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santes, il y bâtit aussi une église, et peu de temps après un couvent, qui porta le nom de Malone ou Maloigne, et qui était situé à deux lieues de Namur. Un des principaux bienfaiteurs de Bertuin fut Pépin d'Héristal, qui régnait depuis 680 en Austrasie.

S. Bertuin mourut vers l'an 698. On ne sait pas positivement si les premiers moines de Malone suivaient la règle de S. Benoît, où s'ils étaient des chanoines réguliers. Toutefois cette abbaye, soumise pour le temporel comme pour le spirituel au prince-évêque de Liége, avait adopté en 1147 la règle de S. Augustin, qu'elle garda jusqu'à la fin du siècle dernier.

Voyez Acta. SS. Belgii selecta, tome V, 165-190.

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Tiré de ses lettres, de Théophane, d'Anastase, in Pontif. et ep. ad Martin. Narniens. episcop. des annales de Baronius; de Fleury, 1. 38, etc.

L'AN 655.

MARTIN, né à Todi, en Toscane, se rendit célèbre dans le clergé de Rome, par son savoir et sa sainteté. Il n'était encore que diacre, lorsque le Pape Théodore l'envoya à Constantinople en qualité d'apocrisaire ou de nonce. II montra le plus grand zèle contre le monothélisme. Théodore étant mort, le Saint-Siége resta vacant près de trois semaines. Martin fut élu pour lui succéder, au mois de Juil. let 649. Dès le mois d'Octobre suivant, il tint dans l'église de Latran un concile de cent cinq évêques contre les monothélites. On y condamna les principaux chefs de ces

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hérétiques, nommément Sergius et Pyrrhus, qui avaient occupé successivement le siége de Constantinople, et Paul qui l'occupait alors. L'Ectèse d'Héraclius et le Type de Constant y furent aussi condamnés. Le premier de ces édits contenait une exposition de la foi, entièrement favorable à l'hérésie régnante. Le second était un formulaire qui imposait silence aux deux partis, et qui défendait de parler d'une ou deux opérations en Jésus-Christ. « Le Seigneur » disent les Pères de Latran, nous a commandé de fuir » le mal et de faire le bien, mais non de rejeter le bien avec le mal..... Nous ne pouvons abjurer tout à la fois >> l'erreur et la vérité. »

Olympius, chambellan de l'Empereur Constant, fut envoyé en Italie, en qualité d'exarque. Il avait ordre d'ôter la vie à Martin, ou de se saisir de sa personne, et de le faire conduire en Orient. En arrivant à Rome, il trouva le concile assemblé. Les moyens qu'il employa pour exciter un schisme, n'eurent aucun succès. Il eut recours à la perfidie, dans l'espérance qu'elle lui réussirait mieux que la force ouverte. Il ordonna à un de ses écuyers de massacrer le Pape, lorsqu'il lui administrerait la communion dans l'église de Sainte-Marie-Majeure. L'exécution de cet ordre paraissait d'autant plus facile, que le Pape communiait chacun à sa place. L'écuyer ne l'exécuta cependant pas; il déclara même depuis, qu'il avait été frappé d'aveuglement, et qu'il n'avait pu voir le Pape. Olympius, que cet événement fit rentrer en lui-même, découvrit tout, et fit sa paix avec saint Martin. Il partit ensuite de Rome, et marcha contre les Sarrasins en Sicile : son armée y périt, et il y mourut de maladie.

Théodore Calliope fut nommé exarque, et l'Empereur l'envoya en Italie avec Théodore Pellurus, un de ses chambellans. Ils eurent ordre d'arrêter le Pape, qu'on accusait d'hérésie, parce qu'il condamnait le Type; on l'accusait

encore de nestorianisme, mais avec aussi peu de fondement. Le nouvel exarque et le chambellan allèrent de Ravenne à Rome avec l'armée. Ils y arrivèrent le Samedi 15 Juin 653. Le Pape, qui était malade, resta dans l'église de Latran, et envoya saluer l'exarque par quelques personnes de son clergé. Celui-ci demanda où était Martin (1), disant qu'il voulait l'adorer (2), ce qu'il répéta encore le lendemain. Deux jours après, Calliope l'accusa d'avoir caché des armes. Le Pape dit qu'il pouvait se convaincre du contraire, en faisant faire une recherche dans son palais. La recherche fut faite, et il ne se trouva point d'ar« Voilà, dit alors le Pape, comme on emploie toujours la calomnie contre nous. » Une demi-heure après, les soldats l'arrêtèrent. Il était couché à la porte de l'église. Calliope fit voir au clergé un rescrit de l'Empereur, qui portait que Martin devait être déposé comme indigne de la papauté. Mais le clergé s'écria : « Anathême à ce>> lui qui dira que le Pape Martin a changé quelque point » de la foi, et à celui qui ne persévère point dans la foi catholique jusqu'à la mort. Il n'y a point d'autre foi que » la vôtre, reprit Calliope, qui craignait la multitude, et je » n'en ai point d'autre. Nous vivrons et nous mourrons avec lui, répliquèrent les évêques.

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mes.

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Le Pape fut mené de l'église à son palais. On l'en tira le 18 Juin à minuit, et on le conduisit à Porto, où on l'embarqua pour Constantinople. Il aborda dans l'île de Naxos au bout de trois mois, et il y resta un an avec ceux qui le gardaient. Il eut long-temps à souffrir de la dyssenterie, à laquelle se joignit un dégoût pour toute espèce de

(1) S. Martin, ep. 15; et Anastas. in Martin.

(2) Adorer et saluer signifiaient la même chose dans ce temps-là. On disait, long-temps auparavant, adorer l'Empereur. Gothofrod. ad. Leg. un. Cod. Theod. de præpositis sacri cubiculi; Saumaise, ad Hist. August.

PAPE. (12 Novembre.) nourriture. Les évêques et les habitans du pays lui ayant envoyé quelques provisions, les gardes s'en emparèrent, et chargèrent d'injures et de coups ceux qui les apportaient, en disant que quiconque montrait de l'humanité pour un tel homme, était ennemi de l'état. Martin fut moins sensible à ses propres souffrances qu'aux mauvais traitemens qu'on avait fait éprouver à ses bienfaiteurs. Enfin, on le fit partir pour Constantinople, où il arriva le 17 Septembre 654. Il y fut renfermé dans une prison, jusqu'au 17 du mois de Décembre suivant. Voici ce qu'on lit dans une des lettres qu'il écrivit alors : « Il y a qua»rante-sept jours qu'on ne m'a donné d'eau ni chaude ni » froide pour me laver. Je suis glacé de froid et dans une faiblesse extrême. Une dyssenterie qui m'a tour» menté sur mer et sur terre, ne me permet pas de goû» ter aucun repos. Mon corps est tout brisé et hors d'é>>tat de se soutenir. Quand j'aurais de quoi me nourrir, je manquerais des alimens que demande ma situation » actuelle, et j'ai du dégoût et de l'aversion pour tout ce

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qui m'est donné. J'espère cependant que Dieu, qui con

>> naît toutes choses, et qui doit bientôt m'enlever de ce monde, voudra bien inspirer des sentimens de péni» tence à mes persécuteurs (3).

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Le 17 Décembre, il comparut dans la chambre du sacellaire ou trésorier, en présence du sénat, qui y était assemblé. On le transporta de là sur une terrasse, d'où l'Empereur pouvait le voir de son appartement, et le sacellaire ordonna aux gardes de le dépouiller des marques de la dignité épiscopale. Le Saint se livrant alors entre les mains du préfet de la ville, lui dit : « Saisissez-vous de moi, et me mettez en pièces sur-le-champ. » Le préfet

(3) Ep. 15.

commanda aux assistans de lui dire anathême; mais il ne se trouva qu'environ vingt personnes qui obéirent. Les autres se retirèrent en baissant la tête et pénétrés de douleur.

Les officiers du magistrat s'étant saisis de Martin, lui arrachèrent son pallium, et le dépouillèrent de tous ses vêtemens. Ils ne lui laissèrent que sa tunique, qui fut déchirée du haut en bas, en sorte que son corps nu fut exposé à la vue de ceux qui étaient présens. On lui mit un carcan de fer au cou, et on le conduisit en cet état, du palais au milieu de la ville. On l'avait enchaîné avec le geolier, et on faisait marcher devant lui un bourreau tenant un glaive, pour donner à entendre qu'il était condamné à mort. A l'exception d'un petit nombre de personnes qui l'insultaient, tout le monde gémissait et fondait en lar mes. Le saint Pape annonçait, par son extérieur, le calme et la serénité de son âme. Lorsqu'il fut arrivé au prétoire, on le renferma dans une prison avec des malfaiteurs. On l'en tira une heure après pour le mettre dans celle de Dio mède. Il eut le corps tout meurtri de la violence avec laquelle on l'y fit entrer. L'escalier fut teint de son sang, et on crut qu'il allait expirer. On le plaça sur un banc, sans lui ôter ses fers; et comme l'hiver était alors très-rigoureux, il pensa périr de froid. Il n'avait auprès de lui aucun de ses amis ou même de ses serviteurs. Il ne se trouvait là qu'un jeune clerc qui l'avait suivi en pleurant. Le geolier était toujours enchaîné avec lui, et on n'attendait plus que le moment de l'exécution. Martin lui même désirait ardemment le martyre. Il eut cependant quelque relâche, et on lui ôta ses fers.

Le lendemain, l'Empereur alla visiter le patriarche Paul, qui était malade, et lui raconta tout ce qui s'était fait à l'égard du Pape. « Hélas, dit Paul en soupirant, on veut » donc encore augmenter ma punition? » En même temps il conjura l'Empereur de se contenter de ce que S. Martin avait

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