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temps que la tutelle, et même pendant le délai de dix ans, qui court depuis la majorité du mineur.

Il est vrai que tous les auteurs qui ont écrit sur le droit romain conviennent que si la loi a donné l'assurance au tuteur d'être payé de ses avances, il est bien naturel de penser qu'il est dans son esprit de lui assurer cette garantie par l'effet de l'hypothèque tacite sur les biens du pupille, en la faisant remonter au jour de l'exercice de la tutelle; qu'amsi le tuteur a une hypothèque de plein droit sur tous les biens de son pupille, à compter de la gestion de la tutelle, de la même manière que celle du pupille sur les biens de son tuteur; que cette doctrine est conforme à l'article 70 du règlement sur les Tutelles; qu'elle a été consacrée par plusieurs arrêts des Parlemens de Grenoble, Rouen, Bordeaux, Toulouse, et même par deux arrêts de Paris, cités par Carondas, en ses Réponses, livre 6, chap. 75, et par un autre arrêt, cité par Delommeau, en ses Maximes du droit français, liv. 3, max. 303.

sur

du

que légale : celle des mineurs et des interdits contre les tuteurs, et celle des femmes contre leurs maris. Cependant, si on admettait le système qu'on tend à introduire d'une manière aussi étrange, il faudrait soutenir, contre la lumière des principes, qu'il existe en dehors de la loi une troisième espèce d'hypothèque légale, puisque dans ce système on donne au tuteur une hypothèque de plein droit sur les biens du pupille, jour même de la gestion de la tutelle, de la même manière qu'elle subsiste légalement sur les biens du tuteur. Il serait peut-être à désirer qu'une disposition nouvelle, dans l'ordre des tutelles, donnât au tuteur une hypothèque légale sur les biens du mineur, du jour même de l'exercice de la tutelle pour des avances jugées utiles et indispensables; mais prenons garde qu'en voulant créer un objet d'équité, il ne devienne une arme dangereuse, dans les mains surtout d'un tuteur entre

prenant, contre celui que la loi a placé sous sa protection!!!

du tuteur.

Cependant, on doit le dire, un plus III. Du Reliquat du compte en faveur grand nombre d'arrêts du même Parlement, comme l'assure Brodeau, Louet, lettre H, somme 23, ont embrassé une opinion contraire, en décidant que l'hypothèque tacite et légale du tuteur sur les biens du pupille n'est pas indiquée parmi ces sortes d'hypothèques; qu'ainsi elle ne peut exister que du jour de la clôture du compte de tutelle.

1370. Du principe qu'on a développé dans le précédent paragraphe, il en résulte que le tuteur n'a point d'hypothèque légalement acquise sur les biens de son pupille pour le reliquat en sa faveur de son compte de tutelle; qu'il ne peut obtenir cette garantie que dans les cas ordinaires de l'hypothèque conventionnelle ou judiciaire.

thèque du tuteur.

Il est bien extraordinaire que les auteurs du Code civil, qui avaient sous les yeux cette contrariété de jurisprudence, n'aient pas tranché la question IV. De la Prescription de l'hypodans un article de la loi sur les hypothèques. Quoi qu'il en soit, nous ne partageons pas l'opinion de ceux qui pensent que cette garantie hypothécaire doit subsister en faveur du tuteur de la même manière que celle du pupille sub siste sur les biens de son tuteur.

Dans notre régime hypothécaire, on ne connaît que deux genres d'hypothè

1371. Sur la prescription des actions du tuteur contre le mineur pour les faits de la tutelle, ce qui comprend l'action en garantie par hypothèque, V. ce qu'on a dit dans la sect. 20 du chap. 16, et surtout le § 5 de la même section.

SECTION XVIII.

De l'Inefficacité de l'inscription sur les biens d'une succession acceptée sous bénéfice d'inventaire.

ART. 2146 du C. civ.

1372. En général, la loi ne fixe pas de délai pour faire l'inscription; mais cette règle n'est pas sans exception : il est des circonstances, au nombre desquelles se trouvent celles dont parle l'art. 2146, où l'inscription est absolument inutile. En effet, suivant le S2 de cet article, l'inscription prise par l'un des créanciers d'une succession, acceptée sous bénéfice d'inventaire, ne produit aucun effet, si elle n'a été prise que depuis l'ouverture de la succession.

Quelques auteurs, au nombre desquels on cite M. Grenier (des Hypothèques, t. 1er, no 125), pensent que la disposition du second alinéa de cet article n'est faite que pour le cas des successions échues à des majeurs librement et volontairement par eux acceptées, et non pour le cas des successions échues à des mineurs qui forcément ne peuvent être acceptées que sous bénéfice d'inventaire.

Mais sur cette question, deux arrêts, l'un de la Cour de Toulouse, du 2 mars 1826, et l'autre de la Cour de Bordeaux, du 24 juin 1826, ont jugé avec raison, « qu'il n'y a point de distinction entre les successions bénéficiaires acceptées par des majeurs et celles acceptées par des mineurs ; que, s'il est vrai que dans ce dernier cas on n'obéisse qu'au vœu de la loi, il faut convenir aussi que la position des tiers est la même; que d'ailleurs, lorsque le législateur en a ainsi disposé, il savait que les successions

échues aux mineurs ne pouvaient être acceptées que sous bénéfice d'invengué, il n'est pas permis aux juges de taire; et que, puisqu'il n'a pas distindistinguer, et qu'il faut au contraire, entendre rigoureusement les dispositions générales du § 2 de l'art. 2146... et non admettre une interprétation arbitraire en faveur de la distinction, comme le proposent seulement quelques auteurs. » Jur. du 19e siècle, 1826, 2. 216 et 306.

De ce principe il faut donc conclure que l'hypothèque n'est utile qu'autant que l'inscription est requise du vivant du débiteur; car, si la succession n'est acceptée que sous bénéfice d'inventaire, même par des mineurs, l'hypothèque cesse d'avoir son effet.

1373. Toutefois cette disposition de l'art. 2146 ne porte aucune atteinte au bénéfice de l'hypothèque légale. Cette règle ne frappe que les inscriptions relatives aux hypothèques conventionnelles ou judiciaires, requises sur les biens du débiteur décédé postérieurement à l'ouverture de sa succession bénéficiaire : elle ne comprend pas dans sa prohibition l'inscription au profit de l'incapable qui met en évidence l'objet réel de ses créances légales. Il n'y a point de règle sans exception; celle-ci est un écho de cette vérité. Que l'inscription, au nom du mineur, ait été faite avant ou après l'ouverture d'une telle succession, l'une ou l'autre ne faisant que reproduire le bénéfice de l'hy. pothèque légale qui subsiste indépendamment de toute inscription, ne peut pas être retranchée du rang des hypothèques inscrites sur tous les biens du débiteur décédé, administrateur légal ou datif de celui que la société a placé sous la protection de son gouvernement.

CHAPITRE XLIX.

De l'Expropriation ou de la Saisie immobilière (1).

1374. L'expropriation forcée, que le Code de procédure appelle saisie immobiliaire, est l'exercice du droit de faire vendre en justice, en vertu d'un titre authentique et exécutoire, les immeubles de son débiteur.

Le Code civil explique dans quelles circonstances on peut ou l'on ne peut pas diriger la poursuite en expropriation, quels sont les biens qu'on peut exproprier; mais les formalités relatives à ce genre de vente forcée sont réglées par le Code de procédure au titre de la saisie immobilière.

1375. Les immeubles d'un mineur, même émancipé, ou d'un interdit, ne peuvent être mis en vente, dit l'article 2206 du Code civil, avant la discussion du mobilier; c'est-à-dire qu'on ne peut provoquer la vente de leurs immeubles avant d'avoir fait vendre le mobilier, parce qu'il est moins onéreux au mineur d'être privé des objets mobiliers dont la plupart ne produisent point de revenus, que d'être dépouillé des immeubles qui en produisent.

Dans le cas de discussion, le tuteur présente son compte de tutelle, et si

(1) Les formalités prescrites par les loi et arrêté des 12 juin 1816 et 12 septembre 1822, pour la vente des biens des mineurs, ne doi vent pas être suivies en cas de vente, pour cause d'utilité publique, d'un immeuble appartenant à un mineur.

Et spécialement : Le conseil de famille peut dans ce cas, autoriser le tuteur à accepter le prix offert pour l'immeuble, s'il trouve plus avantageux de le faire que de s'exposer aux chances et aux frais d'une évaluation judiciaire, et le tribunal auquel l'autorisation

par ce compte il est démontré que le mobilier et les créances réputées bonnes sont suffisans pour répondre de la dette pour laquelle on exerce des poursuites contre le mineur, on suspendra l'exercice des poursuites en expropriation, on donnera un délai moral au tuteur pour vendre le mobilier ou les créances, et appliquer le prix de la vente à la libération du mineur, si non, après ce délai, le créancier poursuivant pourra lui-même faire procéder à cette vente dans les formes ordinaires des ventes judiciaires forcées (2).

Cependant, d'après l'art. 2207, la dis cussion du mobilier n'est pas requise avant l'expropriation des immeubles possédés par indivis entre un majeur et un mineur, ou un interdit, lorsque la dette leur est commune et cette discussion n'est pas non plus requise avant cette expropriation, dans le cas où les poursuites ont été commencées contre un majeur, ou avant l'interdiction.

Supposez qu'entre majeurs il ait été convenu qu'à défaut par l'un d'eux de payer ce qu'il doit à l'autre, les immeubles du débiteur en retard seront

du conseil de famille est soumise, doit l'homologuer s'il est en effet avantageux pour le mineur d'accepter le prix offert. Br. 22 mars 1816. J. Br. 26. 1. 325. Jurispr. du 19e siècle, 26. 3. 214 (V. à la fin du volume).

(2) En matière d'expropriation, la Cour de Paris, par son arrêt du 7 août 1811, Sirey, t. 14, a jugé que les formalités prescrites par les articles 954 et suivans du Code de procédure, pour la vente des biens des mineurs, ne s'appliquent point au cas où les biens sont vendus par expropriation.

saisis et verdus sans discussion préalable du mobilier. Cependant, si le débiteur décède laissant des héritiers mineurs, le créancier ne peut poursuivre la vente des immeubles avant de provoquer la discussion du mobilier, suivant l'art. 2206; mais, nous le répétons, si l'expropriation des immeubles avait été commencée du vivant du débiteur,

ses

héritiers mineurs seraient sans droit pour profiter du bénéfice de la discussion du mobilier : ce changement d'état ne change pas l'ordre de l'exercice de la poursuite en expropriation.

1376. On a jugé que, lorsqu'au mépris de l'art. 2206, les immeubles d'un mineur sont saisis sans discussion préalable du mobilier, le défaut de discussion préalable ne détruit pas la saisie; seulement qu'il y a lieu de surseoir à la vente des immeubles jusqu'après cette discussion. Cette doctrine peut être justement controversée. Ce qui est fait contre les règles de droit ne peut produire des effets utiles....!

Si le créancier ignore quels sont les objets mobiliers qu'il peut discuter avant la poursuite en expropriation des immeubles, il doit mettre le tuteur en demeure de lui en faire la déclaration. A défaut par le tuteur de répondre à la sommation, il pourra être condamné aux dommages et intérêts auxquels pourrait avoir donné lieu le préjudice de sa réticence.

Règle commune à toutes les Minorités.

1377. Lorsqu'un immeuble a été saisi réellement, si tous les intéressés sont majeurs et maîtres de leurs droits, ils peuvent demander que l'adjudication soit faite aux enchères devant notaire ou en justice, sans autres formalités que celles prescrites par les articles 957 et suivans du Code de procédure; mais, dans ce cas, si un mineur ou un interdit est lui-même créancier, le tuteur peut, sur l'avis du conseil de famille homologué par le tribunal, se joindre aux autres parties intéressées pour diriger la même demande.

Et si le mineur ou l'interdit est débi

teur, les autres parties intéressées ne peuvent faire cette demande qu'en se soumettant à l'observation de toutes les formalités sur la vente des biens des mineurs. Art. 746, 747, 748 du C. pr.

1378. La Cour de Bruxelles, par son arrêt du 12 novembre 1806, Dalloz, t. 27. p. 354. Sirey, 1807, p. 1242, a jusment décidé que le tuteur qui dirige des poursuites en expropriation au nom de son pupille pour recouvrer les créan ces mobilières qui lui sont dues, n'a pas besoin de l'autorisation du conseil; que cette poursuite est un acte d'administration qui n'est pas soumis à la règle de l'article 464 du Code civil, du moins, en ce cas, la Cour de cassation a décidé par arrêt du 11 décembre 1810, Dalloz, t. 27, p. 354, Sirey, 1811 p. 52, que cette nullité de l'action étant relative, ne pourrait être proposée que par le mineur, et non par son adversaire majeur. Mais, sur cette double question d'action de droits mobiliers et immobiliers et de nullité relative, V. les nos 1097 et 1098.

De l'Expropriation des immeubles de la femme mariée mineure et de la femme mariée majeure dont le mari

est mineur.

ART. 2208 du Code civil.

1379. L'expropriation des immeubles de la communauté se poursuit con tre le mari, s'il est majeur, encore que la femme majeure ou mineure fut obligée à la dette.

Si le mari est mineur, on ne peut diriger cette poursuite en expropriation contre lui, qu'en présence du curateur à son émancipation.

Si les immeubles de la femme ne sont point entrés dans la communauté, il faut distinguer:

1o Si le mari est majeur, il peut autoriser sa femme majeure ou mineure à se défendre contre la poursuite.

2o Si le mari majeur refuse à sa femme majeure l'autorisation de procéder avec elle, celle-ci peut l'obtenir de la justice.

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6o Si le mari est décédé, et si la femme est mineure, elle doit être assistée d'un curateur, d'après les principes de l'émancipation.

La principale commission de tuteur ad hoc consiste particulièrement à prévenir la fraude et le défaut de publicité,

à veiller à l'exécution des formalités prescrites par les Codes civil et de procédure, en matière d'expropriation et

de saisie immobilière.

Il doit assister à l'ordre sur la distribution du prix de l'adjudication, et surveiller l'emploi de l'excédant de ce prix sur le montant des bordereaux de collocation. Sur ce point, V. le n° 772 et la sect. ire du chap. 16.

CHAPITRE L.

De la Prescription.

1380. La prescription est le moyen d'acquérir la libération d'une dette, ou la propriété d'une chose, par le temps non interrompu d'une possession déterminée par la loi.

La prescription est donc une exception de droit qu'on oppose à celui qui demande la chose que nous possédons. Ainsi deux privileges naissent de la prescription, l'un de ne pas payer ce que l'on doit, et l'autre de jouir du bien qui appartient à autrui, sans le payer. C'est pour cela que des casuistes l'ont appelé iniquorum hominum præsidium, l'appui de l'iniquité. Le célèbre Dargentré, dans l'ardeur de son imagination, a dit que cette loi est magnum scelus auctoritate publicâ patratum.

Il est vrai que le créancier qui de

mande le paiement de sa créance, et le propriétaire qui réclame la propriété de son héritage, sont tous deux favorables, et que le moyen de la prescription est odieux; mais il est des injustices qui sont inévitables. Qui peut se flatter de prévenir tous les abus? Dans l'impossibilité de pénétrer dans les plis et replis de la conscience, les lois out transigé entre l'action de celui qui demande et l'exception de celui qui détient. Elles avertissent que la négligence peut devenir funeste; que, faute de réclamer dans un délai utile, le créancier d'un objet mobilier et le propriétaire d'un bien-fonds s'exposent l'un et l'autre à perdre pour toujours tous leurs droits. Dans le doute, la loi présume qu'il y a plus de personnes qui deman

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