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et les autres à quelque distance de Ratisbonne (1). Les Saxons, toujours battus ne cessaient de se révolter. En 782, ils formèrent une ligue générale, dont Witikind fut le chef, et renouvelèrent leurs hostilités avec plus de fureur que jamais. Ils maltraitèrent les prédicateurs du christianisme, et mirent à mort tous ceux qui tombèrent entre leurs mains. On compte parmi ceux qui souffrirent alors le martyre, Folcard, prêtre, avec Emming qui l'accompagnait; Benjamin, Attreband, et Gerwal avec leurs compagnons.

Willehad, qui était à la tête de cette mission depuis sept ans, s'embarqua pour la Frise, afin d'échapper au danger qui le menaçait. Il profita de cette circonstance pour faire un voyage à Rome, dans la vue de faire connaître au Pape Adrien l'état de sa mission. Il fut reçu d'une manière honorable par le Chef de l'Eglise. De là il vint en France, et en attendant la fin de la

guerre,

il se

(1) Suivant Tacite, l'idole Irmensul représentait Mercure. Spelman pense que c'était une colonne dédiée à Mars. C'était, au jugement de M. Tercier, un monument érigé en l'honneur du brave Arminius, qui défendit si bien la liberté de son pays contre les Romains, et qui a été si long-temps le sujet des chants et des romans parmi les Allemands. Herman signifie guerrier, et Saul ou Sul, comme on prononce en bas saxon, signifie colonne. M. Tercier conjecture que d'Irman ou Herman, ́on aura formé Arminius, qui ne sera plus un nom propre, maïs un nom appellatif. Voyez la dissertation où ce savant montre que la langue teutonique ou allemande, est de toutes les langues qu'on parle actuellement en Europe, celle qui conserve le plus de vestiges de son ancienneté. Mémoires de l'Acad. des Inscriptions, t. XXIV, ad an. 1751.

Rimius, dans son Histoire de la maison de Brunswick-Lunebourg, pense que Ehresbourg ou Ebresbourg est Stadsberg en Westphalie. Charlemagne emporta cette place après un long siége, et y trouva un riche butin. L'idole fut renversée. On enleva la colonne, et on la plaça dans une nouvelle église que Charlemagne fit bâtir à Hildesheim. On l'y voit encore aujourd'hui, et on la couvre de cierges lorsque l'église est illuminée les jours de grandes fêtes.

retira dans le monastère d'Epternac. Il y passa près de deux ans dans le jeûne, les veilles et l'exercice de la contemplation. Rempli de vénération pour saint Willibrord, il allait souvent prier sur son tombeau. Il y copia les Epîtres de saint Paul, et quelques autres livres. Il y rassembla ses coopérateurs que la guerre avait dispersés.

Witikind ayant reçu le baptême en 785 (2), et la paix étant rétablie dans la Saxe, saint Willehad retourna dans cette province. Il implora la protection de Charlemagne qui lui permit de fixer sa demeure dans le Wigmore, entre le Wesel et l'Elbe. Comme il fondait tous les jours de nouvelles églises, il fut sacré évêque des Saxons, le 15 Juillet 787. Il fit alors sa résidence à Brême, qu'on croit avoir été fondée vers ce temps-là, et que ses archevêques enrichirent beaucoup depuis.

Le Saint, après son sacre, se sentit animé d'une nouvelle ardeur pour le salut des âmes, et pour sa propre sanctification. Il ne vivait que de pain, de miel, d'herbes ou de fruits. Sa santé s'étant considérablement dérangée, le Pape Adrien lui commanda de manger un peu de pois. son. Il s'était interdit l'usage de toute liqueur enivrante. Il fondait en larmes pendant la célébration de la messe, et il la disait tous les jours, à moins qu'il ne lui survînt quelque empêchement extraordinaire. La lecture des livres saints et la méditation de la loi du Seigneur faisaient ses délices. Il avait coutume de réciter chaque jour le psautier tout entier, et souvent même plusieurs fois par jour (3). Il dé

(2) Voyez l'histoire de Witikind, par Crusius, in-fol., et la Vie de Witikind-le-Grand, tige des maisons de Saxe et de Brandebourg, etc., par M. Dreux du Radier. 1755, in-12.

(3) On garde encore avec respect le psautier Ms. qui appartenait à Hildegarde, femme de Charlemagne, et dont ce prince fit présent à saint Willehad. Voyez Kollarius, Analecta Vindobonensia, t. I.

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dia sous l'invocation de Saint-Pierre, apôtre, la cathédrale qu'il fit bâtir (4). On ne pouvait, dans sa vieillesse même, lui faire interrompre ses fonctions, ni l'engager à modérer son zèle pour la mortification. Lorsqu'il était au lit de la mort, un de ses disciples lui dit en pleurant : «<< N'aban» donnez pas sitôt votre troupeau : vous le laisseriez exposé à la fureur des loups. Eh quoi! répondit le Saint, vous voulez m'empêcher d'aller à Dieu. Je recommande mon troupeau à celui qui m'en a confié la garde, et qui, par sa miséricorde saura le défendre. » Il mourut dans un village de la Frise, appelé Blekensée, `aujourd'hui Plexem. On porta son corps à Brême, et il fut enterré dans la cathédrale. Il remplit pendant trente-cinq ans les fonctions de missionnaire, et fut évêque pendant deux ans, trois mois et vingt-six jours. Il s'opéra plusieurs miracles à son tombeau. Saint Anschaire, son troisième successeur et premier archevêque de Hambourg (5), le mit au nombre des Saints par l'autorité du Pape, et fit une translation solennelle de ses reliques.

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Voyez la vie de saint Willehad par saint Anschaire, ap. Mabillon, Annal. Ben. 1. 24, §. 36, etc. ; la Batavia sacra, p. 85; Adam de Brême, Hist. Archiep. Bremens, c. 1, p. 1; et Kollarius, dans les Analecta Vindobonensia, imprimés à Vienne en 1761, t. I.

(4) Cette église fut faite de bois; mais Villoric, successeur de saint Willehad, la fit rebâtir en pierre.

(5) Les siéges de Brême et de Hambourg restèrent unis depuis ; mais les archevêques retournèrent bientôt résider à Brême.

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GODEFROI (1), né dans le territoire de Soissons, sortait d'une famille noble et vertueuse. Foulques son père, étant devenu veuf, prit l'habit monastique. Notre Saint n'avait encore que cinq ans lorsqu'on le mit sous la conduite de Godefroi, abbé du Mont-Saint-Quentin, qui l'avait tenu sur les fonts de baptême. Ce Godefroi était oncle de la B. Itte, comtesse de Boulogne et de Namur, mère de Godefroi et de Baudouin qui furent Rois de Jérusalem.

Dès sa plus tendre jeunesse, le Saint se privait d'une grande partie de ce qu'on lui donnait pour sa nourriture, et le distribuait aux pauvres ; souvent même il ne paraissait point au réfectoire, et se renfermait dans quelque oratoire, pendant le temps qu'on y passait, pour s'entretenir avec Dieu. Il consacrait quelquefois la plus grande partie de la nuit à ce saint exercice. Les larmes abondantes qui coulaient de ses yeux, dans la prière, annonçaient sa tendre piété et la vivacité de sa componction. A l'âge de 25 ans, l'évêque de Noyon l'ordonna prêtre. Il parut digne de cet honneur, non-seulement à cause de ses vertus, mais encore à cause des progrès qu'il faisait tous les jours dans l'étude de la religion. On n'écouta point son humilité, qui lui inspirait de l'éloignement pour le sacerdoce.

Peu de temps après, on lui confia le gouvernement de l'abbaye de Nogent, en Champagne. Cette maison, sous

(1) Godefroi, qui signifie paix de Dieu ou bonne paix, vient du mot teutonique frid, paix ou trève. De là Manfroi, Frédégonde, Alfred, etc. T. XVII. 9

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sa conduite, devint bientôt célèbre par sa régularité. Deux abbés, touchés des merveilles qu'on en publiait, s'y retirèrent pour y vivre en simples religieux dans une plus grande perfection.

Godefroi avait tellement acquis l'habitude de veiller sur lui-même, qu'il était absolument maître de tous ses sens. Jamais il ne prononçait une parole inutile; jamais ses yeux ne s'arrêtaient sur aucun objet sans nécessité. Son silence et sa modestie étaient des preuves sensibles de la continuité de son recueillement. Un jour qu'on lui servait à table quelque chose qui paraissait mieux assaisonné qu'à l'ordinaire, il en fit des plaintes. « Est-ce que vous ne

savez pas, dit-il, que la chair se révolte si on la flatte?» Un concile entier le pressant de prendre le gouvernement de l'abbaye de Saint-Remi, de Rheims, il s'avança au milieu de l'assemblée, et, après avoir cité les canons en sa faveur, il s'écria: « A Dieu ne plaise que je méprise une épouse pauvre, et que je lui en préfère une riche. » En 1103, on l'élut évêque d'Amiens; mais il fallut lui faire violence pour qu'il acquiesçât à son élection. Il entra nu-pieds dans la ville. Lorsqu'il fut arrivé à l'église de Saint-Firmin, il adressa au peuple, qui était présent, un discours fort pathétique. On retrouvait dans son palais la maison d'un vrai disciple de Jésus-Christ. Chaque jour il lavait les pieds à treize pauvres, et les servait à table. Il s'opposait avec un zèle inflexible aux entreprises des grands, opiniâtrément attachés à leurs désordres. Il attaquait avec vigueur les abus qui régnaient dans son clergé; et, après avoir éprouvé bien des difficultés, il rétablit la réforme dans le monastère de Saint-Valeri. Célébrant les saints mystères le jour de Noël, en présence de Robert, comte d'Artois, qui tenait sa cour à Saint-Omer, il ne voulut point recevoir les offrandes, même des princes, parce que leur extérieur était trop mondain. Plusieurs sortirent de

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