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ligieuse, seule apte à régler le culte. Si, au contraire, on regarde ces quêtes comme des œuvres étrangères au culte, n'est-ce pas une violation de la liberté des cultes, que de venir en plein exercice du culte faire, dans les Eglises, des actes qui lui sont étrangers? Voilà ce que le simple bon sens nous dicte. Si donc on veut modifier l'article 75 du décret, ce ne peut être qu'en reconnaissant l'autorité épiscopale sur toutes les collectes qui se feront dans l'Eglise et en reconnaissant en même temps aux curés le droit de faire des collectes pour les pauvres. Ce sont les seules modifications, compatibles avec nos principes constitutionnels, à introduire dans cette matière.

LXXI. Mais revenons aux arguments de M. Funck. Il trouve que le texte de l'article 75 est clair, et que d'après la lettre et l'esprit d'un texte aussi formel, les délégués du bureau de bienfaisance ont le droit de faire la quête dans l'église sans l'autorisation et l'agréation du curé, de même que les membres du bureau eux-mêmes. Si cet article est si clair, si précis, si formel, comment se fait-il que M. Funck ait été le premier à s'en apercevoir. Car, jusqu'aujourd'hui, tout le monde y a vu le contraire; nous le prouvons. D'abord le rédacteur lui-même du décret de 1809 a repoussé l'interprétation de M. Funck et cela moins d'un an après la promulgation du décret. En effet, le

ministre des cultes décida, le 24 novembre 1810, qu'un curé peut, en vertu de son droit de police intérieure, s'opposer à ce qu'une personne protestante, déléguée par le bureau de bienfaisance, fasse la quête dans son église, à cause de la religion que cette personne professe (1). La même décision ajoute que la police intérieure de l'église appartenant au curé, il peut choisir ceux qui doivent quêter, et demander au bureau de bienfaisance, lorsqu'il n'y a pas accord entre eux sur le choix qui a été fait par ce bureau, la désignation d'une autre personne. M. Bigot de Préameneu n'était certes pas homme à soumettre l'autorité civile à la domination ecclésiastique, M. Funck en conviendra sans doute; et cependant ne livre-t-il pas clairement les délégués du bureau à l'appréciation arbitraire du clergé.

Telle a toujours été la jurisprudence de l'administration française, comme on peut s'en convaincre par la lecture des décisions ministérielles, en date des 29 mars et 12 juin 1847, concertées entre le ministre de la justice et des cultes et le ministre de l'intérieur, où il est expressément reconnu que les personnes

(1) Si le curé n'a pas qualité pour apprécier la personne déléguée, il n'est pas plus en droit de rejeter un protestant qu'uue autre personne. La loi ne distingue pas. Le curé devrait nécessairement, dans tous les cas, s'en tenir au choix du bureau.

déléguées par le bureau de bienfaisance pour faire la quête pour les pauvres dans les églises doivent être agréées par les curés ou desservants (1).

LXXII. Pour M. Funck, l'article 75 du décret de 1809 reste le seul texte de loi à consulter pour tout ce qui concerne cette matière. Mais c'est contraire à tous les principes d'interprétation. Un décret, antérieur à celui du 50 décembre 1809, avait réglé la matière il avait statué que les administrateurs des bureaux de bienfaisance n'étaient plus autorisés qu'à faire la quête par eux-mêmes, art. 1. L'article 2 laissait aux évêques à déterminer le nombre de ces quêtes, les jours et les offices où elles se feraient. Telle était la législation, quand parut le décret de 1809. Or, d'après les principes d'interprétation des lois, une loi nouvelle n'est censée abroger une loi antérieure ou y déroger, que quand il y a opposition formelle entre elles, et qu'il n'est nullement possible de les concilier ensemble. C'est ce principe que Portalis rappelait au préfet de Loir-et-Cher en ces termes, dans sa lettre du 14 janvier 1806: « Mettez en principe que les lois anciennes gardent toute leur » force en ce qui n'a pas été formellement aboli. »

(4) V. Ces circulaires dans le Journal des Conseils de fabriques, tom. XVII, pag. 17 sq.

Or, le décret de 1809 a-t-il formellement aboli celui de 1806? Y a-t-il-opposition formelle entre les deux? N'y a-t-il pas moyen de les concilier? Nous reconnaissons qu'une partie du décret de 1806 est inconciliable avec celui de 1809, et que cette partie doit être considérée comme abrogée. Cette partie, c'est celle qui chargeait l'évêque de déterminer le nombre des quêtes à faire par le bureau. Il est bien sûr qu'il y a opposition formelle entre cette disposition et celle qui donne aux bureaux de bienfaisance le droit de faire des quêtes toutes les fois qu'ils le jugeront convenable. Mais y a-t-il la même opposition entre cette dernière disposition et celle qui statue que les administrateurs devront faire ces quêtes par eux-mêmes? Malgré toute notre bonne volonté, il nous est impossible de découvrir la moindre opposition: car ces deux dispositions ont un objet tout à fait distinct. La conséquence c'est que la disposition du décret de 1806 qui règle un de ces points n'est point abrogée par celle du décret de 1809, qui statue sur l'autre.

LXXIII. De sorte que, si l'on veut modifier l'article 75 de ce dernier décret, nous demandons qu'on y déclare expressément qu'il ne déroge point à l'article 1 du décret de 1806, ou mieux encore nous demandons la suppression de cet article et son remplacement par le suivant : « Les administrateurs des bureaux de

bienfaisance ne pourront ni par eux-mêmes, ni par des délégués, faire des quêtes dans les églises, ni

» y placer un tronc, sans l'autorisation de l'évêque

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ou du curé. Cette autorisation ne préjudicie en rien » au droit qu'a le curé de faire de semblables quêtes » toutes les fois qu'il le jugera convenable. » Ainsi tous les droits et nos principes constitutionnels seraient sauvegardés.

2. Des conséquences de l'érection des succursales.

I. Parmi les réformes sollicitées, on réclame encore une déclaration de la loi, consacrant pour les succursales nouvellement érigées, le droit de réclamer le partage des biens de la paroisse mère. Cette question est trop grave pour n'en pas faire l'objet d'un S spécial.

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Les principes que nous avons exposés au sujet du droit de propriété des fabriques, résultat du concordat et des lois et décrets qui en furent la suite, s'opposent formellement à ce que nous admettions une pareille déclaration.

Chaque fabrique est devenue en vertu de la restauration du culte et de la restitution de ses biens, propriétaire exclusive de ces biens. L'Etat s'en est dessaisi, et une pareille déclaration de partage serait de

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