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Ministère et, livré à lui-même, serait-il porté à faire des démarches qui ne semblent pas en harmonie avec les actes de ses Conseillers habituels? Ce sont des questions qu'il est plus facile de poser que de résoudre. Mais, quel que soit le motif qui l'a inspirée, la démarche faite par M. de Freydorf au nom de son Souverain méritait d'être signalée à Votre Excellence.

5055. LE COMTE D'ASTORG, MINISTRE À DARMSTADT, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Orig. Hesse-Darmstadt, 30, no 28.)

Darmstadt, 12 mai 1867.

(Cabinet, 14 mai, Dir. pol., 15 mai.)

[Le Comte d'Astorg rappelle au Marquis de Moustier l'importance de la question de l'entrée de la Hesse dans la Confédération du Nord et la démarche qui a été faite, à ce sujet, au Parlement de Berlin (1). Quelques Députés ont déjà présenté à la Chambre hessoise une proposition en ce sens. Régulièrement, la discussion ne doit venir que dans quelques semaines; mais M. de Bismarck pourrait faire reparaître cette question quand il le voudrait. Le Comte d'Astorg ne serait pas étonné de voir le Parlement hessois voter pour la Prusse. Il sait de bonne source que M. de Dalwigk serait disposé, en ce cas, à tenir le vote pour non avenu. D'ailleurs, à moins d'événement imprévu, l'entrée de la Hesse dans la Confédération se ferait tout de même, lentement mais sûrement.]

5056. LE BARON FORTH-ROUEN, MINISTRE À DRESDE, au Marquis DE MOUSTIER. (Confidentiel. Orig. Saxe, 143, no 48.)

[Dresde,] 12 mai 1867.
(Cabinet, 15 mai; Dir. pol., 20 mai.)

suite

Bien que ce qui suit n'ait qu'un intérêt rétrospectif, par de l'heureuse solution donnée hier soir au conflit concernant le Luxembourg, je crois cependant qu'il est bon que Votre Excel

(1) Cf. Benedetti, 10 avril, no 78; d'Astorg, 12 et 26 avril.

lence connaisse ce que la Prusse faisait en Allemagne pendant qu'on négociait à Londres.

Dans ma dépêche n° 47 du [6] de ce mois, j'écrivais à Votre Excellence que le Représentant de la Saxe à Berlin mandait que les Ministres prussiens, tout en étant parfaitement informés au sujet des immenses armements qui se faisaient en France, avaient décidé de ne pas imiter en cela le Gouvernement de S. M. l'Empereur, et d'éviter toute mesure de réciprocité qui pourrait avoir pour résultat de rendre, plus difficile l'oeuvre pacifique des Puissances à la veille de se réunir en conférence. En même temps que M. de Koenneritz était invité à faire cette confidence au Gouvernement saxon, le Ministre prussien à Dresde recevait, avec ordre de les mettre sous les yeux du Baron de Friesen, les rapports de nombreux émissaires que la Prusse entretient en France, chargés d'espionner et de rendre comple des armements qui s'y font. On donnait en même temps connaissance des demandes du Comte de Goltz et des réponses peu satisfaisantes faites à l'Ambassadeur de Prusse au sujet de ces mêmes armements. Enfin, pour faire croire à un état de choses. des plus graves, on insérait dans la Gazette provinciale des lignes destinées à frapper vivement les esprits, en accentuant fortement sur la violence faite à la Prusse, qui ne demandait qu'à vivre en paix avec tout le monde. . . (1) Le journal de M. de Bismarck, après avoir énuméré pompeusement les armements qui se faisaient en France et fait ressortir la modération extrême de la Prusse, ajoutait «Mais, d'un autre côté, du moment que ces préparatifs dépasseront une certaine limite, la Prusse ne pourra y assister en toute tranquillité, quel que soit son désir de maintenir la paix, et quelle que soit sa confiance dans les intentions. pacifiques du Gouvernement de l'Empereur."

C'est absolument de cette manière que l'on procédait contre l'Autriche, il y a un an. Tant de machinations n'ont produit que peu d'effet sur le Gouvernement saxon, lequel, dans son bon sens, a fait observer que ce n'était pas à la Prusse, si puissamment armée, à trouver mauvais que ses voisins adoptent telle ou telle mesure, pour n'être pas pris au dépourvu, comme cela est

(1) Les points de suspension sont dans le texte.

arrivé à l'Autriche intimidée par les accusations sans fin parties de Berlin. Certaines particularités que j'étais à même de citer au Baron de Friesen l'ont affermi dans son opinion qu'il y avait dans toutes ces démarches de la Prusse un jeu pour exciter les Fédérés du Nord à presser les armements, et obtenir le même résultat des États du Sud, si faciles à effrayer, comme n'ayant pas la conscience nette à l'égard de la France. Les intentions pacifiques du Gouvernement de S. M. l'Empereur devaient être appréciées à Berlin, dès le début du conflit. Pourquoi donc s'être donné tant de mal pour faire croire le contraire au reste de l'Allemagne? A cette occasion, on se demande ce qui a été stipulé à Londres, au sujet de l'évacuation du Luxembourg, et les délais fixés pour le complet accomplissement de cette mesure.

Mon Collègue de Prusse, que je signalais à Votre Excellence comme très modéré, cherchait dans les derniers jours à faire de la propagande au sujet des armements de la France. Il en paraissait convaincu, et en parlait avec une humeur extrême. Il racontait que, quelqu'un lui ayant dit que la question du Luxembourg avait été arrangée à Biarritz, il avait cru devoir demander à ce sujet des instructions à M. de Bismarck, lequel aurait répondu par le télégraphe de nier formellement le fait.

[La fin de la dépêche est consacrée à quelques informations sur le séjour des Prussiens à Dresde.]

5057. MAHON, VICE-CONSUL À EICH, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Confidentielle. Orig. Pays-Bas, Eich-Luxembourg, 6, no 30 (1).)

Eich, 12 mai 1867.
(Cabinet, 13 mai.)

Nonobstant les nouvelles rassurantes venues de Londres depuis quelques jours, la plus grande activité ne cesse de régner dans les travaux de la forteresse. De plus, on apporte constamment

(1) En tête, note au crayon bleu : «Envoyer en clair par la poste copie de cette dépêche à : 1° Londres; 2° Berlin; 3° Vienne; 4° Saint-Pétersbourg." Note au crayon rouge: «Envoyé copie au Ministre de la Guerre. Idem à

M. de Saint-Paul."

des approvisionnements de toutes sortes. Ces jours derniers, c'étaient des effets d'habillement et des havresacs. Aujourd'hui, ce sont des munitions. Le chef de gare de Luxembourg a reçu avis de l'agent prussien des chemins de fer qu'il arriverait cet après-midi, par train de marchandises, un wagon de poudre, soit environ cinq mille kilogrammes, destiné à la garnison. Je sais que des ordres adressés de Berlin le o à l'autorité militaire de Luxembourg avaient toujours le même caractère belliqueux. Le fait m'est certifié par un homme des plus honorables et généralement très bien renseigné, qui le tient d'officiers supérieurs du génie avec lesquels il est en relations journalières.

9

5058. Baudin, MINISTRE À LA HAYE, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Télégr. Déchiffrement. Mémoires et documents, Hollande, 150.)

La Haye, 12 mai 1867, 750 soir.
(Reçu à 11h3/4 soir.)

Depuis le refus de conclure le traité de garantie dont je vous ai rendu compte il y a huit jours (1), je n'ai revu qu'une fois M. de Zuylen, et il n'a été question de rien. Je sais qu'il persiste dans son opposition, et n'a même pas fait part de notre offre à ses Collègues. Le Prince d'Orange, très ardent pour nous, m'a promis de voir le Roi; mais je n'espère pas grand chose de ce côté. J'ai parlé du fait à plusieurs des Ministres. Ils sont moins contraires à l'alliance que le Ministre des Affaires étrangères; mais ils ont peur aussi de se compromettre vis-à-vis de la Prusse, et n'osent pas émettre une opinion contre leur Collègue, à qui ils laissent un contrôle absolu sur les Affaires étrangères.

Dans ces circonstances, et après le traité signé hier à Londres, vous convient-il que j'insiste? Si même on revenait à nous, n'y aurait-il pas lieu de nous montrer blessés et de nous faire prier? En tout cas, quelle serait la durée du traité? Je vous demande tout cela parce que je dois voir, demain lundi, M. de Zuylen.

(1) Cf. Baudin, confidentielle, 4 mai.

5059. LE PRINCE DE LA TOUR D'AUVERGNE, AMBASSADEUR À LONDRES, AU MARQUIS DE MOUSTIER. (Orig. Angleterre, 740, no 114 (1).)

Londres, 12 mai 1867. (Cabinet, 13 mai; Dir., pol., 16 mai.)

[Le Prince de La Tour d'Auvergne accuse réception de la dépêche du Marquis de Moustier, no 52, du 8 mai. Il sera bien difficile d'introduire dans le programme de la Conférence, postérieurement à son ouverture, la question de la sortie du Luxembourg du Zollverein.]

Je n'en ai pas moins fait quelques insinuations à cet égard à certains de mes Collègues, mais je me suis confirmé dans ce sentiment qu'ils désiraient vivement que la discussion fût renfermée dans le cercle des questions déterminées d'avance d'un commun accord. MM. les Plénipotentiaires luxembourgeois ont du reste, ainsi que Votre Excellence le verra par les protocoles de la Conférence (2), cru devoir poser la question de leur séparation du Zollverein, et M. l'Ambassadeur de Prusse, appuyé par la majorité de ses Collègues, a déclaré que cette question était tout à fait en dehors du programme adopté, et a ajouté que d'ailleurs il était sans instructions pour la traiter. Il était en effet difficile, sans un accord préalable, de donner à cette question un caractère européen, et le Roi des Pays-Bas semblerait appelé, de préférence à tout autre, à demander, en raison de la sortie du Luxembourg de la Confédération germanique, la dissolution des liens qui l'attachaient au Zollverein. En tout cas, c'est là une question complexe et délicate, dont la solution doit être préparée d'avance par des démarches diplomatiques.

(1) En tête, au crayon : «Berlin.»>

(2) Cf. le protocole n° 2 de la séance du 9 mai, dans les Doc. diplom., 1867, Affaire du Luxembourg, p. 71-72, et dans les Arch. diplom., 1867, t. II, p. 763.

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