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Au contraire, en ce qui concernait les augmentations, elles be monteraient guère qu'à 325,200 fr. »

Une dernière partie, intitulée Ensemble du projet de loi, en renfermait, en effet, la teueur ainsi que des dispositions additionnelles sur la législation des patentes, et celles également additionnelles concernant l'emploi des fonds disponibles de la dotation de l'armée. En ce qui concernait cet emploi en achat de rentes inscrites au nom de la Caisse des dépôts et consignations, ce n'était pas une obligation pour le Gouvernement, mais une faculté dont il pourrait faire usage. Les rentes seraient livrées au cours moyen du trimestre qui suivrait la date de l'arrêté du ministre. Inutile aussi de les faire acheter sur le marché, alors que la Caisse des consignations en avait à transférer directement.

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Discussion. Restait l'appréciation publique de ce projet de budget si minutieusement étudié et débattu 'par la Commission, et si clairement exposé par son rapporteur M. Devinck. Il se composait d'un projet principal, la loi financière proprement dite, et de deux projets additionnels: l'un relatif aux patentes, l'autre à l'emploi de la dotation de l'armée.

La discussion sur l'ensemble du projet commença le 26 avril. Elle fut ouverte par un député studieux, M. d'Andelarre. L'équilibre existait-il réellement dans le budget de l'exercice 1859, ou bien ce budget présentait-il un déficit de 47 millions sur les dépenses ordinaires, et de 29 millions sur les dépenses extraordinaires? Pour répondre à cette question, en d'autres termes pour savoir si la fortune de l'Etat était en progrès ou en déficit, il fallait distinguer le revenu et le capital, séparer les dépenses qui étaient une charge naturelle pour l'Etat, et les dépenses productives et extraordinaires. Quels étaient maintenant les chiffres du budget de 1859?

Recettes de l'Etat : 1,448,421,668 fr. Dépenses du service général (improductives et permanentes): 1,364,052,432 fr. soit un excédant de recettes de 84,369,023 fr. Ajoutez 13,653,363 fr. de créances recouvrées, d'immeubles vendus, et l'on avait un total de 98,022,594 fr. Somme destinée à l'extinction de la dette ou aux travaux extraordinaires, 90, 184,357 fr. Dans cette

situation, y avait-il équilibre? demandait M. d'Andelarre. Mais l'amortissement (doté de 123 millions)? L'orateur estimait qu'il était classé d'une manière irrégulière dans les dépenses ordinaires.

Cette question de l'amortissement occupa aussi un autre membre, M. Choque, qui fit d'ailleurs l'éloge de cette institution.

M. Darimon, lui, ne partageait pas cet optimisme. A son sens, l'action de l'amortissement pour l'extinction de la dette était à peu près nulle; mais la Caisse était un puissant réservoir de capitaux pour les besoins imprévus, et à ce titre seulement elle était de quelque utilité. On reprochait au budget de 1858 de ne donner un excédant de recettes qu'au moyen d'éléments transitoires. L'orateur adressait le même reproche au budget de 1859. Il attribuait à des moyens factices l'excédant final de recettes accusé par l'exposé financier. On ne pouvait pas non plus espérer une diminution de dépenses. Flottants et mobiles étaient les revenus considérables que l'on tirait depuis quelques années des revenus indirects. Pour les diminuer sensiblement, une crise financière suffirait. On avait réduit, il est vrai, de 815 à 750 millions la dette flottante; mais comment ? au moyen d'une consolidation de 199 millions.

Conclusion: les 40 millions que l'on allait employer à l'amortissement seraient plus utilement appliqués à quelques dépenses urgentes. Un orateur versé dans ces matières, M. Lequien, combattit à la fois M. Darimon et M. d'Andelarre. A ses yeux le rétablissement de l'amortissement dans le budget de 1859 était une amélioration incontestable. Il en résulterait un autre avantage: la nécessité où le Gouvernement se mettrait ainsi lui-même de se demander, en face de toute dépense nouvelle, si elle ne rendrait pas son amortissement partiellement fictif, et s'il n'en résulterait pas qu'au lieu d'avoir réellement racheté de la dette, on aurait seulement converti de la dette inscrite en dette flottante, c'est-à-dire opéré tout le contraire d'une bonne gestion. M. Lequien ne pensait pas non plus comme le préopinant, au sujet des moyens de diminuer les découverts. Sans doute, le remboursement d'une partie de la dette flottante serait préférable, mais ce

remboursement ne pourrait avoir lieu que dans un avenir plus ou moins éloigné. Or, il fallait une atténuation immédiate : le Gouvernement avait adopté le seul moyen d'y parvenir sans perturbation, en s'adressant aux deux établissements où vont s'immobiliser les rentes émises en échange des fonds qu'ils lui procurent. Ainsi avait-on pu, sans troubler les cours, consolider 199 millions. Il y avait de plus dans le budget une somme inscrite de 5 millions dont il fallait aussi tenir compte; depuis 1856, elle venait annuellement atténuer la dette flottante par voie de remboursement; ce qui la réduisait à 756 millions en 1859. Etait-ce excessif? On avait bien pu supporter 965 millions. D'ailleurs on avait recours maintenant à des moyens plus assurés que par le passé, pour le service de la dette flottante. L'Etat n'avait plus recours à cet effet à quelques banquiers qui dictaient leurs conditions; il se procurait actuellement les fond's qui lui étaient nécessaires au moyen de bons du Trésor, que l'on plaçait dans les départements. C'est-à-dire que le public tout entier assurait ce placement. Mais le chiffre des découverts devait encore être atténué; il conviendrait que la dette flottante, dans les temps prospères, fût ramenée au chiffre des fonds que le Trésor était obligé de recevoir dans la caisse de la dette flottante, c'est-à-dire à un chiffre de 400 millions, de manière à éviter les emprunts en temps de crise. L'amortissement aurait pour but, non-seulement de racheter de la rente, mais de dégager les abords du grand-livre. Envisageant ensuite les engagements de l'Etat (autre élément de la situation financière) vis-àvis des compagnies de chemin de fer en particulier, l'orateur établissait que plus on s'éloignait de 1851, et plus l'importance de ces subventions diminuait, de telle sorte, qu'actuellement c'était pour ainsi dire les compagnies qui donnaient des subventions à l'Etat. Autre amélioration de la situation : la prorogation à trente années du délai pour le payement, fixé d'abord à douze ans.

Venait,enfin, la situation budgétaire proprement dite. Le défaut d'équilibre signalé par la Commission: un excédant de 47 millions des dépenses ordinaires sur les recettes de même nature, n'avait cependant pas pour résultat un découvert. On ne pouvait

constater un résultat de ce genre, qu'à l'issue définitive d'un exercice. Exemple, celui de 1848 qui s'était soldé en définitive avec un découvert de 3 millions seulement, malgré l'absorption de 404 millions de ressources extraordinaires. Mais quel était le moyen le plus efficace de rentrer dans une situation tout à fait normale? Une augmentation des revenus indirects? Cela ne suffisait point selon l'honorable membre; car de la plus-value qui en résultait, il fallait défalquer le produit des impôts nouveaux. Il fallait donc procéder aussi à la réduction des dépenses.

Cette conclusion de l'orateur était au surplus celle de tous les systèmes possibles.

Cependant, à ce vou si naturel, M. Lequien ajoutait celui de voir le principe de la spécialité s'introduire dans le vote des dépenses. C'était aussi le vœu de la Commission (V. ci-dessus.)

Selon M. Vuitry, orateur du Gouvernement, c'est par suite d'un malentendu que l'on parlait (la Commission) d'un découvert de 47 millions entre les dépenses et les recettes ordinaires. La Commission soutenait qu'il fallait comprendre dans les dépenses les sommes consacrées à l'amortissement. Mais il convenait aussi de n'y comprendre que la dotation permanente de l'amortissement, et de réserver la partie des ressources de cette caisse, provenant des rentes rachetées ou consolidées, puisqu'elles pourraient être annulées par une loi spéciale.

Autre observation nécessaire aux 30 millions admis par la Commission, pour travaux extraordinaires, il fallait ajouter 17 autres millions attribués à la transformation de la flotte. D'où, dans les calculs de M. Vuitry, un excédant de 6 millions. Ajoutez un million d'excédant de recettes pour le service ordinaire; en conséquence, 7 millions en plus constatés par le Gouvernement.

Comparaison faite du budget de 1853 (première année de l'Empire) avec celui de 1859, l'orateur établissait qu'au lieu d'un découvert de 23 millions, en même temps que l'on avait toutes les ressources de l'amortissement, et que 54 millions étaient remboursés à l'Etat par les chemins de fer, il restait, en 1859, l'excédant de recettes de 7 millions dont il venait d'être parlé. M. le Commissaire du Gouvernement espérait done qu'à son tour le

Corps législatif reconnaîtrait que la situation était satisfaisante.

C'est ce que reconnut aussitôt le Rapporteur de la Commission. Mais quant au malentendu dont parlait le préopinant, M. Devinck allait plus loin: il y voyait un complet dissentiment sur le principe. Le fonds de l'amortissement s'élève à 123 millions, savoir: 87 millions de dotation proprement dite, et 36 millions de réserves. Question de savoir si les sommes appartenant à l'amortissement devaient être inscrites dans le budget des dépenses. Nul doute à cet égard aux yeux de la Commission. Exemple, le rapport sur le budget de 1847, œuvre du ministre actuel des finances « qui eut soin de faire figurer l'amortissement dans les dépenses et non dans les recettes. » Cette inscription avait toujours été ordonnée ; et lors du vote de 1,500 millions d'emprunt, on avait eu soin d'inscrire au budget le centième destiné à l'amortissement du capital. Tous les efforts devaient donc tendre à faire fonctionner l'amortissement d'une manière complète. a Il ne faut pas de malentendu en matière de finances, la situation est assez bonne en réalité pour qu'on ne cherche pas à la rendre meilleure encore, mais seulement en apparence. Le pays saura que l'amortissement qui n'avait pas fonctionné depuis 1848 va fonctionner désormais, mais non pour la totalité de sa dotation. Tant qu'on ne parviendra pas à faire fonctionner la totalité de cette dotation, le budget ne sera pas en équilibre, parce que la condition première de l'équilibre financier c'est que les recettes annuelles correspondent aux dépenses permanentes. » Ainsi argumentait l'organe de la Commission.

Dans la conviction du Président du Conseil d'État, ni l'une ni l'autre de ces expressions: déficit, défaut d'équilibre, employées dans le Rapport, n'étaient applicables au budget de 1859. Il eût été désirable que l'on pût dès à présent porter au budget les 123 millions de l'amortissement; mais parce que l'on n'avait fait figurer cette année que 40 millions, s'ensuivait-il qu'il y eût déficit?

A M. Paul Dupont (séance du 27 avril), qui fit valoir quelques généralités utiles, succéda M. de Saint-Paul, quidit que dans le budget de 1859 on prévoyait 74 millions de recette de plus qu'en 1858, et que c'était une prévision hasardée.

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