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cessaires pour mettre à exécution ce principe. Ces dispositions ne peuvent pas ètre d'ailleurs difficiles à prescrire à Tor, eu égard aux indications que M. Miéville a données lui-même sur le mode de procéder adopté pour le placement des malades d'un mème navire.

M. MIÉVILLE lit ensuite les chapitres VI et VII ci-après:

VI. DU CAMPEMENT ET DES SECTIONS des pèlerins.

Bien que la Commission ne croie pas devoir proposer la construction de bâtiments pour loger les pèlerins en quarantaine à cause de la très forte dépense que cela entraînerait, elle reconnaît que l'emploi des tentes, qui présentent l'avantage d'être déplacées avec la plus grande facilité aussi souvent que cela peut être utile, expose les pèlerins à contracter des maladies ou tout au moins à souffrir du froid pendant l'hiver.

Elle s'en tient, pour le moment, au système de campement sous la tente, d'autant plus que huit ou neuf années passeront encore avant que le retour du pèlerinage s'effectue dans la saison froide.

La façon dont on dispose les tentes sur deux longues rangées dans chaque section présente quelques inconvénients : les deux extrémités de la section sont à une distance considérable l'une de l'autre, de sorte que les pèlerins dont les tentes avoisinent l'entrée de la section où sont établis les magasins de denrées alimentaires et les réservoirs d'eau ont un trajet très long à faire avant d'arriver jusqu'aux latrines placées au fond de la section; par contre, ceux qui occupent la seconde moitié des deux files de tentes, du côté des latrines, sont beaucoup trop éloignés de l'eau et des comestibles dont ils ont besoin.

Il est préférable de dresser les tentes en rangées plus courtes et plus nombreuses trois, quatre ou cinq, selon le nombre des pèlerins qui forment la section.

Chaque tente ne devra contenir que huit personnes.

On ne permettra pas que les pèlerins dorment sur la terre nue, on fournira donc une natte à ceux qui n'en sont pas pourvus et qui ne possèdent ni matelas ni tapis.

Le nombre des latrines sera partout augmenté, à raison d'une pour trente personnes.

La garde, la surveillance des sections sera faite par des gardiens sanitaires.

Les militaires seront chargés du cordon extérieur et du maintien de la tranquillité publique.

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Eau. L'eau fournie aux pèlerins devra être distillée, conformément à la décision prise à la Conférence de Venise. A cet effet plusieurs chaudières et appareils seront établis sur le rivage pour distiller l'eau de mer, qui sera ensuite refoulée par des pompes dans un ou plusieurs grands réservoirs construits à la partie centrale et culminante de la station.

Ces réservoirs seront assez élevés pour que l'eau puisse arriver d'elle-même, sans le secours d'aucune machine, aux sections des pèlerins et aux divers établissements de la station par un système de tuyaux de différents calibres. On aura recours, en certains points, à un tuyautage à raccords, soit à vis, soit à manchon.

Les tuyaux amèneront l'eau destinée aux campements jusqu'à de grandes cuves en fer placées, au nombre de deux ou de quatre, sur les côtés des sections. Ces cuves ou réservoirs reposeront sur des assises assez élevées; elles seront bien fermées, abritées sous des tentesparasols et munies de douze robinets chacune. Quelques-unes devront être mobiles, montées

sur roues, afin de pouvoir être transportées à la suite des sections que l'on aurait à déplacer: c'est dans ces cas-là surtout que les tuyaux à raccord seront utiles.

La quantité d'eau qu'emploie un pèlerin par jour, en boisson, pour sa cuisine, pour sa toilette, ses ablutions, pour le lavage de quelques pièces de linge, est de 25 litres en moyenne: dix mille pèlerins, se trouvant simultanément au campement, ce qui est un cas fort rare, auraient donc besoin de 250,000 litres, soit de 250 tonnes d'eau.

Le nombre et la puissance des appareils à distiller devront répondre à cette indication et pouvoir même donner davantage pour le cas où une avarie, un accident en mettrait quelques-uns hors d'état de fonctionner. Quant aux réservoirs d'eau ou citernes, il faut qu'ils puissent emmagasiner une quantité d'eau égale à la consommation de trois jours: 750 tonnes.

Enfin n'oublions pas que les navires doivent être approvisionnés d'eau, ce qui n'est praticable qu'au moyen d'un bateau-citerne avec pompe.

La question de la fourniture de l'eau à la station de Tor est, comme on le voit, une des plus importantes que nous ayons à traiter, et sa solution nécessitera une dépense considérable. Quelque forte que soit cette dépense, il paraît indispensable de la faire afin de donner une eau pure aux quarantenaires et de mettre fin aux plaintes qui se reproduisent à chaque pèlerinage au sujet de l'eau.

Aliments vendus aux pèlerins. Le système de la concurrence, l'admission d'un grand nombre de marchands dans les campements n'ont donné que de mauvais résultats, même après l'imposition d'un tarif.

La Commission émet l'avis que la vente des comestibles aux pèlerins soit désormais adjugée à un seul entrepreneur responsable, connu avantageusement, obligé de déposer un cautionnement et de se soumettre, relativement à la qualité, au poids et au prix des aliments, aux conditions établies par l'administration quarantenaire avec laquelle il passera un contrat. L'adjudicataire devra, ainsi que le personnel qu'il emploiera, se conformer aux règlements en vigueur et aux décisions ou prescriptions du Directeur; au cas où il y contreviendrait, il serait soumis à une amende.

Il n'aura que le nombre d'employés nécessaire. Il établira dans chaque section, en dehors de son restaurant, des fourneaux qu'il mettra à la disposition des pèlerins qui voudraient préparer eux-mêmes leur repas.

- Une surveillance active sera exercée à l'égard de l'entrepreneur et de ses agents tant par le médecin de section et le surveillant du campement que par le Directeur.

que

En ce qui concerne le chapitre VII, M. le Professeur PROUST (France) propose les appareils à stériliser l'eau par la chaleur soient ajoutés à ceux qui sont déjà indiqués dans ce chapitre, afin d'utiliser, le cas échéant, l'eau des puits de Tor.

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M. le Professeur Proust signale d'autre part l'intérêt qu'il y aurait, surtout lorsque le choléra sévit au Hedjaz, à interdire le rembarquement des substances alimentaires que les pèlerins emportent au milieu de leurs vêtements souillés. Au moment de la désinfection à Tor, les ballots des pèlerins doivent être ouverts et soigneusement débarrassés de toutes les substances susceptibles de conserver des germes vivants. Parmi les provisions ainsi rapportées par les pèlerins et présentant de réels dangers, on peut indiquer les pains plus ou moins humides, le

poisson sec, le fromage et, en particulier, les fragments de viande plus ou moins sèche ayant à peu près la consistance du caoutchouc et provenant des animaux sacrifiés à Mina, le grand foyer du choléra.

Ces fragments ont été trouvés depuis quelque temps entre les mains des mograbins pauvres, Marocains ou Tunisiens. On avait cru jusqu'ici, au contraire, que les Somalis et les Soudanais, ainsi que diverses peuplades de la presqu'île Arabique (Takrouris), emportaient seuls ces débris.

Il paraîtrait même qu'il y a deux ans le choléra aurait été importé à Massaouah et en Abyssinie par des sambouks chargés de cette denrée, presque aussitôt après le pèlerinage.

M. le Professeur Proust appelle sur ce point l'attention de la Commission parce que l'un des fonctionnaires de la station de Tor, qui a fait un grand nombre de campagnes quarantenaires, a assuré au médecin sanitaire de France à Suez que les mograbins prennent toujours avec eux une quantité assez grande de cette viande sèche.

M. le Docteur RUYSCH (Pays-Bas) s'associe à la proposition de M. le Professeur Proust. I estime nécessaire de prendre les mesures utiles pour empêcher l'embarquement de tout aliment contagieux ou suspect. L'expérience a démontré, de nouveau, en Europe, lors de la dernière épidémie de choléra, que les comestibles emportés de maisons infectées offrent des dangers.

Il faut observer, toutefois, que cette mesure se trouve implicitement indiquée dans le Règlement sur la police du transport des pèlerins, préparé par la Commission et d'après lequel l'autorité compétente doit veiller sévèrement, surtout lorsque sévit le choléra, à ce que des comestibles contaminés ou suspects ne soient pas embarqués sur les navires à pèlerins au port de départ.

M. MIÉVILLE (Egypte), sans contester l'utilité de la mesure réclamée, se demande si, dans la pratique, il serait possible de l'exécuter sûrement. L'autorité sanitaire de Tor ne serait pas d'ailleurs compétente pour réglementer ce point, qui concerne l'autorité civile.

M. HANOTAUX (France) désirerait savoir si cette viande sèche, provenant de bètes sacrifiées à Mina, est emportée pour servir de provisions de bouche, ou bien s'il y a là une autre pensée.

NOURI-PACHA (Turquie) répond qu'il croit que cette viande séchée est employée par les pèlerins à leur nourriture en cours de retour; il ignore, en ce qui le consi des provisions de cette nature sont faites par les pèlerins; il lui semble d'ailleurs qu'il serait aisé à l'autorité douanière, devant laquelle passent les ba

cerne,

gages des pèlerins à la sortie de Djeddah, de prendre les mesures utiles pour empêcher que ces comestibles nuisibles ne soient laissés aux pèlerins.

M. le Professeur PROUST (France) indique que la prohibition d'emporter des vivres aurait comme corollaire forcé l'emploi des billets de passage d'aller et retour. Il constate les heureux résultats que peut avoir pour les pèlerins ce mode de procéder employé par la France pour le pèlerinage de ses ressortissants et il rappelle que, dans une précédente séance, il a montré les tickets en usage à bord des navires de deux compagnies françaises pour faciliter le contrôle de la distribution des vivres.

M. Proust croit utile également d'arrêter l'attention de la Commission sur une autre question, celle des outres. Au retour du pèlerinage, il faudrait en empêcher l'embarquement et détruire celles qui auraient été embarquées par fraude. Les outres ne peuvent pas être désinfectées à l'étuve ni avec des désinfectants chimiques suffisants et qui ne seraient pas toxiques, lorsqu'il s'agit surtout de nettoyer l'intérieur. Ces outres, toujours humides, conservent leurs poils à l'extérieur; les pèlerins les traînent partout et les remplissent en les couchant sur la terre humide sous les robinets ou près des puits. Souvent même, ils les plongent en entier dans les puits ou les réservoirs dont l'ouverture est assez grande.

Une outre contaminée peut être facilement la cause d'une rapide extension du choléra par elle-mème ou par les germes qu'elle laisse dans les réservoirs, les puits ou leur voisinage. L'intérieur de l'outre est, en effet, aussi bien disposé que possible pour conserver les germes. Il est humide, chauffé par le soleil et présente des coutures et des anfractuosités où sont retenus ces germes, agglutinés aussi dans l'enduit poisseux qui recouvre les parois. Une outre coûte de un à trois francs. Ne serait-il pas possible de les remplacer par des bidons métalliques? L'usage de ces derniers est déjà très répandu parmi les pèlerins. La substitution de ces bidons semble, dès lors, ne pas être très difficile.

Chaque navire pourrait, en conséquence, emporter un nombre de bidons proportionnel à celui de ses passagers, et la distribution pourrait se faire à l'embarquement à Yambo ou à la sortie du lazaret de Tor. Si cette mesure était adoptée, on ne verrait plus, à fond de cale, ces outres infectées, suspendues, suintant le long des parois et transformant les ponts en marécages, où grouillent les pèlerins et où pourrissent les bagages.

M. Proust demande, dès lors, à la Commission de formuler un vou pour le retrait des outres et pour leur remplacement par des bidons métalliques, ne fût-ce qu'à bord des navires.

M. le Professeur PAGLIANI (Italie), revenant sur la question des vivres emportés par certains pèlerins, dit qu'il lui parait bien difficile d'enlever des vivres aux

pèlerins et qu'il est à craindre que les vivres qui auraient été ainsi confisqués ne soient, par la suite, vendus de nouveau. Il serait peut-être plus pratique et plus expéditif de les faire passer à l'étuve.

M. le Docteur RUYSCH (Pays-Bas) signale que les pèlerins emportent de l'eau bénite de la source de Zem-Zem, pour en faire hommage à leur retour chez eux. Il demande à Bonkowski-Pacha et à M. le Docteur Karlinski, qui a fait des expériences bactériologiques dans le Hedjaz, s'ils ont par hasard trouvé dans cette eau des microbes cholériques ou d'autres microbes suspects.

Il semble utile que des éclaicissements à cet égard soient fournis, surtout en vue des courts trajets, car cette eau ne peut constituer un danger pour les Indes néerlandaises, en raison de la durée de la traversée qui est de vingt jours environ. Cette importante question présente, d'autre part, un intérêt particulier pour l'autorité qui doit examiner les objets dont l'admission à bord peut être ordonnée sans danger. Le règlement sur la police du transport des pèlerins donne, en effet, à l'autorité du port de départ un pouvoir absolu à cet égard.

M. le Docteur KARLINSKI (Autriche-Hongrie) répond que l'eau dont il s'agit ne se boit pas; il n'a d'ailleurs trouvé aucun germe de choléra dans cette eau.

BONKOWSKI-PACHA (Turquie) s'associe pleinement à l'opinion de M. le Docteur Karlinski. Il ajoute que cette eau est chargée de sels minéraux et qu'elle ne contient pas de matières nuisibles.

M. le Professeur PROUST (France) constate que la Commission est d'accord sur l'interdiction de l'embarquement de certains vivres suspects et sur celle des outres; il demande à M. le Professeur Pagliani de soumettre à la Commission une résolution qui visera ces deux questions.

M. MIÉVILLE (Égypte) fait connaitre ensuite que les chapitres VIII à XI du rapport adressé au Conseil d'Alexandrie sont relatifs : le n° VIII, à l'organisation de la pharmacie et du laboratoire bactériologique et à la création d'un petit abattoir, d'un système téléphonique; le n° IX, à l'établissement d'un fil télégraphique entre Suez et Tor; le no X, au personnel du campement; le no XI et dernier, au règlement intérieur de la station.

En se référant au chapitre du personnel du campement de Tor, M. le Professeur PROUST (France) fait remarquer que l'un des grands défauts des diverses organisations sanitaires dont la Commission a été appelée à examiner le fonctionnement au cours de ses travaux a été jusqu'ici l'incompétence du personnel.

CONFÉRENCE SANITAIRE.

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