Images de page
PDF
ePub

il (1), solidement établie : on peut souffrir ceux qui errent dans les autres questions qui ne sont pas encore bien examinées, qui ne sont pas décidées par l'autorité de P'Eglise; c'est là que l'erreur se doit tolérer, mais elle ne doit pas entreprendre d'ébranler le fondement de l'Eglise. Ce qu'il appelle ébranler le fondement de l'Eglise, c'est douter de ses décisions.

2. FAIT. Les Pélagiens avoient été condamnés par les conciles d'Afrique, et le pape avoit confirmé les décrets de ces conciles; personne dans l'épiscopat ne réclamoit que quatre ou cinq évêques pélagiens. Saint Augustin explique à son peuple ce qui s'étoit passé. Deux conciles d'Afrique tenus sur cette matière, ont été, dit-il (2), envoyés au saint Siége : les réponses en sont venues, la cause est finie, plaise à Dieu que l'erreur finisse.

Les affaires sont finies parmi les chrétiens, quand le saint Siége en convient avec l'épiscopat.

3. FAIT. Saint Augustin dispute contre les donatistes, qui disoient que le baptême donné par les hérétiques n'étoit pas valable, et qu'il le falloit réitérer. Ces hérétiques alléguoient l'autorité de saint Cyprien, qui avoit soutenu leur sentiment. Saint Augustin excuse saint Cyprien sur ce qu'il a erré avant qu'il fût décidé par l'autorité de l'Eglise universelle, que le baptême se pouvoit donner valablement hors de l'Eglise : et nous-mêmes, dit-il (3), nous n'oserions pas l'assurer, si nous n' appuyés sur l'autorité et le consentement de l'Eglise universelle, à laquelle saint Cyprien auroit cédé sans difficulté, si la vérité eút été dès-lors éclaircie et confirmée par un concile universel.

n'étions

Ce que saint Augustin n'oseroit pas assurer sans l'autorité de l'Eglise, non-seulement il l'assure après sa déci

(1) Ser. 294. aliàs 14. de verbis Apost. c. XXI. — alias 2. de verbis Apost. c. x.

(2) Serm. 131.

(3) De Bapt. contra Donat. lib. 11.

C. IV.

sion, mais encore il ne peut croire que saint Cyprien ni aucun homme de bien en puisse disconvenir.

Et il ne se trompe pas en jugeant ainsi de saint Cyprien, qui avoit enseigné si constamment qu'il falloit condamner sans examen tous ceux qui se séparoient de l'Eglise. Voici comme il en écrit à l'évêque Antonien sur la doctrine de Novatien, prêtre de l'Eglise romaine, et auteur d'une secte nouvelle (1). Vous me priez de vous écrire quelle hérésie a introduit Novatien. Sachez premièrement, mon cher frère, que nous ne devons pas méme étre curieux de ce qu'il enseigne, puisqu'il n'enseigne pas dans l'Eglise. Quel qu'il soit, il n'est pas chrétien, n'étant pas en l'Eglise de Jésus-Christ.

Saint Augustin avoit raison de croire qu'un homme qui parle ainsi de l'autorité de l'Eglise, n'auroit pas hésité après la décision.

On objecte à mademoiselle de Duras, qu'il faut bien, quoi qu'on lui dise, qu'elle se serve de sa raison pour choisir entre deux personnes qui lui parlent de la religion d'une façon si contraire, et ainsi que les catholiques ont tort de lui proposer une soumission à l'Eglise sans

examen.

Mais qui ne voit 1.o que c'est autre chose d'examiner après quelques particuliers, autre chose d'examiner après l'Eglise.

2.o Que si mademoiselle de Duras est forcée d'examiner après son Eglise, qui lui déclare elle-même qu'elle et tous ses synodes peuvent se tromper, et qu'il se peut faire qu'elle seule entende mieux la parole de Dieu que tout le reste, de l'Eglise ensemble, comme M. Claude le lui a enseigné, il ne s'ensuit pas pour cela que l'Eglise soit faillible en soi, ni qu'il faille examiner après elle; mais que ceux-là seulement doivent faire cet examen qui doutent de l'autorité infaillible de l'Eglise.

(1) Epist. LI. ed. Pamel.

3. Les catholiques ne prétendent pas qu'il ne faille pas se servir de sa raison; car il faut de la raison pour entendre qu'il se faut soumettre à l'autorité de l'Eglise ; un fou ne l'entendroit jamais : mais quoiqu'il faille de la raison, il ne s'ensuit pas pour cela que la discussion de ce point soit difficile ou embarrassée, comme celle des autres points. Si peu qu'on ait de raison, on en a assez pour voir qu'un particulier ne doit pas être assez téméraire pour croire qu'il entend mieux la parole de Dieu que toute l'Eglise.

4.° C'est pour cela que Dieu nous a renvoyé à l'autorité, comme à une chose aisée, au lieu que la discussion par les Ecritures saintes est infinie, comme l'expérience le fait voir.

5.° Quand l'Eglise propose de se soumettre sans examen à son autorité, elle ne fait que suivre la pratique des apôtres.

A la première question qui s'est mue dans l'Eglise, elle a prononcé, en disant: Il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous (1). Examiner après cela, ce seroit examiner après le Saint-Esprit.

La discussion se fit donc dans le concile des apôtres : après on ne laissa plus de discussion à faire aux fidèles. Paul et Silas alloient parcourant les villes, leur enseignant de garder ce qui avoit été jugé par les apótres et les prétres dans Jérusalem (2).

Ceux donc qui ne sont pas dans l'Eglise doivent examiner, et c'est ce que faisoient ceux de Berée (3); mais pour ceux qui sont dans l'Eglise, le concile des apôtres leur fait voir qu'il n'y a plus rien à examiner après la décision.

Nous avons appris par ce premier concile à tenir des conciles pour définir les questions qui s'élèvent dans l'Eglise. Nous devons apprendre quelle est l'autorité — (2) Ibid. xvI. 4.- (3) Ibid. xv11. 17.

(1) Act. xv. 28.

des conciles par où nous avons appris à tenir les conciles mêmes.

Encore un mot de saint Augustin (1): Qui est hors de ́l'Eglise ne voit ni entend; qui est dans l'Eglise 'n'est ni sourd ni aveugle.

CHAPITRE XX.

Que la méthode que M. Simon attribue à saint Athanase et aux Pères qui l'ont suivi dans la dispute contre les ariens, n'a rien de certain, et mène à l'indifférence.

MAIS afin qu'on ne croie pas que je craigne, par une vaine terreur, les secrets desseins de l'auteur, il faut ici les approfondir avec plus de soin, et mettre encore dans un plus grand jour ce mystère d'iniquité, en le déterrant du milieu des expressions ambiguës dont cet auteur artificieux a tâché de l'envelopper.

Je dis donc hautement et clairement que la méthode de notre auteur nous mène à l'indifférence des religions, et que le moyen dont il se sert pour nous y conduire, est de faire voir que ce qu'on appelle foi, n'est autre chose dans le fond qu'un raisonnement humain.

Il faut ici expliquer la méthode qu'il attribue aux anciens docteurs sur le sujet du raisonnement. La théologie, dit M. Simon (2), reçut en ce temps-là (dans le temps de saint Athanase) de nouveaux éclaircissemens; et comme les disputes (sur la divinité du Fils de Dieu), commencèrent à Alexandrie, où la dialectique étoit fort en usage, on (1) Enar. in Ps. XLVII. n. 7. — (2) P. 91.

:

joignit le raisonnement au texte de l'Ecriture ; voilà déjà un beau fondement. Auparavant on ne raisonnoit point sur l'Ecriture; on ne conféroit point un passage avec un autre; on n'en tiroit pas les conséquences, pas même les plus certaines, car tout cela certainement c'est raisonner; or on ne raisonnoit pas. Tertullien, ni Origène, ni saint Denis d'Alexandrie, et les autres Pères n'avoient point raisonné contre Marcion, ni contre Sabellius, ni contre Paul de Samosate, et contre les autres hérétiques, ni contre les Juifs cela commence du temps de saint Athanase. On joignit alors le raisonnement au texte de l'Ecriture; ce qui, poursuit notre auteur (1), causa dans la suite de grandes controverses; car chaque parti voulut faire passer, pour la parole de Dieu, les conséquences qu'il tiroit des écrits des évangélistes et des apôtres. Ces embarras sont donc également causés par les orthodoxes et par les hérétiques, par Athanase et par Arius, et chaque parti voulut prendre ses conséquences pour la pure parole de Dieu : qui aura tort? On n'en sait rien; et tout ce qu'on voit jusqu'ici, c'est qu'on suivoit de part et d'autre une mauvaise méthode. C'est déjà un assez grand pas vers l'indifférence; mais ce qu'ajoute l'auteur nous y mèneroit encore plus certainement, si nous suivions ce guide aveugle. Voici la suite de ses paroles (2) Les ariens opposèrent de leur côté aux catholiques, qu'ils avoient introduit dans la religion des mots qui n'étoient pas dans les livres sacrés. Saint Athanase prouva au contraire que les ariens (1) P. 91.-(2) Ibid.

« PrécédentContinuer »