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DES FABRIQUES D'ÉGLISES.

CHAPITRE I.

DU DROIT DE L'ÉGLISE CATHOlique de possÉDER DES BIENS ET DE LES ADMINISTRER, ENVISAGÉ AU POINT DE VUE DE LA DOCTRINE CATHOLIQUE.

I. Il semblera étrange à plusieurs, que dans un livre écrit à notre époque, et dans un pays qui a hérité des principes politiques de l'assemblée constituante de 1789, il soit question, à propos du temporel des cultes, de ce que nous appelons le droit de l'Eglise catholique.

Qu'est-ce-que l'Eglise aujourd'hui pour l'Etat, et pour les différents pouvoirs chargés dans notre pays de faire les lois de l'Etat? Autrefois, l'Eglise catholique était représentée dans l'Etat par un ordre distinct, reconnu

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dans l'ensemble des institutions politiques du pays : C'était le clergé ; aujourd'hui cet ordre n'existe plus, l'Eglise catholique n'existe donc plus aux yeux de l'Etat, en ce sens du moins qu'elle formerait corps dans l'Etat, avec des droits préexistants dont l'état dût se préoccuper.

A un certain point de vue, ces principes sont vrais; mais on peut les forcer de manière à mentir à l'histoire, et à se mettre en contradiction ouverte avec la liberté des cultes, proclamée au moment même où l'existence politique de l'Eglise catholique fut détruite. Si nous en étions encore à 1789, ces principes seraient vrais avec leurs conséquences les plus absolues; après avoir supprimé l'ordre qui représentait dans son sein l'Eglise catholique, l'Etat avait, tout en proclamant l'indépendance des cultes, commis cette étrange contradiction de se substituer à l'administration du temporel des églises, en se chargeant de pourvoir à ses besoins, et en s'emparant de tous ses biens; en cela il fesait l'œuvre contradictoire à laquelle travaillent encore ceux qui considèrent l'Etat, comme le véritable propriétaire et le maître des biens des fabriques.

Mais, en ce qui concerne l'Eglise catholique, l'œuvre de 1789 a été radicalement modifiée; 1801 a été une réaction formelle contre les principes de la consti

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tuante, et si l'Eglise catholique n'est plus représentée par un ordre dans l'Etat, elle a été, en un sens, restaurée dans l'Etat par la restitution des biens enlevés, et la résurrection des fabriques chargées de les posséder pour elle. Avec cette restauration de l'Eglise dans l'Etat, non plus comme ordre politique sans doute, mais comme institution morale indépendante de l'Etat et représentée par des personnes juridiques, le culte catholique a acquis des droits, que sa doctrine nous commande de conserver, dans l'intérêt de sa liberté.

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C'est à ce point de vue seulement que nous avons rappelé cette doctrine catholique suivant laquelle l'Eglise prétend avoir le droit de posséder des biens meubles et immeubles droit sans lequel le culte, dans l'Eglise catholique, ne se comprend pas, et qui dès lors ne dépend pas de la bonne volonté de la loi, mais préexiste dans tout Etat ou la liberté du culte. n'est pas un vain mot. La constituante de 1789 a méconnu ce droit, le concordat l'a rétabli, et a ainsi modifié le droit public de notre pays, en ce qui concerne l'Eglise catholique.

Quant à la liberté d'administrer ses biens sans aucune intervention de l'Etat, que l'Eglise réclame en principe, nous ne rappelons cette doctrine qu'afin de faire comprendre aux catholiques que c'est un but

vers lequel ils doivent tendre de tous leurs efforts, sans méconnaître la situation particulière dans laquelle l'église a été placée dans notre pays et en France. Nous avons obtenu une restitution qui pour être plus complète a été accompagnée d'engagements de la part de l'Etat ce fut là une cause nécessaire d'intervention dans les affaires du culte, intervention qui dans les circonstances ordinaires serait contraire aux principes que l'église professe; tout en rappelant les principes, nous ferons ici les réserves que les événements ont fait admettre par l'église elle-même.

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L'Eglise catholique a donc toujours affirmé son droit. de posséder des biens et de les administrer librement : dans ses canons et ses conciles elle a affirmé mille fois sa doctrine à cet égard. Un prince de l'église, S. Em. le Cardinal Gousset, publiait en France, il y a quelques mois à peine un volume pour justifier cette thèse historique (1); - le droit d'être propriétaire appartient donc à la discipline de l'Eglise catholique, et la conséquence qu'il en faut tirer, c'est que Pie VII, l'illustre Pontife qui négocia le Concordat de 1801, avec le restaurateur du culte catholique en France, n'a pu abandonner et n'a point abandonné cette doc

(4) Du droit de l'église touchant la possession des biens temporels. Paris, Jacques Lecoffre et Comp. 1862.

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