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A remonter encore plus haut, on voit Jacob user de ce droit dans la donation qu'il fait à Joseph, en cette sorte. « Je vous donne par préci>> put sur vos frères un héritage que j'ai enlevé » de la main des Amorrhéens, par mon épée et » par mon arc ( Gen., XLVIII. 22.). »

Il ne s'agit pas d'examiner ce que c'étoit, et comment Jacob l'avoit ôté aux Amorrhéens ; il suffit de voir que Jacob se l'attribuoit par le droit de conquête, comme par le fruit d'une juste guerre.

La mémoire de cette donation de Jacob à Joseph s'étoit conservée dans le peuple de Dieu comme d'une chose sainte et légitime jusqu'au temps de Notre-Seigneur, dont il est écrit, « qu'il >> vint auprès de l'héritage que Jacob avoit donné à son fils Joseph ( JOAN., IV. 5. ). »

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On voit donc un domaine acquis par le droit des armes sur ceux qui le possédoient.

II. PROPOSITION.

Pour rendre le droit de conquête incontestable, la possession paisible y doit être jointe.

Il faut pourtant remarquer deux choses dans ce droit de conquête : l'une, qu'il y faut joindre une possession paisible, ainsi qu'on a vu dans la discussion de Jephté; l'autre, que pour rendre ce droit incontestable, on le confirme en offrant une composition amiable.

Ainsi le sage Simon le Machabée, querellé par le roi d'Asie, sur les villes d'loppé et de Gazara, répondit : « Pour ce qui est de ces deux villes, » elles ravageoient notre pays, et pour cela nous >> vous offrons cent talents (1. MACH., XV. 35. ). ›

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Quoique la conquête fût légitime, et que ceux d'Ioppé et de Gazara étant aggresseurs injustes, eussent été pris de bonne guerre; Simon offroit cent talents pour avoir la paix, et rendre son droit incontestable.

Ainsi, on voit que ce droit de conquête, qui commence par la force, se réduit, pour ainsi dire, au droit commun et naturel, du consentement des peuples, et par la possession paisible. Et l'on présuppose que la conquête a été suivie d'un acquiescement tacite des peuples soumis, qu'on avoit accoutumés à l'obéissance par un traitement honnête, ou qu'il étoit intervenu quelque accord, semblable à celui qu'on a rapporté entre Simon le Machabée et les rois d'Asie.

CONCLUSION.

Nous avons donc établi, par les Ecritures, que la royauté a son origine dans la Divinité même; Que Dieu aussi l'a exercée visiblement sur les hommes dès les commencements du monde ;

Qu'il a continué cet exercice surnaturel et miraculeux sur le peuple d'Israël, jusqu'au temps de l'établissement des rois;

Qu'alors il a choisi l'état monarchique et héréditaire, comme le plus naturel et le plus durable;

Que l'exclusion du sexe né pour obéir, étoit naturelle à la souveraine puissance.

Ainsi nous avons trouvé que, par l'ordre de la divine Providence, la constitution de ce royaume étoit dès son origine la plus conforme à la volonté de Dieu, selon qu'elle est déclarée par ses Ecritures.

Nous n'avons pourtant pas oublié qu'il paroit dans l'antiquité d'autres formes de gouvernements, sur lesquels Dieu n'a rien prescrit au genre humain : en sorte que chaque peuple doit suivre, comme un ordre divin, le gouvernement établi dans son pays; parce que Dieu est un Dieu de paix, et qui veut la tranquillité des choses humaines.

Mais comme nous écrivons, dans un état monarchique, et pour un prince que la succession d'un si grand royaume regarde, nous tournerons dorénavant toutes les instructions que nous tirerons de l'Ecriture, au genre de gouvernement où nous vivons; quoique par les choses qui se diront sur cet état, il sera aisé de déterminer ce qui regarde les autres.

LIVRE TROISIÈME.

OU L'ON COMMENCE A EXPLIQUER LA NATURE ET LES PROPRIÉTÉS DE L'AUTORITÉ ROYALE.

ARTICLE PREMIER.

On en remarque les caractères essentiels.
UNIQUE PROPOSITION.

Il y a quatre caractères ou qualités essentielles à
l'autorité royale.

Premièrement, l'autorité royale est sacrée ; Secondement, elle est paternelle ; Troisièmement, elle est absolue; Quatrièmement, elle est soumise à la raison. C'est ce qu'il faut établir par ordre, dans les articles suivants.

ARTICLE II.

L'autorité royale est sacrée.

PREMIÈRE PROPOSITION.

Dieu établit les rois comme ses ministres, et règne par eux sur les peuples.

Nous avons déjà vu que toute puissance vient de Dieu (Rom., XIII. 1, 2. ).

« Le prince, ajoute saint Paul (Ibid., 4.), » est ministre de Dieu pour le bien. Si vous >> faites mal, tremblez; car ce n'est pas en vain. qu'il a le glaive: et il est ministre de Dieu, » vengeur des mauvaises actions. >>

Les princes agissent donc comme ministres de Dieu, et ses lieutenants sur la terre. C'est par eux qu'il exerce son empire. « Pensez-vous pou>> voir résister au royaume du Seigneur, qu'il » possède par les enfants de David (2. Par., » XIII. 8.).

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La personne des rois est sacrée.

Il paroît de tout cela que la personne des rois est sacrée, et qu'attenter sur eux c'est un sacrilége.

Dieu les fait oindre par ses prophètes d'une onction sacrée ( 1. Reg., IX. 16; XVI. 3, etc.), comme il fait oindre les pontifes et ses autels.

Mais même sans l'application extérieure de cette onction, ils sont sacrés par leur charge, comme étant les représentants de la majesté divine, députés par sa providence à l'exécution de ses desseins. C'est ainsi que Dieu même appelle Cyrus son Oint. « Voici ce que dit le Sei> gneur à Cyrus mon oint, que j'ai pris par la » main pour lui assujétir tous les peuples (Is., » XLV. 1.). »

TOME IV.

Le titre de christ est donné aux rois; et on les voit partout appelés les christs, ou les oints du Seigneur.

Sous ce nom vénérable, les prophètes mêmes les révèrent, et les regardent comme associés à l'empire souverain de Dieu, dont ils exercent l'autorité sur le peuple. « Parlez de moi hardi» ment devant le Seigneur, et devant son christ; >> dites si j'ai pris le bœuf ou l'âne de quelqu'un, » si j'ai pris des présents de quelqu'un, et si j'ai › opprimé quelqu'un. Et ils répondirent : Jamais, et Samuel dit : Le Seigneur et son christ >> sont donc témoins que vous n'avez aucune » plainte à faire contre moi (1. Reg., XII. 3, » 4, 5.). »

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C'est ainsi que Samuel, après avoir jugé le peuple vingt et un ans de la part de Dieu, avec une puissance absolue, rend compte de sa conduite devant Dieu, et devant Saül, qu'il appelle ensemble à témoin, et établit son innocence sur leur témoignage.

Il faut garder les rois comme des choses sacrées; et qui néglige de les garder est digne de mort. « Vive le Seigneur, dit David aux capitaines de » Saül (Ibid., XXVI. 16.), vous êtes des enfants » de mort, vous tous qui ne gardez pas votre >> maître l'oint du Seigneur.

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III. PROPOSITION.

On doit obéir au prince par principe de religion et de conscience.

Saint Paul, après avoir dit que le prince est le ministre de Dieu, conclut ainsi ( Rom., xIII. 5.): « Il est donc nécessaire que vous lui soyez >> soumis, non - seulement par la crainte de sa » colère, mais encore par l'obligation de votre >> conscience. »>>

C'est pourquoi « il le faut servir, non à l'œil, » comme pour plaire aux hommes, mais avec bonne volonté, avec crainte, avec respect, >> et d'un cœur sincère comme à Jésus-Christ » (Ephes., VI. 5, 6. ).

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Et encore: ((

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Serviteurs, obéissez en toutes >> choses à vos maîtres temporels, ne les servant » point à l'œil, comme pour plaire à des hommes, >> mais en simplicité de cœur et dans la crainte » de Dieu. Faites de bon cœur tout ce que vous >> faites, comme servant Dieu et non pas les >> hommes, assurés de recevoir de Dieu même » la récompense de vos services. Regardez Jésus>> Christ comme votre maître (Coloss., III. 22, » 23, 24. ).

Si l'Apôtre parle ainsi de la servitude, état contre la nature; que devons-nous penser de la sujétion légitime aux princes, et aux magistrats protecteurs de la liberté publique?

C'est pourquoi saint Pierre dit : « Soyez donc » soumis, pour l'amour de Dieu, à l'ordre qui >> est établi parmi les hommes: soyez soumis au >> roi, comme à celui qui a la puissance suprême; >> et à ceux à qui il donne son autorité, comme >> étant envoyés de lui pour la louange des bonnes >> actions, et la punition des mauvaises (1. PETR., » II. 13, 14.). »

Quand même ils ne s'acquitteroient pas de ce devoir, il faut respecter en eux leur charge et leur ministère. « Obéissez à vos maîtres, non» seulement à ceux qui sont bons et modérés, >> mais encore à ceux qui sont fâcheux et injustes » (Ibid., 18.). »

Il y a donc quelque chose de religieux dans le respect qu'on rend au prince. Le service de Dieu et le respect pour les rois sont choses unies; et saint Pierre met ensemble ces deux devoirs : Craignez Dieu, honorez le roi ( Ibid., 17.). » Aussi Dieu a-t-il mis dans les princes quelque chose de divin. « J'ai dit : Vous êtes des dieux, et >> vous êtes tous enfants du Très-Haut (Ps. LXXXI. » 6. ). » C'est Dieu même que David fait parler ainsi.

De là vient que les serviteurs de Dieu jurent par le salut et la vie du roi, comme par une

chose divine et sacrée. Urie parlant à David' << Par votre salut et par la conservation de votre » vie, je ne ferai point cette chose (2. Reg., XI. » 11; XIV. 19.). »

Encore même que le roi soit infidèle, par la vue qu'on doit avoir de l'ordre de Dieu : « Par le » salut de Pharaon, je ne vous laisserai point » sortir d'ici ( Gen., XLII. 15, 16. ). ›

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et

Il faut écouter ici les premiers chrétiens, Tertullien qui parle ainsi au nom d'eux tous: « Nous jurons, non par les génies des Césars; >> mais par leur vie et par leur salut, qui est plus >> auguste, que tous les génies. Ne savez-vous » pas que les génies sont des démons? Mais »> nous, qui regardons dans les empereurs le >> choix et le jugement de Dieu qui leur a donné >> le commandement sur tous les peuples, nous >> respectons en eux ce que Dieu y a mis, et nous » tenons cela à grand serment ( TERTULL., Apol. » n. 32. ). »

Il ajoute : « Que dirai-je davantage de notre >> religion et de notre piété pour l'empereur, » que nous devons respecter comme celui que »> notre Dieu a choisi; en sorte que je puis dire » que César est plus à nous qu'à vous, parce >> que c'est notre Dieu qui l'a établi (Ibid., » n. 33.)? »

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C'est donc l'esprit du christianisme de faire respecter les rois avec une espèce de religion, que le même Tertullien appelle très bien, « la religion de la seconde majesté ( Ibid., n. 35. ).» Cette seconde majesté n'est qu'un écoulement de la première, c'est-à-dire de la divine, qui, pour le bien des choses humaines, a voulu faire rejaillir quelque partie de son éclat sur les rois.

IV. PROPOSITION.

Les rois doivent respecter leur propre puissance, et ne l'employer qu'au bien public.

Leur puissance venant d'en haut, ainsi qu'il a été dit, ils ne doivent pas croire qu'ils en soient les maîtres pour en user à leur gré; mais ils doivent s'en servir avec crainte et retenue, comme d'une chose qui leur vient de Dieu, et dont Dicu leur demandera compte. « Ecoutez, ô rois, et >> comprenez; apprenez, juges de la terre; prẻ» tez l'oreille, ô vous qui tenez les peuples sous » votre empire, et vous plaisez à voir la multi>>>tude qui vous environne : c'est Dieu qui vous » a donné la puissance : votre force vient du Très-Haut, qui' interrogera vos œuvres, et pénétrera le fond de vos pensées; parce qu'é>> tant les ministres de son royaume, vous n'avez

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pas bien jugé, et n'avez pas marché selon ses

» volontés. Il vous paroîtra bientôt d'une ma

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» nière terrible; car à ceux qui commandent est » réservé le châtiment le plus dur. On aura pitié » des petits et des foibles; mais les puissants >> seront puissamment tourmentés. Car Dieu > ne redoute la puissance de personne, parce qu'il a fait les grands et les petits, et qu'il a > soin également des uns et des autres. Et les plus >>forts seront tourmentés plus fortement. Je > vous le dis, ô rois, afin que vous soyez sages, >> et que vous ne tombiez pas (Sap., VI. 2, a 3, etc.). »

Les rois doivent donc trembler en se servant de la puissance que Dieu leur donne, et songer combien horrible est le sacrilége d'employer au mal une puissance qui vient de Dieu.

Nous avons vu les rois assis dans le trône du Seigneur, ayant en main l'épée que lui-même leur a mise en main. Quelle profanation et quelle audace aux rois injustes, de s'asseoir dans le trône de Dieu pour donner des arrêts contre ses lois, et d'employer l'épée qu'il leur met en main, à faire des violences et à égorger ses enfants?

Qu'ils respectent donc leur puissance; parce que ce n'est pas leur puissance, mais la puissance de Dieu, dont il faut user saintement et religieusement. Saint Grégoire de Nazianze parle ainsi aux empereurs «< Respectez votre pourpre; recon> noissez le grand mystère de Dieu dans vos per» sonnes : il gouverne par lui-même les choses » célestes; il partage celles de la terre avec vous. Soyez donc des dieux à vos sujets (GREG. » NAZ. ). » C'est-à-dire, gouvernez-les comme Dieu gouverne, d'une manière noble, désintéressée, bienfaisante, en un mot, divine.

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ARTICLE III.

L'autorité royale est paternelle, et son propre caractère c'est la bonté.

Après les choses qui ont été dites, cette vérité n'a plus besoin de preuves.

Nous avons vu que les rois tiennent la place de Dieu, qui est le vrai père du genre humain.

Nous avons vu aussi que la première idée de puissance qui ait été parmi les hommes, est celle de la puissance paternelle; et que l'on a fait les rois sur le modèle des pères.

Aussi tout le monde est-il d'accord que l'obéissance qui est due à la puissance publique', ne se trouve, dans le Décalogue, que dans le précepte qui oblige à honorer ses parents.

Il paroît, par tout cela, que le nom de roi est un nom de père, et que la bonté est le caractère le plus naturel des rois.

Faisons néanmoins ici une réflexion particulière sur une vérité si importante.

PREMIÈRE PROPOSITION.

La bonté est une qualité royale, et le vrai apanage de la grandeur.

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Le Seigneur votre Dieu est le Dieu des dieux, >> et le Seigneur des seigneurs ; un Dieu grand, puissant, redoutable; qui n'a point d'égard >> aux personnes en jugement, et ne reçoit pas >> de présents; qui fait justice au pupille et à la » veuve; qui aime l'étranger et lui donne sa >> nourriture et son vêtement (Deut., x. 17, 18.). »

Parce que Dieu est grand, et plein en luimême, il se tourne, pour ainsi dire, tout entier à faire du bien aux hommes, conformément à cette parole: << Selon sa grandeur, ainsi est sa » miséricorde ( Eccli., 11. 23.). »

Il met une image de sa grandeur dans les rois, afin de les obliger à imiter sa bonté.

Il les élève à un état où ils n'ont plus rien à désirer pour eux-mêmes. Nous avons ouï David disant : «< Que peut ajouter votre serviteur à >> toute cette grandeur dont vous l'avez revêtu » (2. Reg., VII. 20; 1. Par., XVII. 18.) ? »

Et en même temps il leur déclare, qu'il leur donne cette grandeur pour l'amour des peuples. « Parce que Dieu aimoit son peuple, il vous a >> fait régner sur eux (2. Par., II. 11.). » Et encore : « Vous avez plu au Seigneur, il vous a placé sur le trône d'Israël; et parce qu'il ai>> moit ce peuple, il vous a fait leur roi pour » faire justice et jugement (3. Reg., X. 9.) »

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C'est pourquoi dans les endroits où nous lisons, que le royaume de David fut élevé sur le peuple; l'hébreu et le grec portent, pour le peuple. Ce qui montre que la grandeur a pour objet le bien des peuples soumis.

En effet, Dieu, qui a formé tous les hommes d'une même terre pour le corps, et a mis également dans leurs âmes son image et sa ressemblance, n'a pas établi entre eux tant de distinctions, pour faire d'un côté des orgueilleux, et de l'autre des esclaves et des misérables. Il n'a fait des grands que pour protéger les petits; il n'a donné sa puissance aux rois, que pour procurer le bien public, et pour être le support du peuple.

II. PROPOSITION.

Le prince n'est pas né pour lui-même, mais pour le public

C'est une suite de la proposition précédente, et Dieu confirmé cette vérité par l'exemple de Moïse.

Il lui donne son peuple à conduire, et en même temps il fait qu'il s'oublie lui-même.

Après beaucoup de travaux, et après qu'il a supporté l'ingratitude du peuple durant quarante ans, pour le conduire en la Terre promise, il en est exclus: Dieu le lui déclare, et que cet honneur étoit réservé à Josué ( Deut., XXXI. 7. ). »

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Quant à Moïse, il lui dit : « Ce ne sera pas vous qui introduirez ce peuple dans la terre que je >> leur donnerai (Num., xx. 12. ). » Comme s'il lui disoit : Vous en aurez le travail, et un autre en aura le fruit.

Dieu lui déclare sa mort prochaine (Ibid., XXVII. 13.); Moïse, sans s'étonner, et sans songer à lui-même, le prie seulement de pourvoir au peuple. «< Que le Dieu de tous les esprits donne un >> conducteur à cette multitude, qui puisse » marcher devant eux; qui le mène et le ramène, » de peur que le peuple du Seigneur ne soit >> comme des brebis sans pasteur (Ibid., 16, 17.). » Il lui ordonne une grande guerre en ces termes: << Venge ton peuple des Madianites, et puis >> tu mourras (Ibid., XXXI. 2. ). » Il veut lui faire savoir qu'il ne travaille pas pour lui-même, et qu'il est fait pour les autres. Aussitôt, et sans dire un mot sur sa mort prochaine, Moïse donna ses ordres pour la guerre, et l'achève tranquillement (Ibid., 3, 7.).

Il achève le peu de vie qui lui reste, à enseigner le peuple, et à lui donner les instructions qui composent le livre du Deuteronome. Et puis il meurt, sans aucune récompense sur la terre, dans un temps où Dieu les donnoit si libéralement. Aaron a le sacerdoce pour lui et pour sa postérité; Caleb et sa famille est pourvu magnifiquement; les autres reçoivent d'autres dons : Moïse rien; on ne sait ce que devient sa famille. C'est un personnage public né pour le bien de l'univers; ce qui aussi est la véritable grandeur.

Puissent les princes entendre que leur vraie gloire est de n'être pas pour eux-mêmes ; et que le bien public qu'ils procurent, leur est une assez digne récompense sur la terre, en attendant les biens éternels que Dieu leur réserve.

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teur signifie le prince: tant ces choses sont unies. « J'ai dit à Cyrus, dit le Seigneur : Vous êtes >> mon pasteur (Is., XLIV. 28, et alibi. ). » C'està-dire, vous êtes le prince que j'ai établi.

Ce n'est donc pas seulement Homère qui appelle les princes, pasteurs des peuples; c'est le Saint-Esprit. Cenom les avertit assez de pourvoir au besoin de tout le troupeau, c'est-à-dire, de tout le peuple.

Quand la souveraine puissance fut donnée à Simon le Machabée, le décret en est conçu en ces termes : « Tout le peuple l'a établi prince, et >> il aura soin des saints (1. Mach., XIV. 42.): » c'est-à-dire, du peuple juif, qui s'appeloit aussi le peuple des saints.

C'est un droit royal, de pourvoir aux besoins du peuple. Qui l'entreprend au préjudice du prince, entreprend sur la royauté : c'est pour cela qu'elle est établie ; et l'obligation d'avoir soin du peuple est le fondement de tous les droits que les souverains ont sur leurs sujets.

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Voici sur ces obligations du prince une belle sentence du Sage ( Eccli., XXXII. 1, 2. ). « Vous >> ont-ils fait prince ou gouverneur ? soyez parmi >> eux comme l'un d'eux: ayez soin d'eux, et >> prenez courage; et reposez-vous après avoir » pourvu à tout. »

Cette sentence contient deux préceptes.

1.er PRÉCEPTE. « Soyez parmi eux comme l'un » d'eux. » Ne soyez point orgueilleux; rendezvous accessible et familier; ne vous croyez pas, comme on dit, d'un autre métal que vos sujets : mettez-vous à leur place, et soyez-leur tel que vous voudriez qu'ils vous fussent, s'ils étoient à la vôtre.

2. PRECEPTE. « Ayez soin d'eux, et reposez>> vous après avoir pourvu à tout. » Le repos alors vous est permis: le prince est un personnage public, qui doit croire que quelque chose lui manque à lui-même, quand quelque chose manque au peuple et à l'état.

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