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dans toute l'Eglise, et qu'on y a toujours proposée à ceux qui se convertissent. Elle s'accorde très-bien avec le concile de Trente.

Ces participes: invocandus, amandus, venerandus (1), souvent ne signifient autre chose que ce qui seroit exprimé par ces autres mots invocabilis, amabilis, venerabilis. Il est certain que ces participes n'emportent pas toujours un commandement ni une obligation de précepte: les bienséances, les convenances, les grandes utilités s'expli ¡uent souvent en cette manière.

Il en est de même de ces termes français: il faut faire, il faut aller, il faut invoquer; ou de ces autres: L'on doit faire, l'on doit aller, l'on doit invoquer. On a en latin et en français des manières de parler plus fortes et plus précises, pour expliquer un commandement et un devoir d'obligation étroite et formelle.

J'ai vu des Rituels où l'on a traduit, invocandos esse, « les saints sont à invoquer »; et les paroles suivantes: eorum reliquias esse venerandas: « leurs

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reliques sont à honorer »; et ainsi des autres semblables. Je ne crois point nécessaire d'introduire dans la Profession de Foi une façon de parler peu naturelle à la langue : peut-être qu'on pourroit traduire : Les saints sont dignes, ou méritent d'être honorés et d'être invoqués; ou, il est à propos d'invoquer les saints. Mais pour moi je m'en tiens à la manière la plus ordinaire, dont on traduit en fran

vons pas la lettre qu'il écrivit pour proposer la question à laquelle Bossuet répond.

(1) Sess. xxv. Decr. de invocat. Sanct. etc.

çais les participes en dus et en dum, qui est celle de les rendre par Il faut; et c'est aussi celle dont je vois qu'on se sert presque partout.

Au reste, la Profession de Foi ne s'éloigne en aucune sorte de l'esprit du concile. Il est porté dans ce même décret Sanctorum corpora veneranda esse, imagines habendas et retinendas, eisque debitum cultum et venerationem impertiendam : « Il » faut honorer les reliques des saints, avoir leurs » images et les garder, leur rendre le culte et l'hon>> neur qui leur est dû »; paroles qui sont transcrites dans la Profession de Foi. Or, personne n'a jamais cru que les Pères de Trente voulussent par ces paroles imposer aux particuliers plus de nécessité de faire ces choses que d'invoquer les saints: de sorte que tout cela, selon l'esprit du concile, se doit réduire au bonum et utile, qui est posé au commencement du décret comme le fondement de tout ce qui suit:

On lit aussi ces mots dans le concile: Illos verò qui negant sanctos invocandos esse..... impiè sentire: «<< que c'est un sentiment impie, de nier qu'on doive » invoquer les saints » : ce qui a donné lieu de dire dans la Profession de Foi, Sanctos invocandos esse,

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qu'il faut invoquer les saints »; parce que s'il est impie de le nier, il est sans doute pieux et véritable de le dire. Mais cela est toujours relatif au bonum et utile, mis pour fondement; et le concile, selon sa coutume, ne fait ici que condamner la contradictoire de la proposition affirmative qu'il avoit faite d'abord.

En tout cas, les termes du concile, qui sont

clairs, déterminent ce qui est douteux dans la Profession de Foi; et quand on voudroit s'imaginer dans ces mots, Sanctos invocandos esse, 'quelque espèce de nécessité et d'obligation, il ne s'ensuivroit pas qu'elle fût pour tous les fidèles en particulier. Il suffiroit de dire avec les docteurs, que l'invocation des saints est de nécessité pour toute l'Eglise en général, et lorsqu'elle agit en corps; puisque la tradition de tous les siècles lui enseigne à la pratiquer même dans son service.

Si on demande comment l'Eglise en général est obligée à cette pratique, et si elle en a reçu un commandement exprès; je ne le crois pas; et je crois au contraire qu'il s'en faut tenir, tant pour chaque fidèle en particulier, que pour l'Eglise en général, aux termes choisis par le concile : « Il est » bon et utile d'invoquer les saints ». C'est assez que l'Eglise se fasse une loi d'une chose si utile et si bonne, et qu'elle se sente obligée à pratiquer en commun non-seulement ce qui est de commandement; mais encore ce qui est utile et convenable; afin de donner en tout un bon exemple à ses enfans.

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Il en est de la pratique de demander aux saints le secours de leurs prières, comme de celle de le demander aux fidèles qui sont sur la terre. L'Eglise dit publiquement dans le Confiteor: Je prie la sainte Vierge, saint Jean-Baptiste, les apôtres saint Pierre et saint Paul, tous les saints, et vous, mon Père; ou, et vous, mes frères, et te Pater, et vos fra tres, de prier pour moi le Seigneur notre Dieu. On demande des prières aux uns comme aux autres;

et il n'y a que cette seule différence, que les prières des saints sont les plus agréables.

Les particuliers qui assistent à cette prière ne sont pas pour cela tenus de la faire expressément, ni de demander des prières à leurs frères qui sont encore en cette vie : il suffit qu'ils approuvent la demande qu'on leur en fait, et qu'ils y consentent; et s'ils le refusoient, ils improuveroient ce que l'Eglise juge bon et utile. Il faut pourtant avouer qu'on ne peut guère s'abstenir de faire une chose que l'on croit bonne et utile, quand d'ailleurs elle est si facile et même si consolante: et si quelqu'un répugnoit à demander des prières à ses frères qui sont sur la terre, cette répugnance ne seroit pas innocente: non qu'il combattît directement aucun précepte; mais parce qu'il auroit de l'éloignement d'une chose, qui très-constamment est aussi facile que bonne.

Il est aisé de juger par-là de la pratique de prier les saints; et je ne crois pas qu'il puisse rester aucune difficulté dans la question proposée.

Fait à Meaux, le 10 avril 1685.

LETTRE CXVI.

A M. DIROIS, DOCTEUR DE SORBONNE.

Sur l'affaire que l'ecclésiastique dont il a déjà été parlé avoit à la Pénitencerie; sur un projet de défense de la Déclaration du Clergé; et sur les lettres du cardinal Ubaldini, opposées aux sentimens de Bellarmin.

L'AFFAIRE que je croyois terminée, Monsieur, par le bref de la Pénitencerie que vous avez obtenu, va

encore repasser à Rome, à cause des clauses de ce bref. Je vous en envoie copie, et en même temps deux suppliques qui vous feront connoître les difficultés de l'affaire, sur lesquelles on a encore recours à l'autorité du saint Siége. Les deux suppliques regardent la même personne : on en a fait deux ; parce qu'on a cru qu'on ne pouvoit sans embarras comprendre le tout en une seule. Je vous supplie, Monsieur, de vouloir bien encore donner vos soins à cette affaire, et m'aider à tirer un homme très-utile à l'Eglise d'un embarras de conscience, d'où vous seul pouvez le tirer par l'application que vous aurez à faire entendre les choses. Je vous supplie aussi d'y employer, s'il le faut, l'autorité de son Eminence, et de faire qu'on en sorte cette fois : vous me ferez un plaisir sensible; et comme je sais que vous en avez un grand à m'en faire, j'espère tout de vos soins.

Si l'on faisoit difficulté d'accorder à cet Ecclésiastique la permission de retenir les bénéfices qu'il a, vous pouvez assurer qu'il n'en a que deux avec sa Prébende, qui ne sont que du revenu de cent soixante-dix livres chacun; qu'il n'y a point d'incompatibilité de ces bénéfices entre eux, ni avec la Prébende, et que la Prébende ne vaut pas plus de neuf cents livres de revenu de sorte que les trois ensemble ne valent pas plus qu'il ne faut pour la subsistance d'un ecclésiastique qui est en place, où la bienséance veut qu'il vive honnêtement.

Après vous avoir parlé de cette affaire, il faut maintenant vous dire an mot du projet que vous m'avez envoyé en dix assertions, d'une défense de la décla

ration

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