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les deux vaisseaux latéraux vont d'une extrémité de la sangsue à l'autre, et se joignent par des branches qui représentent un réseau très→ fin, réseau très sensible lorsque l'injection faite par le tronc sanguin latéral parvient dans les branches. Le vaisseau dorsal et le vaisseau ventral ne forment point, disent-ils, un réseau pareil; ils donnent seulement des branches disposées alternativement, et dirigées obliquement, qui se subdivisent à l'ordinaire. Le vaisseau ventral est placé, selon eux, précisément sous le cordon médullaire, dont les ganglions fournissent tous les nerfs.

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La découverte qui paroît le plus flatter ces physiciens est celle du mouvement alternatif de systole et de diastole; mouvements dont ils assurent que les vaisseaux ci-dessus jouissent, et au moyen duquel le sang y circule.

Des quatre vaisseaux sanguins, les vaisseaux latéraux sont d'une grandeur médiocre relativement à celle de la sangsue; pour le vaisseau dorsal il est si petit que nous doutons qu'ils aient pu réussir plusieurs fois à l'injecter; les ramifications qui naissent des principales bran+ ches sont si déliées, qu'on ne peut assignér d'une manière précise leur terminaison. Le vaisseau

ventral a jusqu'à présent échappé à nos recherches. Nous pensons que l'imagination ou la prévention a fait soutenir à ces anatomistes que les

quatre vaisseaux ci-dessus étoient doués du mouvement de systole et de diastole. Quelque moyen que nous ayons employé pour distinguer ces deux mouvements, sur-tout dans les deux vaisseaux latéraux, les plus considérables des vaisseaux sanguins connus, il nous a été impossible d'y apercevoir la moindre oscillation.

A ces physiciens ont succedédes anatomistes avides des nouveautés physiologiques: ils ont cru que pour bien mériter de leurs devanciers ils devoient en adopter les erreurs comme les découvertes; ils ont recounu, à leur imitation, deux vaisseaux sanguins latéraux et un dorsal; ils ont oublié le ventral, dans l'impossibilité sans doute de l'apercevoir. Ils ont donc admis sur chaque partie latérale de la sangsue un vaisseau membraneux rempli de sang rouge, s'étendant d'une extrémité du corps à l'autre ; ces deux vaisseaux leur ont paru doués d'un mouvement régulier de systole et de diastole, et donnant sept à huit pulsations par minute. Le sang jouit encore selon eux d'un mouvement d'impulsion dirigé de devant en arrière, et

quelquefois de l'extrémité postérieure à la tête ; ces vaisseaux fournissent de chaque côté une très grande branche d'où partent plusieurs rameaux qui communiquent avec ceux de la branche opposée; car lorsqu'on injecte un des vaisseaux latéraux, aussitôt l'autre est rempli; les deux grands vaisseaux latéraux se terminent chacun par deux ramifications qui s'anastomosent entre elles. Le vaisseau dorsal, plus petit que les précédents, est situé au milieu et le long du dos, depuis la lèvre jusqu'au disque ou l'extrémité postérieure ; il donne des branches qui se ramifient sur la membrane interne du tube alimentaire; leurs dernières ramifications sont blanchâtres au lieu d'être rouges; ce sont des vaisseaux lymphatiques qui absorbent le produit de la digestion. Les mouvements prétendus de systole et de diastole dépendent de la faculté qu'ont les tuniques membraneuses des vaisseaux latéraux de se contracter et de se dilater dans tous les sens; mouvements étrangers à l'action de tout organe central approchant de la structure du cœur des différents animaux.

Le désir que j'ai d'applaudir aux recherches et aux systèmes de ces anatomistes ne doit pas me faire trahir la vérité. Il ne m'a jamais été

possible, comme je l'ai déjà dit, d'apercevoir avec une excellente loupe ou avec un bon microscope les mouvements de systole et de diastole attribués aux gros vaisseaux latéraux, ni le mouvement d'impulsion du sang, soit de la queue vers la tête, soit de la tête vers la queue. Je n'ai jamais pu distinguer les dernières ramifications du vaisseau dorsal, et les vaisseaux blanchâtres ou lymphatiques absorbants qu'on dit naître de ces ramifications. Supposé que les mouvements de systole et de diastole ne soient pas imaginaires, il ne falloit pas les attribuer à la faculté qu'a la tunique membraneuse des vaisseaux latéraux de se contracter et de se relâcher. C'est à l'aide de semblables facultés, nommées occultes par les anciens, qu'ils expliquoient tous les phénomènes de l'économie animale: ils avoient raison. En les imitant, les physiciens ne perdroient pas un temps précieux à enfanter de nouveaux systèmes, les théoriciens à les discuter, et le public à lire nos rêveries physiologiques.

Des sens.

Les sens de la sangsue se rapportent au

toucher; sans eux elle ne peut éviter ce qui lui est nuisible et rechercher l'utile.

La sangsue touche les corps étrangers pour juger leur forme et leurs qualités; ces corps agissent sur elle extérieurement, ou ils pénétrent dans l'intérieur de manière qu'elle éprouve un sentiment désagréable ou agréable. Dans l'un et l'autre cas, les nerfs qui se distribuent à la peau ou à un organe interne, reçoivent des objets extérieurs ou intérieurs une impression qu'ils transmettent au cerveau ou aux gan. glions nerveux; c'est là que le principe vital, toujours occupé à maintenir les fonctions de la sangsue dans le meilleur état possible, est averti par les nerfs de faire exécuter sur-le-champ à la sangsue les mouvements nécessaires pour repousser le mal, ou opérer ce qui lui est le plus avantageux.

Ce principe vital a-t-il une existence propre? Son existence est-elle distincte de celle du corps organisé et de l'ame? N'est-ce qu'un mode particulier du corps vivant? Comme il est impossible de répondre rien de satisfaisant à toutes ces questions, il faut se contenter de croire qu'il existe dans la sangsue un principe qui veille sans cesse à sa conservation.

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