'était pas déterminé; et qu'il était bien juste encore que l'on ne fût pas lié irrévocablement par une obligation que l'on pouvait contracter si légèrement ;

Mais qu'au contraire, depuis le Code, l'adoption étant devenue une institutiou solennelle, soumise par la loi à de sévères conditions, à de graves formalités, à de longues épreuves, il n'était pas extraordinaire que le Code en eût fait un lien indissoluble;

Qu'en vain on opposait la loi transitoire du 25 germinal an 11, comme ayant imprimé le sceau de l'irrévocabilité à toutes les adoptions antérieures ;

Qu'il résultait seulement de cette loi bien entendue, que les adoptions antérieures, et encore existantes, seraient irrévocables à l'avenir; mais que les adoptions, qui déjà n'existaient plus à l'époque de cette loi, qui

déjà étaient révoquées, n'avaient pu revivre, en vertu de ses dispositions,. parce que la loi n'avait pu invalider les rétractations faites avant sa publication, et sous l'empire des lois antérieures qui permettaient ces rétractations, par cela seul qu'elles ne les prohibaient pas.

La cour de cassation n'a eu aucun égard à ces moyens. Par arrêt du 26 avril 1808, la section des requêtes a rejeté le pourvoi, et voici les. motifs de sa décision :

<< Considérant que l'arrêt attaqué, en déclarant irrévocable de la part: des père et mère adoptans, une adoption faite en l'an 4, s'est conformé au principe du droit romain, d'après lequel on ne pouvait pas adopter pour un certain tems, par la même raison que ceux qui naissent de nous, sont également nos enfans pour toujours ;

>> Qu'il s'est également conformé à l'article 2 de la loi transitoire du 25 germinal an 11, lequel n'accordant la faculté de renoncer à l'adoption, qu'aux enfans adoptés en minorité ou encore mineurs, la refuse aux adop tans toujours majeurs ;

» Que cette loi ayant pour objet de déterminer le sort de toutes les adoptions pour l'avenir et pour le passé, dont une loi du 16 frimaire an. 3. s'était seulement occupée pour prescrire des actes conservatoires, it était impossible de ne pas lui donner un effet rétroactif, et de ne pas en appliquer les dispositions à celle dont il s'agit, à l'époque de laquelle Fadoption avait été solennellement consacrée par la Convention nationale;

>> Et qu'elle a dû agir ainsi sur cette adoption, nonobstant la rétractation de James Margnat et Françoise Tixier sa femme, parce que le sort de la rétractation dépendait de l'effet que lui donnerait la loi, laquelle l'a anéan tie, en refusant aux adoptans le droit de révoquer les adoptions, et cette révocation n'ayant pas été acceptée par Marie Faure ;

>> Qu'ainsi, en appliquant à l'adoption de Marie Faure, les dispositions de la loi du 25 germinal an 11, l'arrêt attaqué s'est parfaitement conformé aux principes, ....... Rejette, etc. >>

[ocr errors]

II. Le principe de l'irrévocabilité des adoptions antérieures au Code Napoléon, se trouvant établi, il est facile de résoudre les deux autres questions que nous avons proposées, en tête de ce paragraphe.

Et, en effet, puisque l'adoption antérieure à la loi du 23 mars 1803, était un acte parfait et irrévocable de la part de l'adoptant, il est hors de doute que

l'adoptant n'a pu en changer la nature, ni le détruire dans son essence ni enlever à l'adopté l'état qu'il lui avait donné; il n'a donc pu reconnaître pour son enfant naturel, celui que déjà il avait adopté ; ce qui était substituer un état à un autre, et annuler réellement l'adoption dans ses motifs et son objet, comme dans ses effets.

Ou, du moins, l'enfant adopté a, incontestablement, le droit de repousser la reconnaissance, pour réclamer le bénéfice de l'adoption, puisque le contrat primitif ne peut être ni rompu, ni altéré, sans son

consentement.

C'est ainsi que l'a expressément décidé la cour d'appel de Paris, par arrêt du 11 ventose an 12, contre les héritiers du sieur Hesse qui, après avoir adopté, en 1793, la demoiselle Saint-Valentin, l'avait ensuite reconnue pour sa fille naturelle.

<< Attendu, porte l'arrêt, que ni le défunt Hesse, par sa reconnaissance de paternité, ni le tuteur, par une qualification donnée indiscrètement, n'ont pu enlever à la fille Saint-Valentin, contre sa volonté, l'état et les droits que l'adoption lui assurait. »

S. IV.

L'adoptant a-t-il pu, avant la publication de la loi du 23 mars 1803, disposer de ses biens, au préjudice de l'adopté, soit par donations entre-vifs, soit par donations de biens présens et à venir, ou institutions d'héritiers, faites au profit de conjoints, par leur contrat de mariage?

L'adopté a-t-il un droit de réduction sur les biens donnés, lorsque l'adoptant est mort postérieurement à la publication de la loi du 23 mars 1803 ?

Quelle est la quotité de ce droit?'

Ces questions nous paraissent décidées par la loi transitoire du 25 germinal an 11, et par les art. 350, 913, 920 et 921 du Code Napoléon..

La loi du 25 germinal, qui a eu pour objet de régler les effets des adoptions antérieures, dispose, art. 3, que, si les droits de l'adopté ont été réglés par acte ou contrat authentique, disposition entre-vifs ou

cause de mort, il ne sera porté aucune atteinte auxdits acte, contrat,›

« PrécédentContinuer »