Je sais de quels appas son enfance etoit pleine ; Et n'ai pas entrepris,
Injurieux ami, de soulager ta peine
Avecque son mépris.
Mais elle étoit du monde, où les plus belles choses Ont le pire destin :
Et rose, elle a vécu ce que vivent les roses, L'espace d'un matin.
La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles : On a beau la prier;
La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles, Et nous laisse crier.
Le pauvre en sa cabane, où le chaume le couvre, Est sujet à ses lois ;
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre, N'en défend point nos rois.
De murmurer contre elle et de perdre patience, Il est mal à propos;
Vouloir ce que Dieu veut est la seule science Qui nous met en repos.
PIERRE CORNEILLE is considered as the originator of the French classical drama. Amongst a great number of tragedies and comedies in verse, and other poems, are four tragedies which have immortalized him—" Le Cid," "Horace," "Cinna," "Polyeucte," produced consecutively. Corneille was a contemporary of Cardinal Richelieu, who instituted the Académie Française, of which the tragedian was a member. The French dramatists had been for
some fifty or sixty years feeling their way. The old mysteries, moralities, and passion plays had fallen into disuse, no really good drama had taken their place, when Corneille, after writing comedies which were a great improvement on the past in taste and style, produced his first tragedy, named "Le Cid." This was acted in 1636, and the effect was electrical. Nothing else was heard of; not even could Cardinal Richelieu, jealously ambitious of dramatic celebrity, armed with all his power, put Corneille in the shade. The "Cid" was called for and repeated time after time, and became quite popular. The author sustained his reputation by the plays already mentioned. Corneille
fixed the standard tragedy of the French, which unfortunately regulated the stage in France for two centuries. He established it as a fashion to draw from Greek, Roman, and Hebrew antiquity for characters, and to observe the unities of time, place, and action. The Cid," however, is an exception to these rules, and hence, no doubt, its great popularity.
L'Instruction d'un Prince.
Excitez son orgueil et gouvernez le prince Montrez-lui comme il faut régir une province, Faire trembler partout les peuples sous sa loi, Remplir les bons d'amour, et les méchants d'effroi, Joignez à ces vertus celles d'un capitaine : Montrez-lui comme il faut s'endurcir à la peine, Dans le métier de Mars se rendre sans égal, Passer les jours entiers et les nuits à cheval, Reposer tout armé, forcer une muraille, Et ne devoir qu'à soi le gain d'une bataille, Instruisez-le d'exemple, et rendez-le parfait : Expliquant à ses yeux vos leçons par l'effet.
Comment Don Rodrigue de Bivar devint Le Cid.
Le jeune Rodrigue de Bivar s'était exposé aux rigueurs de la justice pour avoir tué en combat singulier le Comte de Germas, grand capitaine, et père de Chimène, sa fiancée. Cet événement se
fut à peine passé qu'on vit les Maures venir avec une grande flotte menacer l'Espagne d'une descente au port de Séville. Don Rodrigue prévint son arrestation en courant aux armes contre ces ennemis et en les repoussant de la manière dont il fait ici le récit au roi Don Fernand.
Sire, vous avez su qu'en ce danger pressant Qui jeta dans la ville un effroi si puissant, Une troupe d'amis chez mon père assemblée Sollicita mon âme encor toute troublée Mais, sire, pardonnez à ma témérité, Si j'osai l'employer sans votre autorité ; Le péril approchait, leur brigade était prête ; Me montrant à la cour je hasardais ma tête : Et, s'il fallait la perdre, il m'était bien plus doux De sortir de la vie en combattant pour vous D. Fernand.
Sous moi donc cette troupe s'avance Et porte sur le front une mâle assurance.
Nous partîmes cinq cents, mais par un prompt renfort, Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port, Tant, à nous voir marcher avec un tel visage, Les plus épouvantés reprenaient de courage! J'en cache les deux tiers, aussitôt qu' arrivés, Dans le fond des vaisseaux qui lors furent trouvés : Le reste, dont le nombre augmentait à toute heure, Brulant d'impatience autour de moi demeure, Se couche contre terre, et, sans faire aucun bruit, Passe une bonne part d'une si belle nuit,
Par mon commandement la garde en fait de même, Et, se tenant cachée, aide à mon stratagème ;
Et, je feins hardiment d'avoir reçu de vous L'ordre qu'on me voit suivre et que je donne à tous. Cette obscure clarté qui tombe des étoiles Enfin avec le flux nous fit voir trente voiles; L'onde s'enfle dessous, et d'un commun effort Les Maures et la mer montent jusques au port. On les laisse passer; tout leur paraît tranquille; Point de soldats au port, point aux murs de la ville. Notre profond silence, abusant leurs esprits, Ils n'osent plus douter de nous avoir surpris; Ils abordent sans peur, ils anerent, ils descendent, Et courent se livrer aux mains qui les attendent. Nous nous levons alors, et tous en même temps Poussons jusques au ciel mille cris éclatants ; Les nôtres, à ces cris, de nos vaisseaux répondent ; Ils paraissent armés, les Maures se confondent, L'epouvante les prend à demi-descendus ; Avant que de combattre ils s'estiment perdus. Ils couraient au pillage, et rencontrent la guerre ; Nous les pressons sur l'eau nous les pressons sur terre,
Et nous faisons courir des ruisseaux de leur sang Avant qu'aucun résiste ou reprenne son rang. Mais bientot, malgré nous, leurs princes les rallient, Leur courage renaît et leurs terreurs s'oublient : La honte de mourir sans avoir combattu Arrête leur désordre, et leur rend leur vertu. Contre nous de pied ferme ils tirent leurs alfanges De notre sang au leur font d'horribles mélanges; Et la terre, et le fleuve, et leur flotte, et le port Sont des champs de carnage où triomphe la mort. O combien d'actions, combien d'exploits célèbres Sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres, Où chacun, seul témoin des grands coups qu'il donnait, Ne pouvait discerner où de sort inclinait! J'allais de tous côtés encourager les nôtres, Faire avancer les uns et soutenir les autres, Ranger ceux qui venaient, les pousser à leur tour; Et ne l'ai pu savoir jusques au point du jour.
Mais enfin sa clarté montre notre avantage; Le Maure voit sa perte, et perd soudain courage : Et, voyant un renfort qui nous vient secourir, L'ardeur de vaincre cède à la peur de mourir. Ils gagnent leurs vaisseaux, ils en coupent les câbles, Poussent jusques aux cieux des cris épouvantables, Font retraite en tumulte, et sans considérer
Si leurs rois avec eux peuvent se retirer.
Pour souffrir ce devoir leur frayeur est trop forte ; Le flux les apporta, le reflux les remporte ; Cependant que leurs rois, engagés parmi nous, Et quelque peu des leurs, tous percés de nos coups, Disputent vaillamment et vendent bien leur vie. A se rendre moi-même en vain je les convie; Le cimeterre au poing, ils ne m'écoutent pas : Mais voyant à leurs pieds tomber tous leurs soldats, Et que seuls désormais en vain ils se défendent, Ils demandent le chef; je me nomme ils se rendent. Je vous les envoyai tous deux en même temps; Et le combat cessa faute de combattants.
Le pays délivré d'un si rude ennemi,
Mon sceptre dans ma main par la tienne affermi, Et les Maures défaits avant qu'en ces alarmes J'eusse pu donner ordre à repousser leurs armes, Ne sont point des exploits qui laissent à ton roi Le moyen ni l'espoir de s'acquitter vers toi. Mais deux rois tes captifs feront ta récompense: Ils t'ont nommé, tous deux, leur Cid en ma présence. Puisque Cid en leur langue est autant que seigneur Sois désormais le Cid; qu'à ce grand nom tout cède, Qu'il comble d'épouvante et Grenade et Tolède, Et qu'il marque à tous ceux qui vivent sous mes lois Et ce que tu me vaux et ce que je te dois.
La Politique dans les cas Extrêmes. Seigneur, quand par le fer les choses sont vidées, La justice et le droit sont de vaines idées;
« PrécédentContinuer » |