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cis d'être qu'il nous a communiqué. Si nous voions fon effence à découvert, nous verrions qu'il differe infiniment de l'idée que nous avons d'un efprit créé. Cette pensée loin de ravaler l'idée de l'être incomprehenfible, eft une exaltation de cette idée au fuprême degré d'incomprehenfibilité. Mais, dira-t-on : Pourquoi donc eft-il dit que Dieu eft un efprit ? d'où vient que l'Ecriture même l'affure ? C'est pour apprendre aux hommes groffiers, que Dieu eft incorporel, & que ce n'eft point un être borné par la nature materielle. C'est encore dans le deffein de faire entendre, que Dieu eft intelligent comme les efprits, & qu'il a en lui tout le pofitif, c'està-dire, toute la perfection de ce que nous entendons par la penfée, quoiqu'il n'en ait point la

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borne. Mais enfin, quand il envoïe Moïfe avec tant d'autorité pour prononcer fon nom,& pour declarer ce qu'il eft, Moïse ne dit point: Celui qui eft Efprit m'a envoïé vers vous: il dit, Celui qui eft. Celui qui eft, dit infiniment davantage que celui qui eft efprit, celui qui eft efprit n'eft qu'efprit; celui qui eft par excellence, eft efprit, eft créateur, tout-puiffant, immuable, il est fouverainement fans être rien de fini & de particulier. Il ne faut point difputer fur un équivoque. Au fens où l'Ecriture apelle Dieu efprit, fans doute il en eft un; car il eft incorporel, & fouverainement intelligent; mais il eft plus qu'efprit, & plus parfaitement efprit que nous ne pouvons le concevoir, ni l'exprimer. S'il étoit efprit felon notre maniere bornée de concevoir,

ce qu'on appelle efprit, c'eft-àdire, déterminé au genre particulier d'être, il n'auroit aucune puiffance fur la nature corporelle, ni aucun rapport à tout ce qu'elle contient; il ne pour, roit ni la produire, ni la conferver, ni la mouvoir; mais quand je le conçois dans ce genre que l'Ecole appelle transcendentel, que nulle difference ne peut ja mais faire déchoir de fa fimplicité univerfelle, je conçois qu'il peut égallement tirer de fon ê, tre fimple & infini, les efprits, les corps, & toutes les autres ef fences poffibles qui correfpondent à fes degrez infinis d'être.

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De l'unité du premier Etre.

'A commencé à découvrir l'être qui eft par lui-même, mais il s'en faut bien que je ne O o iiij

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le connoiffe, & je n'efpere pas même de le connoître tout entier puifqu'il eft infini, & que ma pensée a des bornes. Je conçois néanmoins que je puis en connoître beaucoup de chofes en confultant l'idée que j'ai de la fuprême perfection. Tout ce qui eft clairement renfermé dans cette idée, doit être attribué à cet Etre fouverain, & je dois auffi exclure de lui tout ce qui eft contraire à cette idée. Il ne me refte donc pour connoître Dieu, autant qu'il peut être connu par mon foible raisonnement, qu'à chercher dans cette idée tout ce que je puis concevoir de plus parfait. Je fuis affuré que c'eft Dieu. Tout ce qui paroît excellent, mais au deffus de quoi on peut encore concevoir un autre degré d'excellence, ne peut lui appartenir: car il n'eft pas feule

ment la perfection, mais il est la perfection fuprême en tout genre. Ce principe eft bien-tôt pofé; mais il eft très-fécond: les conféquences en font infinies & c'est à moi à prendre garde de les tirer toutes fans me relâcher jamais.

1°. L'Etre qui eft par lui-même est un, comme je l'ai déja remarqué: S'il étoit compofé il ne feroit plus parfaitement parfait: car je conçois qu'à chofes égales d'ailleurs, ce qui eft fimple, indivisible & veritablement un, eft plus parfait que ce qui eft divifible & compofé de ties. J'ai même déja reconnu que nul compofé divisible ne peut être veritablement infini.

par

2o. Je conçois qu'il ne peut point y avoir deux êtres infiniment parfaits. Toutes les raifons qui me convainquent qu'il

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