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avec un peu de sel. Il n'interrompait l'exercice de l'oraison, que pour lire l'Ecriture sainte, ou s'occuper à quelque travail. Il mourut après avoir passé dix-huit ans de cette manière. On met sa bienheureuse mort vers l'an 577. Il fut enterré à Colombières, et il s'opéra divers miracles à son tombeau. Sa fête est marquée en ce jour dans le martyrologe gallican. Ce Saint est quelquefois nommé S. Parre.

Voyez S. Grégoire de Tours, Vit. Patr. c. 9, et Hist. Fr. 1. 5, c. 10; et le P. Longueval, Hist. de l'Egl. gallic. t. III, p. 99.

S. JACQUES, HERMITE EN BERRY.

L'AN 865.

SAINT JACQUES, issu d'une famille noble établie dans la Grèce ou dans le voisinage de Constantinople, embrassa la profession des armes avec cinq de ses frères, et s'y acquit une grande réputation par sa sagesse et son courage. L'Empereur Léon l'Arménien le fit venir auprès de lui, et lui promit d'avancer ses frères; mais ceux-ci se rendirent indignes des bontés du prince par leur conduite déréglée. Quant à Jacques, il justifia la haute idée qu'on avait conçue de lui; il se faisait d'ailleurs aimer de tout le monde, et on ne pouvait lui reprocher que les défauts de son état, l'ambition et le désir de faire fortune.

Il avait un sixième frère, nommé Herpelin, qui avait embrassé la vie monastique, et qui ne s'occupait que de sa sanctification. Ses éminentes vertus portèrent son évêque à l'ordonner prêtre. Il ne cessait de prier pour le salut de ses frères. Mais il se sentait une tendresse particulière pour Jacques, qui approchait plus de son âge, et

dans lequel il avait toujours remarqué plus de disposition à la piété. Il le pria de venir le voir. Il lui parla avec tant de force de la vanité des honneurs, et des dangers auxquels on est exposé dans le monde, qu'il le désabusa des idées de fortune qui l'avaient occupé jusqu'alors. Jacques fut si touché, qu'il ne voulut plus retourner à la cour. Il se fit même religieux, et reçut le diaconat quelque temps après.

Les deux frères demeurèrent ensemble un ou deux ans ; mais ils résolurent ensuite de quitter leur pays, d'aller à Jérusalem et à Rome, et enfin de se fixer en France, où il y avait alors un grand nombre de personnes célèbres par leur sainteté. La loi ne les excluant pas du droit d'hériter de leur famille, ils vendirent leurs biens, et les donnèrent aux pauvres. Ils ne se réservèrent que ce qui était absolument nécessaire pour leur voyage. Ils s'embarquèrent à Constantinople, chacun sur un vaisseau différent. Celui où était Jacques fut jeté par la tempête sur les côtes d'Afrique. Mais on ne revit plus le vaisseau qui portait Herpelin. Jacques, ayant abordé en Sardaigne, y passa l'hiver. De retour à Constantinople, il s'informa vainement de ce qu'était devenu son frère. Quelque douloureuse que fût cette séparation, il se soumit à la volonté de Dieu qui en avait ordonné ainsi. S'étant embarqué de nouveau pour I'Italie, une seconde tempête le fit aborder à Jopé en Judée; il profita de ce malheur pour visiter les Lieux saints. Lorsqu'il fut revenu à Constantinople, il demanda quelque secours à ses amis, parce qu'il n'avait plus de quoi subsister. Le patriarche Jean, qui le connaissait, lui fournit les choses qui lui étaient nécessaires. Jacques s'embarqua pour la troisième fois, et aborda à l'île de Corse, où les matelots le laissèrent sur le rivage, après l'avoir depouillé de tout ce qu'il avait. Les habitans de l'île l'arrêtèrent comme un espion, et lui firent souffrir mille indignités, pour ti

rer de lui l'aveu de son prétendu crime. A la fin sa patience fit douter s'il était réellement coupable. On le conduisit à l'évêque, qui reconnut son innocence, et le retint dans l'ile pendant un an. Ce terme expiré, Jacques voulut partir pour Rome, et l'évêque lui donna des lettres de recommandation qui lui procurèrent accès auprès du Pape. Il demanda la bénédiction du Souverain-Pontife, et obtint des reliques de plusieurs martyrs.

De Rome, il se rendit à Lucques, puis à Gênes, toujours dans le dessein de passer en France. Mais l'évêque de Gênes, instruit de son éminente piété, le retint dans son diocèse. Jacques y servit Dieu quatorze ans. Importuné par les visites de ceux qui venaient implorer le secours de ses prières, il résolut enfin de passer en France. La réputation de sainteté dont jouissait Fridégise, évêque de Clermont, lui fit choisir l'Auvergne pour le lieu de sa retraite. Il y mena quelque temps la vie hérémitique. Il se retira depuis dans le Berry, et sur ce qu'on lui dit d'un monastère voisin de Bourges, où l'on gardait exactement la règle de saint Benoît, il s'y fit recevoir en qualité d'hôte. Il fut si édifié de la conduite des religieux, qu'il demanda et obtint la permission de demeurer avec eux. Il portait un rude cilice, et ne buvait que de l'eau. Du pain dur et aigre faisait toute sa nourriture. Il y ajoutait cependant quelquefois de petits poissons ce n'était ordinairement qu'en maladie qu'il se permettait l'usage des œufs et du fromage. Il couchait sur la terre nue, et ne consentait à coucher sur la paille que quand ses infirmités lui rendaient ce petit soulagement nécessaire.

Enflammé d'un désir ardent de suivre son attrait pour la pénitence et la contemplation, il prit la résolution de finir ses jours dans le désert. Il se construisit une cellule près de la rivière de Saudre, du consentement du comte Robert, Seigneur du pays. Il bâtit aussi une chapelle, T. XVII.

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pour y célébrer la messe; Jean, son disciple, lui servait de ministre. Il passait presque tous les jours dans les bois, où il vaquait à l'oraison avec une ferveur merveilleuse. Comme il ne portait point de chaussure, ses pieds étaient quelquefois tout ensanglantés. Le comte Robert et sa femme lui envoyaient à manger tous les jours mais il distribuait aux pauvres la plus grande partie de ce qu'il recevait. Il prédit sa mort, qu'on met communément en 865. On l'enterra dans la chapelle de son hermitage, où il se forma depuis un monastère. Ce n'est plus qu'un prieuré dépendant de l'abbaye de Saint-Sulpice de Bourges, qu'on appelle la chapelle d'Angillon, et qui est à sept ou huit lieues de Bourges, sur le chemin de Paris. Les miracles opérés à son tombeau donnèrent lieu à l'établissement de son culte en plusieurs lieux du Berry.

Nous n'avons plus sa vie, qu'avait composée un auteur contemporain, qui était peut-être Jean, son disciple. Celle que nous avons a été faite d'après la première, par un moine de Saint-Sulpice de Bourges. Mabillon l'a publiée dans ses Acta SS. Ord. S. Bened. Sæc. 4, part. 2, p. 144. Voyez Bulteau, Hist. de S. Benoît, 1. 5, c. 8, t. II, p. 387; Baillet, etc.

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LE B. TOTTO, ABBÉ D'OTTENBEUERN.

L'AN 815.

TOTTO descendait d'une famille d'Alemanie, et fut formé à la piété, dès sa tendre jeunesse, par ses pieux parens. Voulant continuer dans un âge plus avancé à servir librement le Seigneur et à guider son prochain dans les voies de la vertu, il se consacra, dans l'église de Vienne ( en France), au ministère de l'autel. Lorsque, dans la suite, ses pieux parens fondèrent le couvent d'Ottenbeuern, vers

l'an 764, il résolut de se dévouer entièrement au Ciel dans cette paisible solitude. Il céda son héritage au nouveau monastère, pour pouvoir, dans un complet renoncement au monde, se livrer sans contrainte à la poursuite des biens célestes.

L'humilité du pieux religieux l'aurait retenu toute sa vie parmi les derniers des frères de la communauté ; mais ceux-ci l'élurent bientôt, en 767, pour leur abbé. Totto, par sa douceur et son affabilité, était fait pour gouverner et pour faire fleurir cette jeune pépinière. En ne suivant que son exemple, la communauté devait s'élever chaque jour à un plus haut degré de vertu. Il était assidu au service divin; regardant les pauvres comme les membres de Jésus-Christ, il les soignait avec une charité douce et prévenante, et il savait, par une administration sage, conserver et assurer les revenus de la communauté. Mais il était aussi sévère envers lui-même qu'il était indulgent et doux à l'égard des autres: il s'exerçait à toutes sortes de privations, pour étouffer en soi toute passion déréglée et faire triompher la vertu.

Un serviteur de Dieu aussi distingué ne pouvait manquer d'exercer de l'influence tant au loin que sur ceux qui l'entouraient immédiatement, et la mort ne pouvait effacer sa mémoire. Aussi le pieux abbé, qui mourut le 19 Novembre 815, ne cessa d'être vénéré par la postérité. Ses frères en religion enterrèrent son corps dans la partie de l'église appelée Langhaus, d'où il fut transféré en 1163 sous le maître-autel. Au seizième siècle, l'abbé Léonard réunit les restes mortels de Totto aux autres saintes reliques, qui furent enfermées plus tard dans une niche de l'église du couvent, laquelle se trouve à côté de l'autel de S. Martin.

Voyez les Jahrbücher von Ottenbeuern, de Feyerabend, I, 108 et 193.

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