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religion, et la religion elle-même est indifférente, en abandonne les preuves, que Grotius qui n'avoit point de principe et qui avoit si peu de théologie, qu'en sortant de celle de Calvin, il n'a rien trouvé de meilleur que celle des sociniens, soit entré dans leur esprit; mais on ne peut assez déplorer que M. Simon, nourri dans l'Eglise catholique, et élevé à la dignité du sacerdoce, ait appuyé ces deux auteurs, et qu'il ait été à leur exemple si fort entêté du rabbinisme et de la critique pleine de chicane où il s'est plongé, qu'il ait oublié les Pères et les traditions les plus constantes du christianisme. Quand après cela il fera semblant de louer la tradition, nous lui dirons qu'il nous veut tromper sous cette apparence; puisque déjà nous la lui avons vu détruire par sept moyens : le premier, en disant qu'elle a varié sur la matière de la grâce du temps de saint Augustin : le second, en soutenant qu'elle nous trompoit en établissant du temps de ce Père la nécessité absolue de la communion: le troisième, en permettant d'expliquer le sixième chapitre de saint Jean, sans y trouver l'eucharistie, contre le sentiment de tous les Pères, de son propre aveu: le quatrième, en afföiblissant, sous prétexte de favoriser la tradition, toutes les preuves de l'Ecriture que la tradition elle-même proposoit comme les plus fortes le cinquième, en détruisant l'autorité de l'Eglise catholique, sans laquelle il n'y a point de tradition le sixième, en décriant la théologie, et non-seulement la scolastique, mais encore celle des Pères dès l'origine du christianisme; et le septième, qui surpasse tous les autres en impiété, en

:

affoiblissant avec les sociniens et les libertins la preuve des prophéties, qui est la chose du monde la plus constamment opposée à la tradition et à tout l'esprit du christianisme.

CHAPITRE XXX.

Conclusion de ce livre par un avis de saint Justin aux rabbinisans.

QUANT aux critiques modernes, qui s'imaginent faire les savans et les grands hébreux, en soutenant les solutions des rabbins contre les Pères, et même leur en fournissant de nouvelles à l'exemple de Grotius, nous disons avec saint Justin (1), que s'ils ne méprisent ceux qui s'appellent rabbi, rabbi, comme Jésus-Christ le leur reproche, ils ne tireront jamais aucune utilité des prophètes; ce qui, pour des chrétiens, est une perte irréparable, puisqu'elle entraîne avec elle celle de la foi, et nous empêche de nous établir, comme nous l'enseigne saint Paul, sur le fondement des apóires et des prophètes, dont Jésus-Christ est la principale pierre de l'angle (2).

(1) Dial. ad. Tryph. p. 339.— (2) Ephes. 11. 20.

LIVRE QUATRIÈME.

M. Simon, ennemi et téméraire censeur des SS. Pères.

no

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CHAPITRE PREMIER.

M. Simon táche d'opposer les Pères aux sentimens de l'Eglise passage trivial de saint Jérôme, qu'il relève curieusement et de mauvaise foi contre l'épiscopat : autres passages aussi vulgaires du diacre Hilaire et de Pelage.

CETTE Opposition de notre critique aux traditions et à la doctrine de l'Eglise, lui fait relever avec soin et sans aucune nécessité tous les passages des anciens commentateurs qui semblent confondre l'épiscopat et la prêtrise, tels que sont ceux de saint Jérôme, d'Hilaire diacre, et de Pélage. Ces deux derniers sont schismatiques. Hilaire, si c'est le diacre, comme le croit M. Simon, est luciférien : Pélage est connu comme l'ennemi de la grâce. Il n'y a point d'anciens commentateurs latins qui soient plus estimés de M. Simon que ces deux là; nous en verrons les endroits. Mais ici, pour nous attacher à ce qui regarde l'épiscopat et la prêtrise, voici sur cette matière ce qu'il rapporte de saint Jérôme dans l'extrait du Commentaire sur l'épître à Tite (1). Il prétend que les prêtres ne différoient point ordinai(1) P. 234, 235.

rement

rement des évêques, et que cette distinction n'a été introduite dans l'Eglise que depuis qu'il y eut différens partis, qui donnèrent occasion à établir d'entre les prêtres un chef qui fút au-dessus d'eux, au lieu qu'ils gouvernoient auparavant tous ensemble les Eglises. Mais il semble que son sentiment n'étoit pas alors approuvé de tout le monde, puisqu'on lui objectoit qu'il n'étoit appuyé sur aucun passage de TEcriture. C'est pourquoi il le prouve au long, et il conclut que c'est plutôt la coutume que l'institution de Jésus-Christ qui a fait les évêques plus grands que les prêtres.

Je rapporte au long ce passage, afin qu'on voie. le grand soin que prend notre critique de faire valoir ce qui lui semble contraire à une doctrine aussi établie dès l'origine du christianisme que celle de la distinction des évêques et des prêtres. C'est en vérité une foible ostentation de doctrine que de produire soigneusement un endroit de saint Jérôme que tous les écoliers savent par cœur, et qu'on évite de proposer sur les bancs, tant il est commun. D'ailleurs, il ne faisoit non plus au dessein de notre critique que tous les autres de quelque nature et sur quelque sujet que ce fût, qu'il auroit pu extraire des commentaires de ce Père; et l'on voit bien qu'un passage si trivial n'a mérité de trouver sa place dans le curieux ouvrage de M. Simon, qu'à cause que les protestans s'en sont appuyés contre l'Eglise.... Mais s'il avoit tant d'envie de rapporter ce pasde saint Jérôme, il devoit du moins observer que par ce passage même il paroît que l'épiscopat avec toutes ses distinctions est universellement éta

sage

BOSSUET. V.

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bli dès le temps de saint Paul, puisqu'il l'étoit dès le temps des divisions que cet apôtre blâme dans ceux de Corinthe'; et au lieu de dire foiblement qu'il semble que le sentiment de saint Jérôme n'étoit pas alors approuvé, pour insinuer en même temps qu'auparavant il l'étoit, il auroit pu dire que ce sentiment étoit si peu approuvé, qu'Aërius fut rangé au nombre des hérétiques pour l'avoir suivi. Les endroits de saint Epiphane et de saint Augustin, qui prouvent cette vérité, ne sont ignorés de personne. Enfin, ce qu'il y avoit de plus nécessaire, c'est qu'au lieu de laisser pour constant que ce fut là le sentiment de saint Jérôme, il auroit fallu remarquer que les docteurs catholiques, et même les protestans anglais, l'ont solidement expliqué par

saint Jérôme même.

Mais cela eût été trop catholique, et les critiques n'en auroient pas été contens. Ainsi, M. Simon n'en a rien dit et s'est contenté de se préparer une misérable échappatoire, en faisant prétendre à saint Jérôme que les prêtres ne différoient point ORDINAIREMENT des évéques; ce qui ne signifie rien, et ne sert qu'à embarrasser la question.

Pour ce qui est du diacre Hilaire, schismatique luciférien, et de Pélage l'hérésiarque, l'allégation de 'ces deux auteurs et de leurs passages rebattus, sans les contredire, ne sert qu'à confirmer l'affectation visible de M. Simon à produire autant qu'il peut des témoins contre la foi de l'Eglise; mais l'autorité de ceux-ci est bien petite, parce qu'encore que l'erreur dont ils sont notés ne regarde pas l'épiscopat, ceux qui s'égarent de la droite voie en se séparant de

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