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25 ,D53 1873 V. 14

Les lecteurs sont prévenus que tous les mots espacés dans le texte courant (par exemple Transsubstantiation, Immortalité, César) sont l'objet d'articles spéciaux dans le Dictionnaire, et constituent dès lors autant de renvois à consulter.

1070583-170 DICTIONNAIRE

DE

LA CONVERSATION

ET DE LA LECTURE.

ORIENTALES (Langues et Littératures). On comprend aujourd'hui sous cette dénomination commune les langues et les littératures de tous les peuples de l'Asie aussi bien que de l'Afrique et de l'Europe musulmanes. Tant que leur étude scientifique se borna en Europe aux langues et aux littératures des peuples d'origine sémitique (Juifs, Syriens, Chaldéens Arabes) et fit entrer tout au plus dans son domaine les Arméniens et les Coptes chrétiens, l'expression de littérature orientale fut restreinte à la littérature de ces diverses nations. Mais d'un côté l'Europe, par son commerce et son mouvement de colonisation, en est arrivée de nos jours à avoir des relations de plus en plus actives avec l'Orient et à se trouver en contact avec presque tous les peuples de l'Asie et de l'Afrique, et de l'autre la tendance de notre époque a de plus en plus été de suivre l'histoire du développement de l'esprit humain et de rechecher dans son berceau, situé en Asie, le germe de notre existence moderne. C'est pourquoi non-seulement les langues et les littératures de l'Orient chrétien, juif et musulman, ont été étudiées avec plus de soin et d'exactitude, mais encore les œuvres intellectuelles des peuples du plateau de l'Asie, des populations participant à la civilisation indo-chinoise, sont entrées dans le domaine des études scientifiques et des connaissances pratiques. Il serait impossible à un seul individu d'embrasser dans tous ses détails un si vaste ensemble de notions; aussi, parmi les orientalistes, les uns se sont-ils spécialement consacrés à l'étude de l'Asie orientale, de la langue et de la littérature des peuples participant à la civilisation chinoise (on les appelle sinologues), d'autres à celle du monde indien ( on les appelle indianistes), d'autres, enfin, à l'étude scientifique et pratique des langues de l'Orient musulman (arabe, persan, turc et, suivant l'occasion et le besoin, malais, hindoustani, arménien et berbère); alors que d'autres encore se livraient spécialement à l'étude de la Bible, notamment à l'archéologie juive, et y rattachaient l'étude de langues anciennes déjà tout à fait ou à peu près éteintes de l'Asie en deçà du Gange (phénicien, syriaque, chaldéen, éthiopien, antiquités assyriennes et babyloniennes, etc.). Un plus petit nombre d'investigateurs (les égyptologues) se sont consacrés à jeter quelque lumière sur les choses de l'antique Égypte.

L'attention des savants de l'Europe se porta dès le moyen åge vers les langues orientales, en particulier vers l'arabe, et cela par deux motifs principaux. Le premier fut l'esprit de prosélytisme, qui, au moyen de la connaissance de l'arabe, voulait réfuter les mahométans et les convertir au christianisme. Dès le milieu du quinzième siècle le pape Innocent IV ordonna de fonder à Paris des chaires pour l'enseiguement de la langue arabe; les papes Clément IV et HonoDICT. DE LA CONVERS, - T. XIV.

rius IV s'intéressèrent aussi à cette institution. Sous le pontificat de Clément V le synode réuni à Vienne décida que des professeurs d'arabe et de chaldéen seraient établis à Rome. à Paris, à Oxford, à Bologne et à Salamanque, afin de pouvoir mieux convertir les mahométans et les juifs. Le pape Jean XXII notamment recommanda à l'évêque de Paris de veiller à ce que ces langues fussent enseignées à la Sorbonne. Le second motif qui porta à s'occuper de littérature orientale fut le zèle scientifique qui voulut rendre accessibles à l'Occident les ouvrages des Arabes relatifs à la médecine, à l'astronomie et à la philosophie, ainsi que les ouvrages d'Aristote traduits en arabe. Dès la dernière moitié du douzième siècle il parut des traductions latines d'ouvrages arabes surtout, dont le nombre alla toujours en augmentant pendant le moyen âge, et qu'on imprima à partir du quinzième siècle. La réformation encouragea l'étude des langues orientales en s'appliquant à la critique biblique. Afin de mieux étudier le texte hébreu, ainsi que les anciennes traductions du Nouveau et de l'Ancien Testan.ent en langues orientales, protestants et catholiques rivalisèrent de zèle pour apprendre la langue rabbinique, l'arabe, le syriaque, le chaldéen le samaritain et l'éthiopien. Les catholiques songèrent aussi à créer des missions en Orient. En 1627 le pape Urbain VIII fonda à Rome, pour les missions catholiques, le Collegium pro Fide propaganda, où l'on enseigna les langues orientales (voyez PROPAGANDE ). Les missionnaires jésuites de la Chine et du Japon firent en même temps connaître à l'Europe les langues de l'Asie orientale et leur littérature. A partir du dix-huitième siècle l'étude des langues orientales reçut une direction plus scientifique. On ne se borna plus à les étudier dans des buts bibliques ou de mission, mais pour connaître la littérature qu'elles possèdent et par là l'histoire et la civilisation des peuples de l'est. Dans les Indes orientales, l'Anglais W. Jones appela, de 1780 à 1790, l'attention sur la richesse de la littérature hindoue; et il fonda en 1780 à Calcutta la Société Asiatique, qui a tant contribué aux progrès des études orientales. A Paris Sylvestre de Sacy, à partir de 1790, donna une vive impulsion à l'étude de la langue et des écrivains arabes. Tandis que jusque alors les études orientales étaient restées dans un état d'infériorité réelle à l'égard des autres sciences, on les vit vers la fin du siècle dernier prendre tout à coup le plus brillant essor, se créer dans les diverses sociétés asiatiques des organes influents; et depuis une trentaine d'années elles constituent un élément essentiel de la civilisation moderne.

Les principales parties dont se compose la littérature orientale sont:

ORIENTALES

1o La littérature chinoise (voyez CHINE);

ORIFLAMME

13° La littérature samaritaine, brancne de la littérature 2o La littérature japonaise, qui se rattache complé-juive, peu riche, ne consistant guère qu'en une traduction du Pentateuque, en préceptes liturgiques pour le culte jutement à la littérature chinoise, qui lutte de richesses et daïco-samaritain et en hymnes religieux; d'étendue avec elle, mais qui est encore peu connue. En Europe, Siebold et Pfizmeier sont ceux qui s'en sont le plus occupés;

3o La littérature anamitique, comprenant les ouvrages des peuples du Tonkin, de la Cochinchine, des Siamois et des Birmans. Les livres théologiques relatifs aux dogmes et aux traditions de la religion de Bouddha en constituent la plus grande partie. Viennent ensuite de nombreux ouvrages relatifs à l'histoire, à la botanique et à d'autres sciences naturelles, de même que des romans et des pièces de théâtre.

4o La littérature mongole, qui naquit au moyen âge, lorsque les Mongols réunis en corps de nation par Djingis. Khan adoptèrent la religion de Bouddha et l'alphabet mongol actuel. Une foule d'ouvrages rélatifs aux dogmes ́et aux traditions de la religion de Bouddha furent, à partir de cette époque, traduits du thibétain en mongol. Il existe aussi en langue mongole des ouvrages historiques, des poésies épiques, des romans et des contes, les uns originaux, les tres imités de modèles hindous. On retrouve le même caractère dans la littérature, moins importante, des Kalmoucks;

au

5o La littérature mandchoue, qui naquit seulement à l'époque où les Mandchoux firent pour la deuxième fois la conquête de la Chine (1644). La dynastie mandchoue qui depuis lors s'est maintenue sur le trône de la Chine dota peu à peu son peuple de la civilisation chinoise. On traduisit donc en langue mandchoue les ouvrages de l'ancienne littérature chinoise, notamment les livres sacrés et les ouvrages historiques; et on composa également dans cette langue de nouveaux ouvrages, tels que des grammaires, des dictionnaires. La littérature mandchoue se recommande donc à l'Europe comme pouvant lui faciliter l'intelligence des anciens ouvrages chinois, la langue mandchoue n'étant pas difficile (voyez MANDCHOU);

6o La literature tatare, comprenant: a, la littérature muigouriques qui à partir du huitième siècle se répandit parmi les Quigoures occidentaux, habitant l'Asie centrale; b, la littérature du Djaggataï, appartenant à la horde tatare du même nom en Boukharie, laquelle le porte depuis le règne de Djaggataï, l'un des fils de Djinghiz-Khan; c, la littérature du Kaptchak, écrite dans le dialecte des Tatares fixés à Kasan et à Astrakhan; d, la littérature des Osmanlis, que nous nommons plus particulièrement littérature turque;

7° La littérature thibétaine, née lorsque le Thibet adopta, an septième siècle, la religion de Bouddha. Elle comprend une foule d'ouvrages théologiques, ascétiques et cosmogoniques des bouddhistes, traduits en grande partie du sanskrit, plus des ouvrages d'histoire, des romans, des dictionnaires et des grammaires;

8° La littérature malaise, à savoir: a, la littérature malaise proprement dite, née parmi les tribus malaises qui habitent la presqu'ile de Malahka et l'île de Sumatra, consistant en imitations de traditions soit musulmanes, soit indigènes, en contes et en poëmes; et b, la littérature javanaise, divisée en littérature ancienne et en littérature moderne: la première écrite en langue kawi, dialecte sanskrit, qui s'y est conservé de l'inde; la seconde, en langue javanaise, et consistant surtout en poëmes et en contes;

9° La littérature hindoue (voyez INDE). De cette latérature hindoue naquirent les littératures pali et prakrit, de même que les riches littératures existant aujourd'hui dans les langues modernes de l'Inde et dans leurs dialectes; 10° La littérature persane, divisée en ancienne littérature persane (voyez ZEND et PEHLEWI) et en littérature persane moderne, et à laquelle se rattache la très-pauvre littérature des Afghans;

11o La littérature chaldéenne (voyez CHALDÉENS);
12° La littérature hébraïque et la littérature posté-
rieure des Juifs;

14° La littérature phénicienne, consistant uniquement
en inscriptions sur des tombeaux et sur des médailles;
15° La littérature syriaque;

16° L'ancienne littérature éthiopienne ( voyez ÉTHIOPIE);
17° La littérature arabe;
18° La littérature copte;

19o La littérature arménienne;

20° La littérature géorgienne ou grusienne, née aux quatrième et cinquième siècles, lorsque la Géorgie se fut convertic au christianisme, encore peu connue, et qui a été récemment l'objet d'intelligents travaux de la part de M. Brosset. Elle contient des ouvrages de théologie, d'histoire, de géographie, de philologie, de législation et de poësie. M. Brosset nous a donné quelques échantillons du poëme épique Tariel, dont le caractère rappelle la poësie épique des Persans. Il ne saurait être question de littérature chez les autres peuples de l'Asie; car, bien qu'il existe des livres dans presque toutes les langues de l'Orient, ils manquent d'originalité dans la pensée, de sensibilité et d'expression. ORIENTER (S'). Voyez EST.

ORIFLAMME, célèbre bannière française, que la crédulité de nos pères comparait à un palladium, dont la vue mettait en fuile l'ennemi; elle n'en a pas moins été perdue maintes fois à la guerre, et renouvelée sous des formes dissemblables; de là vient que les auteurs qui la dépeignent à des époques distantes les unes des autres en font une description différente. Cependant, la superstition s'était persuadé que quand l'ennemi mettait en pièces cet insigne, comme le firent les Flamands, saint Denys le réintégrait dans son trésor. Ce conte était renouvelé des Grecs, c'est-à-dire du labarum. Le nom de l'oriflamme n'a pas moins varié; on l'a orthographié de six manières avant de l'écrire comme on le fait aujourd'hui. Avant la création de la langue française, on disait auriflamma. Ce mot barbare venait du grec pλzμúλov (drapeau ). On a supposé que la hampe ou le glaive de l'oriflamme était originairement recouvert en cuivre doré, de là le mot or. La draperie qui y était appendue était de couleur de feu, parce que le rouge était l'emblème des inartyrs et de saint Denys; de la le mot flamme. Telle est l'explication que donnent à tort ou à raison les étymologistes; mais telle n'est pas l'opinion de Court de Gébelin, qui prétend originaire du celtique la seconde syllabe du mot, et qui la suppose analogue à fanon ou fanion.

L'oriflamme était dans le principe la bannière de l'abbaye de Saint-Denys; sa draperie était d'une étoffe de soie, qu'on appelait cedal ou cendal. Elle avait été, dit-on, donnée en présent en 630 à ce monastère, par le roi Dagobert. Quand l'abbé de Saint-Denys, qui était en même temps baron du Vexin, faisait campagne à la tête de ses vassaux, il y por tait l'oriflamme, comme les curés des autres provinces de France faisaient marcher en temps de guerre la bannière paroissiale à la tête de l'infanterie communale. L'Encyclopé die de 1751 a supposé que le couvent de Saint-Denys avait bannière de procession (vexillum beati Dyonisii) et bannière de campagne; mais rien n'appuie cette supposition. L'oriflammo ou les oriflammes n'eurent pas d'autre destination pendant plus de quatre siècles. Le roi de France devint alors seigneur du Vexin, et en vertu d'un contrat formel il s'engagea envers les moines, dont la couronne devint vassale, à porter aux guerres nationales l'étendard de SaintDenys. Cette vassalité du monarque, relevant d'une compagnie de moines, dont il devenait le capitaine, le gonfalonier, ou, comme on disait alors, l'avoué, était une des risibles bizarreries de la féodalité. En vertu de cette convention, Louis le Gros vint, en 1075, lever sur l'autel de SaintDenys l'oriflamme. L'histoire mentionne fréquemment celle solennelle cérémonie du drapeau emporté, jamais du drapeau rapporté. Au temps de Charles V, qui leva ainsi l'ori

ORIFLAMME flamme, la draperie se détachait de sa hampe ou de son båton, puisque Daniel rapporte que le porte-orislamme se l'attachait au con, et la gardait en manière d'écharpe jusqu'à ce qu'il eût rallie l'armée; il embâtonnait alors cette écharpe.

L'oriflamme a été aussi pendant trois siècles la bannière nationale et l'insigne royal qui avait remplacé la chape de saint Martin. Louis le Jeune perdit l'orillamme dans la croisade de 1147; mais Philippe-Auguste ne vint pas moins la rechercher à Saint-Denys pour la porter en Terre Sainte, en 1191; il la fit également flotter à Bouvines, en 1214; elle y était sous la garde de la milice communale. Il n'en est plus question depuis la défaite d'Azincourt; on croit que les Anglais s'en rendirent maîtres au temps de Charles VI, quand ils possédaient Paris et Saint-Denys; cependant. quelques relations donnent à entendre qu'après l'expulsion des Anglais, Charles VII leva une nouvelle oriflamme. Ce monarque, trente-buit ans après la mort de son père, si f'on en croit un ouvrage de 1686, intitulé: De l'Origine et des Progrès de la Monarchie française, faisait porter une oriflamme à la guerre; une chronique manuscrite affirme que dans l'église de Sainte-Catherine-du-Val-des-Écoliers, le cardinal d'Albi remit aux mains de Louis XI une oriflamme qu'il se disposait à déployer contre les Bourguignons; mais nous supposons qu'il ne faut voir dans ces récits qu'une cérémonie de consécration d'une bannière royale que par habitude on continuait à appeler oriflamme, mais qui n'avait plus rien de commun avec la baronnie du Vexin et les saints autels du bienheureux Denys. M. de Barante, se contredisant sans s'en apercevoir, atteste que depuis 1437 il n'est plus question d'oriflamme, et affirme dans un autre passage que c'est en 1465 que « pour la dernère fois on ait parlé d'oriflanme». Félibien, au contraire, rapporte qu'en 1534 une auriflambe se voyoit encore au trésor de l'abbaye, mais à demi rongée des mites ».

En 1790 la fédération du 14 Juillet arbora une oriflamme, qui était le chef de file des bannières des quatre-vingts-trois départements; elle n'avait du reste rien de commun avec l'ancienne, ni par la forme, ni par la couleur, ni par le lieu de la consécration, puisque c'est au Champ-de-Mars qu'elle fut bénie, de la main de M. de Talleyrand, évêque d'Autun. Elle se composait d'une draperie bleue semée de fleurs de lis d'or. Elle était à deux fanons, comme les anciens étendards d'église. On vit renaître en l'an iv et en l'an v des oriflammes; mais celles-ci se passèrent de consécration. Le Directoire en adressa une à chaque armée de la république. Elles furent réintégrées en cérémonie au Luxembourg, après le traité de Campo-Formio. Gal BARDIN

ORIGAN (de opos, montagne, et yávos, joie, parce que cette plante se plaît sur les montagnes). Genre de dicotylédones monopétales, de la famille des labiées, et trèsvoisin du thym, comprenant des plantes herbacées à feuilles et à fleurs ramassées en épis serrés. On en connaît une vingtaine d'espèces, appartenant presque toutes à l'ancien continent. Nous citerons l'origan commun, dont la tige atteint 0,66 de hauteur, et dont les fleurs, disposées en épis oblongs ou cylindriques, forment par leur agglomération des corymbes ou panicules très-denses au sommet de la plante. La couleur pourprée des bractées et du double périanthe donne à cette plante un aspect agréable. L'origan est très-commun dans nos bois, le long des haies et des chemins, surtout dans les parties montueuses de l'Europe tempérée. Froissée entre les doigts, cette plante répand une odeur agréable, qui a fait préconiser ses feuilles comme stomachiques, sudorifiques, emménagogues, céphaliqués et expectorantes; préparées en infusion à l'instar du thé, on les a employées contre les suppressions des menstrues, les flatuosités, les maux de tête, les étourdissements et les affections catarrhales du thorax. On s'en sert en bains ou en fumigations contre la paralysie et les rhumatismes chroniques, En Suède, on ajoute, dit-on, une infusion d'origan à la bière pour la rendre plus forte et plus enivrante.

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ORIGENE

3 L'origan fausse marjolaine, vulgairement nommé marjolaine, est une plante qui, comme la précédente, a été fort usitée en médecine. D'une odeur, aromatique agréable, tonique et excitante, agissant principalement sur le système nerveux, on la croyait très-puissante contre les affections du cerveau, et on l'employait contre la paralysie, l'apoplexie, l'épilepsie et les vertiges. On la donnait encore dans les ma ladies atoniques de la poitrine et de l'utérus, telles que catarrhes chroniques, chlorose, aménorrhée. Elle est peu usitée aujourd'hui. La patrie originaire, de la marjolaine n'est pas bien déterminée; on croit qu'elle vient des contrées littorales du nord de l'Afrique.

L'origan dictame, vulgairement nommé dictame de Crèle, est une plante originaire des montagnes de l'ile de Crète, cultivée depuis longtemps dans les jardins botaniques, et dans laquelle des botanistes modernes ont cru reconnaitre le dictame des poëtes anciens, qui, suivant ces derniers, avait la propriété merveilleuse de faire fermer à l'instant les blessures les plus dangereuses, L. LOUVET.

ORIGÈNE, le plus savant des écrivains de l'Église primitivé, surnommé Adamantinus, comine qui dirait de diamant, suivant les uns à cause de sa patience dans ses recherches et dans ses études, et suivant d'autres à cause de la force de ses raisonnements et de sa pénétration, ou encore à cause de sa constance à résister aux erreurs, naquit à Alexan drie', l'an 185, sous le règne de l'empereur Commode. Son père s'appelait Léonidas. C'était un homme pieux et éclairé; il s'occupa lui-même de l'éducation de son fils, et lui fit commencer de bonne heure des études sérieuses, l'appli quant surtout à l'interprétation de l'Ecriture Sainte. Le jeune Origène en acquit en peu de temps une connaissance qui dépassait tellement la capacité de son âge, que saint Jérôme disait de lui que dès son enfance il avait été grand homme. Plus tard il étudia sous le fameux saint Clément d'Alexandrie, et sous le néo-platonicien Ammonius Saccas. Il avait dix-sept ans quand eut lieu (202) la persécution de l'empe reur Sévère contre les chrétiens. Léonidas fut jeté en prison. Origène, loin d'être effrayé par le sort de son père, se sentit saisi d'un tel enthousiasme pour les confesseurs de JésusChrist qu'il brûla de partager leur martyre. I encouragea son père à souffrir le martyre, plutôt que de renoncer à la foi de Jésus-Christ, et à ne se point mettre en peine de ce qui pourrait advenir de sa femme et de son fils, Cependan la mort de son père lui enleva tous ses biens. Il se trouva réduit pour vivre et faire subsister sa mère et sa sœur à en seigner la grammaire et les belles-lettres. Saint Clément ayant été obligé de quitter vers ce temps Alexandrie, on chargea Origène, malgré sa grande jeunesse, d'exposer à sa place la doctrine chrétienne au nombreux auditoire qui v✈ nait entendre saint Clément.

Il n'avait encore que dix-huit ans, et il expliquait aussi les lettres saintes aux femmes et aux filles : la calomnie pouvait s'exercer sur lui et le noircir; pour y échapper, il prit un parti extrême, dont il serait permis de douter sans les importantes autorités qui l'attestent: il se mutila lui même, renonçant à la virilité pour continuer sans distrac tion d'aucune espèce l'enseignement qu'il avait commencé. Cette résolution et cette vigueur de courage, il les retint toute sa vie, et les porta dans toutes ses actions et dans fous ses travaux. Sans se soucier des jugements du public, et fort de l'approbation de l'évêque d'Alexandrie, de Démé trius, il poursuivit son œuvre. Il avait depuis longtemps conçu le projet d'un grand ouvrage; il le commença alors et bientôt l'acheva, grâce à sa persévérance et à la puis sance de travail qu'il s'était donnée par des exercices pénibles et dont on se ferait à peine l'idée. Il fit donc les Tétraples. C'était une Bible où se trouvaient d'abord le texte hébreu, puis les différentes versions qui en avaient été faites, par les Septante, par Aquila, par Symmachus et par Theodotion, lesquelles étaient distinguées en autant de colonnes. Il y ajouta depuis deux autres versions grecques, et l'ouvrage parut avec cette addition, sous le nom d'll exa

ORIGÈNE ples. Ces immenses travaux accrurent la réputation d'Origène, et on venait à Alexandrie dans le seul but de voir l'homme célèbre qui avait osé entreprendre d'élever à la religion chrétienne le plus grand monument littéraire qu'on Jui eût encore consacré.

Mais la tranquillité dont Origène avait joui jusque alors allait être troublée pour jamais. Les traverses et les vicissitudes de sa vie commencèrent à la guerre insensée que l'empereur Antonin Caracalla fit aux habitants d'Alexandrie. Obligé de quitter sa ville', Origène alla chercher un refuge en Palestine. Il y reçut des évêques de la province la charge d'expliquer publiquement l'Écriture Sainte dans l'église. Rappelé dans Alexandrie par l'évêque Démétrius, que ses succès rendaient jaloux, puis forcé d'en sortir derechef, errant de province en province, il s'arrêta encore en Palestine, où il fut ordonné prêtre. Cette ordination parut irrégulière à quelques-uns, et son évêque Démétrius prétendit que seul il aurait eu le droit de la faire. Toutefois, Origène, revenu dans sa ville natale, y mit au jour ses cinq livres de commentaires sur l'Évangile de saint Jean, huit livres sur la Genèse, des commentaires sur les vingt-cinq premiers psaumes et sur les Lamentations de Jérémie, ses livres des Principes et ses Stromates. Le succès qu'obtinrent ces écrits ne fit qu'envenimer la haine de Démétrius contre Origène. Il fut inquiété et contraint encore une fois de s'exiler et d'aller chercher un asile dans une terre étrangère. Il choisit Césarée pour sa retraite. La jalousie de Démétrius l'y poursuivit encore. A l'instigation de cet évêque, un concile déposa et même excommunia Origène. Cette sentence fut approuvée à Rome et par la plupart des autres évêques, à l'exception de ceux de la Palestine, de l'Arabie, de la Phénicie et de l'Achaïe, qui demeurent fidèles aux doctrines d'Origène.

Cependant celui-ci expliquait au peuple de Césarée l'Écriture, et le nombre de ses auditeurs et de ses admirateurs. augmentait de jour en jour. Un nouvel édit fut alors publié contre les chrétiens, sous l'empereur Maximin. La persécution fut sanglante. Origène se tint caché pendant deux années en Cappadoce. Quand, en l'an 237, l'empereur Gordien rendit la paix à l'Église, Origène fit un voyage à Athènes, puis alla en Arabie, appelé par les évêques de cette contrée pour réfuter l'évêque Berylle de Botha, qui niait encore que la nature divine de Jésus-Christ eût existé avant son incarnation. Origène déploya tant d'éloquence, que Berylle se rétracta et le remercia de l'avoir remis sur la voie de la vérité. Quoique âgé de plus de soixante ans, il travaillait avec une ardeur infatigable. Ce fut alors qu'il écrivit sa réfutation du philosophe Celse, le plus estimé de ses écrits, et en même temps l'apologie du christianisme la plus complète et la mieux raisonnée que ncus offre l'antiquité.

Chargé de fers et jeté dans un cachot, lors d'une nouvelle persécution ordonnée par l'empereur Dèce contre les chrétiens, il souffrit tous les tourments qu'on imaginait alors contre les sectateurs de la foi nouvelle. Sorti de prison, il ne profita de sa liberté que pour parler et écrire en faveur de sa foi et pour la défense et la gloire des martyrs. Enfin, après des travaux inouïs, mourut à Tyr, au commencement du règne de l'empereur Gallus (254), dans la soixante-sixième année de son âge, cet homme rare par ses talents et plus encore par ses vertus.

Peu d'hommes ont été plus admirés et honorés, et en même temps plus attaqués et persécutés qu'Origène, de son ▼ivant comme après sa mort: on l'accuse notamment d'avoir défiguré les vérités du christianisme par des idées néoplatoa iciennes. Sans aucun doute, dans son livre Des Principes, dressé surtout aux hérétiques, et que nous ne possédons plus que par la traduction de Rufin, il a exposé un système fondé sur la philosophie de Platon; mais il ne présente ses idées que comme une possibilité. D'ailleurs, comme il le dit Ini-même, les hérétiques avaient beaucoup falsifié ses ouvrages. Ils étaient, assure-t-on, au nombre de 6,000; mais

s'en faut que tous soient parvenus jusqu'à nous. Outre

-

ORIGINAL

ceux que nous avons déjà mentionnés, on a encore de lui
une Exhortation à souffrir le martyre, des Philosophismena,
des commentaires, des homélies et des scolies sur l'Écri
ture Sainte, que le premier peut-être il entreprit d'interpré
ter. On en a beaucoup de lui, mais la plupart ne sont que
des traductions libres. Origène rendit aussi plus générale
l'interprétation figurée ou allégorique de l'Écriture en usage
parmi les Juifs, et il en rejeta le sens littéral, dans lequel i
ne voyait que le corps de l'interprétation figurée. Son or-
thodoxie a donné lieu aux controverses les plus animées. An
quatrième siècle, les ariens invoquaient son autorité pour
défendre leurs doctrines. Parmi ses défenseurs et ses adver-
saires, on trouve les plus savants et les plus célèbres Pères
de l'Église, saint Jérôme entre autres, qui se déclara contre
lui. La doctrine d'Origène n'est donc point nettement con-
nue. Voici néanmoins ce qu'on en sait de plus clair : Ori-
gène, profondément versé dans la connaissance de la doc-
trine de Platon et de celle des pythagoriciens, n'était pas
étranger à la philosophie stoïcienne. Il distinguait trois
sortes de sagesses: la sagesse profane, qui comprend les
sciences et les arts; la sagesse des princes de ce monde,
c'est-à-dire la philosophie occulte et l'astrologie des Chal-
déens; enfin, la sagesse qui a sa source dans la révélation
et l'Evangile. Il croyait à la préexistence des âmes dans une
région supérieure; de là, selon lui, elles venaient animer le
corps matériel, avec le pouvoir de se perfectionner par la
connaissance de Dieu et l'instruction des bons génies, de
se purifier de leurs erreurs, de s'élever à la rassemblance
avec Dieu, et enfin à la félicité suprême par la communica-
tion intime et l'union avec l'auteur de toutes choses. Telle est
pour le fond la doctrine d'Origène. Ses ouvrages ont été
plusieurs fois imprimés. Une des meilleures éditions qui en
aient été faites est celle de Delarue, imprimée à Paris.
1733-1759, en 4 vol. in-fol., et repro luite à Wurtzbourg,
en 1785, 15 vol. in-8°; à Berlin, 1831 1848, 25 vol.; et à
Paris, 1856, 7 vol.

ORIGÉNISTES. Deux sectes ont porté ce nom.

La première, qui tirait son nom d'un Origène qu'il ne faut pas confondre avec le savant père de l'Église de ce nom, existait encore sous saint Épiphane; on attribuait à ces origénistes des abominations. Ils condamnaient le mariage, se servaient de livres apocryphies, etc.

La seconde de ces sectes provenait, au contraire, d'Origène, dont elle adoptait les doctrines. Les origénistes trouvèrent dans le principe de nombreux adeptes parmi les moines de Nubie et d'Égypte. Le cinquième concile œcuménique renouvela contre les origénistes les condamnations prononcées contre Origène et sa doctrine par le concile réuni sous Justinien. Aujourd'hui il existe encore des origénistes dans la Russie méridionale; ces derniers débris de la secte d'Origène se font remarquer par le retranchement de la virilité, qu'ils pratiquent à l'exemple du maître.

ORIGINAL ( du latin origo, originis, principe, naissance), mot qui sert à caractériser exclusivement tout ouvrage, toute pièce ou lettre qui n'ont point eu de modèle, et qui par conséquent ne sont point des copies, toute action qui n'est point décalquée sur celle des autres. L'original d'un portrait est la personne qu'il représente. On appelle original, par rapport à une traduction, le texte même de l'ouvrage traduit. L'original d'un acte, d'un contrat, est la minute qui reste en dépôt, et dont on délivre des copies à qui de droit. Il en est de même d'un traité diplomatique dont l'original est conservé dans les archives. On dit d'un tableau, qui n'est point une copie, que c'est un original; on qualifie de même le tableau dont le peintre n'a eu d'autre modèle que la nature et son imagination. On décerne aux auteurs des brevets d'originalité, quand le tour, la forme particulière de leurs écrits ne ressemblent en rien à ceux des autres, quand ils impriment à leurs œuvres un cachet tout particulier, qu'on ne saurait imiter. La plupart de nos grands écrivains sont des écrivains originaux. Qui donc im terait le style de Pascal, de La Bruyère, de Voltaire, da

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