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contenté de tirer, le 22, quelques coups de canon de la batterie de San Francisco.

Le 7 Octobre.

Le général Blake a transmis à la Junte Suprême la dépêche suivante, à laquelle étaient joints les rapports des officiers qui ont coopéré, sous ses ordres, au ravitaillement et au secours de Gérone.

"Très-Excellent Seigneur,

"Gérone, l'immortelle Gérone, soit qu'elle finisse par être conquise soit qu'elle reste victorieuse; cette place funeste dans tous les temps aux troupes françaises qui l'ont assiégée, persévere avec fermeté dans la glorieuse défense. Mais non-seulement elle manquait de vivres et de munitions, elle éprouvait encore le besoin le plus urgent des articles nécessaires aux malades et aux blessés. Elle était investie de si près qu'elle n'avait aucune communication avec le reste de cette brave province, si ce n'est de temps À autre par quelque courier qui trouvait moyen de se faire jour à travers les batteries et les boulets de l'ennemi. Il était donc devenu indispensablement urgent d'alléger cette situation déplorable, en faisant entrer dans la ville un convoi suffisant pour remédier à la disette générale, et un corps de troupes fraîches pour renforcer la brave et infatigable garnison de la place. Mais si cette opération était importante, elle n'en était que plus difficile et plus hasardeuse. Quoique l'ennemi occupât une ligne extrémement étendue, il pouvait aisément la resserTer; et l'on devait s'attendre qu'il ferait tous les efforts imaginables pour empêcher qu'on ne jetât des secours dans une place aussi importante qu'il assiégeait depuis trois mois, et qu'il tenait bloquée de la maniere la plus rigoureuse. La seule ressource

qui me restait était de détourner son attention sur divers points, et de lui faire croire que mon intention était de lui livrer bataille dans le quartier directement opposé à celui par lequel le convoi devait marcher. Ce plan fut exécuté avec le succès le plus complet.

Mon quartier-général était à San Ilari, et c'est de là que je donnai mes ordres pour les mouvements respectifs. J'ordonnai à Don Manuel Llanden, lieutenant d'infanterie d'Ultonia, de marcher sur la hauteur de Los Angeles, située au Nord de Gérone, avec un nombre suffisant de troupes, et les Somatenes qu'il pourrait trouver en chemin, afin de déloger l'ennemi de cette position, où il n'avait qu'un petit corps d'infanterie, et de protéger les convois de provisions qui devaient être introduits de ce côté. Ces ordres furent exécutés ponctuellement.

Je me rendis alors à l'hermitage de Padra, à deux lieues de San Ilari, avec la réserve, dans l'intention de me porter partout où les circonstances l'exigeraient. Je détachai de ce point le colonel du régiment d'Ultouia, Don Enrique O'Donnel, avec 1200 hommes d'infanterie et quelque cavalerie, afin d'attaquer les troupes que l'ennemi avait à Brunolas, et de faire croire au général français que le convoi devait marcher dans cette direction. Malgré l'excellence de la position de Brunolas et sa force locale, qui avait encore été augmentée par des retranchements, O'Donnel et ses gens l'attaquerent avec tant de valeur qu'ils gagnerent le sommet de la montagne, et planterent le drapeau espagnol dans les retranchements. Les Français firent le feu le plus vif, mais nos troupes l'essuyerent avec la plus froide intrépidité, et sans même vouloir y répondre elles grimperent jusqu'à la plus élevée de ces hauteurs. Dans les entrefaites, l'ennemi reçut un renfort qui lui fut envoyé dans l'idée que c'était là le point qui devait être le plus particulierement gardé. O'Donnel, pour

éviter d'être tourné, descendit dans la plaine, où il tint bon. Un corps de nos troupes, sous le commandement du général Loygorri, arriva peu après à la position occupée par O'Donnel. Il aurait pu dans un instant chasser l'ennemi de sa position, s'il n'avait pas été jugé préférable de faire diverses manœuvres pour nous faire paraître plus nombreux que nous n'étions réellement, et pour engager les généraux français, en recevant cet avis, à renforcer ce point avec le corps qu'ils avaient sur le Tar, car c'était par cette route que j'avais intention de faire passer le convoi que je désirais faire entrer dans Gérone. Ces divisions demeurerent pendant tout le reste de la journée en face de Brunolas, que l'ennemi évacua précipitamment dans la nuit.

Le colonel Don Francisco Robira, qui était à la gauche du Tar, ainsi que le lieutenant-colonel Don Juan Claros, attaquerent, par mon ordre, les troupes de l'ennemi qu'ils avaient devant eux, et attirerent fort à propos l'attention de l'ennemi de ce côté.

Dans le même temps, 4000 hommes d'infanterie et 500 de cavalerie, sous le commandement du général Garcia Condé, escortaient un convoi nom+ breux, consistant de 1500 à 2000 mules, qui marchant par Amer, passa le Tar, dirigeant sa marche le long de la rive droite de cette riviere. Ils défirent l'ennemi qui leur était opposé, brûlerent plusieurs de leurs camps, et parvinrent à entrer dans Gérone. Les Français firent rentrer aussitôt tous leurs postes éloignés, et resserrerent leur ligne, afin d'empêcher le retour des mules, des conducteurs et des chevaux qui étaient entrés. Il devint alors nécessaire de changer nos positions, et de faire divers mouvements pour protéger leur départ. Ils resterent dans la place un jour et deux nuits, et finirent par effectuer leur retour si heureusement que nous ne perdîmes pas une seule mule, ni un seul cheval.

Le gouverneur de Gérone a été laissé avec uné garnison de 3000 hommes. Dès que je recevrai le rapport détaillé de Garcia de Condé, je le ferai passer à Votre Excellence. En attendant, je joins ici ceux de O'Donnel, Robira, Claros et Llanden. JOAQUIN BLAKE.

(Signé)

Au quartier-général, à Olot, le 13 Septembre 1809.

Adressée à Don Antonio Cornel.

VARIÉTÉS POLITIQUES,

L'excoadjuteur D'Alberg que Napoléon a fait Prince Primat de la Confédération du Rhin, a mérité les faveurs du maître auquel il s'est vendu, par le zele avec lequel il a cherché à lui soumettre l'Allemagne, à désorganiser l'ancienne ligue germanique, à séduire les princes qui la composaient, à concilier aux projets de l'usurpation les savants, les diplomates et les jurisconsultes de ce pays, enfin à propager ces idées prétendues libérales qui servent de voile au plan de domination universelle que Buonaparté suit avec autant de constance que de succès. Aujourd'hui, c'est lui qui s'est chargé de faire goûter aux bons Germains le code Napoléon, et il a fait précéder le décret par lequel il lui donne force de loi, d'un préambule que nous donnons ci-après, et qui nous a paru mériter un commentaire et une réfutation.

Les bonnes lois, dit-il, sont la raison écrite. Nous ne lui contestons point cette assertion, mais il l'a rendue exprès incomplette; il n'a pas voulu ajouter que ce qu'il appelle ici raison écrite est le résultat des habitudes, des mœurs des peuples et de leurs rapports avec les nations voisines, et de la place

qu'ils occupent dans le systême physique et politique du monde. Mais pour n'envisager ici la question que sous le point de vue relatif à l'Allemagne, nous observerons que, par l'introduction du code Napoléon, ce pays qui se trouvait soumis à une jurisprudence peu compliquée, à des tribunaux peu nombreux, à des formes juridiques conformes au caractere tranquille de ses habitantse t à cette lenteur de conception qui vaut mieux que la légéreté et l'inconséquence qui caractérisent d'autres nations, ce pays, disons-nous, doit voir s'établirtout-à-coup dans son sein, tels qu'ils sont institués en France, les juges-de-paix, les juges civils et criminels, les notaires, les greffiers, les huissiers, les officiers chargés de l'enregistrement des actes, les conservateurs des hypotheques, etc. etc., ce qui produira dans les charges judiciaires, la même révolution que dans les principes et la marche de la jurisprudence. Jusqu'à présent la procédure allemande, qui dérivait en partie des formes introduites par le droit canonique, était secrette: aujourd'hui par une innovation qui blesse les mœurs et les usages de ce pays, elle va devenir publique. Nous n'examinerons pas ici le principe de la publicité des procédures, mais nous ne croyons pas qu'il puisse être soudainementappliqué à une nation qui, après l'avoir adopté dans les temps anciens et communiqué même aux provinees qu'elle avait conquises, y avait entierement renoncé, et chez laquelle, depuis plusieurs siecles, tous les procès quelconques s'instruisaient par écrit.

Buonaparté a mis la même précipitation dans la confection de ses codes que dans la formation de ses nouveaux royaumes: les uns et les autres ont pour appui l'existence passagere de celui qui les créa, et pour moyen d'agrandissement ou de propagation une violence qui peut bien, pendant quelques années, effrayer les peuples et les forcer à adopter en apparence ces nouvelles institutions, mais qui ne parviendra jamais à détruire leurs souvenirs, leurs habi

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