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tuelle (1). Et comment en serait-il autrement? L'exercice du culte ne dépend-il pas nécessairement des moyens d'y pourvoir? Et l'on viendra nous dire que l'administration de ces moyens est tout-à-fait étrangère aux intérêts du culte ! Il nous est impossible d'admettre qu'une telle affirmation soit sérieuse. Ainsi que le disait trèsbien Portalis, les fabriques n'existant que pour le bien des églises, ne sauraient être étrangères, dans leur administration, aux ministres du culte (2). « L'admi>>nistration de ces sortes d'établissements, dit-il encore

» ailleurs, qui embrassent tout ce qui concerne l'en» tretien et la conservation des choses consacrées au » culte, a des rapports intimes avec le service divin et » la police intérieure des temples (3). » En effet, les fabriques sont appelées à s'occuper de tout ce que la religion a de plus saint, de plus auguste, « à assurer » l'exercice du culte et le maintien de sa dignité; » et les moyens d'atteindre ce but seraient étrangers aux intérêts religieux. Non, on n'y a pas pensé. Avec combien plus de raison, Portalis disait à l'Empereur : <«< Sans doute, l'administration des fabriques est pu>>rement temporelle, puisqu'elle se rapporte à des

(1) Belgique judiciaire, tom. X, pag. 1368.

(2) Rapport du 5e jour complémentaire an XI, Discours, rapports et travaux inédits sur le concordat de 1801, pag. 282. (3) Lettre du 47 avril 1806, Discours, rapports etc., pag. 413.

» biens qui sont temporels; mais ces biens ont pour

D

objet l'utilité de la religion et l'utilité de l'Eglise, qui a le dépôt des choses religieuses et spirituelles. » La destination des biens des fabriques a constam» ment déterminé l'influence, plus ou moins grande, » des évêques et autres personnes ecclésiastiques dans » tout ce qui concerne l'administration de ces biens. >> Il est conforme à la raison et au bon sens que ceux qui sont le plus intéressés à la propriété d'une admi>> nistration en soient chargés de préférence à tous » autres, surtout lorsque, par état et par devoir, ils » sont plus à portée que tous autres d'acquérir les >> connaissances relatives à cette administration et de

>> contracter l'habitude de s'en occuper (1). » Voilà des principes que nous ne devons pas perdre de vue, si nous ne voulons pas nous égarer dans l'examen de la législation des fabriques. Passons maintenant aux modifications que l'on propose.

SI.

IV. On demande, en premier lieu, une nouvelle définition de la fabrique (2). « Cette définition (de l'art. 1

(4) Rapport sur les fabriques des églises, juillet 1806, Discours, rapports etc., pag. 393.

(2) La Belgique judiciaire, tom. XIX, col. 4346 et rapport de M. Funck, §1.

» du décret du 30 décembre 1809) est claire, dit

» M. Funck, S 1, mais dans la pratique on a perdu de

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vue qu'elle est limitative; et l'on a étendu la mission

» des Fabriques à des objets qui ne sont pas de leur compétence, tels que le soulagement des pauvres et l'enseignement public, et on a ouvert ainsi la porte » à des abus qu'il est toujours difficile de redresser » quand ils sont passés à l'état de faits accomplis. Et plus loin: Il serait donc désirable que la loi mit » obstacle au retour de ces abus, et il suffirait pour » cela d'ajouter à l'art. 1er un paragraphe ainsi » conçu : Les fabriques ne peuvent s'immiscer dans

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aucun autre service. L'effet de cette disposition ne

>> serait pas seulement de prévenir, elle ferait encore

cesser les usurpations existantes, et notamment celle » qui concerne les cimetières. »

:

V. Quel devrait être l'effet d'une semblable clause quant aux cimetières ? Nous venons de voir l'opinion de M. Funck elle devrait avoir pour effet de dépouiller les Fabriques de leurs cimetières, de les attribuer aux communes. Si des Fabriques sont en possession de cimetières, c'est par suite d'usurpations. Il n'est pas dès lors surprenant que M. Funck ne parle d'aucune indemnité à leur accorder de ce chef (1). La Belgique ju

(1) Nous ne discuterons pas l'opinion de M. Funck sur la propriété des cimetières; nous nous contenterons de dire qu'elle est en

diciaire ne se prononce à ce sujet que pour l'avenir; sur les mesures à adopter quant aux cimetières appartenant déjà aux Fabriques, elle se tient dans une sage réserve. « Grand nombre de cimetières sont possédés » par des Fabriques d'église ou par des commissions déléguées par celles-ci. Nous tenons cet état de

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opposition avec la jurisprudence de nos cours d'appel et de cassation. V. ci-dessus, chap. IV, § II. Mais nous relèverons quelques inexactitudes qui se trouvent dans ce passage. Il dit que le jugement que les cimetières ne peuvent appartenir qu'aux communes « cst >> l'avis donné par le conseil d'Etat le 29 frimaire an XIII, adopté >> par le gouvernement de cette époque, et invariablement mainte>>nue par tous les gouvernements qui se sont succédé en France. » Cela est inexact. Le gouvernement de la restauration autorisa des fabriques à acquérir des cimetières, V. ci-dessus, chap. IV, § II. Une ordonnance royale du 13 septembre 1822 et une décision du ministre des finances du 22 septembre 1824 avaient autorisé la société des missions de France à établir un cimetière sur le Mont Valérien et à percevoir le prix des concessions de terrains pour les sépultures. Le gouvernement de juillet reconnut en maintes circonstances le droit des fabriques, notamment dans l'ordonnance du 14 mai 1840, insérée dans le Journal des conseils de fabriques, tom. VII, pag. 364. Nous avons du reste démontré ci dessus, chap IV, § II, l'inconstance du conseil d'Etat dans ses principes à ce sujet.

M. Funck nous dit que la jurisprudence belge n'offre pas, jusqu'en 4839, d'exemples de procès entre communes et fabriques touchant la propriété des cimetières. Mais il se garde bien de nous dire que le gouvernement des Pays-Bas pensait, sur ce point, comme nos cours d'appel et de cassation. « Les cimetières, disait Van Gobbelschroy, dans sa dépêche aux Etats députés de la Flandre occiden» tale, sont en général la propriété des fabriques d'églises par le >> motif qu'autrefois ils étaient établis sur des biens-fonds apparte»> nant à des fondations, lesquelles en vertu de l'arrêté du 7 ther>>midor an XI et de l'arrêté royal du 19 août 1817, no 29 ont été >> rendues aux fabriques d'églises. »

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» choses pour illégal et irrégulier, et si nous réservons » entièrement la question de savoir par quelles voies

» il faut y rémédier en ce qui concerne les cimetières

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qui déjà sont la propriété des fabriques, nous » croyons qu'il y a cependant une mesure à prendre, » pour que le mal ne s'étende pas à l'avenir et qu'il y » ait dans la loi même, interdiction absolue que des » paroisses acquièrent des cimetières (1). »

VI. Que penser de cette modification? De tout ce que nous avons dit dans le chapitre IV, § 2, il est facile de conclure que nous ne pouvons l'admettre; en effet, les Fabriques sont instituées pour représenter le culte dans tous les actes qui le concernent; et si l'on devait introduire une définition dans la loi, c'est en ces termes qu'elle devrait être conçue.

On

Il est incroyable de voir cette tendance contraire à la liberté du culte s'affirmer avec tant de naturel, et évidemment aussi avec tant de bonne foi. dirait que le système de la spécialité des services, inventé il y a à peine quelques années, est devenu le dogme politique, destiné à remplacer le dogme constitutionnel de la liberté et cependant ce système peut se résumer en deux mots : l'Etat qui réglemente sans souci de la liberté, au lieu du citoyen

:

(4) Tom. 19, col. 4547.

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