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dans le rouge, Herschel enfin en dehors du rouge. Seebeck vida le différend en démontrant que la position du maximum dépend de la nature du prisme employé. M. Melloni, depuis, a reconnu qu'il fallait de plus tenir compte de l'épaisseur du prisme, ce que Seebeck n'avait pas pu observer avec les instruments imparfaits mis à sa disposition. S'il avait été mieux pourvu, il est trèsprobable qu'il aurait fait la découverte capitale des différences existant entre les rayons calorifiques provenant de diverses sources, découverte qui suffirait à immortaliser M. Melloni. M. Arago découvrit en 1811 la propriété remarquable dont jouissent toutes les substances doublement réfringentes de dépolariser le rayon lumineux qui les traverse; il observa que quelques substances non cristallisées, certains sucres, par exemple, jouissaient de la même propriété, mais que l'action exercée par eux était différente dans divers points de leur masse. En répétant ces belles expériences avec un appareil qui augmentait le champ de la vision et permettait d'embrasser d'un seul coup d'œil tout l'ensemble du phénomène, Seebeck aperçut, non sans étonnement, ces belles figures diversement colorées qu'il a désignées sous le nom d'entoptiques. Distribuées dans toute l'étendue de la plaque; quadrangulaires dans les plaques carrées, circulaires dans les plaques rondes, trigones dans les plaques triangulaires, etc., elles varient d'arrangement comme aussi de couleur quand on tourne les plaques dans leur propre plan, et subissent des mutations soudaines et générales de teinte et de configuration quand on enlève par fracture une portion des plaques. Seebeck comprit sur-le

champ que ces phénomènes résultaient d'une tension inégale des différentes parties des plaques où on les observe, et il le prouva en modifiant les figures entoptiques déjà formées ou les faisant naître par l'application d'une pression artificielle, par le refroidissement subit des plaques chauffées et la trempe, etc., etc. Seebeck avait donc à la fois et découvert un brillant phénomène et trouvé son explication: l'Académie royale des Sciences de Paris couronna ses belles recherches en lui faisant partager avec le docteur Brewster un prix de 3,000 francs, et, mieux encore, en lui ouvrant son sein en qualité de membre correspondant. Parmi les phénomènes lumineux découverts en si grand nombre, de 1811 à 1815, il n'en est aucun, ou presque aucun, que Seebeck n'ait observé de son côté; de sorte qu'avec plus d'ambition ou d'empressement, avec moins de modestie ou d'abandon, il aurait beaucoup ajouté à ses titres de gloire. Citons quelques exemples: Il constata la polarisation du ciel bleu, il reconnut la propriété dont jouit une plaque de tourmaline taillée parallèlement à l'axe de ne laisser passer que le rayon polarisé perpendiculairement à ce même axe; il vit les anneaux colorés des plaques de spath d'Islande perpendiculaires à l'axe; il pressentit la rotation du plan de polarisation par le passage à travers certaines substances solides ou liquides, plusieurs mois avant d'apprendre que ces phénomèmes avaient été remarqués avant lui par MM. Arago, Wollaston et Biot, et que dans l'histoire de la science ils se rattacheraient à ces noms glorieux. Pour donner une idée de la patience avec laquelle Seebeck observait, pour montrer à quel point

il multipliait les expériences, nous citérons un passage d'une lettre qu'il écrivit à M. Biot et qui est datée de Nuremberg, 26 février 1816. « Le sucre dissous dans l'eau rétablit la transparence entre les piles croisées (ou, ce qui revient au même, dépolarise le rayon polarisé par son passage à travers une première pile de · lames parallèles), et cela d'autant mieux qu'il y a plus de sucre dans la dissolution: il diminue la transparence des piles dans leur position parallèle. Si l'on place une dissolution de sucre au-devant d'un verre rempli d'essence de térébenthine, l'ensemble des deux liquides n'est pas transparent entre les piles croisées... J'ai indiqué dans une de mes précédentes lettres (1) plusieurs huiles qui réta

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(1) Ces mots expriment nettement que Seebeck avait déjà entretenu M. Biot de la propriété dont jouissent certains fluides de dépolariser la lumière ou de faire tourner son plan de polarisation. Quelle était la date de la lettre à laquelle Seebeck renvoie, nous ne le savons pas. M. Biot, qui a gardé précieusement et publié les trois autres, dit en parlant de celle-ci : « M. Seebeck m'avait adressé une quatrième lettre sur les mêmes objets à une époque intermédiaire entre celle-ci. Mais je l'avais donnée à une personne qui n'est plus et on ne l'a pas retrouvée dans ses papiers, de sorte qu'elle l'a vraisemblablement échangée pour quelques autres autographes. Comptes rendus de l'Académie des sciences, tom. XV, pag. 95. Nous avons de la peine à croire qu'en l'absence de cette lettre M. Biot ait cru pouvoir résoudre d'une manière pleinement satisfaisante la controverse de la découverte du beau phénomène de la rotation des liquides. Herschel et après lui beaucoup de physiciens avaient dit en parlant de ce fait : « M. Biot et M. Seebeck paraissent avoir fait cette singulière et intéressante découverte à peu près dans le même temps.» M. Biot affirme dans ce passage on a fait au physicien allemand une trop belle part; il veut que la première observation de Seebeck soit postérieure de quatre mois aux communica tions qu'il fit à l'Académie vers la fin d'oc tobre 1815. Mais si la lettre perdue avait précédé de quatre ou cinq mois celle dont

que

SEE

blissent la transparence, si l'on fait agir l'une de ces huiles, par exemple celle de menthe poivrée, conjointement avec de l'essence de térébenthine; ces deux huiles étant renfermées dans des vases particuliers, les objets paraissent beaucoup plus nets qu'avec une seule des deux huiles. L'huile de cèdre combinée de même avec l'essence de térébenthine produit un effet pareil. Ces huiles existent donc de la même manière que l'essence de térébenthine, car cette dernière éclaircit le champ proportionnellement à son épaisseur. Plusieurs autres huiles exercent des actions semblables, d'autres ne rétablissent pas la transparence : ce sont celles d'hysope, d'origan, de cerfeuil, de camomille, d'œillet, d'anis, de thym, de mille-fleurs, de cumin, de cajeput, de marjolaine, de bergamotte, de lavande, de cassis, d'aneth, de valériane, etc...... II résulte au moins de cette lettre que Seebeck a constaté le premier l'action dépolarisante et par conséquent le pouvoir rotatoire du sucre; c'est un fait ordinaire en apparence, c'était en même temps le germe d'une des plus belles applications de la science à l'industrie. Aujourd'hui, avec le saccarimètre si ingénieux de M. Soleil et M. Biot, des tables calculées par en s'aidant des principes posés par M. Clerget, on peut, en portant la propriété caractéristique mise en évidence par Seebeck, déterminer avec la plus grande facilité, à un ou deux centièmes près, la quantité

nous avons cité un fragment, et qui est du 26 février 1816, la question de priorité resterait très-douteuse. Il est vraiment fâcheux que la plus importante des lettres soit précisément celle qui s'est perdue. Dans tous les cas, c'est bien M. Biot qui le premier a montré et mesuré la rotation à droite ou à gauche.

réelle de sucre contenue dans un mélange ou dans une dissolution donnée. Une simple expérience faite il y a trente ans, dans un des laboratoires d'une humble cité allemande, aura eu pour résultat d'établir sur ses seules bases raisonnables un impôt qui rapporte au Trésor français de nombreux millions. Tant de désintéressement, une si noble répugnance à défendre ses droits méritaient une éclatante compensation: elle ne se fit pas long-temps attendre, et, en 1821, Seebeck attachait son nom à l'une des magnifiques découvertes qui ouvrent un horizon nouveau et seront célébrées à jamais d'âge en âge. Seebeck, un jour inspiré par un bon génie, voulut étudier les modifications électriques qu'une élévation de température devait produire au contact de deux métaux hétérogènes. Il prit un cylindre de bismuth, et souda à ses deux bases les extrémités pliées rectangulairement d'une lame de cuivre. Il avait ainsi construit un rectangle dont un des côtés était formé de bismuth uni au cuivre par une double soudure. Au sein de ce rectangle il suspendit une aiguille aimantée, puis il chauffa l'une des soudures, en maintenant l'autre à la température de l'air ambiant; aussitôt l'aiguille dévia et devint perpendiculaire à sa première direction l'élévation de température de l'une des soudures avait donc donné naissance à un courant électrique intense: les phénomènes thermo-électriques étaient découverts et une pile nouvelle venait s'ajouter à celle de Volta. Son apparition fut saJuée par des transports d'enthousiasme faciles à expliquer, parce que l'on comprit sur-le-champ qu'elle rendrait possibles des recherches inabordables jusqu'alors. Et, en effet,

la pile thermo-électrique, ou le thermo-multiplicateur, a reçu mille applications fécondes et imprévues. M. Peltier, physicien français, la transforma en pince thermoscopique et constata, au grand étonnement du monde savant tout entier, l'existence d'un courant électrique produisant du froid: l'électricité voltaïque, qui jusque-là ne s'était révélée que par une chaleur intense et ses effets terribles de combustion, se montra froide tout à coup; au lieu d'étincelles brillantes, elle donna des glaçons. Entre les mains de MM. Novoli et Melloni cette même pile, unie au galvanomètre, devint un thermomètre d'une sensibilité en quelque sorte infinie: aucune chaleur, quelque peu intense qu'on la suppose, n'échappera désormais aux investigations de la science : la température des insectes, la chaleur dégagée. dans la combustion lente des substances phosphorescentes, celle des rayons lunaires, ont été non-seulement constatées, mais mesurées; on a exploré tout à la fois avec le merveilleux instrument et la température des parties les plus intimes du corps de l'homme et des animaux, et celle des fourneaux les plus embrasés, la température des mers les plus profondes et celle des hauteurs de l'atmosphère, etc., etc. Avec cette pile, enfin, M. Melloni nous a révélé la nature inconnue de la chaleur rayonnante, il a constaté des différences énormes entre des rayons calorifiques que l'on avait identifiés jusqu'à lui. Six grands phénomènes dominent la science aujourd'hui si vaste de l'électricité: 1o la découverte du courant électrique et de la pile; 2o l'action des courants sur l'aiguille aimantée ; 3° l'action des courants sur les courants; 4o la pile

thermo-électrique; 50 l'aimantation produite par les courants; 6° l'action sur l'aiguille aimantée des corps en mouvement, et plus généralement l'induction voltaïque et magnétique. Un de ces phénomènes appartient à Seebeck, et, par conséquent, son nom resplendira dans tous les siècles à côté de ceux des Volta, des Ersted, des Ampère, des Arago et des Faraday. Arrêtons-nous, en rappelant toutefois que Seebeck, dans sa note sur le magnétisme transversal, avait depuis long-temps devancé M. Faraday dans sa distinction tant exaltée des substances magnétiques et dia-magnétiques. L'illustre physicien de Berlin avait réellement reconnu que, placées sous la forme allongée entre les pôles d'un aimant, les diverses substances sont diversement influencées. Les unes, simplement magnétiques, étaient altérées et se dirigeaient suivant la ligne des piles; les autres, repoussées, prenaient une direction transversale; les troisièmes, enfin, n'étaient ni attirées ni repoussées, elles restaient indifférentes ou neutres. Nous avons prouvé surabondamment que Seebeck doit être placé au premier rang des physiciens qui se sont fait un nom célèbre par leurs expériences et leurs observations; sous le rapport de la théorie il fut beaucoup moins heureux; il a partagé avec Goethe le triste privilège de substituer des systèmes vagues et incohérents aux idées universellement admises. Lui aussi voulait que le rayon de lumière blanche fût simple et un ; il se refusait à reconnaître que le magnétisme eût des rapports intimes avec l'électricité, etc. Il est donc vrai que l'homme le plus heureusement pourvu des dons de la nature est encore incomplet et que la per

fection n'est pas dans la condition humaine. M-N-0.

SEEGER (CHRISTOPHE DENIS, baron de), général wurtembergeois, naquit en 1740, à Schockingen, où son père était pasteur. Ses parents l'ayant destiné à l'état ecclésiastique, il fréquenta pendant quatre ans les écoles de Blaubeuren et Babenhausen; mais au moment où il devait se rendre à Tubingen pour y continuer ses études, il changea de plan et entra comme cornette dans le régiment des cuirassiers de Phull, nouvellement organisé. Il fit la guerre dans la même année contre la Prusse, et se trouva à la malheureuse affaire de Fulde. Il devint l'année suivante lieutenant d'un bataillon de grenadiers, et fit plus tard le service d'aide-de-camp. On voit par un petit traité qu'il publia en 1762, à Tubingen, De l'influence des arts et des sciences sur l'art militaire, qu'il ne négligea point la littérature et tout ce qui pouvait orner son esprit. Le duc Charles l'employa dans différentes occasions comme inspecteur des travaux publics, des bâtiments, etc., et lui conféra, en 1768, le grade de capitaine. En 1770, il fut chargé par ce prince de lui présenter le plan d'un établissement destiné à l'éducation des jeunes jardiniers. Ce fut le premier germe de l'établissement qui acquit plus tard une si grande réputation sous les noms d'Académie de Charles, de Maison des orphelins militaires, de Pépinière militaire, et enfin d'Académie militaire. Seeger en fut nommé l'intendant en 1773, et dès lors la plus grande partie de ce qui s'y fit de brillant et d'utile fut son ouvrage. Lorsque après la mort du duc Charles l'établissement fut supprimé, Seeger quitta la carrière de l'éducation et rentra au ser

vice militaire. Nommé précédemment par les états de Souabe colonel et adjudant-général, il reçut, en 1795, le brevet de major-général des troupes du cercle de Souabe, et quand les Français entrèrent, en 1799, dans les bailliages septentrionaux du Wurtemberg, Seeger marcha contre eux avec le corps du général de Phull, et se distingua à Bieligheim et à Lochgau ; il contribua encore, par son activité et ses talents, au succès des combats de Sinzheim et de Wislock. Dans la campagne de 1800, on lui donna le commandement du contingent wurtembergeois, et ce fut à la tête de ce corps qu'il soutint plusieurs combats dans la Haute-Souabe, qu'il empêcha le 18 juin les ennemis de passer le Danube près de Dillingen, et qu'il protégea au-delà de l'Inn la retraite des Autrichiens. L'empereur d'Allemagne lui donna alors le titre de baron. En 1805, lorsque le Wurtemberg s'allia avec la France contre l'Autriche, Seeger fut nommé lieutenant-général et commandant du corps destiné à agir sous les ordres de Napoléon. Depuis, en 1806, il fut mis à la retraite et mourut à Blaubeuren, le 26 juin 1808. B-H-D.

SEGA (PHILIPPE ), né à Bologne, fut promu, en 1578, au siége épiscopal de Plaisance, et remplit, sous Grégoire XIII, les fonctions de légat en Belgique, en Espagne et en Portugal. I exerça, sous SixteQuint, les mêmes fonctions en Allemagne, et fut à cette occasion décoré des ordres impériaux. C'était, dit l'Estoile, un homme de peu de savoir, mais de beaucoup d'esprit et de jugement. De retour en Italie, il publia des ordonnances synodales pour son diocèse; puis il accompagna en France le cardinal Cajetan (voy. ce nom, VI, 490), légat de

Sixte-Quint auprès de la Ligue, et, lorsque ce légat fut rappelé, Sega resta à Paris et le remplaça. Il reçut, le 20 janvier 1591, du nouveau pape Grégoire XIV, un bref dans lequel le pontife rappelait tous les efforts que le saint - siége avait faits pour combattre l'hérésie, et promettait de nouveaux secours en argent et en troupes, s'ils étaient nécessaires pour assurer l'élection d'un roi catholique, seul parti propre à pacifier les discordes civiles auxquelles la France était en proie. Philippe Sega publia ce bref le 20 février, en l'accompagnant d'une lettre où il disait que sa lecture confirmerait les gens de bien dans leurs résolutions, réchaufferait les tièdes et confondrait ceux que leur obstination ou plutôt un fatal enchantement avait enchaînés à la suite des hérétiques. Le 15 janvier 1593, au moment de la réunion des États de la Ligue, Philippe Sega adressa une nouvelle exhortation aux catholiques, dans laquelle il reproduisit les mêmes sentiments avec plus de force et de développement. Il se présenta aussi dans cette assemblée et joignit inutilement ses efforts à ceux de l'ambassadeur d'Espagne pour faire décerner par les États la couronne de France à l'infante Isabelle, nonobstant la loi salique. Enfin, il menaça d'excommunication les ecclésiastiques qui se rendraient à Saint-Denis pour assister à l'abjuration de Henri IV, déclarant que ce prince ne pouvait être absous que par le pape (Clément VIII). Malgré la vive et longue opposition du légat, le roi, lors de son entrée à Paris, le traita avec égard; il lui envoya Duperron, évêque d'Évreux, pour lui annoncer qu'il le recevrait convenablement s'il jugeait à propos de venir le voir,

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