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trine c'est donc dans le sens du retour à son droit de propriété que l'Eglise catholique a été restaurée dans notre pays, et lorsque, à force de lutte, Pie VII obtint la consécration du principe des fondations, il garantit dans notre droit public l'inaliénabilité de ce droit de propriété.

Au surplus, rappelons en peu de mots la lutte que l'Eglise catholique a soutenue pour maintenir ce droit.

Jusqu'au douzième siècle personne ne s'avisa de contester à l'Eglise le droit de posséder des biens temporels. Arnauld de Bresse est le premier qui s'insurgea (vers 1159) contre les possessions temporelles de l'Eglise (1). Il fut suivi par les Vaudois au commencement du siècle suivant (2). Marsille de Padoue marcha sur leurs traces (5), ainsi que Wiclef, dont les erreurs

(1) « Dicebat enim, rapporte Othon de Frisingue, nec clericos proprietatem, nec episcopos regalia, nec monachos possessiones

» habentes aliqua ratione posse salvari; cunctaque hæc principis >> esse, ab ejusdem beneficia in usum tantum laicorum cedere opor» tere. » De rebus gestis Friderici imperatoris, lib. II, cap. 20. Cf. Histoire de l'Eglise Gallicane, liv. XXV, tom. IX, pag. 14; Bernino, Istoria di tutte l'eresie, secolo XII, cap. IV, tom. III, pag. 191. (2) « Decimus quintus (error), dit Rainier, quod clerici posses >>siones non debeant habere: Deut. 18. Non habebunt sacerdotes, et >> omnes qui de tribu Levi sunt, partem et hæreditatem cum populo >> Israel, quia sacrificia comedunt, et nihil aliud accipient. » Liber » contra Waldenses hæreticos, cap. V. Cf. Histoire de l'Eglise Gallicane, liv. XXIX, tom. X, p. 300; Bernino, ibid., cap. 10, pag. 224. (3) << Nituntur concludere, dit le pape Jean XXII, dans la bulle » qui proscrit les erreurs de Marsille, præfati viri reprobi, quod

furent condamnées dans le concile de Constance (1). Le principe de cet hérésiarque est que l'Eglise se met en opposition avec l'Ecriture Sainte en possédant des biens temporels (2). Par conséquent ceux qui enrichissent le clergé agissent contre le précepte du Seigneur (3). Les papes et les empereurs qui ont doté l'Eglise ont donc péché (4), se sont laissé séduire par le démon (5), Bien plus le pape et le clergé se rendent coupables d'hérésie, en retenant ces biens, de même que les laïques et les princes temporels qui souffrent un tel désordre (6). Enfin les princes peuvent à

>> omnia temporalia Ecclesiæ subsunt imperatori, et ea potest acci» pere ut sua. » Bern. ibid., sect. XIV, cap, 3, pag. 466; Histoire de l'Eglise Gallicane, liv. XXXVII, tom. XIII, pag. 106.

(1) Dans la VIIIe session eut lieu la condamnation de quarantecinq propositions extraites de ses œuvres. V. Von der Hardt, Magnum Concilium Constantiense, tom. IV, pag. 153. Martin V condamna aussi ces erreurs par une bulle en date du 22 fevrier 1418. Constit. Inter cunctas, Bullar. Roman. tom. I, p. 309, edit. Lugd. 1712.

(2) « Contra Scripturam Sacram est, quod viri ecclesiastici ha>> bebant possessiones. » Propos. X.

(3) « Ditare clerum est contra Christi mandatum. » Propos. XXXII.

(4) « Sylvester Papa et Constantinus Imperator erraverunt Eccle>> siam dotando. » Propos. XXXIII.

(5) « Imperator et domini seculares seducti sunt a diabolo, ut >> Ecclesiam dotarent de bonio temporalibus. » Propos. XXXIX.

(6) « Papa cum omnibus clericis suis possessionem habentibus >> sunt hæreteci, eo quod possessionem habent, et omnes consen>>tientes eis, omnes scilicet domini seculares et laici ceteri. » Propos. XXXVI.

leur gré enlever les biens temporels de l'Eglise (1). II. Plus tard on ne contesta plus à l'Eglise le droit de posséder des biens, on prétendit seulement que ce droit, elle le tenait de l'autorité civile. Son pouvoir est purement spirituel, et se borne aux choses qui sont purement spirituelles. « Mon royaume n'est pas de ce monde, dit Notre-Seigneur (2). D'où l'on conclut qu'aucune chose temporelle ne tombe sous le pouvoir de l'Eglise, sinon en tant que la puissance séculière consent à l'y placer. C'est la doctrine développée par les juristes gallicans anciens et modernes. Dans la fameuse déclaration de 1682, le clergé de France avait posé ce principe : << Saint Pierre et ses successeurs, » vicaires de Jésus-Christ, et toute l'Eglise même n'ont » reçu de puissance de Dieu, que sur les choses spirituelles, et qui concernent le salut, et non point sur » les choses temporelles et civiles (3). plication qu'on en a faite. Dupin dit à ce sujet :

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Voyons l'ap

« La

» première proposition de l'assemblée contient deux

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(1) « Domini temporales possunt ad arbitrium suum auferre bona temporalia ab Ecclesia, possessionatis habitualiter delinquentibus,

» id est, ex habitu, non solo actu delinquentibus. » Propos. XVI. (2) Regnum meum non erit de hoc mundo, » Joan. XVIIII, 36. (3) « Beato Petro ejusque successoribus, Christi vicariis, ipsique >> Ecclesiæ rerum spiritualium et ad æternam salutem pertinentium, >> non autem civilium ac temporalium a Deo traditam potestatem, >> dicente Domino Regnum non est de hoc mundo. »

» parties, dont la première est que l'autorité de l'Eglise » est toute spirituelle, et qu'elle ne s'étend point sur » les choses temporelles (1). » Si l'Eglise n'a de pouvoir que sur les cœurs, comme le prétend Dupin, si son pouvoir se borne aux choses spirituelles, il s'ensuit qu'elle abuse de son autorité, lorsqu'elle l'étend aux choses temporelles c'est la conclusion de Févret (2). Par conséquent, comme le veut cet auteur, c'est à l'autorité civile qu'il appartient à faire des lois et ordonnances pour la conservation et administration du patrimoine de l'Eglise, et pour empêcher que les ecclésiastiques n'en abusent (5).

III. Voici comment De Héricourt développe ce principe : « Comme Jésus-Christ ne s'est fait homme que » pour sauver les hommes, et pour rendre témoignage » à la vérité, il s'est proposé de les instruire sans

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exercer aucune puissance sur le temporel. Il a dé» claré que son royaume n'était point de ce monde : il » n'a pas même voulu se mêler d'un partage entre deux » frères. Sa puissance ne s'exerçait donc que sur le spirituel. Celle qu'il a confiée à l'Eglise n'est point

(4) Traité de l'autorité ecclésiastique et de la puissance temporelle, tom. I, preuve de la première proposition. Cet ouvrage est à l'Index.

(2) Traité de l'abus, liv. I, chap. 1, n. 1. Cet ouvrage a été aussi frappé des censures de Rome. Décret du 22 décembre 1700.

(3) Ibid., chap. 8, n. 4.

» d'une nature différente, ainsi qu'il le dit à ses Apò» tres, en leur donnant leur mission. De là il suit que » la juridiction qui appartient à l'Eglise de droit divin

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ne consiste que dans le pouvoir d'enseigner les nations, de remettre les péchés, d'administrer aux

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» fidèles les sacrements, et de punir par des peines ⚫ purement spirituelles ceux qui violent les lois ecclésiastiques (1). Le pouvoir de l'Eglise est donc limité à ce qui est purement spirituel. Si elle possède des biens, c'est une faveur qu'elle tient de la puissance civile. « Ce n'est que par une grâce spéciale des souve» rains comme premiers magistrats politiques, que l'Eglise possède des biens en fonds (2).

«

IV. Donnons maintenant la parole à un auteur qui s'est tout spécialement occupé de l'administration des fabriques.<< La puissance établie par Jésus-Christ, dit

Jousse, n'a d'autorité et d'empire que sur les âmes, » et elle n'en a point sur les corps, ni sur tout ce qui » est extérieur et temporel. C'est ce qui a fait donner » à cette puissance le nom de puissance spirituelle, qui ne consiste que dans le pouvoir d'enseigner, de

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» remettre les péchés, d'administrer les sacrements

(1) Les lois ecclésiastiques de France dans leur ordre naturel, part. I, chap. 1, n. 2.

(2) Ibid., chap. 42, n. 3.

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