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La possession et l'occupation de la terre ferme supposent et entraînent celles des îles adjacentes, alors même qu'on n'y aurait exercé aucun acte positif de propriété. En ce qui concerne ces îles, on peut dire que, si un État étranger quelconque essayait de les coloniser, il donnerait à celui dont elles dépendent un juste sujet de plainte. et même de guerre en persistant dans l'intention de s'en emparer. La possession des îles situées à une certaine distance de la terre ferme s'acquiert aux mêmes titres que celle de tout autre territoire. § 300. Le congrès des États-Unis a proclamé, le 18 août 1856, que Etats-Unis du lorsqu'un citoyen américain découvre une île ou un rocher n'apmérique re partenant à personne, le gouvernement fédéral pourra le considérer aux les dé comme sien, et même employer la force pour la défense et la protection de ceux qui l'auront découvert. Toutefois, ces îles ou ces rochers ne faisant point partie du territoire de la république, les crimes ou les délits qui s'y commettront, seront regardés comme commis en pleine mer à bord d'un navire de l'Union et jugés d'après les lois établies à cet effet.

Décision du congrès des

Nord de l'A

lativement

sertes.

Les lacs ot leurs rivages,

Aux termes de cette même décision, les citoyens des États-Unis qui, dans des conditions légitimes, prendront possession de quelque dépôt de guano sur des îles ou des rochers n'appartenant à personne, seront protégés par le gouvernement fédéral, pourvu qu'ils expédient ce guano dans leur pays et qu'ils le vendent aux prix établis par les règlements *.

§ 301. Guidé par les principes que nous venons d'établir, on reconnaît sans peine qu'en droit international les lacs et leurs rivages rentrent de plano dans le domaine propre de la nation sur le territoire de laquelle ils sont situés. Toutefois, si leurs rivages appartenaient à deux ou à plusieurs nations, ces lacs, que leurs caux soient douces ou salées, devraient forcément être considérés comme des mers libres **.

Grotius, Le droit, liv. II, ch. 11, § 4; Vattel, Le droit, liv. I, §§ 207-209; Pufendorf, De jure, lib. IV, cap. vI, § 4; Bello, pte. 1, cap. III, § 1, p. 53; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. II; Azuni, Systéme, pte. 1, ch. II, art. 1; Garden, Traité, t. I, p. 390; Heffter, § 70; Halleck, ch. IV. § 15; Dana, Elem. by Wheaton, note 104; Wildman, vol. I, pp. 69, 70; Ortolan, Dom.; § 93; Polson, sect. 5, pp. 29, 30; U. S. statutes at large, vol. XI, p. 119, Brightley, Digest., p. 301.

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Bello, pte. 1, cap. III, § 1; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. Iv; Martens Précis, $$ 39, 156; Wheaton, Elém., pte. 2, ch. rv, § 11; Bowyer, ch. XXVIII; Phillimore, Com., vol. I, § 204; Heffter, § 76; Klüber, Droit, § 131; Gunther, Völkerr., t. II, pp. 21, 55; Moser, Versuch, t. V, pp. 284, 288, 307; Halleck, ch. vi, § 22; Wildman, vol. I, pp. 71, 72; Polson, sect. 5, p. 30, Vergé, Précis de Martens, pp. 136 et seq.

La liberté de la naviga

ves.

§ 302. Si la liberté des mers est un principe de justice définitivement consacré par le droit des gens et reconnu par la pratique des tion des fleunations, il semble logique et naturel, à première vue, de l'appliquer également à la navigation des fleuves, dans lesquels on ne peut s'empêcher de voir un moyen précieux de communication entre les peuples, de progrès et de civilisation. Nul motif en effet n'empêche de placer les fleuves sur la même ligne que les mers, de reconnaître que les règlements particuliers, établis par chaque peuple relativement à cette navigation, ne doivent pas assumer un caractère de fiscalité, et que l'autorité ne saurait intervenir que pour la faciliter, la généraliser et faire respecter les droits de tous.

publicistes.

§ 303. Les publicistes admettent bien le principe général et abs- Opinion des trait de la libre navigation des fleuves; mais ils cessent d'ètre d'accord sur le mode de son application, ou bien, reconnaissant aux États un droit absolu de propriété sur les fleuves qui parcourent leurs territoires, ils arrivent à détruire la règle même qu'ils ont posée. On peut seulement constater chez tous une tendance marquée à généraliser et à développer de plus en plus le principe de la libre navigation des fleuves.

Klüber soutient le droit absolu de propriété des États sur les fleuves situés dans l'intérieur de leur territoire; il va jusqu'à trouver légitime qu'une nation ferme complètement ses voies fluviales aux autres. Martens adoucit quelque peu la rigueur de cette déduction, en disant que le passage inoffensif d'un fleuve ne doit pas être interdit, bien que la faculté de le refuser ou de l'accorder appartienne incontestablement au souverain territorial.

Klüber.

Martens.

Wheaton s'exprime ainsi : « Les choses dont l'usage est inépui- Wheaton, sable, la mer et les eaux courantes par exemple, ne peuvent appartenir à personne en toute propriété; on ne peut donc en interdire l'usage aux autres, à moins que cet usage n'incommode le propriétaire légitime ou ne lui cause un préjudice notoire: c'est ce qu'on appelle usage inoffensif.

<«< Ainsi nous avons vu que la juridiction d'un État sur les détroits ou les bras de mer situés entre ses rivages, et servant en même temps de communication avec un autre État ou avec des mers communes à tous les hommes, ne prive pas les autres nations du droit de traverser librement ces eaux. Le même principe s'applique aux fleuves qui vont d'un Etat à un autre pour se perdre dans la mer ou pour pénétrer sur le territoire d'une troisième puissance.

«Le droit de navigation dans un but mercantile sur un fleuve qui coule à travers le territoire de plusieurs États, est commun à

Heffter.

tous les peuples placés sur ses bords; mais comme c'est un droit imparfait, on peut, à l'aide de conventions réciproques, expressément en modifier l'étendue et l'exercice selon les exigences de la sécurité des Etats intéressés.

« Le droit de navigation fluviale implique celui d'employer tous les moyens nécessaires pour jouir des avantages qui s'y rattachent. C'est ainsi que la législation romaine, qui considérait les fleuves navigables comme propriété publique ou commune, déclarait que le droit de faire usage des rives d'un fleuve supposait celui de se servir de ses eaux, et que le droit de navigation sur ce fleuve impliquait celui d'amarrer et de décharger les navires ou les barques sur ses bords. Les publicistes appliquent ce principe du droit romain aux relations internationales, et prétendent que c'est une conséquence nécessaire de la libre navigation. Ce droit accessoire est, comme le droit principal, de sa nature un droit imparfait, et pour son exercice il faut tenir compte de l'avantage des parties intéressées. » Heffter envisage les voies fluviales comme des dépendances naturelles de la terre qu'elles arrosent, et comme ne comportant pas la liberté de parcours acquise à la pleine mer; à ce point de vue, il en attribue la juridiction, dans tout leur cours et jusqu'à leur embouchure, à l'autorité dont elles traversent le territoire.

Lorsque les fleuves s'étendent sur plusieurs Etats différents, le même auteur admet que les riverains ont le droit de les faire servir à leurs besoins, d'en réglementer l'usage et d'en exclure les étrangers, à moins que par leur position topographique ces fleuves ne constituent une voie de communication indispensable et forcée pour la subsistance d'un pays tiers. Les anciens publicistes faisaient découler cette règle d'un principe beaucoup plus large, celui de l'usage inoffensif, qui appartient à toutes les nations, mais qui, constituant un droit imparfait, n'existe qu'à la condition d'être reconnu et sanctionné par des traités spéciaux.

Par ce qui précède on voit que la principale objection opposée à la libre navigation des fleuves repose sur ce qu'on les considère comme enclavés dans le territoire de chaque Etat et faisant partie du domaine de la nation au même titre que les terres; dans cet ordre d'idées, le peuple qui possède les deux bords d'un fleuve depuis sa source jusqu'à son embouchure dans la mer, en est le propriétaire absolu; il peut disposer de ses eaux, en réglementer et même en interdire l'usage selon qu'il le juge convenable. Cette règle doit toutefois fléchir quand il s'agit de ces grandes voies fluviales qui, en Amérique par exemple, forment de véritables mers,

et à ce titre affectent les intérêts commerciaux et maritimes du monde entier. A l'égard de pareils fleuves les convenances internationales admettent une réglementation équitable, mais non le droit absolu de fermeture.

Sous quel régime faut-il placer les fleuves qui traversent le territoire de plusieurs Etats différents? La question n'a pas été résolue d'une manière uniforme par les publicistes. Les uns, au nombre desquels figure le docteur Phillimore, soutiennent que chaque État Phillimore. est propriétaire de la partie du fleuve qui traverse son territoire et n'a nul compte à tenir des riverains supérieurs ou inférieurs; d'autres veulent que les co-riverains aient en commun la propriété des voies fluviales et puissent, par des traités spéciaux, accorder à d'autres nations le droit imparfait d'y naviguer. Un dernier système, qui repose en partie sur l'autorité de Grotius et qui est plus généralement suivi, ne reconnaît à chaque Etat que les droits que peut conférer la contiguïté à la voie fluviale.

Après avoir traité la question de la libre navigation des fleuves au point de vue particulier de l'opinion des publicistes, il nous reste à montrer comment les Etats l'ont résolue pratiquement, et quelles sont à cet égard les tendances générales du droit des gens moderne *. § 304. Par l'étendue de son cours et le volume de ses eaux le Rhin est au premier rang des fleuves européens dont le libre parcours devait éveiller l'attention des Etats co-riverains.

Au congrès de Rastadt, les plénipotentiaires français exigèrent et obtinrent l'abolition des impôts et des péages qui de temps immémorial grevaient sa navigation. La convention spéciale signée à Paris, le 15 août 1804, fixa les relations des Etats qui bordent le Rhin, et fut comme le préliminaire des principes qui régissent aujourd'hui la navigation fluviale.

L'article 5 du traité de paix du 30 mars 1814 consacra définitive

Klüber, Droit, § 135; Martens, Précis, § 84; Wheaton, Elem., pte. 2, ch. Iv, §§ 12, 14; Wheaton, Hist., t. II, pp. 184 et seq.; Heffter, § 77; Caratheodory, Du droit, pp. 29 et seq.; Grotius, Le droit, liv. II, ch. II, §§ 12-14; ch. III, §§ 7-12; Pufendorf, De jure, lib. III, cap. III, §§ 3-6; Phillimore, Com., pte. 3, ch. v; Wolff, Jus gent., §§ 310-312; Bowyer, ch. xxvIII; Bello, pte. 1, cap. II, § 1; Cussy, Phases, liv. I, tit. 2, § 57; Rayneval, Inst., liv. II, ch. xI; Halleck, ch. vI, § 28; Kent, Com., vol. I, pp. 36, 37; Wildman, v. I, p. 76; Polson, sect. 5, pp. 30, 31; Twiss, Peace, § 145; Pinheiro Ferreira, Vattel, §§ 132 et seq.; Pradier Fodéré, Vattel, t. II, pp. 114, 116-119; Funck Brentano et Sorel, Précis, p. 378; Hall, International law, 108; Engelhardt, Du régime conventionnel des fleuves internationaux, pp. 77-107; Dudley-Field, Projet de Code, p. 25; Holtzendorff, Völkerrecht, t. II, pp. 279 et suiv.

Le Rhin.

Discussion soulevée par

ment la libre navigation du Rhin et reçut, dans le règlement général arrêté en 1815 par le congrès de Vienne, une consécration qui en a fait entrer le principe dans le droit public de l'Europe. Il porte que le parcours du Rhin sera absolument libre et ne pourra être interdit à quiconque se conformera aux prescriptions établies dans l'intérêt général et au profit du commerce de toutes les nations; qu'une commission centrale mixte, siégeant à Mayence, surveillera la stricte observation des règlements de navigation, et qu'en cas de guerre la neutralité du parcours sera garantie à la batellerie; que les mesures de détails indispensables et les dispositions particulières relatives aux tarifs, à l'organisation et au mode de procéder des autorités préposées aux péages et à la police fluviale seront débattues et réglées en commun.

§ 305. La commission mixte dont il s'agit aborda la tâche qui lui le gouverne- était confiée, le 15 août 1816; mais dès le début clle fut arrêtée Pays-Bas, dans ses travaux par l'interprétation du règlement général de Vienne

ment des

Le différend

est soumis au congrès

Vérone.

concernant la navigation fluviale. En effet, le gouvernement des Pays-Bas revendiqua le droit exclusif de réglementer la batellerie et le commerce du Rhin dans les endroits où ce fleuve traverse son territoire et déverse ses eaux dans la mer. A l'appui de cette prétention il alléguait que les mots jusqu'à la mer, employés dans les traités de Paris et de Vienne, n'étaient pas synonyme de dans la mer, et qu'en interprétant les textes dans ce sens, il fallait limiter les dispositions qu'on avait en vue au véritable Rhin, qui n'est pas navigable jusqu'à son embouchure.

Pour apprécier la valeur des prétentions soulevées par les PaysBas, il ne faut pas perdre de vue que le Rhin se partage, près de Nimègue, en trois grandes branches qui prennent, les noms des Wahal, de Leck et d'Yssel, et dont aucune n'est connue sous la dénomination de Rhin, réservée au seul cours d'eau qui se sépare du Leck à Wyk.

Les autres Etats riverains firent de vains efforts pour vaincre les résistances du gouvernement néerlandais, en faisant ressortir combien elles étaient contraires à l'esprit et à la lettre des stipulations conventionnelles qui avaient consacré péremptoirement l'usage libre des eaux du Rhin, depuis l'endroit où elles devenaient navigables jusqu'à la mer.

§ 306. Toute entente amiable entre les parties directement inde téressées paraissant impossible, l'Angleterre crut devoir intervenir dans le débat et soumit la question au congrès de Vérone.

Dans une note en date du 27 novembre 1827 le duc de Wellington

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