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Léonard étant encore dans le monde, avait une grande charité pour les captifs et les prisonniers ; il travaillait avec un zèle infatigable à leur procurer tous les soulagemens dont ils avaient besoin, et sur-tout à les retirer du vice. Il obtint même la liberté à plusieurs d'entre eux. Il se rendit particulièrement recommandable par la même vertu, lorsque sa sainteté l'eut fait connaître au monde dans le Limousin. L'auteur de sa vie rapporte que quelques prisonniers furent miraculeusement délivrés de leurs chaînes par ses prières, et que le Roi lui accorda, par un privilége spécial, de pouvoir quelquefois les mettre en liberté. Ce fut vers ce temps-là que certains évêques et autres personnes illustres commencèrent à jouir du même privilége (4).

Le Saint ayant comblé la mesure de ses bonnes œuvres, alla en recevoir la récompense dans le ciel, le 6 Novembre, vers l'an 559. L'église dédiée sous son invocation à Noblac, a été long-temps desservie par des chanoines réguliers; elle jouit encore d'un grand nombre de priviléges. Saint Léonard est patron de plusieurs églises de France, où il est honoré avec une dévotion particulière. Son culte n'était pas moins célèbre en Angleterre, avant la prétendue réforme. Dans la liste des fêtes, publiée à Worcester en 1240, on voit que celle de saint Léonard était chômée jusqu'à midi; qu'on y était obligé d'entendre la messe, et que le

(4) Quelques modernes attribuent à saint Léonard le privilége en vertu duquel les évêques d'Orléans délivrent tous les prisonniers, lorsqu'ils font leur entrée solennelle dans cette ville, pour prendre possession de leur siége. L'auteur de la Dissertation sur le privilége des évéques d'Orléans, assure, p. 8, qu'il fut accordé par le Roi Thierri, sur les représentations de saint Léonard; et il cite à ce sujet la vie de ce Saint publiée par Surius, où l'on ne trouve rien de semblable. Il est plus probable qu'on doit attribuer ce privilége à saint Agnan, évêque d'Orléans. Voyez Piganiol, Description de la France, t. X, n. 131.

labourage était le seul travail qui y fût permis (5). On invoque particulièrement ce Saint en faveur des prisonniers et des femmes en travail d'enfant. On lui attribue un grand nombre de miracles (6). On lit son nom dans le martyrologe romain et dans plusieurs autres, spécialement dans ceux de France et d'Angleterre (7).

(5) Spelman, Conc. t. II, p. 358; les canons anglais de Johnson, ad an. 1362, n. 3.

(6) Un des plus éclatans miracles attribués à saint Léonard, est la délivrance de Martel, sire de Bacqueville, au pays de Caux, dans le quatorzième siècle. Il avait été fait prisonnier par les Turcs avec deux autres seigneurs français. La rigueur et la durée de sa captivité commençaient à lui ôter l'espérance de revoir jamais sa patrie. L'esclave qui avait soin de lui, et à qui il avait souvent parlé de l'excellence de la religion chrétienne, l'avertit un jour que le lendemain on devait le condamner à mort. Aussitôt il se mit en prières, et invoqua pendant une partie de la nuit saint Léonard, avec la plus vive confiance, faisant vœu de bâtir une chapelle en son honneur, s'il le délivrait du péril dont il était menacé. Il s'endormit ensuite. A son réveil, il se trouva miraculeusement transporté à l'entrée de la forêt de Bacqueville, ayant encore les fers aux pieds et aux mains. Il s'empressa de témoigner sa reconnaissance à son libérateur, et fit bâtir, sous l'invocation du Saint, une chapelle dans son château

Ce fait est rapporté par un grand nombre d'historiens. Quoique plusieurs circonstances qui y ont été ajoutées, n'aient peut-être pas la même certitude, la tradition des habitans du lieu, leur dévotion singulière pour saint Léonard, et divers monumens qui subsistent encore aujourd'hui, ne permettent pas de douter que le seigneur de Bacqueville n'ait dû sa délivrance à l'intercession du Saint. La procession qui se fait tous les ans le premier Dimanche de Novembre, en est une preuve suffisante.

Cetle note nous a été donnée par M. l'abbé Trochet, originaire de Bacqueville, curé de Somery au diocèse de Rouen.

(7) On peut voir le calendrier qui est à la tête du Ms. in fol. intitulé Scala Mundi, lequel est dans la bibliothèque du collége anglais à Douai. La plus grande partie des reliques de saint Léonard se garde encore dans l'église qui porte son nom à Noblac. Des lettres patentes données par le Roi Charles VII, en 1442, prouvent que ce prince avait une grande dévotion pour notre Saint. Il lui recommanda son royaume, avant d'enT. XVII.

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La solitude a toujours fait les délices des vrais serviteurs de Dieu, parce que la retraite facilite les moyens de con

treprendre la guerre contre les Anglais; et après les victoires qu'il remporta sur eux, il envoya une châsse pour renfermer ses reliques. Cette châsse représentait le château de la Bastille de Paris. Le Roi envoya aussi un petit coffret où il s'était fait représenter à genoux ; le tout était d'argent doré, et travaillé avec beaucoup d'art et de délicatesse. Lorsqu'on eut reçu ces pieux dons de la libéralité de ce prince, on y renferma le chef et quelques ossemens du Saint; on mit le reste dans une autre châsse, aussi d'argent doré. Plusieurs églises ont obtenu quelques portions de ces reliques. On voit deux anciens reliquaires qui contiennent des ossemens de saint Léonard, dans la chapelle de son nom, à Pontà-Raisse, près de Douai; c'est un lieu de dévotion célèbre, où l'on assure qu'il s'est opéré des miracles, dont quelques-uns sont rapportés par Arnold de Raisse, in Gazophilacio Belgic. p. 446, et par Vanlaton dans sa vie du Saint. On croit que les reliques dont il s'agit ici, sont les mêmes que celles qui étaient chez les Cisterciennes de Flines, et que ces religieuses firent transporter à Pont-à-Raisse, pour n'être plus distraites dans leur solitude par le concours des pélerins. Voy. Martène, Voyage lit. t. I, p. 217.

Il y a deux autres Saints du même nom : saint Léonard de Vandruve ou de Corbigny, et saint Léonard de Dunois. Nous avons donné la vie du premier sous le 15 Octobre. Nous ajouterons ici quelques détails sur ses reliques. Elles furent transférées à Tournus, et peu de temps après (vers 881) à l'abbaye de Corbigny. Voyez la chronique de Foulques, moine de Tournus; Juenin, Hist. de Tournus, preuves, p. 20, etc. Les calvinistes les brûlèrent à Corbigny, en 1562, et pillèrent le monastère. On ne sauva qu'une petite partie de ses reliques, qu'on garde dans la collégiale de Varzi, au diocèse d'Auxerre. C'est de là que sont venues celles qui sont présentement à Corbigny. Voyez le Gallia Christ. t. IV, col. 478.

Saint Léonard de Dunois est honoré dans le diocèse de Blois, et nommé sous le 8 Décembre dans l'ancien martyrologe d'Auxerre, qui est du dixième siècle. C'était un solitaire qui vivait dans le Dunois, et qui paraît avoir été à Micy, dans le même temps que saint Léonard du Limousin; du moins donne-t-on deux Saints du nom de Léonard pour disciples à saint Maximin ou saint Mesmin, et il est fait mention de l'un et de l'autre dans d'anciens vers latins publiés par Mabillon, Act. Ben. Sec. 1, p. 580. Les reliques de saint Léonard de Dunois se gardent encore dans l'église paroissiale bâtie à l'endroit où était sa cellule, et où il fut enterré. Elles furent vérifiées par l'évêque de Chartres,

verser avec le ciel. C'est ce qu'on pourrait prouver dans l'ancienne loi, par la pratique des Nazaréens, des prophètes, et de toutes les personnes qui faisaient une profession spéciale d'honorer le Seigneur ; et dans la nouvelle, par l'exemple de Jésus-Christ et de tous les Saints. Isaac allait dans les champs lorsqu'il voulait méditer. Moïse était dans le désert quand le Seigneur se fit voir à lui. Le silence de la solitude arrête les égaremens de l'esprit; la force et la vigueur de l'âme augmentent par le repos et le recueillement; et dans cet état de calme, on est plus capable de réfléchir sur soi-même, sur ses besoins, et de contempler les mystères de la religion, le bonheur de la patrie céleste, les fondemens de l'espérance chrétienne. Ne nous trompons cependant pas, en attribuant ces avantages à la solitude purement extérieure ; il s'agit principalement ici de la solitude intérieure, de celle qui nous dégage des soins du monde, qui nous affranchit de l'attachement à nos sens, qui bannit jusqu'aux pensées propres à nous distraire ou à nous jeter dans le trouble; autrement nous éprouverions plus de persécutions dans la retraite qu'au milieu des occupations de la vie la plus active. Mais la retraite estelle praticable à un chrétien obligé de vivre dans le monde? Oui qu'il n'aime ni l'esprit ni les maximes du monde; qu'il soit aussi recueilli que peut le lui permettre le genre de vie qu'il a embrassé; qu'il n'oublie jamais que le salut est la plus importante, et même l'unique affaire; qu'il évite les vains amusemens, les conversations inutiles; qu'il emploie tous les jours, dans ceux sur-tout que l'Eglise a consacrés au Seigneur, un certain temps à la prière, à de pieuses lectures et à la méditation de la loi divine.

en 1226; et par l'évêque de Blois, en 1748. Du Saussay confond ce Saint avec saint Evremond, patron de Creil, au diocèse de Beauvais, quand il dit que ses reliques furent brûlées à Creil par les calvinistes, dans le seizième siècle.

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dans

PARMI les Bretons qui passèrent dans les Gaules, la vue de se soustraire à la fureur des Anglo-Saxons, plusieurs profitèrent des calamités publiques, pour s'attacher . à la recherche des biens éternels. Aussi la Bretagne produisit-elle un grand nombre de Saints pendant quelques siècles. Winoc sortait d'une de ces familles bretonnes, qui s'étaient établies dans la Bretagne, province de France. Il paraît qu'il était fils du Roi Howel III, et frère des Rois Salomon et Judoc, ou Jose (1). On voit par son exemple, combien il est utile d'avoir reçu une éducation chrétienne.

Il s'associa trois jeunes gentilshommes qui avaient les mêmes inclinations. Ils firent ensemble plusieurs pélerinages, et visitèrent à Saint-Omer le monastère de Sithiu, connu depuis sous le nom de Saint-Bertin. La ferveur des religieux qui l'habitaient les frappa singulièrement, et ils se fixèrent parmi eux en prenant l'habit. Les noms des trois compagnons du Saint étaient Quadenoc, Ingenoc et Madoc (2).

Quelque nombreuse que fût la communauté, on y distingua bientôt Winoc. Quelque temps après, saint Bertin, abbé de Sithiu, envoya les quatre moines bretons former un établissement dans des marais du côté de la mer. Hérémar, gentilhomme flamand, leur donna une terre nommée Wormhout, et la charte de cette fondation existe encore aujourd'hui. Winoc fut mis à la tête de la nouvelle

(1) Voyez D. Morice, Hist. de Bret. t. I, p. 22, et not. ibid. pag. 785 et 818.

(2) Léland. Itiner. t. III, p. 48, Vit. S. Winoci.

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