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PARIS.

IMPRIMERIE DE CH. LAHURE ET Cie

Rues de Fleurus, 9, et de l'Ouest, 21

DE VOLTAIRE

TOME SIXIÈME

ÉDITION DE CH. LAHURE ET Cie

Imprimeurs à Pari

PUBLIC

PARIS

LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET Cie

RUE PIERRE-SARRAZIN, N° 14

1859

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POËMES.

(SUITE.)

LA GUERRE CIVILE DE GENÈVE,

ου

LES AMOURS DE ROBERT COVELLE.

POEME HEROÏQUE,

AVEC DES NOTES INSTRUCTIVES.

(1768.)

AVERTISSEMENT DES ÉDITEURS DE KEHL.

On a fait un crime à M. de Voltaire d'avoir publié ce poëme. Nous ne doutons point que les chantres de la Sainte-Chapelle n'aient aussi trouvé Boileau un homme bien abominable.

M. de Voltaire avait acheté fort cher une petite maison auprès de Genève, et il avait été forcé de la vendre à perte. Malgré la défense d'appeler son frère raca, quelques vénérables maîtres lui avaient dit de grosses injures. Cependant le produit de ses ouvrages, dont il ne tirait rien pour lui-même, avait enrichi une des familles patriciennes de la république. Son séjour avait rendu à la ville de Genève, en Europe, la célébrité que deux siècles auparavant le Picard Jehan Chauvin lui, ayait, donnée, et qu'elle avait perdue depuis que la théologie aydi passé de mode. Il avait donné de plus la comédie gratis aux dames génevoises, et avait formé plusieurs citoyens dans l'art de la déclamation. Les exécutions de Servet, d'Antoine et Michel Chaudron, avaient été jusqu'alors les seuls spectacles permis par le consistoire : l'ingratitude ne pouvait donc être de son côté..

D'ailleurs ce poëme n'a d'autre chjet que de prêcher la concorde aux deux partis; et ce qui prouve que M. de Voitaire avait raison, c'est que bientôt après la lassitude des troubles amena une espèce de paix.

L'histoire de Robert Covelle est très-vraie. Les prêtres génevois avaient l'insolence d'appeler à leur tribunal les citoyens et citoyennes accusés du crime de fornication, et les obligeaient de recevoir leur sentence à genoux : c'était rendre un service important à la république que de tourner cette extravagance en ridicule. M. Rousseau est traité dans ce poëme avec trop de dureté, sans doute; mais M. Rousseau accusait publiquement M. de Voltaire d'être un athée, le dénonçait comme l'auteur d'ouvrages VOLTAIRE - VI

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irréligieux auxquels M. de Voltaire n'avait pas mis son nom, cherchait à attirer la persécution sur lui, et mettait en même temps à la tête de ses persécuteurs ce vieillard dont la vie avait été une guerre continuelle contre les fauteurs de la persécution, et qui, dans ce temps-là même, prenait contre les prêtres le parti de Jean-Jacques.

M. de Voltaire vivait dans un pays où des lois barbares, établies contre la liberté de penser dans les siècles d'ignorance, n'étaient pas encore abolies. De telles accusations étaient donc un véritable crime, et elles doivent paraître plus odieuses encore, lorsque l'on songe que l'accusateur lui-même avait imprimé des choses plus hardies que celles qu'il reprochait à son ennemi; qu'il donnait pour un modèle de vertu un prêtre qui disait la messe pour de l'argent, sans y croire ; et qu'il avait la fureur de prétendre être un bon chrétien, parce qu'il avait développé en prose sérieuse cette épigramme de Jean-Baptiste Rousseau : Oui, je voudrais connaître, Toucher au doigt, sentir la vérité.

Eh bien! courage, allons, reprit le prêtre :
Offrez à Dieu votre incrédulité.

L'humeur qui a pu égarer M. de Voltaire n'est-elle pas excusable? Il eût dû plaindre M. Rousseau; mais un homme qui, dans son malheur, calomniait, outrageait, dénonçait tous ceux qui faisaient cause commune avec lui, pouvait aussi exciter l'indignation.

Excepté ces traits contre M. Rousseau, on ne trouve ici que des plaisanteries. La manière dont milord Abington ressuscite Catherine est une sorte de reproche aux Génevois d'aimer trop l'argent; mais ce reproche, qu'on peut faire aux habitants de toutes les villes purement commerçantes, n'est-il pas fondé? Tout homme qui, ayant le nécessaire, et un patrimoine suffisant à laisser à ses enfants, se dévoue à un métier lucratif, peut-il ne pas aimer l'argent? s'occupe-t-on toute sa vie sans nécessité d'une chose qu'on n'aime point? le désintéressement qu'affecte un homme qui s'est livré longtemps au soin de s'enrichir ne peut être que de Phypocrisie

PROLOGUE.

On a si mai imprimé quelques chants de ce poëme, nous en avons vu des morceaux si défigurés dans différents journaux, on est si empressé de publier toutes les nouveautés dans l'heureuse paix dont nous jouissons, que nous avons interrompu notre édition de l'histoire des anciens Babyloniens et des Gomérites, pour donner l'histoire véritable des dissensions présentes de Genève, mises en vers par un jeune Franc-Comtois qui paraît promettre beaucoup. Ses talents seront encouragés sans doute par tous les gens de lettres, qui ne sont jamais jaloux les uns des autres, qui courent tous avec candeur au-devant du mérite naissant, qui

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