leur auguste origine, garantir pour nos arriere-petits-neveux, la durée de tous les biens que lui devra notre patrie, et que l'image du bonheur des Français, que lui offriront le présent et l'avenir, soit la récompense de ses travaux et le prix de ses sacrifices. "Votre commission, sénateurs, vous propose à l'unanimité; Premierement, d'adopter le projet de sénatus-consulte qui vous a été présenté; deuxiemement, d'adopter aussi deux adresses que je vais avoir l'honneur de vous soumettre, et dont votre bureau présenterait l'une à S. M. l'Empereur et Roi, et l'autre à S. M. l'Impératrice et Reine." On demande qu'il soit de suite voté au scrutin sur l'adoption proposée. Le scrutin est ouvert: son résultat donne en faveur du projet le nombre de voix exigé por l'article LVI. de l'acte des constitutions, du 4 Août 1802. Son adoption est, en conséquence, prononcée par le prince archichancelier président, qui le déclare converti en sénatus-consulte, de la teneur suivante : SÉNATUS-CONSULTE. Du Samedi 16 Décembre 1809. Le sénat-conservateur, réuni au nombre de membres prescrit par l'article XC. de l'acte des constitutions, en date du 18 Décembre 1799; Vu l'acte dressé le 15 du présent mois par le prince archi-chancelier de l'Empire, dont la teneur suit: "L'an 1809 et le 15e jour du mois de Décembre, à neuf heures du soir, nous, Jean-Jacques-Regis Cambacérès, prince archichancelier de l'Empire, duc de Parme, exerçant les fonctions qui nous sont attribuées par le titre II, art. XIV. du statut de la famille impériale, et en vertu des ordres qui nous ont été adressés par S. M. l'Empereur et Roi, dans sa lettre close en date de ce jour, dont la teneur suit : "Mon cousin, notre intention est que vous vous rendiez " aujourd'hui 15 Décembre, à neuf heures du soir, dans " notre grand cabinet du palais des Tuileries, assisté du se"crétaire de l'état civil de notre famille impériale, pour y " recevoir de notre part et de celle de l'Impératrice, notre " chere épouse, une communication de grande importance. "A cet effet, nous avons ordonné que la présente lettre " close vous soit expédiée. Sur ce, nous prions Dieu qu'il vous ait, mon cousin, en sa sainte et digne garde. A Paris, le 15 Décembre 1809." Et au dos est écrit: à notre cousin le prince archichancelier, duc de Parme. "Nous nous sommes rendus dans la salle du trône au palais des Tuilleries, assisté de Michel-Louis-Etienne Regnault (de Saint-Jean-d'Angely), comte de l'Empire, ministre d'Etat, secrétaire de l'état de la famille impériale. Un quart-d'heure après, nous avons été introduits dans le grand cabinet de l'Empereur, où nous avons trouvé S. M. l'Empereur et Roi avec S. M. l'Impératrice, et accompagués de LL. MM. les rois de Hollande, de Westphalie, et de Naples, de S. A. I. le prince vice-roi, des reines d'Espagne, de Hollande, de Westphalie et de Naples, de Madame, et de S. A. I. la princesse Pauline. "S. M. l'Empereur et Roi a daigné nous adresser la parole en ces termes : 1 " Mon cousin le prince archichancelier, je vous ai expédié une lettre close, en date de ce jour, pour vous ordonner de vous rendre dans mon cabinet, afin de vous faire connaître la résolution que moi et l'impératrice ma très-chere épouse, nous avons prise. J'ai été bien aise que les rois, reines et princesses, mes freres et sœurs, beaux-freres et belles-sœurs, ma belle-fille et mon beau-fils devenu mon fils d'adoption, ainsi que ma mere, fussent présents à ce que j'avais à vous faire connaître. "La politique de ma monarchie, l'intérêt et le besoin de mes peuples, qui ont constamment guidé toutes mes actions, veulent qu'après moi je laisse à des enfants, héritiers de mon amour pour mes peuples, ce trône où la Providence m'a placé. Cependant, depuis plusieurs années, j'ai perdu l'espérance d'avoir des enfants de mon mariage avec ma bien-aimée épouse l'Impératrice Joséphine; c'est ce qui me porte à sacrifier les plus douces affections de mon cœur, à n'écouter que le bien de l'Etat, et à vouloir la dissolution de mon mariage. "Parvenu à l'âge de quarante ans, je puis concevoir l'espérance de vivre assez pour élèver dans mon esprit et dans ma pensée les enfants qu'il plaira à la Providence de me donner. Dieu sait combien une pareille résolution a coûté à mon cœur; mais il n'est aucun sacrifice qui soit au-dessus de mon courage, lorsqu'il m'est démontré qu'il est utile au bien de la France. "J'ai le besoin d'ajouter que loin d'avoir jamais eu à me plaindre, je n'ai au contraire qu'à me louer de l'attachement et de la tendresse de ma bien-aimée épouse: elle a embelli quinze ans de ma vie; le souvenir en restera toujours gravé dans mon cœur. Elle a été couronnée de ma main; je veux qu'elle conserve le rang et le titre d'Impératrice, mais surtout qu'elle ne doute jamais de mes sentiments, et qu'elle me tienne toujours pour son meilleur et son plus cher ami." S. M. l'Empereur et Roi ayant cessé de parler, S. м. l'Impératrice-Reine a pris la parole en ces termes : "Avec la permission de notre auguste et cher époux, je dois déclarer que, ne conservant aucun espoir d'avoir des enfants qui puissent satisfaire les besoins de sa politique et l'intérêt de la France, je me plais à lui donner la plus grande preuve d'attachement et de dévouement qui ait jamais été donnée sur la terre. Je tiens tout de ses bontés; c'est sa main qui n'a couronnée, et, du haut de ce trône, je n'ai reçu que des témoignages d'affection et d'amour du Peuple Français. "Je crois reconnaître tous ces sentiments, en consentant à la dissolution d'un mariage qui, désormais, est un obstacle au bien de la France, qui la prive du bonheur d'être un jour gouvernée par les descendants d'un grand homme si évidemment suscité par la Providence pour effacer les maux d'une terrible révolution, et rétablir l'autel, le trône et l'ordre social. Mais la dissolution de mon mariage ne changera rien aux sentiments de mon cœur : l'Empereur aura toujours en moi sa meilleure amie. Je sais combien cet acte, commandé par la politique et par de si grands intérêts, a froissé son cœur; mais l'un et l'autre nous sommes glorieux du sacrifice que nous faisons au bien de la patrie." Sur quoi, Leurs Majestés Impériales et Royales nous ayant demandé acte de leurs déclarations respectives, ainsi que du consentement mutuel qu'elles contiennent, et que LL. MM. donnent à la dissolution de leur mariage, comme aussi du pouvoir que LL. MM. nous conferent de suivre, partout où besoin serait et près de qui il appartiendrait, l'effet de leur volonté, nous prince archichancelier de l'Empire, déférant aux ordres et réquisitions de LL. MM., avons donné le susdit acte et dressé en conséquence le présent procès-verbal, pour servir et valoir ainsi que de droit; auquel procès-verbal LL. MM. ont apposé leur signature, et qui, après avoir été signé par les rois, reines, princesses et princes présents, a été signé par nous et contre-signé par le secrétaire de l'état de la famille impériale, qui l'a écrit de sa main. "Fait au palais des Tuileries, les jour, heure et an que dessus." CAMBACERES, prince archichancelier. Vu le projet de sénatus-consulte rédigé en la forme prescrite par l'article 57 de l'acte des constitutions, du 4 Août 1802. Après avoir entendu, sur les motifs dudit projet, les orateurs du conseil d'Etat et le rapport de sa commission spéciale, nommée dans la séance de ce jour. L'adoption ayant été délibérée au nombre de voix prescrit par l'article 56 de l'acte des constitutions du 4 Août 1802, décrete : Art. Ier. Le mariage contracté entre l'Empereur Nag ⚫ poléon et l'Impératrice Joséphine est dissous. II. L'Impératrice Joséphine conservera les titre et rang d'Impératrice-Reine couronnée. III. Son douaire est fixé à une rente annuelle de deux millions de francs sur le trésor de l'Etat. IV. Toutes les dispositions qui pourront être faites par l'Empereur en faveur de l'Impératrice Joséphine sur les fonds de la liste civile, seront obligatoires pour ses succes seurs. V. Le présent sénatus-consulte sera transmis par un message à Sa Majesté Impériale et Royale. Ces deux adresses proposées par la commission sont de suite mises aux voix, et adoptées dans les termes suivants : Adresse du Sénat à S. M. l'Empereur et Roi. Sire, Le sénat vient d'adopter le projet de sénatus-consulte qui lui a été présenté au nom de S. M. I. et R. V. M., Sire, ne pouvait pas donner à la France un plus grand témoignage de son dévouement absolu aux devoirs qu'impose un trône héréditaire. Le sénat ressent vivement le besoin de vous exprimer combien il est pénétré de tout ce qu'éprouve la grande âme de V. M. La puissance la plus étendue, la gloire la plus éclatante, l'admiration de la postérité la plus reculée, ne pourront pas payer, Sire, le sacrifice de vos affections les plus cheres; l'éternel amour du peuple français, et le sentiment profond de tout ce que vous faites pour lui, pourront seuls consoler le cœur de V. M. Adresse du Sénat à S. M. l'Impératrice-Reine. Votre Majesté Impériale et Royale vient de faire à la France le plus grand des sacrifices. L'histoire en conservera un éternel souvenir. L'auguste épouse du plus grand des monarques ne pouvait pas s'associer à sa gloire immortelle par un dévouement plus heroïque? Depuis long-temps, Madame, le peuple Français révere vos vertus; il chérit cette bonté touchante qui inspire toutes vos paroles, comme elle dirige toutes vos actions; il admirera votre dévouement sublime; il décern er à jamais à V. M. I. et R. un hommage de reconnaissance, de respect et d'amour. Le sénat arrête que les deux adresses ci-dessus seront présentées l'une à S. M. l'Empereur et Roi, et l'autre à S. M. l'Impératrice-Reine par les président et sécrétaires du sénat, (Signé) Les président et secrétaires CAMBACÉRÈS, prince archichancelier de l'Empire, président. SEMONVILLE et BEURNONVILLE, secrétaires. Les orateurs du conseil d'Etat se retirent. Le prince archichancelier leve la séance. S. A. S, est conduite, à sa sortie, avec les mêmes honneurs qui lui ont été rendus à son arrivée. 1 |