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la paix par ses accusations sans fondement, nous ferons appel à l'équité de tous les Cabinets européens, qui ne se méprennent pas sur le véritable état des choses et qui savent tous les gages que nous donnons en ce moment de notre sincère désir de paix. Le Comte Goltz reconnaît également que les instructions envoyées à notre Plénipotentiaire à la Conférence et nos communications aux Puissances sont un démenti plus que suffisant à tous les rapports que reçoit le Cabinet militaire du Roi et aux conclusions. qu'on en veut tirer.

Les renseignements sur les achats de chevaux de la Prusse me sont garantis comme certains par le Ministre de la Guerre. Servez-vous de ces renseignements pour protester auprès de vos Collègues et auprès de M. de Bismarck.

5009. LE MARQUIS DE MOUSTIER AUX AGENTS DIPLOMATIQUES DE L'EMPEREUR À LONDRES, BERLIN ET SAINT-PETERSBOURG (1). (Minute. Angleterre, 740, no 50.)

[Paris,] 8 mai 1867.

Je vous ai fait part, dans ma dépêche du 23 avril dernier (2), des indications qui m'avaient été transmises sur le but de la mission dont M. de Tauffkirchen a été récemment chargé par le Gouvernement bavarois auprès des Cabinets de Berlin et de Vienne. J'avais jugé utile de les porter également à la connaissance du Ministre de l'Empereur à Munich, en le priant d'entretenir à l'occasion le Prince de Hohenlohe de la démarche dont sa Cour avait pris l'initiative (3).

Le Ministre des Affaires étrangères n'a pas nié l'exactitude des informations qui m'avaient été transmises, et s'est borné à chercher l'explication de sa conduite dans les difficultés de la situation faite au Cabinet de Munich par le traité secret du 23 août (4),

(1) Cette dépêche ne fut adressée à Berlin et à Saint-Pétersbourg que le

13 mai.

(2) Pour Saint-Pétersbourg seulement : «Je vous ai fait part dans une de mes dernières dépêches...». Il s'agit de la dépêche de Moustier du 25 avril, n° 25.

(3) Cf. Moustier à des Méloizes, 26 avril. (4) Cf. des Méloizes à Moustier, 1'

⚫r mai.

Le Prince de Hohenlohe est convenu que M. de Tauffkirchen, pour obtenir l'adhésion du Gouvernement autrichien à une nouvelle alliance des Cours du Nord, avait été autorisé à lui offrir, au nom de la Prusse, la garantie des territoires allemands et non allemands de l'Empire. L'Envoyé bavarois avait été chargé de faire entrevoir l'éventualité d'un accord avec le Cabinet de SaintPétersbourg, en dehors duquel, toutefois, ces ouvertures ont eu lieu, et dont on avait simplement fait espérer le concours. Je suis donc en mesure de confirmer de tous points les détails que je vous ai communiqués sur la mission du Comte de Tauffkirchen, et, si l'étrangeté de cette démarche avait pu nous faire concevoir quelques doutes, ils auraient été dissipés par l'aveu même du Premier Ministre du Roi de Bavière. Les nouvelles informations que j'ai reçues d'autre part précisent encore davantage tout ce que nous savions déjà à ce sujet, et nous sommes pleinement édifiés aujourd'hui sur le caractère et le but de l'alliance qu'on a essayé de reconstituer contre nous.

5010. LE MARQUIS DE MOUSTIER AU PRINCE DE LA TOUR D'AUVERGNE, AMBASSADEUR À LONDRES. (Minute. Angleterre, 740, no 51.)

[Paris, ] 8 mai 1867.

[Le Marquis de Moustier communique au Prince de La Tour d'Auvergne la dépêche de Benedetti du 4 mai, no 123.]

5011. LE MARQUIS DE MOUSTIER AU PRINCE DE LA TOUR D'AUVERGNE, AMBASSADEUR À LONDRES. (Minute. Angleterre, 740, no 52.)

[Paris,] 8 mai 1867.

[Le Marquis de Moustier rappelle au Prince de La Tour d'Auvergne sa dépêche du 5 mai sur les inconvénients du maintien du Luxembourg dans le Zollverein. Il lui envoie à ce sujet un travail où il pourra puiser des données utiles (1).]

(1) Cf., ci-après, la note pour le Ministre.

ORIG. DIPL.

XVI.

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IMPRIMERIE NATIONALE

5012. NOTE POUR LE MINISTRE. (Orig. Mémoires et documents, Hollande, 150.)

Paris, mai 1867.

Conséquences de la neutralisation du Grand-Duché de Luxembourg, au point de vue de la situation douanière.

Le Grand-Duché de Luxembourg est entré dans le Zollverein, le 8 février 1842, par suite de l'accession du Roi Grand-Duc aux traités d'union douanière intervenus entre la Prusse et les principaux Gouvernements allemands en 1833.

Toutes les fois que, depuis cette époque, le pacte fondamental du Zollverein a été renouvelé, le Grand-Duché s'est maintenu dans l'association par un simple acte d'adhésion, dont le dernier porte la date de juin 1864.

La guerre qui a éclaté en Allemagne dans le courant de l'année dernière a eu pour conséquence la rupture des traités de toute nature qui existaient entre les parties belligérantes. Toutefois, dès le rétablissement de la paix, la Prusse a stipulé le renouvellement des conventions constitutives du Zollverein, en у introduisant une clause qui laisse à chacune des parties contractantes la faculté de dénoncer les traités dans un délai de six mois. Le bénéfice de cette disposition est acquis au Roi Grand-Duc, qui peut ainsi sortir à son gré de l'association.

On sait d'ailleurs que la Constitution que les États de la Confédération du Nord de l'Allemagne viennent d'adopter rend nécessaire la révision du pacte constitutif du Zollverein, et, par suite, la révision de tous les traités qui unissent entre eux les membres de l'ancienne association douanière.

Aucune obligation contractée envers une Puissance étrangère ne restreint donc la liberté d'action du Souverain du GrandDuché, qui demeure maître, après être sorti du Zollverein, de régler comme il l'entendra la situation douanière du Luxembourg.

Si des considérations politiques doivent faire écarter l'hypothèse soit du maintien dans le Zollverein du territoire qui va être neutralisé, soit de son accession douanière avec la France, il

ne reste au Grand-Duc qu'à choisir entre l'autonomie douanière du Grand-Duché ou son association à la Belgique.

Il ne peut être question d'établir une ligne de douanes autour d'un pays dont la superficie n'est que de 260,000 hectares et qui ne compte que 206,000 habitants.

L'autonomie impliquerait donc nécessairement la suppression complète des douanes aux frontières du Grand-Duché. Les intérêts économiques du pays pourraient, à la rigueur, s'accommoder d'un pareil régime, parce que les marchés voisins resteraient ouverts à ses exportations, consistant principalement en matières premières admises en franchise tant en France et en Belgique que dans le Zollverein; mais il faudrait pourvoir aux besoins du Trésor. Or, sur un revenu total de 3,600,000 francs, le produit des douanes figure, dans ces dernières années, pour 660,000 francs.

On se borne à indiquer cette première combinaison, qui, dans la pratique, soulèverait de graves difficultés, et qui ne paraît pas d'ailleurs répondre aux vœux des populations. L'union douanière avec la Belgique, telle est donc la conclusion à laquelle on se trouve forcément amené.

Quelles en seraient les conséquences pour le Luxembourg au point de vue économique? La substitution du marché belge, qui ne compte que cinq millions de consommateurs, à celui du Zollverein, n'aurait pas les résultats fâcheux qu'on pourrait redouter à première vue. Comme on l'a déjà dit, l'exportation luxembourgeoise consiste principalement en minerais, plâtres, écorces ou pierres à bâtir, qui sont admis sans droits dans le Zollverein. Quelques industries peu importantes, la draperie, les fabriques de papier peint, les hauts fourneaux, auraient à souffrir de la concurrence belge; d'autres, au contraire, la brasserie, les filatures de laine à tricoter, les fabriques de flanelles et de molletons, la faïencerie, etc., trouveraient sur le marché belge un écoulement plus avantageux que sur celui du Zollverein. En résumé, le changement se traduirait par un déplacement d'intérêts où les profits compenseraient largement les pertes. On croit devoir insister sur ce fait que le Luxembourg, si riche en minerais de fer, ne contient aucun gîte houiller; la Belgique, au contraire, qui fournit du charbon à toute l'Europe, est obligée de demander en grande partie à l'étranger les minerais oligistes que le bassin

de la Sarre contient en quantités inépuisables. Aussi, depuis l'ouverture du chemin de fer qui met le Grand-Duché en relation avec Charleroi, l'échange du coke belge contre les minettes luxembourgeoises s'est-il développé sur une grande échelle. Dès à présent, on évalue à cinquante pour cent la part du commerce avec la Belgique dans le total des importations et exportations du Luxembourg; la Prusse et les autres pays se partagent l'autre moitié. Cette proportion ne peut d'ailleurs manquer de se modifier encore à l'avantage de la Belgique, depuis que le GrandDuché est relié avec Liége par le chemin de fer des Ardennes. Les usines du nord du royaume n'ont pas moins besoin que celles de l'ouest de minerais oligistes, et on compte avec raison sur le mouvement qui va se produire entre les usines luxembourgeoises et les usines du bassin de la Meuse pour alimenter le trafic du nouveau chemin de fer.

Il nous paraît donc démontré que les intérêts économiques du Grand-Duché trouveront de préférence leur satisfaction dans l'association douanière avec la Belgique. Au point de vue fiscal, le contingent attribué au Luxembourg dans la répartition des produits du Zollverein est environ de 660,000 francs; uni à la Belgique, le Grand-Duché ne percevrait guère que 535,000 francs à titre de revenu douanier, à raison de 2.60 par tête d'habitant.

La différence des produits s'explique par la différence des tarifs, celui de la Belgique étant moins fiscal que celui du Zollverein; il paraîtrait facile de compenser par l'analogue augmentation des autres impôts le déficit qui résulterait en définitive de la diminution de l'un d'eux.

Nous n'avions pas à examiner l'hypothèse d'une union douanière du Grand-Duché avec le Royaume des Pays-Bas, puisque la séparation des deux territoires rend une semblable combinaison entièrement impossible. Après avoir indiqué les principales raisons qui paraissent militer pour une association du Luxembourg avec le Royaume contigu, il ne nous reste qu'à signaler l'opinion émise récemment par le Président de la Chambre de Commerce de Luxembourg en vue des changements qui se préparent:

Si le Grand-Duché reste attaché à l'Allemagne par le Zollverein, on peut d'avance le considérer comme devant fatalement

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