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rer l'application des sangsues jusqu'à ce que la couenne ait beaucoup diminué; quelque quantité de sang qu'on tire, on ne parvient jamais à ce but; souvent l'effet contraire arrive. L'observation nous apprend donc que la présence de la couenne en général indique l'état inflammatoire du sang; mais pour cela nous ne savons de quelle nature elle est.

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3o La dérivation est l'accroissement de la vitesse et de la quantité du sang, soit dans les vaisseaux sanguins que les sangsues ont ouverts, soit dans les vaisseaux sanguins voisins des morsures, pendant l'évacuation du sang et après l'évacuation; quelquefois même les sangsues déterminent la nature à faire transporter vers les morsures l'humeur morbifique qui s'en trouvoit éloignée.

Sans examiner si la dérivation est conforme ou contraire aux lois de l'hydraulique, on est en droit, d'après les lois de l'économie animale, et d'après les effets sensibles des sangsues sur l'homme sain et sur l'homme malade, d'affirmer qu'elles établissent une vraie dérivation dans les vaisseaux sanguins qu'elles mordent, et dans les environs des morsures.

Qu'on se rappelle les effets des sangsues sur

la cuisse d'un homme pléthorique; les bords des morsures et les environs deviennent rouges et chauds; les veines se gonflent, et les artères voisines battent avec plus de force, tandis que le contraire arrive dans les parties les plus éloignées des morsures; plus la partie mordue par les sangsues abonde en nerfs et en vaisseaux, plus elles y causent de la douleur, sucent du sang, et font dériver dans tous les vaisseaux voisins des morsures une grande quantité de sang, quelquefois plus ou moins d'humeur morbifique.

4° La révulsion est la quantité de sang qui entre de moins dans les vaisseaux éloignés de ceux que les sangsues ont mordus : ici la dérivation accompagne toujours la révulsion.

Dans l'endroit où s'opère la révulsion, le sang, non seulement coule en moindre quantité, mais encore avec plus de lenteur, au moins pour le sang veineux: le diamètre des vaisseaux sanguins diminue parcequ'il y coule moins de sang, et parceque la nature y produit une constriction particulière; les artères battent toujours avec moins de force, les veines sont moins gonflées, et si la partie où se fait la révulsion est extérieure, souvent elle pâlit et di

minue de volume. Dans l'érysipèle essentiel de la tête, les sangsues étant mises en grand nombre sur la cuisse, la rougeur, le gonflement, la chaleur et la douleur de la tumeur diminuent; en même temps l'endroit où les sangsues mordent et sucent s'enflamme, et la dérivation du sang s'exécute.

Les médecins-mécaniciens, partisans de la dérivation et de la révulsion, quelque peine qu'ils se soient donnée pour démontrer que la révulsion est soumise aux lois de l'hydraulique, ont été forcés d'avouer que, sans les efforts de la nature, elle seroit nulle; bien plus, la nature seule détermine la révulsion et l'expulsion de l'humeur morbifique pour la faire porter dans l'endroit mordu, sucé et irrité par les sangsues.

Comparez les effets de la saignée par les sangsues avec ceux de la saignée par la lancette, vous vous mettrez à même de juger en quoi elles diffèrent, et dans quelles circonstances la première espèce de saignée l'emporte sur la seconde.

Les sangsues établissent une évacuation sanguine dont on ne peut diriger et fixer à volonté la quantité; en ouvrant avec la lancette une grande ou une petite veine, on en tire au con

traire à volonté la quantité de sang qu'on croit nécessaire.

Dans les maladies où il faut évacuer sur-lechamp une grande quantité de sang, les sangsues ne peuvent ordinairement produire cet effet; la lancette seule a cet avantage.

Le sang qui sort des morsures des sangsues s'échappe lentement; cette évacuation n'abat pas d'une manière bien sensible les forces vitales et musculaires, à moins qu'elle ne soit excessive: au contraire, la saignée par la lancette procure en peu de temps une évacuation de sang abondante, et diminue toujours sensiblement les forces, souvent jusqu'à produire des défaillances; lorsqu'elle est trop copieuse, elle cause un relâchement considérable dans les solides, altère les humeurs récrémentielles, dérange le travail de la nature, nuit à la crise, et quelquefois donne lieu à l'hydropisie.

Il s'opère toujours une dérivation dans les vaisseaux que la sangsue a mordus, et dans les vaisseaux sanguins proches de la morsure: dans la saignée du bras par la lancette, les effets de la dérivation ne sont point sensibles; la ligature faite au bras avant et après la saignée paroît évidemment s'opposer à la dérivation;

seulement dans la saignée du pied, l'eau chaude où l'on fait tremper la jambe favorise la dilatation des vaisseaux sanguins, et y fait affluer, avant et après la saignée, une plus grande quantité de sang: aussi est-elle quelquefois accompagnée des mêmes effets que la saignée aux cuisses par les sangsues.

La révulsion faite par les sangsues s'opère dans les vaisseaux ordinairement les plus éloignés des morsures: l'application des sangsues à la cuisse ou proche de l'anus, pour l'ophtalmie, pour l'angine-inflammatoire, pour l'inflammation des poumons par suppression du flux hémorroïdal, du flux menstruel, ou des lochies, produit quelquefois une révulsion avantageuse du sang et de l'humeur morbifique.

Jamais la morsure et la succion des sangsues n'engagent la nature à déplacer le sang ou la matière morbifique déposés à l'extérieur, pour les transporter et les fixer dans l'intérieur ; la saignée faite au bras par la lancette procure souvent ce déplacement.

Lorsqu'il faut arrêter une hémorragie utérine, la saignée faite au bras par la lancette provoque quelquefois la nature à resserrer les vaisseaux sanguins, à diminuer la quantité et la vé

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