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CHAPITRE V.

DANEMARK.

Ouverture de la session du Conseil suprême; discours du Roi: il porte en particulier sur la question des duchés allemands. Où en était cette question?-Rapport de la Commission instituée en octobre. Invitation adressée au Gouvernement royal par la Diète de Francfort. Elle ne reconnait aucune des ordonnances sur lesquelles est basée la position politique actuelle des duchés allemands dans leurs rapports avec la Couronne. Autre résolution de l'Assemblée de Francfort adoptée sur la proposition de l'envoyé du Hanovre, et tendante à inviter le Gouvernement royal à ne faire voter par le Conseil suprême aucuns crédits nouveaux ou lois fiscales pouvant concerner le Holstein ou le Lauenbourg. Réponse du Gouvernement : il décline, quant à présent, la compétence de la Diète, en ce qui concerne la Constitution commure. Nouvelle commission instituée à l'effet d'examiner cette réponse. Réplique de la Confédération germanique et mise en demeure adressée au Gouvernement royal de se prononcer dans un délai donné. Nouvelle réponse du Gouvernement de Copenhague. Il propose de faire régler la question contradictoirement et par voie de négociations. Il consent de plus à l'abolition du ministère d'intérieur commun. Autres répliques échangées de part et d'autre. Déclaration de la Suède à propos de la menace d'envoyer dans le Nord les troupes chargées d'exécuter les résolutions fédérales. - Ordonnances du 6 novembre par lesquelles le Roi se rend aux exigences de la Diete, sauf à soumettre définitivement les questions litigieuses aux Etats convoqués à cet effet. — Circulaire adressée aux Légations danoises à l'étranger à La l'effet d'expliquer les motifs déterminants de ces ordonnances. Diete suspend toutes mesures coercitives contre le Danemark; toutefois elle subordonne à la décision des Etats ses actes ultérieurs. Fortifications de Copenhague: loi qui décide qu'elles seront exécutées, à dater de la promulgation, jusqu'en 1869, au plus tard jusqu'en 1888. Sanction du traité relatif aux péages sur le Sund. Loi relative à l'exercice des professions industrielles. Curieuses dispositions. — Ordonnance relative à la contrefaçon des ouvrages publiés en France: réciprocité. Flotte danoise.- Diminution du mouvement maritime et commercial du port d'Elseneur. Cause de ce changement.

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Le jour même où, à Francfort, la Commission chargée de l'examen de la plainte de l'Autriche et de la Prusse, au sujet du Holstein et du Lauenbourg, soumettait son rapport à la 1858

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Haute Diète, le Roi de Danemark ouvrait la session ordinaire du Conseil suprême de la monarchie. Debout et découvert, Frédéric VII prononça un discours dans lequel, après s'être applaudi de la prospérité intérieure, il abordait tout d'abord la question qui depuis si longtemps préoccupait les esprits. « Nous avons vu avec une peine profonde, disait Sa Majesté, que dans les Assemblées pour les États provinciaux de nos Duchés de Holstein et de Lauenbourg, les rapports constitutionnels ont été inerprétés de manière à exciter l'inquiétude et la désunion, et cette peine, nous l'avons ressentie d'autant plus vivement que les rapports de ces Duchés avec la Confédération germanique ont amené des discussions avec les Gouvernements d'Autriche et de Prusse, et ont déterminé le renvoi de la question à la Diète fédérale. >>

Et le Roi ajoutait que des pièces qui seraient présentées au grand Conseil, il résulterait que pour vider le différend à l'amiable, il s'était montré prêt à toute concession compatible avec la prospérité de la monarchie.

Cette explication sur la grande difficulté du moment, était suivie de l'annonce de divers projets de loi, parmi lesquels ceux relatifs à l'organisation et à la consolidation des moyens de défense du pays, ce qui était un corollaire de ce qui précédait. Le chapitre des finances ne pouvait pas être oublié: le Roi espérait que le Conseil donnerait son assentiment aux dépenses indispensables, reconnaissant comme un devoir « d'assurer à l'État les forces nécessaires pour sauvegarder au besoin son honneur et son indépendance, »

Le discours royal annonçait en terminant un nouveau projet de tarif de douanes. La partie saillante de ce document était nécessairement celle qui touchait au conflit avec les duchés allemands. Nous avons rappelé (Confédération germanique) que le 14 janvier, la Commission formée le 29 octobre 1857 (V. Ann.) avait fait son rapport sur la question, au point de vue constitutionnel, et que la Haute Assemblée avait remis à quelques semaines plus tard son vote sur les conclusions de la Commission. De son côté, le représentant danois avait annoncé à la Diète, tout en réservant les droits de son Gouvernement, qu'il ferait prochai

nement une déclaration sur le mémoire du Lauenbourg. Seulement, le dépôt des pièces relatives au conflit témoignait que le Roi ne voulait pas s'engager à cet égard dans la voie des concessions avant d'avoir consulté le Conseil suprême de la monarchie.

Le 11 février, avertissement donné par la Diète au Gouvernement royal et ducal, et dont voici l'esprit : la Diète ne reconnaissait comme en vigueur constitutionnelle ni l'ordonnance du 11 juin 1854, au sujet du Duché de Holstein, attendu que les articles n'en avaient pas été soumis aux Etats provinciaux du duché, ni le décret du 23 juin 1856, ni la Constitution commune du 20 octobre 1855; cette dernière, comme inapplicable au Holstein et au Lauenbourg.

L'organe de la Confédération regrettait ensuite de ne pas trouver dans les lois et ordonnances promulguées depuis, quant aux rapports des Duchés de Holstein et de Lauenbourg avec les autres parties ou l'ensemble de la monarchie danoise, une observation bien fidèle des promesses royales de 1851 et 1852. Enfin, la Diète invitait le Gouvernement de Frédéric VII à établir dans les Duchés un état de choses qui leur garantit leurs Constitutions particulières et leur administration. L'Assemblée de Francfort ne se contentait pas de cette sorte de décision rendue par défaut contre le Gouvernement danois, elle fit plus : le 25 février, elle adopta une motion du représentant du Hanovre tendante à recommander au Danemark de s'abstenir, jusqu'à ce qu'il eût été fait droit aux demandes relatives à la position constitutionnelle des Duchés, de faire voter par le Conseil suprême, des lois, des règlements et des crédits nouveaux touchant directement le Lauenbourg et le Holstein. Ce qui revenait à un refus d'impôt.

Enfin, le 19 mars vint la réponse du Gouvernement de Copenhague, communiquée à la Diète le 25 du même mois. L'Assemblée de Francfort prétendait entachés d'inconstitutionnalité, comme n'ayant pas été soumis aux États du Holstein, les premiers paragraphes de l'ordonnance fondamentale du 11 juin 1854: le Gouvernement danois admettait ce point. Mais, puisqu'il ne s'agissait que d'une omission, quant à la forme, il n'y avait

qu'à procéder comme pour toutes lois provisoires, prononcer d'abord, sauf à en référer ensuite aux pouvoirs compétents, c'està-dire, dans la cause actuelle, que les paragraphes dont s'agissait pourraient être soumis aux États du Duché en même temps qu'ils concourraient à la fixation de son indépendance et à la détermination de ses intérêts particuliers. Le Holstein pourrait aussi exprimer alors ses vœux relatifs à la Constitution commune et à la loi électorale.

La Diète ayant en outre exprimé le regret que les lois et ordonnances intervenues depuis 1854, n'eussent pas réalisé les promesses faites aux Holsteinois, le Gouvernement royal répondait que c'était là une question de fond, et non plus de forme comme la précédente. Et quant à la critique de la Constitution commune de la monarchie danoise, la réponse qui était faite à la Haute Diète déclinait sa compétence à cet égard. Enfin, s'agissait-il de la motion hanovrienne devenue décision diétale, le Danemark convenait que l'activité de la Constitution commune devait nécessairement être suspendue sur certains points, la Diète ayant invalidé en partie la constitution provinciale du Duché. De tout quoi le Gouvernement royal tiendrait compte. C'est-à-dire qu'il ajournerait toutes décisions pouvant affecter les intérêts matériels ou financiers du Duché, tels que tarif des douanes, impôt nouveau. A la suite de cette réponse, qui ouvrait la voie à la conciliation, nomination d'un comité diétal chargé d'en rendre compte. Le rapport de ce comité n'ayant point paru assez vigoureusement accusé (29 avril), une réplique péremptoire fut arrêtée en assemblée fédérale le 20 mai. Voici quelle en était la teneur. 1o Six semaines nouvelles étaient accordées au gouvernement danois, à l'effet de s'expliquer sur la manière dont il entendait régler la position constitutionnelle des Duchés, eu égard à la décision de la Diète en date du 11 février de cette année. 2° Quant à l'invitation adressée au Gouvernement royal le 25 du même mois, outre que la Haute Assemblée n'acceptait pas l'interprétation que lui donnait le gouvernement de Copenhague, elle se réservait au contraire toute sa liberté d'agir suivant que les circonstances ne répondraient pas à ses résolutions. Ainsi, la couronne de Danemark était mise en demeure de se

prononcer dans un délai donné. Inutile d'ajouter que son envoyé à la Diète avait protesté dans une déclaration motivée; en même temps il avait voté contre le rapport du Comité. Le délai fixé dans la réplique diétale devait échoir le 15 juillet. A cette date, le Gouvernement danois fit un nouveau pas vers la solution en adressant à la Diète une réponse de laquelle il résultait : que tout en admettant sa compétence au sujet de l'abolition constitutionnelle ou non constitutionnelle de l'ancienne organisation provinciale du duché de Holstein, il ne pouvait consentir à ce que les négociations suivies d'abord avec les grandes puissances allemandes, plus tard avec la Confédération germanique, fussent interprétées exclusivement par une seule partie. Toutefois, proposition, en ce qui concernait le Lauenbourg, d'établir des règles constitutionnelles, telles que tous les doutes sur le maintien intégral des droits fondés par la constitution provinciale du Lauenbourg seraient résolus. Et quant au Holstein, en attendant l'avis des États, offre de laisser ouvrir avec la Diète, avant ou après cet avis, les négociations déjà proposées, et jusqu'à leur issue, de considérer la constitution générale du 2 octobre comme n'étant plus en vigueur dans les Duchés. De telle sorte qu'il n'y aurait plus qu'à faire fixer par les négociateurs délégués, la position constitutionnelle des Duchés dans l'organisation générale de la monarchie, tous droits du souverain du pays et des devoirs du Roi, comme membre de la Confédération, étant réservés.

Le 26 juillet, autre concession du gouvernement de Copenhague: il n'y aurait plus (ce que les Holsteinois demandaient depuis longtemps) de ministère particulier pour les affaires générales de l'intérieur. Elles seraient désormais de la compétence du ministre des finances. - 12 août, nouvelle résolution de la Diète : elle jugeait insuffisantes les offres et décision des 15 et 26 juillet, et demandait avant tous débats contradic

toires si en même temps qu'il abolissait le ministère commun de l'intérieur, le Gouvernement entendait abolir la patente du 23 juin 1856 désignative des intérêts particuliers du Holstein, ainsi que les paragraphes attaqués de l'ordonnance du 11 juin 1854.

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