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de ceux qui sont incapables de veiller à leurs intérêts.

L'article 466, spécial à la minorité, n'a pas été supprimé par les formalités prescrites d'une manière générale en matière de partage des successions: il subsiste dans tout son entier. Il n'y a point d'antinomie entre cet article et l'article 824. Get article parle des partages entre majeurs sans déroger à l'article 466. Une règle générale ne détruit une exception particulière que par une disposition formelle. D'ailleurs, il est de principe qu'entre deux règles qui se contrarient on doit suivre de préférence celle qui est la plus conforme au sujet, plutôt que celle qui s'en éloigne. On doit craindre d'affaiblir les principes sur lesquels repose la propriété de ceux qui sont incapables de se dé fendre: il vaut mieux leur faire quelques sacrifices que de s'exposer à les détruire entièrement.

Jamais tuteur n'a reçu le pouvoir de nommer des experts pour ses pupilles. Avoir le droit de faire cette nomination, c'est avoir celui d'aliéner et de transiger; or, on sait que le tuteur n'a ni l'un ni l'autre. Suivant l'article 819, il ne peut même pas faire un partage à l'amiable. Donc, s'il ne peut pas faire une chose, il ne peut conférer à un autre une capacité qu'il n'a pas, le droit de faire ce qu'il ne peut pas faire lui-même.

En parlant de l'article 824, M. Chabot dit «En comparant la première partie de cet article avec la disposition de l'article 466, on voit qu'elle ne peut s'appliquer qu'aux partages qui se font entre majeurs, puisqu'elle dit que les experts peuvent être choisis par les parties intéressées, et qu'il est dit, au con.

traire. dans l'article 466, que les experts doivent toujours être nommés par le tribunal lorsqu'il s'agit d'un partage dans lequel un mineur est intéressé(1). »

982. S'il y a plusieurs mineurs qui aient des intérêts opposés dans le partage, on doit leur nommer à chacun un tuteur spécial et particulier, conformément à la disposition de l'article 968 du Code de procédure. Autorisés par la justice, procédant sous la surveillance du ministère public, ils sont dispensés de l'autorisation du conseil de famille. Les tuteurs spéciaux sont hors des attributions de l'institution de la tutelle. Le tuteur spécial est un subrogé-tuteur, un curateur ad hoc établi pour une fonction passagère, et, dans certains cas, une sentinelle éveillée sur la conduite du tuteur. V. la sect. 16 du chap. 13.

7° Lorsqu'il y a lieu à licitation, dans le cas de l'article 839 du Code civil, elle ne peut être faite qu'en justice avec les formalités prescrites pour l'aliénation des biens des mineurs. Les étrangers y sont essentiellement appelés et admis. C. civ., 1687.

80 Les frais de partage en justice, à cause de l'état des incapables, sont supportés par la masse des biens à partager. Ces formalités sont dispendieuses, mais elles sont plus utiles aux majeurs qu'aux mineurs, puisqu'elles les mettent à l'abri de la nullité du partage, en rendant définitif ce qui ne serait que provisoire.

V., sur la Vente des biens des mineurs, le chap. 36.

(1) Un arrêt de la Cour de Douai, du 12 mai 1827, embrasse cette opinion. Jurispr. du 19e siècle, 1827, 2. p. 138.

CHAPITRE XXII.
XXII.

Des Donations et Testamens.

983. En général, la donation est la libéralité qu'une personne fait à une

autre.

Il y a deux sortes de donations; la donation entre-vifs, et la donation testamentaire.

La donation entre-vifs est un acte par lequel le donateur se dessaisit irré. vocablement, à l'instant et pour toujours, de la chose donnée, en faveur du donataire qui l'accepte.

La donation testamentaire, qu'on appelle encore donation à cause de mort, est l'acte par lequel le testateur dispose, pour le temps où il n'existera plus, de tout ou partie de ses biens. Cette donation n'a point de consistance, car le donateur peut la révoquer jusqu'au dernier terme de sa vie.

On distingue les donations selon les causes et les effets.

La donation est simple, ou conditionnelle, ou onéreuse, ou rémunératoire, ou mutuelle.

la

La donation simple est celle par quelle le donateur fait don d'un chose, sans réserves ni charges.

La donation conditionnelle est celle dont l'accomplissement dépend d'un événement, ou de l'exécution d'une ou de plusieurs conditions. Ainsi, je donne à ma petite-fille, par son contrat de mariage, la maison que j'habite, sous la condition que, si au décès de son mari il y a des enfans de cette union, elle ne pourra se remarier qu'après leur établissement par mariage. Une telle donation est une donation conditionnelle.

Tout est de rigueur dans ces sortes

de donations. Par exemple, le testateur donne à Paul mineur sa maison d'habitation; mais sous la condition expresse qu'il se mariera si ce légataire décède sans être marié, le legs devient caduc, encore bien que son décès soit arrivé avant l'âge nubile. Dans de telles dispositions, c'est moins l'impossibilité accidentelle survenue au légataire, que l'intention en vue de laquelle le legs a été fait qu'il faut considérer. Je donne, parce que je veux que telle chose arrive, qua non.

sine

La donation onéreuse est celle qui impose des charges au donataire. Par exemple, je donne à mon fils la maison que j'ai commencé à faire construire, à la charge par lui de la faire achever sur le plan indiqué, et de me payer annuellement une rente viagère de dix mille francs. Cet acte est une véritable donation onéreuse.

La donation rémunératoire est celle qui est faite à titre de récompense de services rendus par le donataire, ou pour l'indemniser de quelques charges par lui supportées d'une manière obligeante, ou pour l'honorer de quelque bienfait. Telle est la donation que fait un ami à son ami pour des soins et des peines donnés à ses affaires, et telle est aussi le donation d'un chef d'établissement à son employé, d'un particulier à son précepteur, d'un maître à son domestique.

La donation mutuelle ou réciproque est celle qui se fait par une affection mutuelle entre deux personnes qui sont réciproquement donateurs et donataires. Dans la nouvelle législation, elle

n'a lieu qu'entre époux et par contrat de mariage. 1091, 1097.

Dans toute disposition entre-vifs ou testamentaire, les conditions impossibles, celles qui sont contraires aux lois ou aux mœurs, sont réputées non écrites.

Toute donation entre-vifs doit être passée devant notaire dans la forme ordinaire des contrats, à peine de nullité. Ainsi serait nulle une donation entre-vifs par acte sous seing privé un tel acte ne pourrait même pas valoir comme testament, lequel ne peut être

fait que par une seule personne. 968. Après cette explication sur la nature et la forme des donations, nous divise rons ce chapitre en huit parties. et successivement nous en parlerons dans cet ordre.

SOMMAIRE.

1. De la capacité que la loi exige pour donner et recevoir par donation entre-vifs ou par testament, et des caractères de l'incapacité, selon l'état et la qualité des

personnes.

2. Des règles de l'acceptation, que le Code prescrit à l'égard des incapables, pour

la validité des donations.

3. De la transcription hypothécaire des donations, et de ses effets.

4. Des personnes qui peuvent faire des dispositions entre-vifs et testamentaires en faveur des enfans à naître. 5. Des donations ou dispositions que les époux mineurs peuvent se faire par contrat de mariage.

6. De la renonciation à une donation. 7. De la révocation des donations entre-vifs, pour cause d'ingratitude.

8. De la révocation des donations entre-vifs, à cause de la survenance d'enfant légitime du donateur, même d'un posthume, ou d'un enfant naturel.

PREMIÈRE PARTIE.

De la capacité que la loi exige pour don ner et recevoir donation entrepar vifs ou par testament, et des caractères de l'incapacité selon l'état et les qualités des personnes.

984. L'incapacité relative aux dona

tions et testamens dérive plutôt de l'état civil des personnes que de leurs qualités civiques, choses bien différentes dans leurs effets.

Le Code a consacré le principe général que toutes personnes sont capables de donner et recevoir, si elles n'en sont pas déclarées incapables par la loi. Ainsi, malade ou en santé, loin ou près de la Parque menaçante, si l'on est capable de disposer, si l'on est sain d'esprit, la donation. entre-vifs, ou par testament, sera respectée au gré du donateur. 901.

Pour donner et recevoir par acte entre-vifs, il faut que la capacité que la loi exige soit parfaite au moment de la donation et de l'acceptation, alors même que cette acceptation serait faite par un acte postérieur à la donation.

:

Il en est de même de la disposition testamentaire il faut que le donateur ait la capacité requise par la loi au moment de la disposition.

Ainsi serait nul le testament d'une personne décédée en majorité, si ce testament avait été fait en minorité avant seize ans révolus. Dans ce cas, la majorité et la mort ne ratifient pas ce qui est nul dans son principe. V. les arrêts cités à la fin du § 2 de la sect. 4 de cette re part.

La Cour de Bordeaux a jugé qu'une donation faite à un incapable était nulle, bien qu'ensuite il fût devenu habile à recevoir. Sur le pourvoi par le sieur Laye, la Cour de cassation a décidé « qu'en jugeant qu'un individu qui

reçoit à titre de donation entre-vifs, » pour être capable de recevoir à ce » titre, doit avoir la capacité au mo» ment de la donation, et qu'il ne peut » l'acquérir par la suite, cette Cour » s'est conformée aux principes de la » matière ».

Mais il n'y a pas de règle sans exception. Par exemple, pour être capable de recevoir, il suffit d'être né viable pour que la donation produise son effet, On ne peut donc se former une idée exacte de la capacité qu'on doit avoir pour donner et recevoir, qu'en dévelop

pant les principes dans l'ordre des personnes que la loi déclare incapables de recevoir et donner. Ainsi, pour traiter avec une certaine méthode ce que nous avons à dire sur cette matière, nous divi serons cette première partie en treize sections.

SOMMAIRE.

1. De celui qui n'est pas sain d'esprit. 2. De l'interdit pour imbécillité, démence ou fureur.

3. De celui qui est pourvu d'un conseil judiciaire.

4. De l'incapacité qui résulte de la minorité avant et après seize ans, et du mineur devenu majeur, à l'égard de son tuteur datif, et de ses ascendans.

5. Des sourds-muets.

6. De la femme mariée mineure.

7. De l'incapacité qui résulte de la mort civile.

8. De celui qui est conçu et né viable.

9. Des enfans à naître.

10. Des enfans naturels.

11. Des enfans adultérins et des enfans incestueux.

12. De l'ingrat.

13. Des personnes interposées, sous le rapport de leur capacité relative.

PARTIE I, SECTION I.

De celui qui n'est pas sain d'esprit.

985. Pour faire une donation entrevifs ou un testament, dit l'article 901, il faut être sain d'esprit.

une telle disposition devrait être annulée, comme ayant été faite sans volonté.

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» I

C'est dans ce sens qu'un arrêt de la Cour de cassation a jugé « que l'arti»cle 504 du Code civil n'est point applicable aux donations entre-vifs ni » aux testamens, qui sont spécialement régis par l'article 901 ; qu'il résulte » de la généralité d'expression de cet » article, que nonobstant les articles 1341, 1347, 1352 et 1353, il est per» mis aux parties d'articuler, et aux » tribunaux de les admettre à prouver » tous les faits qui sont de nature à » établir que l'auteur d'une donation >> entre-vifs ou testamentaire n'était pas » sain d'esprit à l'époque de la confec» tion de ces actes, sans distinguer si ces » faits ont ou n'ont pas constitué un » état permanent de démence. » 22 novembre 1810, Dalloz, t. 9. p. 240; Merlin, Rép. t. 33, p. 233 et suiv. (édit. Tarlier); Sirey, 1811, p. 70 et 73; autre arrêt de la même Cour dans le même sens, du 26 mars 1822, Dalloz, t. 16, p. 249; Sirey, t. 22, p. 349.

La Cour de Rouen, par son arrêt du 17 mars 1813, a jugé que l'enfant naturel ayant droit à la succession de ses père et mère, peut, comme l'héritier légitime, quereller les donations entre-vifs faites par sa mère décédée en état d'imbécillité. V. Interdiction, chap. 19, sect. 8, p. 718 et suiv.

PARTIE I, SECTION II.

mence ou fureur.

Cette disposition est indépendante de De l'Interdiction pour imbécillité, décelle de l'article 504, qui est relative aux contrats onéreux, et non aux donations entre-vifs et testamentaires.

Ainsi, soit que le disposant fût dans les liens de l'interdiction, soit qu'on n'eût fait avant son décès aucune provocation d'interdiction, si l'on établissait la preuve positive, qu'au moment de sa disposition il était privé de ses facultés intellectuelles, qu'il était dans un état de délire, ou dans un état d'ivresse qui allât jusqu'à la privation de la raison; enfin, si dans ce moment il ne jouissait point de la liberté de son esprit,

986. Ceux qui sont dans un état habituel d'imbécillité, de démence ou de fureur, alors même qu'ils présentent des intervalles lucides, sont incapables de disposer par donation entre-vifs ou testamentaire; car, dit l'article 901 pour faire une donation entre-vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit.

Mais si le testament olographe d'uu interdit, fait antérieurement à son interdiction et à sa démence, est valable, son incapacité n'a point d'effet rétroac

tif au-delà de l'époque où elle a commencé : : ce testament fait foi de sa date jusqu'à preuve contraire, non par inscription de faux, comme pour les actes authentiques, mais par la preuve ordinaire. C'est ce qu'a jugé l'arrêt notable de la cour de cassation de Bruxelles, du 15 avril 1825, Sirey, t. 25, p. 419, dont les principes sont fondés sur la jurisprudence de plusieurs Cours royales.

Trois arrêts de la Cour de cassation, 22 novembre 1810, déjà cité dans la précédente section; 17 mars 1813, Dalloz, t. 9, p. 245; Sirey, p. 393; 22 novembre 1827; Jurispr. du 19e siècle, 1828, 1. p. 287, ont décidé que l'article 504 du Code civil n'est pas applicable aux donations et testamens; qu'on peut prouver qu'un donateur n'était pas sain d'esprit au moment où il a fait son testament, encore que ses parens n'aient point provoqué son interdiction.

Ainsi, comme nous l'avons déjà dit dans la première section de la première partie de ce chapitre, on juge de la validité de la donation entre-vifs ou testamentaire par l'état moral du disposant au moment de sa disposition.

L'interdit pour aliénation mentale ne peut faire de donation entre -vifs ou testamentaire; mais il est susceptible de recevoir, et lorsque la donation est acceptée par son tuteur légalement autorisé par le conseil de famille, elle a, à l'égard de l'interdit, le même effet que pour la personne qui jouit de toutes ses facultés intellectuelles. 463 et 509.

V. Sur les Donations et Testamens, en matière d'interdiction mentale, ce qu'on a dit à la fin de la section 8 du chap. 19.

PARTIE I, SECTION III.

De celui qui est pourvu d'un conseil judiciaire.

987. En matière d'incapacité mentale, on distingue celui qui est dans un état d'interdiction absolue de ses droits civils, de celui qui est seulement dans les liens d'un conseil judiciaire; le pre

mier ne peut faire ni donation entrevifs ni testament, même avec l'autorisation de son tuteur; l'autre peut faire une donation entre-vifs avec l'assistance de son conseil de la même manière qu'il peut aliéner (499 et 513); et, sans son conseil, il peut faire un testament; car, dans cet état, il n'est pas privé de l'exercice du droit de tester. La présence d'un conseil dans un testament est incompatible avec la volonté de tester. Il n'y a point de disposition libre, lorsqu'on peut supposer qu'elle a été faite par suggestion, ou sous l'influence d'un étranger.

Mais lorsqu'il s'agit de reconnaître si l'individu mis sous la protection d'un conseil judiciaire était sain d'esprit, au moment où il a fait des donations entre-vifs ou testamentaires, antérieurement à l'institution d'un conseil, on suit les mêmes règles que dans l'interdiction absolue; on a même décidé que le jugement qui le met sous la protection du conseil judiciaire ne préjuge rien sur la question de savoir si le donateur ou testateur était ou n'était pas sain d'esprit, au moment de la donation ou du testament. Il n'y a pas là chose jugée dans le sens de l'article 1351 du Code civil. Cassation, 19 décembre 1814; Dalloz, t. 9, 255; Sirey, t. 15, p. 105. V. la sect. 5 de la 2o part. de ce chap.; V. aussi la sect. 9 du chapi

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