Images de page
PDF
ePub

dire qu'il y ait eu de leur part le même concours quant à la politique intérieure. Réunis en février, les Etats, nonobstant une sorte d'appel à la conciliation que leur avait fait le Roi lors d'un banquet parlementaire, les Etats, disons-nous, firent une opposition presque constante aux projets de la Couronne, et à ce qu'elles jugeaient être des envahissements de sa part. En vain le Roi, prétextant de la Constitution fédérale, s'appliquait-il à écarter de son chemin ce qu'il jugeait en contradiction avec elle, ou ce qui, à son point de vue, menaçait l'ordre intérieur, les Chambres lui résistaient ou refusaient de se laisser entraîner dans une voie de réaction. Le ministère tenait beaucoup à un projet qu'il avait élaboré sur la chasse; cette fois il avait pour lui la première Chambre; mais, quand ce fut au tour de la seconde Chambre, elle le remania de telle sorte qu'il ne répondait en rien aux prévisions de ses auteurs. Un autre projet relatif à la réorganisation judiciaire, eut un sort plus malheureux encore. Après avoir motivé la retraite de M. de Decken, ministre de la justice, en désaccord avec les autres membres du Cabinet, et qui fut remplacé par M. de Bar, ce projet échoua au sein de la première Chambre (novembre). Quelles causes avaient pu amener ce grave résultat? C'est qu'on voyait dans la loi proposée une tendance à rendre l'autorité judiciaire dépendante du Gouvernement. Il s'agissait aussi de réduire le nombre des juges.

Les demandes de crédits n'éprouvèrent pas moins de vicissitudes, et ce ne fut pas sans peine que les représentants du pays consentirent à la création de nouveaux directeurs de police dans les principales villes du royaume, et à augmenter certains traitements des fonctionnaires. En même temps,

blâme formel adressé au Gouvernement par les Chambres à l'occasion de dépenses de luxe ou autres, estimées superflues. Voilà où en étaient les choses: opposition croissante, émotion de l'opinion au sein du pays. Le Roi se montra frappé de cette direction des esprits, qu'un retour à une politique intérieure moins tendue pouvait seul ramener.

HESSE ÉLECTORALE.

Le désaccord entre l'Electeur et les Etats était loin de s'aplanir. Au mois de juillet de cette année le nouveau représentant du Gouvernement auprès de la Diète germanique, M. Abbé, fut chargé de faire connaître à la Haute Assemblée les concessions que le Prince était disposé à faire à ses sujets. Il serait assez accommodant sur les questions constitutionnelles; mais il n'entendrait à rien dès qu'il s'agirait des questions de famille et de finance. Or c'étaient précisément celles qui intéressaient le pays. Et d'abord on supposait à l'Electeur le projet d'investir du pouvoir, à un moment donné, le second des fils issus de son union morganatique avec la princesse de Hanau; ensuite, il importait beaucoup aux Etats - et c'est ce que contestait l'Electeur de savoir ce que devenaient les sommes votées pour les exercices écoulés. On voit par là que le Prince et les représentants du pays n'étaient pas près de s'entendre.

-

Réunis en juillet, puis prorogés jusqu'au mois d'octobre, les Etats ne se livrèrent cependant pas à des débats bien importants. La question constitutionnelle resta ainsi entière. En présence de la persistance prolongée de l'Electeur et du droit des contribuables de s'enquérir de la situation financière, la solution était difficile. Il n'y avait que l'Assemblée de Francfort qui pût rétablir la concorde en un conflit assez fréquent en Allemagne entre princes et sujets.

BRUNSWICK.

l'Elec

Le Gouvernement de ce duché se montra plus sage que teur de Hesse. Le 12 août il promulgua une loi qui faisait disparaître en matière financière des droits surannés et empreints d'un caractère féodal, par exemple, les dimes, les droits de mouture et d'abatage. Le tout était remplacé par une contribution foncière générale. Ce fait résumait l'histoire du duché.

Mais il avait une haute portée, et témoignait que le Brunswick suivait le mouvement général de l'Allemagne.

BADE.-Des discussions religieuses ardentes, comme il arrive toujours en ces matières, troublèrent la paix habituelle du GrandDuché. Cette fois l'Eglise catholique, dont les intérêts étaient enfin réglés par un concordat, ne fut aucunement mêlée à cette agitation. Le trouble régnait au sein des Eglises protestantes. S'associant aux vues orthodoxes, en faveur en Bavière et en Prusse, le Gouvernement Grand-Ducal méditait de remplacer l'acte d'union de 1821, qui fondait en un symbole unique les catéchismes de Luther et de Heidelberg, par un rituel conçu dans la forme primitive du protestantisme, et analogue à ce qui existait au temps de l'auteur de la réforme. Le synode de 1855, siégeant à Carlsruhe, avait posé les bases de cette œuvre dont la rédaction, confiée à un prélat vénéré, M. Ulmann, put être soumise vers la fin de 1857 à l'approbation du Grand-Duc. Elle ne fit pas défaut, et le rituel fut publié pour être mis en application dans les communautés religieuses. Mais, presque immédiatement après la publication, on dut renoncer à faire accepter l'œuvre de M. Ulmann. Elle fut violemment critiquée comme entachée de papisme ou des abominations de l'Eglise romaine. Bientôt ce fut comme une levée générale de boucliers qui se traduisit en protestations, en pétitions revêtues de milliers de signatures et ayant pour objet la demande d'un synode afin de révision de la nouvelle liturgie. Le Grand-Duc comprit le vœu de ses sujets protestants, et le 20 décembre, parut une ordonnance transactionnelle du Grand-Duc, de laquelle il ressortait que le rituel Ulmann ne serait obligatoire qu'en partie.

Des sujets moins irritants occupèrent néanmoins le Gouvernement et les États. En première ligne, un projet tendant à améliorer la position des instituteurs des Real-schule (écoles professionnelles); un autre relatif à l'exécution du traité monétaire de 1856, conclu entre l'Autriche et l'Union douanière ; enfin, un dernier projet en vue de l'établissement d'un nouveau cadastre, dont le résultat permettrait une meilleure répartition de l'impôt foncier. Les Chambres approuvèrent aussi en défini

tive le système de voies ferrées proposé par le Cabinet. Elles augmentèrent la liste civile. Le Discours de clôture des États (3 mai) résuma leurs travaux. Le Grand-Duc annonça sa résolution d'entrer dans la voie des économies par la simplification des rouages de l'administration.

Au dehors, la politique du Gouvernement était empreinte d'un caractère qui, cette année, ne franchit guère les limites d'une sage modération. On a vu ci-dessus (Confédération germanique) que le traité conclu avec la France pour la construction d'un pont fixe sur le Rhin à Kehl, reçut (5 juin) la sanction de la Haute-Diète. La conduite politique du Grand-Duché dans d'autres occurrences, en particulier à l'occasion de la garnison de Rastadt, fut empreinte de ce même esprit de sagesse. Entre les prétentions extrêmes de Vienne et de Berlin, le gouvernement de Carlsruhe sut garder, malgré les récriminations ou les plaintes de la Prusse, l'attitude impartiale qui lui convenait.

OLDENBOURG.

Ce petit pays prit, cette année, des résolutions importantes. D'abord il fit cause commune avec le reste de l'Allemagne contre le Danemark. Le 3 mars, la Diète oldenbourgeoise vota, à l'unanimité, sur la proposition de son Gouvernement, une décision ayant pour objet l'institution d'une caisse de secours en faveur des anciens officiers de l'armée du Sleswig-Holstein. Présentée d'abord à l'Assemblée de Francfort par la Prusse et le Hanovre, mais écartée par le Président, c'est-à-dire par l'Autriche, la proposition se reproduisait ainsi sous une forme spéciale dans certains Etats du nord de l'Allemagne.

Le 8 mars, une autre proposition ayant pour objet une œuvre d'utilité intérieure, la construction du port de Brake, fut soumise aux représentants du Grand-Duché. On évaluait à plus de 100,000 thalers la dépense qu'entraînerait cette construction; mais les avantages étaient trop manifestes pour que l'on refusât cette allocation.

FRANCFORT.

Réunie depuis le 2 novembre 1857, l'Assemblée législative de cette ville avait à se prononcer sur d'importantes questions. En première ligne se présentait un projet relatif aux poids et mesures: on proposait, ce qui en présence du mouvement général de l'Allemagne commerciale n'offrait point de difficultés, on proposait d'introduire en cette matière le système adopté par l'Union douanière. Mais ce qui ne fut pas accueilli avec le même empressement, c'était le projet de traité avec la France au sujet de la propriété littéraire. La Commission chargée de l'examen de cette convention conseilla à l'Assemblée de refuser sa sanction. Le Rapport posait d'abord la question de savoir s'il serait utile en général à la ville de Francfort de conclure un arrangement particulier pour la protection réciproque des œuvres littéraires, tant qu'il n'existerait pas de traité de ce genre entre la France et la plus grande partie de l'Allemagne. Poser ainsi la question, c'était la résoudre négativement; c'est aussi ce que faisait l'organe de la Commission. Il allait plus loin : non-seulement, dans l'état présent des choses, Francfort ne retirerait point d'avantages du traité projeté, mais il n'en résulterait pour elle que des inconvénients. En admettant, continuait le Rapport, que la Confédération germanique ne trouvât point, dans l'article 64 de l'acte final du Congrès de Vienne et le règlement de la Diète, des motifs suffisants pour autoriser la conclusion de sa part, d'un traité de ce genre, applicable à toute l'Allemagne, on pourrait laisser ce soin au Zollverein, ce qui garantirait encore les intérêts de la ville de Francfort. Conclusion: il-fallait s'adresser à la Diète germanique, d'abord, puis à l'Union douanière, afin d'obtenir un traité de protection littéraire applicable à la plus grande partie de l'Allemagne. Nonobstant l'urgence de la question, car ici comme dans nombre d'États allemands, l'imprimerie avait besoin de tirer parti de ses produits au dehors comme à l'intérieur, l'Assemblée législative adopta (28 juin) la solution négative de sa Commission, quant au traité avec la France; en même temps elle émit le vœu de voir le Zollverein prendre en main cette question.

« PrécédentContinuer »