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DE LA CONFÉRENCE FAITE A RUEL,

Par MM. les Députés des Parlement, Chambre des Comptes et Cour des Aides, ensemble ceux de la Ville;

Contenant toutes les propositions qui ont été faites, tant par les Princes et Députés de la Reine que par les Députés desdites compagnies, et tout ce qui s'est passé entre eux pendant ladite conférence.

Du jeudi 4 mars 1649.

s'é

LES Es députés, pour la conférence de la paix des compagnies souveraines et ceux de la ville, tant tous trouvés sur les neuf heures du matin au logis de M. le premier président au nombre de vingt-deux, savoir: treize du corps du parlement, trois de la chambre des comptes, trois de la cour des aides et trois de la ville, en sont sortis entre neuf et dix pour aller à Ruel, au lieu destiné pour ladite conférence, lesquels ont passé par la porte Saint-Honoré, où ils furent arrêtés, au moins deux heures, en sortant, par les bourgeois qui étaient de garde ce jour-là, lesquels visitèrent tous les chariots et bagages desdits députés, dont ceux qui étaient passés les premiers,

accompagnés de la compagnie des gardes de M. le prince de Conti avec leur cornette, attendirent les autres qui étaient derrière jusqu'au dernier hors la ville, entre ladite porte et celle de la Conférence. Là, le sieur Sainctot, maître des cérémonies, vint les trouver avec la compagnie des gardes de M. le maréchal de Grammont qui étaient au bout du Cours-la-Reine, pour les escorter jusqu'à Ruel. Aussitôt les gardes de M. le prince de Conti s'en retournèrent à Paris, et furent conduits ainsi avec une autre escorte qui les vint joindre au bois de Boulogne, audit lieu de Ruel, où ils arrivèrent sur les trois heures; et en entrant hors de la porte, ledit sieur Sainctot leur dit et nomma à chacun les logis qui leur avaient été marqués par les fourriers du Roi, où ils furent tous. Peu après, ledit sieur Sainctot alla trouver M. le premier président qui était logé au logis de M. Croizet, garde-rôle de la grande chancellerie, qui lui dit, en présence de cinq des messieurs qui étaient pour lors avec lui, que M. le duc d'Orléans attendait les députés pour commencer la conférence qui se ferait avec lui, M. le Prince, M. le Cardinal, M. le chancelier et les autres du conseil; que M. le Prince serait à la gauche, et les autres compagnies ensuite. M. le premier président dit qu'il voyait d'abord deux difficultés en

cette proposition, l'une pour la personne du Cardinal, et l'autre pour la séance; qu'il allait assembler MM. les députés de toutes les compagnies pour en délibérer; ce qui ayant été fait à l'instant, il fut résolu qu'on dirait audit sieur Sainctot que la compagnie ne pouvait entrer en conférence avec ledit Cardinal. Sur ce ledit sieur Sainctot étant revenu dit que la Reine désirait qu'il y fût; et que, l'ayant choisi pour député, le parlement ne devait le trouver mauvais, puisque l'on n'empêchait pas que tous ces députés ne fussent à la conférence; et que ce n'était point au sujet à donner la loi à son souverain; et qu'on eût à déclarer si l'on n'entendait pas qu'il y fût, auquel cas M. le duc d'Orléans s'en retournerait à Saint-Germain. Les députés, prévoyant que cette réponse allait à la rupture de la conférence, prièrent ledit sieur Sainctot d'aller dire à M. le duc d'Orléans qu'il trouvât bon que l'assemblée lui rendît ses devoirs, et que deux d'icelle l'informeraient des raisons pour lesquelles la conférence ne pouvait être faite avec ledit Cardinal. M. le duc d'Orléans manda qu'il n'était point venu pour recevoir des complimens; qu'il était venu pour donner la paix à la France, et que cela pouvait être fait en demi-heure; qu'il fallait que le Cardinal fût à la conférence. Les députés lui

mandèrent qu'ils ne pouvaient le consentir, et qu'ils le priaient de trouver bon que deux des messieurs lui fissent entendre les motifs de l'assemblée. M. le Tellier fut envoyé de sa part pour apprendre ces motifs, et les demander à M. le premier président, qui lui dit que l'assemblée ne le pouvait admettre à la conférence, pour ce qu'il avait été déclaré perturbateur du repos public. Que c'était l'ennemi commun, et que c'était contre lui que se faisait la conférence. Ledit sieur le Tellier dit que, si l'assemblée entendait que ledit Cardinal ne fût point admis à la conférence, il avait charge de mondit sieur le duc d'Orléans de dire qu'il s'en retournerait à Saint-Germain, et que lesdits députés pouvaient s'en retourner à Paris, et répéta cela par trois fois, et se retira, disant que Monsieur allait monter en carrosse. Les députés, résolus aussi de s'en retourner à Paris le lendemain, demandèrent escorte pour cela, et chacun se retira chez soi.

Le lendemain vendredi, étant levés, ils donnèrent ordre de charger leur bagage, et allèrent à la messe, au retour de laquelle ils s'assemblèrent tous chez M. le premier président, où fut proposé que Monsieur ne s'en étant point allé, il y avait apparence de croire que l'espérance de renouer la conférence n'était pas perdue, et sur cela

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