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vention dont il vous a parlé sous le sceau du secret. Je vais placer aujourd'hui même sous les yeux de l'Empereur la dépêche dans laquelle vous me faites part de la confidence du Principal Secrétaire d'État, et je ne doute pas que Sa Majesté ne se montre très sensible à cette preuve des dispositions amicales de la Reine et de son Gouvernement.

Ma dépêche d'hier (1), que vous recevrez avec celle-ci, résume nos dernières nouvelles de Berlin, qui sont du reste en parfait accord avec celles que Lord Stanley vous a lui-même communiquées. D'après un télégramme de M. de Talleyrand en date du 22, le Prince Gortchakoff attache peu d'importance aux paroles de M. le Comte de Bernstorff, qu'il considère comme arriérées et n'étant plus en rapport avec la situation actuelle. Le Prince de Metternich, que j'ai vu ce matin, m'a montré une dépêche adressée le 17 par le Baron de Beust au Ministre d'Autriche à Berlin. Dans cette pièce, qui serait une réponse au compte rendu de M. de Wimpffen du 14(2), M. de Beust témoigne la satisfaction de l'accueil fait aux ouvertures du Cabinet de Vienne par le Comte de Bismarck.

D'un autre côté, M. de Metternich m'a entretenu de la misque M. de Tauffkirchen a remplie successivement à Berlin et

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à Vienne.

[Le Marquis de Moustier parle ensuite de la mission Tauffkirchen dans des termes presque identiques à ceux de sa dépêche du même jour à Benedetti.]

Je suppose que le Comte Apponyi aura été informé également des détails de la mission de M. de Tauffkirchen. Il vous sera facile de vous en assurer, ainsi que de la mesure dans laquelle il aura jugé convenable d'en entretenir Lord Stanley. Vous apprécierez vous-même d'après les indications que vous aurez recueillies l'usage que vous pourrez faire avec le Principal Secrétaire d'État des données que je vous transmets.

(1) N° 41.

(2) Cf. Moustier à Benedetti, 18 avril, n° 83.

4793. LE MARQUIS DE MOUSTIER À FOURNIER, MINISTRE À STOCKHOLM, ET À DOTÉZAC, MINISTRE À COPENHAGUE. (Très confidentielle. Minute. Suède, 337, n° 5.)

[Paris, 23 avril (1) 1867.

La déclaration que j'ai faite, le 8 de ce mois, par ordre de Sa Majesté, au Sénat et au Corps législatif, vous a déjà mis à même d'apprécier les vues qui ont dirigé le Gouvernement de l'Empereur dans l'affaire du Luxembourg. Les événements qui se sont passés l'année dernière en Allemagne et les changements considérables qui en sont résultés dans les relations des États germaniques entre eux ainsi que dans leur situation vis-à-vis des autres Puissances européennes, ne pouvaient laisser les Cabinets indifférents en présence de l'incertitude prolongée qui pesait sur la position internationale du Limbourg et du Grand-Duché de Luxembourg. Nous avions, en particulier, le droit d'espérer que cette question serait résolue de manière à ne pas constituer sur notre frontière et sur celle de la Belgique une extension nouvelle au profit d'une Puissance dont l'influence et le territoire venaient de recevoir de si considérables accroissements. Cependant, préoccupés avant tout des intérêts de la paix générale, nous nous sommes abstenus de toute observation sur la lenteur que le Cabinet de Berlin mettait à régler avec qui de droit les conditions d'existence du Limbourg et du Luxembourg.

Le Roi des Pays-Bas, pouvant toutefois moins que nous encore rester dans une pénible indécision sur des questions qui le touchaient si directement, a été conduit à nous entretenir de ses appréhensions, et c'est dans de telles circonstances, à une date très récente, que nous avons été naturellement amenés à ouvrir avec la Cour de La Haye des pourparlers confidentiels. Dans l'examen auquel a donné lieu plus spécialement l'avenir du GrandDuché, la possibilité de la cession de cette province à la France a été admise par le Roi, qui s'en croyait et s'en croit encore seul légitime Souverain, comme par le Gouvernement de l'Empereur, qui, ne poursuivant aucun projet d'agrandissement territorial, se préoccupait uniquement d'assurer à nos frontières leurs condi

(1) Cette dépêche a été expédiée à Copenhague le 26 avril, sous le no 4.

tions légitimes de sécurité. Il était loin de notre pensée de vouloir léser aucun droit, et la cession, pour nous, était subordonnée d'avance aux trois conditions que j'ai fait connaître devant les Chambres.

penser

Nous n'avions, en particulier, nul désir d'inquiéter la Prusse, et les entretiens intimes qui jusqu'au dernier moment ont eu lieu entre notre Ambassadeur à Berlin et le Premier Ministre de S. M. le Roi Guillaume étaient de nature à ne laisser subsister aucune incertitude à cet égard. Nous n'en étions que plus fondés à que la Prusse, de son côté, évitant d'étendre son influence à notre détriment et tenant compte des nécessités de notre situation défensive, envisagerait l'arrangement plutôt politique que territorial qui devait faire passer pacifiquement le Grand-Duché dans les mains de la France, comme une occasion d'établir entre l'Allemagne et nous un échange de bons sentiments qui ne pouvait qu'assurer la tranquillité de l'Europe.

Nous étions en tout cas, et nous sommes encore tellement éloignés de faire une cause de guerre d'une combinaison dans laquelle nous avions vu un gage de paix, que nous avons admis sans hésiter l'examen des traités et l'intervention diplomatique des grandes Puissances.

Nous avons lieu d'être satisfaits des bonnes dispositions manifestées par l'Angleterre, l'Autriche et la Russie, et, pleins de confiance dans les sentiments d'équité dont elles se montrent animées, nous leur laissons le soin de régler avec la Prusse une question qui est avant tout à nos yeux une question de droit public et d'intérêt général. Par le fait de la dissolution de la Confédération germanique, le Grand-Duc est rentré dans la plénitude de sa souveraineté. Depuis lors, selon les expressions de M. de Bismarck, le Grand-Duché jouit de la même indépendance de caractère européen que le Royaume des Pays-Bas. Le Luxembourg se trouve donc affranchi en droit de la servitude militaire. dont il était grevé au profit de la Confédération germanique, et nous avons la persuasion que les Cabinets dont nous avons accepté les bons offices décideront la Prusse à renoncer des prétentions qui n'ont plus de base puisqu'elle a elle-même anéanti les traités sur lesquels elles se fondaient, sans demander ni l'assentiment préalable, ni la sanction subséquente de l'Europe.

Quelle que puisse être d'ailleurs l'issue des négociations actuelles, nous sommes certains d'avance que le Cabinet de Stockholm en suivra le développement avec le plus sincère intérêt. L'émotion que cette crise a causée en Suède et en Norvège (2) en est pour nous la preuve, et nous autorise à penser que, dans cette grave circonstance, le Gouvernement et les populations continueront à s'inspirer envers nous de leurs sympathies traditionnelles, ainsi que de l'évidente communauté des intérêts.

4794. BENEDETti, Ambassadeur à Berlin, au Marquis de Moustier. (Télégr. Déchiffrement. Prusse, 363.)

Berlin, 23 avril 1867, 2a 25 soir.

Aux termes d'une disposition insérée dans la loi électorale pour l'élection du Parlement, la question (3) fédérale, après avoir été votée par cette assemblée, doit être soumise aux Chambres particulières des États de la Confédération. C'est dans ce but qu'on a convoqué celles de la Prusse, et il était entendu qu'elles seraient convoquées sans retard (1). On présume que leur session durera trois semaines environ. Je vous écris.

Le Grand-Duc de Mecklembourg-Schwerin, neveu du Roi, venu à Berlin pour assister au mariage du Comte de Flandre, a fait viser pour son départ d'urgence à la Chancellerie de l'Ambassade son passeport pour la France sous le nom de Comte de Widin. J'ignore à quel moment il se propose de partir.

4795. BENEDETTI, AMBASSADEUR À BERLIN, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Télégr. Déchiffrement. Mémoires et documents, Hollande, 150.)

Berlin, 23 avril 1867, 51 20 soir.
(Reçu à 7 15 soir.)

J'ai lieu de considérer comme imminente la publication d'une ordonnance interdisant l'exportation des chevaux. On m'assure en

(1) Pour Dotézac : «Copenhague».

(2) Pour Dotézac : «Eu Danemark".

(3) Constitution?

(4) Cf. Moustier à Benedetti, 21 avril, n° 85.

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même temps qu'au Ministère de la Guerre tout est prêt pour d'autres mesures, mais qu'il n'en a encore été ordonné aucune.

4796. BENEDETTI, AMBASSADEUR À BERLIN, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Déchiffrement. Prusse, 363, no 102.)

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Berlin, 23 avril 1867.

(Cabinet, 25 avril; Dir. pol., 26 avril.)

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J'ai reçu ce matin les dépêches que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser sous les nos 84 et 85 (1).

Ainsi que je m'empresse de vous l'annoncer par le télégraphe, les Chambres prussiennes sont convoquées pour recevoir communication de la Constitution fédérale votée par le Parlement et l'approuver. Il avait été en effet entendu, et décidé par une disposition particulière insérée dans la loi électorale déterminant le mode d'élection des Députés pour cette dernière assemblée, que son œuvre serait soumise à l'approbation des Chambres particufières de tous les États confédérés. J'ai plusieurs fois, dans ma correspondance, fait mention de ces arrangements, et j'avais l'honneur notamment de vous annoncer dans ma dépêche du 10 de ce mois, no 79, que les Chambres prussiennes seraient réunies immédiatement après Pâques. Leur session, pense-t-on, durera un peu plus de trois semaines. Les libéraux modérés y ayant acquiescé au sein du Parlement, il y a tout lieu de croire que le pacte fédéral ne rencontrera aucune difficulté sérieuse dans les Chambres prussiennes. Mais cet acte, modifiant la Constitution de la Prusse, doit subir l'épreuve de deux lectures qui, aux termes de la Constitution elle-même, doivent se succéder à vingt et un jours d'intervalle.

Nous ne saurions dans cette convocation voir le dessein prémédité de faire intervenir la Représentation nationale dans la question du Luxembourg. Il y a là une simple coïncidence, mais nous ne saurions nous dissimuler qu'elle peut donner lieu à des incidents regrettables. Je suis cependant convaincu qu'il dépend du

(1) Toutes deux du 21 avril.

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