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A GENÈVE, CHEZ J. GAY ET FILS, rue des Pâquis, 20
A LONDRES, CHEZ TRÜBNER ET Cie, 60, Paternoster Row
ET A AMSTERDAM, CHEZ R.-C. MEIJER, Calver Straat

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LAB

519-0873

AVANT-PROPOS

En commençant cet ouvrage, nous savons que nous ne possédons pas, pour réclamer l'attention du public, les droits que confèrent les talents littéraires, ni les titres qui commandent la confiance, c'est-à-dire, une autorité reconnue dans la matière que nous voulons traiter. Il y a certainement quelque présomption de notre part dans notre entreprise. Pourquoi donc, nous en rendant parfaitement compte, tentons-nous de la réaliser? C'est que nous croyons que des individus dénués de toute autorité magistrale et ignorant l'art de bien dire peuvent quelquefois, au moyen de leur gros bon sens, apercevoir des vérités qui échappent à des hommes d'un mérite reconnu, mais distraits par leurs intérêts ou prévenus en faveur d'erreurs contraires (tels sont trop souvent les savants, les hommes politiques et religieux: docteurs, professeurs, ministres, sénateurs, rois, prélats et papes). Ne voit-on pas tous les jours de simples ouvriers arriver, par le fait d'une étude

persévérante, à faire d'importants perfectionnements dans les sciences et dans les arts? Certainement, ils se tromperont souvent pour une fois qu'ils auront raison; mais, qui en sera juge, si ce n'est le public, lequel, en définitive, a le profit de la découverte? et n'est-ce pas pour ce motif qu'il faut toujours lui soumettre les questions?

Il y a plus : une réforme, une innovation utile peut avoir été proposée bien des fois et bien des fois repoussée. On peut même avoir regardé généralement une proposition comme mauvaise et comme assez dangereuse pour croire bon d'en punir et d'en outrager les auteurs, pour les persécuter, pour leur interdire la propagande et même l'expression de leur pensée, sans que cependant ce blâme, cet ostracisme soient mérités. On a vu de tels effets de la prévention se produire, non-seulement dans les basses classes et dans les classes aristocratiques, mais chez les savants eux-mêmes, et dans toutes les sciences. Les gens qui, par leur position, font autorité, consentent difficilement à reconnaître leurs erreurs, et, lorsque les bons arguments leur manquent, ils les remplacent volontiers par des injures, toujours plus faciles à trouver que la plus petite raison. Cependant, peu à peu, les vérités qu'ils ont repoussées avec tant d'acrimonie se font reconnaître comme certaines, positives, exactes, et sont enfin comprises et acceptées par tout le monde (1).

(1) Citons un exemple de la tenacité des erreurs vulgaires. L'idée pythagoricienne, qui admettait la rotation de la terre, fut rejetée comme ridicule par l'autorité ayant Ptolémée pour grand pontife, et l'erreur, adoptée par les savants officiels et par la religion, régna encore plus de deux mille ans après avoir été réfutée. Mais, les moyens d'investigation se perfectionnant, les observations et les découvertes se multi

Bien des gens se croient des natures supérieures parce qu'ils ont acquis quelques notions justes, et ils considèrent leurs semblables qui, ne s'étant pas trouvés dans des circonstances favorables, n'ont pu le faire encore, comme des êtres inférieurs faits pour obéir et pour être exploités. Rien de plus faux que cette opinion, par laquelle les classes privilégiées cherchent à s'excuser de l'infériorité où elles tiennent le peuple. On n'ignore pas que, dans la

pliant, il arriva un moment où la théorie ne s'accorda plus du tout avec la réalité. Copernic reprit alors le système pythagoricien et il le développa; mais, craignant la persécution, il ne livra ses idées à la publicité qu'à la fin de sa vie. Ce fut le jour même de sa mort, en 1543, que fut terminée l'impression du livre dans lequel elles étaient exposées. En 1619, Kepler reprit cette idée et fonda la vraie astronomie, dans son livre intitulé Harmonia mundi, mais il fit peu de disciples et, de toutes parts, on le réfutait sottement. Ceux qui, en très-petit nombre, avaient adopté ses opinions, étaient poursuivis comme des novateurs dangereux et ils se résignaient à les taire, ou, à l'exemple de Descartes, ils jetaient leurs écrits au feu. Galilée, en 1634, âgé de soixante-dix ans, dénoncé au tribunal de l'inquisition comme propageant cette doctrine, fut contraint de l'abjurer à genoux et il fut privé de la liberté pour le restant de ses jours. Enfin, en 1687, Newton,en mettant par ses Principia mathematica le sceau de son génie à cette prétendue utopie, fit-il taire toutes les dissidences? Non. Les adeptes de la vieille science lui résistèrent opiniâtrément, et il trouvait des adversaires même parmi ses collègues de la Société Royale de Londres. Son rival en mérite et.en gloire, Leibnitz, le raillait et l'attaquait sur des détails. Les savants français, partisans des tourbillons de Descartes, jalousaient la découverte de Newton, comme étant une production anglaise. Ce furent un poëte et une femme, Voltaire et Mme Du Châtelet, qui vulgarisèrent, les premiers en France, la loi de la gravitation universelle.

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