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LES TYROLIENS..

Nous donnons ci-après les détails de diverses affaires qui ont eu lieu entre les Tyroliens et les troupes bavaroises, saxonnes, &c. commandées par Le Febvre. Quoique publiés par une gazette qui, comme toutes celles d'Allemagne, est soumise à la censure des agents de Buonaparté, ils donnent la plus haute idée de la bravoure des Tyroliens, et de la tactique qu'ils ont adoptée. On voit qu'elle consiste à ne point avoir d'engagement général avec l'ennemi, à l'obliger de diviser ses forces en dispersant les leurs, et à l'attaquer lorsqu'eux-mêmes sont protégés par de fortes positions, retranchés dans les montagnes on dans les maisons des villages par lesquels il passe. On peut juger d'après cela quelle perte doivent essuyer les corps qui sont envoyés contre eux, et combien ces combats partiels dans lesquels les soldats, les officiers se trouvent frappés sans voir leur ennemi, et sans pouvoir l'attaquer à leur tour, doivent décourager une armée qui n'est pas exaltée des sentiments de la nature par de ceux qui animent ses adversaires.

En voyant se renouveler avec tant de vigueur, et d'ensemble cette belle insurrection des Tyroliens, on éprouve l'admiration qu'inspirent toutes les grandes choses, tous les actes sublimes de dévouement à la patrie et au Souverain légitime: mais en même temps on ne peut repousser tout-à-fait les sinistres présages qui naissent de la situation isolée où ils se trouvent. La certitude que leur Empereur ne les abandonnerait pas, que jamais il ne les livre-rait par une paix déshonorante aux vengeances d'un ennemi qui ne pardonne pas aux peuples de combattre pour leur patrie et pour leur Roi, cette cer

titude a donné un grand ensemble et une grande énergie à l'explosion de leur courroux contre le débile maître auquel Buonaparté les avait autrefois vendus; contre cette puissance qui, étant l'esclave du crime et de l'usurpation, ose vouloir commander à des hommes libres; contre ce prétendu Roi de Ba-viere enfin, qui serait le plus coupable des princes, s'il n'en était pas le plus faible. Lorsque les députés Tyroliens se rendirent près de l'Empereur François II, ils lui reprocherent avec une franchise respectueuse d'avoir conclu une treve qui les sacrifiait à l'ennemi contre lequel il les avait lui-même soulevés, et ils lui dirent qu'il répondrait devant Dieu d'avoir ainsi abandonné des sujets fideles qui s'étaient dévoués pour sa cause. Non, ce n'est pas moi, s'écria ce malheureux Prince, qui ai conclu l'armistice; je n'en ai eu aucune connaissance; c'est mon frere Charles qui l'a conclu; c'est à lui à en répondre devant Dieu."

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Alors S. M. I. leur promit solennellement que jamais elle ne se séparerait d'eux. Pleins de confiance dans cet engagement qui sans doute était pris dans la sincérité du cœur de ce Souverain, les Tyroliens ont montré ce que peut une nation qui a conservé ses mœurs primitives, et qui est digne d'être un des instruments par lesquels le monde sera régénéré parce qu'elle n'a pas participé à la corruption qui a produit de si grands désastres. Les Bavarois tiennent envers les Tyroliens une conduite encore plus barbare que les Français; malgré cela, ce bon peuple traite leurs blessés comme les siens.

On pourraît citer comme un exemple frappant de sa générosité la maniere dont il a traité le Lieutenant-Colonel de Wrede, Bavarois, qui, fait prisonnier après avoir égorgé une femme et son enfant, aurait été rappelé à la vie par les soins des Tyroliens, si ses affreux remords ne l'avaient conduit au tombeau.

Détails sur la derniere Expédition du Tyrol, publiés dans la Gazette de Munich.

Le 5 Septembre, on reçut à Inspruck la nouvelle que le corps Saxon, commandé par le général français Rouyer, destiné à marcher contre Brixen, avait été entouré de tous côtés par les insurgés qui avaient rompu le pont de Laditsch et forcé ce corps, au moyen d'un feu très-meurtrier dirigé de chaque côté des montagnes, du haut desquelles ils précipitaient entre autres des rochers et des arbres, à se faire jour avec une perte considérable, jusqu'à Sterzingen on le Colonel de Witgenstein s'était porté pour le renforcer avec deux compagnies d'infanterie, un détachement de dragons, un bataillon de Saxons et deux pieces de canon. Dans l'après-midi du même jour, la premiere division de l'armée bavaroise s'avança jusqu'à Steinach, et ensuite se dirigea par le Brenner vers Sterzingen. Mais le comte Berchem avait chassé les insurgés du village de Gossenfuss au pied du Brenner, et les avait empêchés de rompre un pont qui traverse la route. Comme la division avançait sur le Brenner, ils firent feu du haut des montagnes et de l'intérieur des maisons, et lancerent des pierres, mais sans effet. Le village d'Obervied d'où les insurgents nous avaient le plus inquiété, fut livré aux flammes par ordre du Duc de Dantzick.

Les régiments des gardes, deux compagnies du régiment de Bernklau, et une compagnie de troupes françaises, s'avancerent sur la droite, à travers les montagnes, tandis que, sur la gauche, le régiment du Prince Royal et le bataillon d'Haberman franchissaient aussi les montagnes avec les plus grandes difficultés, étant continuellement engagés avec les insurgés. En même temps le reste de l'infanterie, de l'artillerie et de la cavalerie sous les ordres de MajorGénéral Raglowich, procédait lentement dans le vallon à mesure que les deux corps dont il vient d'être parlé avançaient. Le Duc de Dantzick était à la tête de cette colonne, les deux autres furent atteintes dans leur route par quelques officiers de l'état-major français, entr'autres le Colonel Mainzarnau et le Lieutenant-Colonel Platry.

La chaleur et le défaut total de rafraîchissements rendaient VOL. XXVII.

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cette marche si pénible pour ces troupes, qu'elles n'auraient pu la supporter plusieurs jours de suite. Plus avant, les ponts étaient rompus, et la route rendue impraticable par d'énormes blocs de rocher, lancés à une très-grande distance du haut des montagnes. Les troupes prirent une position sur les bords de l'Eizack, à une lieue de Sterzingen, et les postes avancés furent établis en avant de Mauls. Le Maj.-Gén. Baron de Stengel était près de Sterzingen, où le maréchal avait son quartier-général.

La fusillade continua le 7, le 8 et 9 Septembre. Il fut envoyé des détachements dans les montagnes pour en chasser les insurgés, et s'emparer de tous les bestiaux. Les lieutenants Picten et Bratavia furent tués dans cette expédition. Il y eut en outre plusieurs officiers et soldats blessés. Le dernier jour, le feu cessa par ordre du maréchal, qui avait eu avec cinq des insurgés une conférence dont l'objet est resté inconnu.

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Pendant ces événements, la Seme division de l'armée bavaroise était restée à Inspruck. Le général français Beaumont s'était avancé jusqu'à Vorarlia, par Landeck et l'Arlberg, tandis que les 5e, ge et 10e régiments d'infanterie de ligne avec un détachement des dragons de Taxis, ainsi qu'une partie de l'artillerie de la 3e division bavaroise, se rendaient à Imst et à Landeck, pour maiutenir la communication avec les troupes qui occupaient Vorarlia.

Les troupes qui avancaient contre Bregentz, éprouverent une résistance si vigoureuse et si inattendue, que le baron de Bougs-chewet secondé par le Lieutenant-Colonel Vassereau de l'étatmajor français, s'avança avec le 20e. régiment de ligne, un escadron du 2e. de dragons et deux canons, par Finsternmunz, jusqu'à Meram, `pour surprendre par derrière les insurgés qui étaient dans la vallée d'Eizack, entreprise un peu hasardeuse pour un détachement qui n'était composé que de 1400 hommes.

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"Le 8 Septembre, à une heure après-midi, la coloune de Landeck se mit en marche et gagua Ladis sans être inquiétée. Le pont de Prug avait été rompu; le feu des insurgés, qui avaient eu connaissance de l'expédition, rendait le passage impossible; il eût été d'autant plus dangereux de le tenter que les insurgés avaient déjà occupé les montagnes qu'on laissait à dos, et que la colonne courait de plus en plus risque d'être cernée. La retraite fut résolue; mais afin de la cacher à l'ennemi, on continua l'attaque près du pont jusqu'à la nuit, et ce ne fut qu'à neuf heures

qu'on commença à se retirer avec le moins de bruit possible. Mais à peine le ler bataillon du 10e régimeut d'infanterie, qui formait l'avant-garde, eut-il passé le pont de Runseck, que le bruit des charpentiers en enlevant un abattis considérable, et le trot de la cavalerie sur le pont, firent connaître aux ennemis nos mouve ments. Ils dirigerent leur feu sur le pont, et firent rouler à l'entrée des morceaux de rochers de six à huit pieds de diametre. Le passage devint impossible à la cavalerie, à l'artillerie qui la suivait, et au 2e bataillon du régiment qui devait couvrir la retraite. Les pierres mirent en pieces les affuts, les chariots de munitions, et précipiterent hommes et chevaux dans l'Inn. Le défilé fut bientôt encombré de morceaux de rochers, d'arbres, et de corps morts ou blessés. Nous perdîmes environ 800 hommes et 100 chevaux, dont le plus grand nombre, comme on l'a su depuis, fut pris par l'ennemi, ainsi que deux canons de 3 et trois chariots de munitions.

"Le 1er bataillon du 10e régiment qui avait passé le pont fut arrêté par deux retranchements; il vint à bout néanmoins de se faire jour les armes à la main, et de gagner à deux heures du matin Landeck, où le 1er bataillon du 5e régiment d'infanterie de Preysing se réunit avec lui. On espérait pouvoir faire reposer là les troupes accablées de fatigue; mais les insurgés attaquerent le pont de Landeck avec des forces supérieures. Après avoir fait une vigoureuse résistance, les troupes se retirerent, toujours en combattant, à Zambs et enfin à Imst. Elles retrouverent dans ce dernier endroit le 2e bataillon du 5e régiment d'infanterie aux prises avec une colonne d'insurgés qui s'y était portée de l'Oezthal et qui l'avait attaqué à la pointe du jour. Nos troupes se retirerent alors d'Imst par Nassenreit, parce qu'on avait rompu plusieurs ponts de,l'Inn. Sur la route de Minmingen, l'affut d'un canon de six fut entierement brisé par une masse de rocher. Auprès de Minmingen, les insurgés entourerent la colonne entiere; mais nos troupes, quoique fatiguées par les assauts qu'elles avaient soutenus pendant la nuit, et les efforts des deux journées précédentes, réussirent à se faire jour. La colonne arriva harassée vers neuf heures du soir à Zirl après avoir perdu environ 200 hommes.

"Le 10, la 3e division se réunit toute entiere auprès d'Inspruck. C'est aux exemples de courage qu'ont donné les officiers

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