RÉSUMÉ POLITIQUE. Le Marquis de Wellesley est arrivé à Londres. Sa Seigneurie s'était embarquée à Cadix le 11 de ce mois, aux acclamations du peuple Espagnol. Le vaisseau le Donegal l'a heureusement conduite à Portsmouth, où elle a débarqué après une traversée de 15 jours, au milieu des empressements, et des félicitations d'une foule immense qui voyait en lui le conservateur de la chose publique. Toute l'Angleterre attendait avec anxiété la réponse de S. S. à l'offre qui lui avait été faite de la place de ministre des affaires étrangeres. Cette réponse a été telle qu'on avait lieu de l'attendre d'un vrai patriote qui voit les périls de son pays, et qui croit lui devoir ainsi qu'à son Souverain, le sacrifice de toutes les vues secondaires, qui, dans d'autres temps, peuvent sans doute entrer pour quelque chose dans les déterminations d'un homme d'état; mais qui, dans les circonstances actuelles, doivent céder à l'intérêt général. Si pour lutter contre l'ennemi des rois et l'oppresseur des peuples, si pour arrêter les progrès de cette dissolution qui menace toutes les anciennes institutions, de ce systême désorganisateur qui tend à substituer à toutes les dynasties, des familles sorties de la fange des nations; si pour repousser des rivages britanniques ce fléau qui enveloppe tout le Continent dans ses ravages, il faut une fermeté inébranlable, une vigueur que rien ne peut dompter, une décision prompte, énergique; s'il faut surtout avoir déjà découvert et combattu tous les artifices de l'intrigue française, personne n'est plus que le Marquis de Wellesley capable de déployer ces grandes qualités. En considérant la politique également profonde et audacieuse que S. S. a déployée dans l'administrasuprême de l'Inde, et les conquêtes qu'elle a obto nues encore plus par les résultats de cette politique que par la force des armes, on ne peut s'empêcher de concevoir les plus flatteuses espérances, lorsqu'on voit entrer dans le cabinet Britannique un homme qui, ayant déjà fait de si grandes choses, a sans doute médité durant ses loisirs, sur la situation de l'Angleterre relativement au reste de l'Europe, sur la nature de l'influence que Buonaparté veut exercer sur le monde civilisé, et sur les moyens d'empêcher au moins cette influence de dominer les destinées de la Grande-Bretagne. Telle est la nouvelle perspective qu'ouvre aux amis de l'ordre et de la légitimité l'accession de Lord Wellesley au ministere. Puisse l'attente générale n'être pas trompée! Puisse ce grand caractere ne pas être effrayé de la tâche qui lui est imposée ! On a reçu les journaux d'Espagne jusqu'au 18, et ceux de Portugal jusqu'au 17. Les uns et les autres annoncent que le Duc del Parque, poursuivant ses succès, est entré à Salamanque le 25 Octobre. Les Français avaient évacué cette ville quelques heures auparavant. Le Duc a sous lui deux habiles officiers, qui sont les généraux Mendesara et Car rera. L'armée anglaise est en bon état dans les environs de Badajoz et Mérida, et tant qu'elle conservera cette position l'ennemi ne pourra faire aucuns mouvements vers le Sud, à moins qu'il ne reçoive des renforts considérables. : Relativement à la situation intérieure de l'Espagne, voici quelques détails qui viennent de trèsbonne source:--Le peuple Espagnol est dans de très-bonnes dispositions; il est aussi animé contre les Français qu'il l'ait jamais été; des insurrections contre ceux-ci éclatent de toute part et tous les détachements faibles sont enlevés. Les armées espagnoles ne sont guere plus nombreuses ni mieux disciplinées. VOL. XXVII. 3 R Celle d'Estramadure, commandée ci-devant par Cuesta et ensuite par Eguia, s'est portée vers la Manche; il n'est resté dans l'Estramadure que 9 à 10,000 hommés sous les ordres du Duc d'Albuquerque. Venegas, súr sa demande, a été nommé gouverneur de Cadix. En conséquence, l'armée de la Manche, forte de 45,000 hommes, qui était sous ses ordres, est maintenant commandée par Arisaga, bon officier, et elle marchait en avant contre l'ennemi qui faisait mine de vouloir évacuer Madrid, Gérone tenait encore. Blakè était aux environs de cette place; mais son armée était très-faible. On croit qu'il commandera l'armée de la Manche. L'armée française est très-nombreuse. Il y a dans l'Estramadure et la Manche au moins 70,000 hommes; à Madrid, environ 5,000; dans le Nord, sous Ney, 10,000; près de Gérone, sous Angereau, 20,000; en Catalogne, environ 9,000; à Burgos, 10,000, et à Pampelune, 5,000; ce qui fait un total d'environ 135,000 combattants; le nombre des malades et blessés est très-considérable. Les Cortès s'assembleront décidément le ler Mars 1810. Le Marquis de Wellesley avait engagé la Junte Suprême à les convoquer immédiatement, à établir une Régence, et à mettre plus de vigueur dans ses opérations. Elle a nommé un comité militaire composé de sept membres, au nombre desquels est le Marquis de la Romana, pour diriger les opérations de la guerre et toutes celles qui exigent du secret, de la vigueur et de la promptitude. Le Marquis d'Astorga n'est plus président de la Junte; à l'expiration du terme prescrit pour l'exercice de cette place, il a été remplacé par l'archevêque de Laodicée. Garay s'est démis de ses deux emplois de secrétaire-général de la Junte et de ministre des affaires étrangeres. Il est remplacé dans le premier par Riviero, et dans le second par Saavedra. Il est probable que le général Castanos sera nommé ministre de la guerre. Le Marquis de Wellesley, depuis son arrivée en Espagne jusqu'au moment où il s'est embarqué, n'a cessé de recevoir tous les témoignages possibles de respect et d'attachement de la part du peuple Espagnol, qui lui a montré qu'il appréciait les efforts que nous avons faits pour lui et pour l'amélioration de son gouvernement. M. Frere est resté à Séville comme ministre plé nipotentiaire de S. M. Voici la substance de la dépêche du Lieutenant-Colonel Carroll, en date de Salamanque le 26 Octobre. "Le 21, le Duc del Parque fit avancer son armée de Tamames à Carrascal del Obispo, et ayant envoyé une colonne par Chatilla et Jejo, comme s'il eût eu l'intention d'approcher de Salamanque par Muniguela, il marcha rapidement sur sa gauche par un mouvement lateral, traversa le 23, le Tormes à Ledesma, arriva à Amanara le 24, et se Crouva le 25 sur les hauteurs de Salamanque, où il eut la douleur d'apprendre que l'ennemi s'était retiré précipitamment jusqu'à Toro, après avoir pillé l'argenterie des églises et les propriétés des particuliers. Le développement successif des colonnes sur la belle place de Salamanque, et les acclamations de la joie publique produisaient le plus bel effet. La marche des patriotes par Ledesma ayait été si rapide, si judicieuse, si bien masquée que l'ennemi ignorait leur point d'attaque, quoiqu'ils fussent seulement à trois lieues de dis tance. Ce ne fut que le 24, à six heures du soir, que le gé néral Marchand connut leur approche par Ledesma: il ordonna sur-le-champ la retraite le plus secrettement possible aux commandants des brigades; à minuit la cavalerie com mença à se mettre en marche, et telles étaient les apprehensions de l'ennemi, qu'il ne s'arrêta qu'à Toro. Il a perdu dans la bataille de Tamames en tués et prisonniers 1200 hommes, et on évalue le nombre de ses blessés à 2000, parmi lesquels plusieurs officiers. Un général, un colonel, plusieurs officiers et 75 soldats sont morts de leurs blessures. Ces derniers succès ont inspiré la plus grande confiance à l'armée. Les lettres de Séville annoncent comme probable l'évacuation de Madrid, par les Français. L'armée de la Manche a la plus grande confiance dans son nouveau commandant. Le cri des soldats est: "La mort, ou à Madrid; plus de Sierra." La cavalerie attachée à cette armée est forte de 7000 hommes; elle a en outre 60 pieces de canon. suppose que la force de l'ennemi à Toledo et sur la rive gauche du Tage n'excede pas 38,000 hommes. On Nous insérons ici une lettre qui renferme quelques détails sur la situation de l'Autriche, sur ce qui a été en partie cause de ses désastres, et sur la maladie de Buonaparté. Nous n'avons jamais vu dans la retraite de l'Archiduc Charles, ainsi que nos lecteurs peuvent se le rappeler, que les résultats d'une intrigue qui a perdu la Monarchie Autrichienne, et nous avons toujours attribué le désastre de Wagram au défaut de concert de l'Archiduc Jean avec la grande armée commandée par son illustre frere. C'est ainsi que les monarchies tombent par les fautes, les jalousies, les divisions de ceux qui sont appelés par leur naissance à les soutenir. Quant à la maladie de Buonaparté, il est difficile de douter qu'il n'ait en une attaque qui a exigé le déplacement de Corvisart, et qui peut-être a prolongé son séjour à Fontainebleau; mais quelle qu'ait été ou quelle que soit encore la nature de sa maladie, nous devons dire que nous serions bien fâchés pour l'Europe qu'il fût attaqué de |