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« D'autre part, les vêtements d'hiver nous arrivent, et déjà la capote à capuchon, le paletot en peau de mouton dominent dans nos camps. Le soldat supportera noblement et courageusement l'épreuve de la mauvaise saison, se voyant ainsi l'objet de soins nouveaux pour lui et qui témoignent de tant de sollicitude pour sa situation de la part de l'empereur et de son ministre.

« Le gouvernement turc m'a promis six mille tentes coniques, qui sont fort recherchées ici parce qu'elles résistent micux que les nôtres aux vents très-violents de ces contrées.

« Je puis vous assurer, Monsieur le maréchal, que l'armée devient d'une rare solidité, et vous ne sauriez imaginer à quel point nos jeunes gens, tout-à-coup mûris par la grandeur de la lutte, deviennent vite de vieux soldats. Vous n'auriez pas vu sans un vif sentiment de satisfaction des lignes déployées rester calmes et immobiles sous un feu de canon que lord Raglan m'a déclaré être supérieur à celui qu'il avait entendu à Waterloo.

« Je vous donne ces détails parce qu'ils ne peuvent manquer de vous intéresser vivement, de vous rassurer en même temps, enfin de vous donner la mesure de la confiance que m'inspirent mes troupes.

« Les nouvelles divisions trouveront ici des aînées qui leur donneront de bons exemples.

. Veuillez agréer, etc. »

Malheureusement, cette amélioration du temps ne devait pas être de longue durée, comme on peut le voir par cette autre dépêche, écrite à cinq jours de date de la première :

<<< Devant Sébastopol, 3 décembre 1854.

<< La pluie tombe à torrents. Nos chemins sont défoncés, nos tranchées remplies d'eau, et toutes nos opérations, comme

la plupart de nos travaux, restent suspendues. L'ennemi est immobile par les mêmes causes et par celles que j'ai antérieurement exposées.

<< Malgré ces épreuves le moral de tous est excellent, et nous tenons ferme, prêts à recommencer nos opérations dès que le temps et l'état des routes le permettront. »>

CHAPITRE X.

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Traité du 2 décembre 1854 entre l'empereur d'Autriche, d'une part, la France et l'Angleterre, de l'autre. Nouvelles négociations. Ouverture du Parlement anglais. Discours de Napoléon III à l'ouverture de la session législative. Appréciation de ce discours par divers publicistes. - Nouveau manifeste de l'empereur Nicolas. chatka et en Laponie. mandement de la flotte. Nicolas.

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- Rapports du général Caprobert. Expéditions au Kamt

- La guerre en Asie. L'amiral Hamelin quitte le comCombats de chaque jour. Mort de l'empereur

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Malgré les rigueurs de la saison, les armées alliées recevaient presque journellement de nouveaux renforts, en hommes, en chevaux, en matériel de siége. Bientôt l'Autriche, qui avait fait un premier pas en faveur des puissances occidentales, en occupant les provinces danubiennes, du consentement du sultan et contre la volonté de la Russie, l'Autriche, disons-nous, parut vouloir se rapprocher des alliés, et le 2 décembre 1854 fut conclu entre l'empereur François-Joseph, d'une part, la reine Victoria et l'empereur Napoléon III, d'autre part, un traité ainsi conçu :

« Art. 1o. Les parties contractantes s'engagent à ne pas entrer en arrangement avec la Russie, sans en avoir préalablement délibéré en commun.

« Art. 2. L'Autriche s'oblige à défendre les Principautés danubiennes contre tout retour des Russes. Les armées an

glaise et française seront libres d'entrer dans les Principautés, si elles le jugent convenable.

«Art. 3. En cas de guerre entre l'Autriche et la Russie, la France et l'Angleterre promettent de signer un traité offensif et défensif avec l'Autriche.

« Art. 4. Dans ce dernier cas, aucune proposition de paix émanant de la Russie ne serait accueillie sans que les puissances alliées fussent arrivées à une entente commune.

«Art. 5. Si la paix n'est pas rétablie d'ici au 1er janvier 1855, les trois puissances alliées délibéreront sur les moyens les plus efficaces pour atteindre le but qu'elles se proposent en contractant leur alliance.

«

Art. 6. Le présent décret sera communiqué à la Prusse, sa coopération étant désirable. »

En même temps, de nouvelles négociations s'ouvrirent à Vienne; elles devaient avoir pour base les quatre garanties exigées par les puissances alliées et que la Russie adoptait sous réserve, et afin qu'il ne pût y avoir de malentendu, ces quatre garanties furent clairement interprétées par les représentants de la France, de l'Angleterre et de l'Autriche, dans un protocole ainsi conçu :

Dans le but de préciser le sens que leurs gouvernements attribuent à chacun des principes contenus dans les quatre articles, et en se réservant d'ailleurs, comme ils l'ont toujours fait, la faculté de poser telles conditions particu lières qui leur paraîtraient exigées en sus des quatre garanties par l'intérêt général de l'Europe pour prévenir le retour des dernières complications, les représentants de l'Autriche, de la France et de la Grande-Bretagne déclarent que :

«1° Leurs gouvernements, en jugeant de commun accord qu'il était nécessaire d'abolir le protectorat exclusif exercé par la Russie sur la Moldavie, la Valachie et la Servie, et de placer dorénavant sous la garantie collective des cinq puis

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sances les priviléges reconnus par les sultans à ces Principautés dépendantes de leur empire, ont entendu et entendent qu'aucune des stipulations des anciens traités de la Russie avec la Porte, concernant lesdites provinces, ne pourrait être remise en vigueur à la paix, et que les arrangements à conclure à leur sujet seraient ultérieurement combinés de façon à donner une pleine et entière satisfaction aux droits de la puissance suzeraine, à ceux des trois Principautés et aux intérêts généraux de l'Europe.

« 2° Pour donner à la liberté de la navigation du Danube tout le développement dont elle est susceptible, il serait convenable que le cours du bas Danube, à partir du point où il devient commun aux deux États riverains, fût soustrait à la juridiction territoriale existant en vertu de l'article 3 du traité d'Andrinople. En tout cas, la libre navigation du Danube ne saurait être assurée si elle n'est pas placée sous le contrôle d'une autorité syndicale investic des pouvoirs nécessaires pour détruire les obstacles existant aux embouchures de ce fleuve ou qui s'y formeraient plus tard.

« 3° La révision du traité du 13 juillet 1841 doit avoir pour objet de rattacher plus complétement l'existence de l'empire ottoman à l'équilibre européen, et de mettre fin à la prépondérance de la Russie dans la mer Noire. Quant aux arrangements à prendre à cet égard, ils dépendent trop directement des événements de la guerre pour qu'on puisse dès a présent en arrêter les bases. Il suffit d'en indiquer le principe.

<«< 4° La Russie, en renonçant à la prétention de couvrir d'un protectorat officiel les sujets chrétiens du sultan du rite oriental, renonce également, par voie de conséquence natnrelle, à faire revivre aucun des articles de ses traités antérieurs, et notamment du traité de Koutchouk-Kaïnardji, dont l'interprétation erronée a été la cause principale de la

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