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sus-Christ comme principe de notre justice et de notre salut, avec Adam comme principe de notre péché et de notre perte; d'où saint Augustin tire d'abord en divers endroits deux conséquences contre les explications des pélagiens (1): la première, que Jésus-Christ nous étant proposé comme celui qui nous profite, non-seulement par son exemple, mais encore en nous communiquant intérieurement sa justice, Adam nous est aussi proposé comme celui qui nous a perdus, non point par l'exemple seulement, ainsi que le prétendoient les pélagiens, mais par la communication actuelle et véritable de son péché; en sorte que nous soyons faits aussi véritablement pécheurs par la désobéissance d'Adam, que nous sommes faits justes par l'obéissance de Jésus-Christ (2), qui est la proposition où aboutit manifestement le raisonnement de saint Paul.

CHAPITRE XX.

Seconde conséquence du texte de saint Paul remarquée par saint Augustin: de quelque sorte qu'on traduise, on démontre également l'erreur de ceux qui, à l'exemple des pélagiens, mettent la propagation du péché d'Adam dans l'imitation de ce péché.

La seconde conséquence de saint Augustin, est que la justice de Jésus-Christ étant infuse aux enfans par le baptême, qui est une seconde naissance,

(1) Aug. de pecc. mer. l. 1. c. 1x, x, xv. ad Bonif. lib. IV. c. IV. et alib. pass. (2) Rom. v. 19.

le péché d'Adam passe aussi à eux avec la vie, par la première génération.

Il est clair, dit saint Augustin, par toute la suite du raisonnement de saint Paul, qu'il aboutit à ce parallèle. Ce Père remarque aussi qu'il est ridicule d'attribuer tous les péchés des hommes, au mauvais exemple d'Adam, que les hommes, pour la plupart, n'ont pas connu. Il leur nuisoit donc autrement que par son exemple: il leur nuisoit, dit saint Augustin (1), par propagation, et non point par imitation, comme un pere qui les engendre, et non point comme un modèle dont l'exemple les induisoit à faire mal; d'autant plus que visiblement saint Paul comprenoit dans sa sentence tout ce qui étoit sorti d'Adam, et tout ce qui étoit sujet à la mort. Il y comprenoit par conséquent les petits enfans, à qui l'exemple d'Adam, non plus que celui de Jésus-Christ, ne pouvoit ni nuire, ni servir. Enfin, il s'agissoit de montrer, dans le genre humain, la cause de la mort et de la vie : l'une, dans le péché d'Adam; l'autre, dans la justice de Jésus-Christ. Tous mouroient, et les enfans mêmes. Si par les paroles de saint Paul, le péché étoit introduit dans le monde par Adam, et la mort par le péché, les enfans qui participoient à la mort d'Adam, devoient aussi participer à son péché : autrement, dit saint Augustin (2), par une injustice manifeste, vous faites passer l'effet sans la cause, le supplice sans la faute, la peine de mort sans le démérite qui l'attire. Chicanez, M. Simon, tant qu'il vous plaira : ni vous, ni les pélagiens

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ne pouvez plus reculer: laissez à part, pour un moment, les noms de Théodoret, de Photius, si vous voulez, et des scoliastes grecs traduisez comme vous voudrez le passage de saint Paul : voulez-vous traduire par en qui? c'est la bonne, c'est la naturelle version, où l'Eglise, de votre aveu, gagne sa cause, parce qu'on y trouve celui en qui tous étoient un seul homme (1), comme dans le principe commun de leur naissance, et en qui aussi ils sont tous un seul pécheur dans le principe commun de leur corruption : voulez-vous, au lieu d'en qui, mettre parce que? vous n'échapperez pas pour cela à la vérité qui vous presse : la mort a passé à tous, parce que tous ont péché : il faut donc trouver le péché partout où l'on trouvera la mort. Vous la trouvez dans les enfans: trouvez-y donc le péché. S'ils sont du nombre de ceux qui meurent, par votre propre traduction, ils sont du nombre de ceux qui péchent: ils ne péchent pas en eux-mêmes; c'est donc en Adam, et malgré que vous en ayez, il faut ici de vous-même rétablir l'in quo que vous aviez voulu supprimer. On y est forcé par la seule suite des paroles de saint Paul. Cet apôtre, visiblement n'ayant fait Adam introducteur de la mort, qu'après l'avoir fait introducteur du péché, d'où il avoit inféré que la mort avoit passé à tous, dans la présupposition que tous aussi avoient péché : en sorte que, selon le texte de saint Paul, ils ne pouvoient naître mortels que parce qu'ils naissoient pécheurs.

(1) 1. De pecc. mer, c. x.

CHAPITRE XXI.

Intention de saint Paul dans ce passage, qui démontre qu'il est impossible d'expliquer la propagation du péché d'Adam par l'imitation et par l'exemple.

Er afin de pénétrer une fois tout le fond de cette parole de saint Paul, sur laquelle roule principalement tout ce qui doit suivre; lorsqu'il a dit, que par un seul homme le péché est entré dans le ' monde, et par le péché la mort, son intention n'a pas été de nous apprendre que le premier de tous les péchés soit celui d'Adam, ou que sa mort soit la première de toutes les morts. L'un et l'autre est faux. Pour la mort, Abel en a subi la sentence avant Adam pour le péché, celui des anges rebelles a précédé. Quand on voudroit se réduire au commencement du péché parmi les hommes, Eve en a donné la première le mauvais exemple; et quand on s'attacheroit à Adam, comme à celui dont le sexe étoit dominant, il n'y auroit rien de fort remarquable, qu'étant le premier et alors le seul, il n'y ait point eu de péché parmi les hommes qui ait pu précéder le sien. Ce n'étoit pas une chose qui méritât d'être relevée avec tant d'emphase; mais ce qui étoit véritablement digne de remarque, et ce qu'aussi le saint apôtre nous fait observer, c'est que le péché et la mort qu'Adam avoit encourue ne sont pas demeurés en lui seul, tout ayant passé de lui à tout le monde, le pé

ché le premier comme la cause, et la mort après comme l'effet et la peine.

A cela, les pélagiens d'abord ne trouvèrent de solution qu'en disant : que notre premier père étoit introducteur du péché par son exemple; mais outre que cela étoit insoutenable par toutes les raisons qu'on vient de voir, la suite des paroles de l'apôtre y répugnoit; puisqu'Adam n'y étant introducteur du péché que de la même manière et à même titre qu'il l'étoit aussi de la mort, comme ce n'étoit point par son exemple, mais par la génération que la mort s'étoit introduite, ce ne pouvoit être non plus par son exemple, mais par la génération, que le péché fût entré dans le monde.

que

Voilà si visiblement le raisonnement de saint Paul, et tout l'esprit de ce passage, qu'il n'est pas possible de ne s'y pas rendre, à moins que d'être tombé dans l'aveuglement. C'est aussi de cette manière raisonnent tous les orthodoxes, Tolet, que vous citez mal à propos, Bellarmin, Estius, tous les autres d'une même voix. Vous vous vantiez d'avoir ôté à saint Augustin la force de sa preuve en lui ôtant sa version; mais elle revient, et malgré vous, le passage de saint Paul est aussi clair, aussi convaincant que saint Augustin le disoit (1).

(1) 1. De pecc. mer. c. ix el x.

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