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Commission.

l'Espagne n'obtinssent du gouvernement anglais qu'il empêchât de séjourner dans ses chantiers un navire de guerre destiné à l'un des belligérants dans la guerre du Pacifique, le commandant de la frégate, Aurelio Garcia, quitta précipitamment les eaux de l'Angleterre pour se rendre dans la mer du Nord, et quelques jours après il jetait l'ancre devant le tranquille village de Terneuzen sur la côte de Hollande, où il s'empressa de faire saluer officiellement les autorités de l'endroit par l'entremise de son second; cette politesse lui fut rendue avec des offres d'amitié.

Nous empruntons au compte rendu officiel, adressé le 3 août 1866 par le commandant de l'Independencia au ministre de la marine du Pérou, le récit de l'incidentqui suivit :

a II y avait quelques jours que je me trouvais à Terneuzen, quand survint la frégate de guerre hollandaise Adolphe de Nassau, ayant à bord l'amiral chef du poste militaire de Flessingue et le sous-secrétaire des relations extérieures du royaume. Ces fonctionnaires m'informèrent, non sans étonnement de ma part, qu'ils avaient pour mission de s'assurer du caractère véritable du navire que je montais, parce que, ainsi que le représentant de l'Espagne à La Haye l'avait dénoncé au gouvernement de cette cour, l'Independencia était un corsaire chilien, qui arborait le pavillon du Pérou sans en avoir le droit. J'eus bientôt et facilement déjoué la supercherie de l'agent espagnol; je déclarai en outre aux fonctionnaires hollandais qu'aucun militaire de la marine d'une de nos républiques ne se permettrait jamais de hisser sur son navire un pavillon qui ne lui aurait pas été confié expressément, et, pour leur prouver que je n'entendais pas attribuer une fausse nationalité à l'Independencia, j'eus la complaisance de leur montrer, à défaut d'une nomination en forme que ne pouvait avoir le chef qui, comme moi, avait reçu depuis deux ans auparavant la charge de faire construire et de conduire le navire dans le Pacifique, une des dernières dépêches officielles à moi adressée par le secrétariat de la guerre et de la marine du Pérou, laquelle, outre qu'elle me donnait les titres qui m'appartiennent, était revêtue du timbre officiel de ce département administratif de la république. A partir de ce moment, j'ai été, de la part des autorités hollandaises, militaires et politiques, l'objet de toute sorte d'égards. »

§ 437. Lorsque, dans des cas tout à fait exceptionnels, des doutes s'élèvent sur la nationalité d'un bâtiment de guerre, la commission est considérée comme suppléant à toute autre preuve. Voici en quels termes le juge Story s'exprime à cet égard : « En général,

la commission d'un navire public (de guerre), signée par les autorités compétentes de la nation à laquelle il appartient, est une preuve complète de son caractère national. La production d'un acte de vente n'est pas nécessaire, et les tribunaux d'un pays étranger n'ont pas à rechercher les moyens par lesquels la propriété a été acquise. Une parcille recherche équivaudrait à discuter la validité des actes d'un souverain étranger et de les juger dans des cas où ce souverain ne s'est pas dessaisi de son droit exclusif de juridiction, et où cette manière de procéder serait incompatible avec sa souveraineté. Aussi la commission d'un navire public, dùment légalisée, en tant du moins que cela concerne les tribunaux étrangers, implique-t-elle la vérité d'une façon absoluc, et le titre n'estil pas discutable. La propriété doit être tenue pour dûment acquise et ne peut être controversée. Telle est la pratique établie entre les nations; c'est une règle fondée sur les convenances autant que sur la bonne police publique, et l'on ne saurait l'enfreindre sans mettre en danger la paix et le repos des souverains neutres aussi bien que ceux des souverains belligérants *.

Les navires

sont réputés

§ 438. Les navires et les autres bâtiments de mer sont réputés meubles, le Code de Commerce de la République Argentine (Liv. III, meubles. Leur tit. 1, art. 1014) ajoute: « pour tous les effets juridiques ».

L'acquisition et la vente en ont lieu d'après les modes établis pour l'acquisition et la vente des choses qui sont dans le commerce. Cependant la vente volontaire d'un navire doit être faite par écrit; clle peut avoir lieu par acte public ou par acte sous signature privée, pour le navire entier ou pour une portion du navire.

Le Code argentin spécifie que, quand un navire ou une embarcation est d'un jaugeage de plus de six tonneaux, sa propriété, en tout ou en partie, ne peut se transmettre que par un document écrit, qui doit être transcrit sur un registre destiné spécialement à cet effet.

Cette mesure est prescrite par la plupart des législations; il s'ensuit comme conséquence que dans les pays où existent des registres maritimes, aucune transmission de navires inscrits, même de ceux qui se trouvent à l'étranger, n'est reconnue, si la transcription n'en est pas faite sur ces registres.

§ 439. Tout propriétaire de navire est civilement responsable des faits du capitaine ou de ses employés et tenu des engagements con

Ortolan, Règles, t. I, pp. 178 et seq.; Phillimore, Com., v. I, § 347; Hubner, De la saisie, t. I, pte. 2, ch. III, § 8; Archives dip., avril 1862.

acquisition et leur vente.

Responsabilite des ar

mateurs.

Contrat d'affrètement

Nanfrage.

tractés par eux pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition; mais le propriétaire ou l'armateur n'est obligé qu'à raison des faits accomplis et des engagements pris par le capitaine ou de ses employés dans l'exécution du mandat légal qu'ils tiennent de lui.

L'étendue de cette responsabilité est déterminée par la loi du lieu où est l'établissement d'armement, et où le capitaine ou l'employé a reçu ses pouvoirs : c'est la loi du pavillon qui est applicable.

Le propriétaire du navire peut dans tous les cas s'affranchir de cette responsabilité par l'abandon du navire et du fret.

§ 440. Le contrat d'affrètement ou de louage du navire, qu'il soit total ou partiel, qu'il ait pour objet un ou plusieurs voyages, est régi principalement par la loi du lieu de destination des marchandises, où le chargement doit être livré et le fret payé, et par conséquent où doivent être exécutées les principales obligations de part et d'autre.

Le contrat d'assurance est assimilé aux autres contrats et est régi par les principes en pratique pour les contrats et les conventions en général : c'est la loi du lieu où il se conclut qui lui est appliquée.

§ 441. Le naufrage, ou submersion ou bris d'un navire par un accident de mer, entraînant la perte totale ou partielle du bâtiment ou de son chargement, peut avoir lieu en pleine mer, sur une côte, sur un banc de sable, avec ou sans bris, avec ou sans échouement.

Le naufrage proprement dit survient par un fait de force majeure, contraire à la volonté de l'homme; s'il était occasionné par la faute volontaire d'une personne à bord, il constituerait un acte de baraterie, justiciable des tribunaux criminels, passible d'extradition, et faisant encourir les peines les plus graves.

Il est du devoir des États situés sur le bord de la mer d'employer tous les moyens dont ils disposent pour porter secours aux navires en détresse et accueillir les naufragés, sans distinction de nationalité; on doit leur permettre de se mettre en état de reprendre la mer et de continuer leur voyage. Ces navires, ainsi que les personnes et les biens qu'ils portent, ont droit à la même assistance et sont sujets aux mêmes taxes, droits de sauvetage et autres frais que les navires nationaux qui se trouveraient dans le même cas.

Tout capitaine d'un navire qui a fait naufrage et qui s'est sauvé seul ou avec une partie de son équipage, est tenu de faire ou d'adresser un rapport sur l'événement à l'agent du service extérieur le plus proche du lieu du sinistre.

De leur côté, dans le cas où un navire étranger, public ou privé, fait naufrage, échoue ou se trouve en détresse sur les côtes d'une

nation ou dans ses eaux territoriales, si la nationalité du navire est connue, les autorités locales doivent sur-le-champ notifier le fait au consul de la nation à laquelle appartient le navire ou l'épave qui réside dans la circonscription, et lorsqu'il n'y en a pas, au consul le plus proche.

§ 442. Le consul de la nation à laquelle le navire appartient, et, Sauvetage. en son absence et jusqu'à son arrivée, les autorités locales, doivent prendre les mesures nécessaires pour le sauvetage ou la conservation du navire et de son chargement. Le consul peut même procéder à la vente des objets sauvés, à condition d'en rendre compte aux parties intéressées, par l'intermédiaire de leur gouvernement. Nul n'a le droit de s'emparer de la personne des naufragés, ni des objets qui leur appartiennent. Toutefois le droit de recueillir les objets naufragés ou jetés à la mer existe, mais seulement dans le cas où l'on suppose que le propriétaire en est inconnu. En pareille circonstance, les débris du bâtiment naufragé et les marchandises qui restent encore du chargement sont considérées comme épaves sans maître connu et appartiennent à ceux à qui la loi du pays les adjuge; les assureurs du navire ou du chargement ont également le droit de réclamer ce qui en reste.

Il est de règle que le propriétaire fasse valoir ses droits, et pour cela un délai convenable lui est accordé; divers traités fixent ce délai à un an et un jour. Or il peut se faire qu'il renonce volontairement à toute réclamation; alors les choses se trouvent placées dans la même situation que s'il était demeuré inconnu.

Mais si la réclamation est faite dans le délai prescrit, les objets sauvés, ou le produit de leur vente, sont restitués à qui de droit, sauf toutefois le montant des frais occasionnés par le sauvetage, et de l'indemnité due aux sauveteurs; car les personnes qui ont aidé au sauvetage et recueilli les naufragés et leurs biens ont droit à un dédommagement, dont la valeur est généralement déterminée par des règlements ou par le code de commerce de chaque pays.

Le devoir qu'ont les États de secourir les naufragés n'enlève pas à ces États le droit d'exiger le remboursement des dépenses faites par eux pour le sauvetage et l'entretien des naufragés étrangers, et d'en réclamer le montant au gouvernement duquel dépendent ces naufragés, si ceux-ci ne sont pas en position de le rembourser eux-mêmes; mais les États doivent supporter les frais de l'organisation du sauvetage sans pouvoir en réclamer le remboursement aux autres Etats.

De nombreuses stipulations sont intervenues sur cette matière

Naufrage des navires de guerre.

Abordage.

entre les puissances maritimes, sous forme de traités spéciaux, ou de clauses insérées dans les conventions consulaires, de commerce et de navigation.

Nous citerons entre autres les traités conclus par la France avec les Etats-Unis le 23 février 1853, avec le Honduras le 22 février 1856, avec le Salvador le 2 janvier 1858, avec la nouvelle Grenade, le 15 mai de la même année, avec le Nicaragua le 11 avril 1859; les traités de navigation avec Lubeck, Brême et Hambourg le 4 mars 1865, avec les duchés de Mecklembourg le 9 juin et avec les Pays-Bas le 7 juillet de la même année; les conventions consulaires avec le Portugal le 11 juillet 1856 et avec l'Autriche le 11 décembre suivant; par les États-Unis avec le Guatemala le 3 mars 1849, avec le Pérou le 26 juillet 1851, avec la Bolivie le 13 mai 1858, avec le Vénézuéla le 27 août 1860, avec le Nicaragua le 21 juin 1867, avec l'Italie le 8 février 1868; par l'Espagne avec les Pays-Bas le 18 novembre 1871, par l'Allemagne avec les États-Unis le 11 décembre 1871 l'article 16 de ce traité prescrit l'application de la lex loci aux mesures de sauvetage limite l'action des consuls à la surveillance des réparations, des ravitaillements, et, s'il y a licu, de la vente du navire naufragé; fixe un maximum des frais à payer par le navire étranger, lesquels ne doivent dans aucun cas excéder ceux qu'aurait à payer un navire national.

§ 443. L'application des règles que nous venons d'exposer ne rencontre aucune difficulté et ne soulève aucune objection en temps de paix; elles sont admises et observées par toutes les nations; par contre en temps de guerre, la pratique suivie par les États belligérants dans les cas de naufrage et de relàche forcée d'un navire ennemi n'offre pas la même uniformité, comme nous le verrons, lorsque nous traiterons plus loin de l'état de guerre.

Quoi qu'il en soit, on peut regarder comme la règle la plus généralement admise, dans l'état actuel du droit des gens, que les navires de guerre chassés par la tempête ou autre fortune de mer et courant un danger imminent de naufrage ou d'échouement, sont, comme les navires marchands, reçus et secourus dans les ports ncutres aussi bien que dans les ports ennemis.

§ 444. Au nombre des accidents de mer qui peuvent causer le naufrage, il faut mentionner l'abordage, ou le choc d'un navire contre un autre navire.

En principe, l'abordage est censé fortuit; provenant de cause inconnue ou de force majeure; par exemple, deux bâtiments, soit en pleine mer, soit à l'ancre dans un port, sont portés l'un contre

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