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la même vue les hérétiques qui disent qu'il n'est pas né véritablement, mais seulement d'une naissance apparente, PUTATIVE, prennent la défense du péché (1), ce qu'il explique aussitôt après, en disant: Qu'en passant par tous les états de la vie humaine, il a renouvelé son ancien ouvrage, en ce qu'il a donné la mort au péché, ôté la mort et vivifié l'homme. Voilà donc l'ordre de la rédemption. Jésus-Christ n'a ôté la mort qu'après avoir premièrement ôté le péché; et ne vivifie que ceux qui sont morts, non-seulement de la mort du corps, mais encore de celle de l'ame.

CHAPITRE XXV.

Suite de saint Irénée : la comparaison de Marie et d'Eve: combien elle est universelle dans tous les Pères : ce qu'elle induit pour établir un véritable péché.

Pour venir au second passage cité par saint Augustin: quand on y verra ce lien qui astreignoit à la mort tout le genre humain, par la désobéissance d'Eve, et dont nous sommes délivrés par l'obéissance de Marie (2), chicanera-t-on, en disant: Que ce lien nous astreignoit à la peine et non à la coulpe, et que l'obéissance de Marie n'a fait qu'ôter les mauvais effets de la désobéissance d'Eve? Mais s'il ne s'agissoit que des effets, et que le péché d'Eve ne fût pas le nôtre, pourquoi ce Père avoit-il appelé, un peu au-dessus (3), la désobéissance d'Eve

(1) Lib. m. e. xx. — (2) Lib. v. c. xix.

(3) Ib. c. XVII.

notre désobéissance, que Marie a guérie en obéissant? Pourquoi, disoit-il dans le même endroit, que le bois nous avoit rendu ce que nous avions perdu par le bois où pendoit le fruit défendu? Si JésusChrist, à l'arbre de la croix, nous a rendu la vie de l'ame et celle du corps, nous avions donc perdu l'une et l'autre à l'arbre qui nous avoit été interdit. Jésus-Christ, dit saint Irénée (1), est le premier des vivans, comme Adam est le premier des mourans. Jésus-Christ n'est-il le premier des vivans que selon le corps? Adam n'est-il pas aussi le premier qui est mort dans l'ame? C'étoit donc à la mort de l'ame qu'Eve nous avoit liés par son incrédulité, puisque c'est de la mort de l'ame que Marie nous a délivrés par la foi. Enfin, toute la suite du discours et l'esprit même de la comparaison entre Jésus-Christ et Adam, tant inculquée par ce saint martyr, après saint Paul, fait voir, que comme ce ne sont pas les seuls fruits de la justice, mais la justice elle-même que nous possédons en Jésus-Christ, ce ne sont pas aussi seulement les peines du péché, mais le péché même dont nous héritons en Adam.

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Je remarquerai en passant, que cette comparaison de Jésus-Christ avec Adam, et de Marie avec Eve, se trouve dans tous les Pères, dès la première antiquité, par exemple dans Tertullien (2), mais toujours pour faire voir que la foi et l'obéissance de la sainte Vierge avoit effacé tout le péché qu'Eve avoit commis en croyant au serpent: QUOD ILLA CREDENDO DELIquit hæc credendo delevit; et le dessein est partout de faire voir un véritable péché (1) Lib. 111. c. XXXIII. — - (3) De Carne Christ. cap. XVI

remis, non point seulement à Eve qui l'avoit commis, mais à toute sa postérité qui y avoit part.

CHAPITRE XXVI.

Beau passage de saint Clement d'Alexandrie.

L'un des plus anciens auteurs, après saint Justin et saint Irénée, c'est saint Clément, prêtre d'Alexandrie, qui parle ainsi dans son avertissement aux gentils (1), en expliquant les mauvais effets du plaisir des sens L'homme qui étoit libre à cause de sa simplicité (Dieu l'ayant créé simple et droit, ainsi qu'il est écrit dans l'Ecclésiaste) s'est trouvé lié aux péchés (par la volupté), et notre Seigneur l'a voulu délivrer de ses liens (2). On voit que ce n'étoit pas seulement aux peines, mais encore au péché qu'il étoit lié, et que c'est de ce lien que Jésus-Christ l'a délivré. Qui dit l'homme, dit ici sans contestation tout le genre humain. Adam n'est pas le seul lié au péché, ni le seul que Jésus-Christ est venu délier; tous les hommes sont regardés en Adam comme un seul pécheur, et en Jésus-Christ comme un seul affranchi par l'unité du même corps et l'influence du même esprit.

Il enseigne, dans le Pédagogue (3), que le baptême est appelé un lavoir, parce qu'on y lave les péchés, et une grâce, parce qu'on y remet la peine qui leur est due. Il fait donc voir qu'on ne vient (3) Pedag.

(1) Admon. ad Gent. 51. pag. 1. 6.

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- (3) Eccles. vii. 30.

dans ce sacrement à la rémission de la peine, que par celle de la coulpe, et selon la doctrine de saint Augustin et du concile de Carthage, que le baptême seroit faux dans les enfans si l'on n'y trouvoit l'un et l'autre.

Après avoir rapporté dans le troisième livre des Tapisseries (1) le sentiment de Basilide, qui condamnoit la génération des enfans, à quoi cet hérésiarque faisoit servir le passage de Job, où il est porté que nul n'est exempt de tache, pas même l'enfant d'un jour; et le verset où David confesse qu'il a été conçu dans les péchés, il conclut : Qu'encore qu'il soit conçu dans les péchés, il n'est point lui-même dans le péché, ce qui seroit contradictoire, si on n'expliquoit, qu'il n'est point dans un péché qui vienne de lui, quoiqu'il soit dans un péché qui vient d'un

autre.

On trouve même en termes formels cette distinction dans ce savant auteur, au quatrième livre des Tapisseries, où il est porté (2): Que l'enfant, à la vérité, n'a point péché, mais actuellement et en luiméme ενεργῶς, ἐν ἑαυτῷ. Il est vrai que ces paroles sont de Basilide; mais saint Clément ne les contredit pas et ne reprend, dans le discours de cet hérétique, que de dire qu'on a commis des péchés dans une autre vie précédente, laissant tout le reste en son entier, comme en effet il n'y a rien que de véritable.

Et le même Père fait bien voir qu'à la réserve de cette autre vie, et des péchés qu'on y pourroit avoir commis, la doctrine de Basilide étoit véritable, (1) P. 342.—(2) P. 369.

puisque dans le troisième livre des mêmes Tapisseries, il enseigne qu'un prophète reconnoît des impiétés dans les enfans qui étoient le fruit de ses entrailles (1), et qu'il appelle de ce nom d'impiétés, non pas la génération en elle-même, ni ces paroles croissez et multipliez, prononcées de la bouche de Dieu; mais, dit-il, les premiers appétits qui nous viennent de notre naissance éx yevérews, et qui nous empêchent de connoître Dieu.

Par-là donc il a désigné la concupiscence que nous apportons en naissant. Il l'appelle une impiété, non point en acte formé, mais quant à la tache qui nous en demeure en habitude, en puissance, en inclination; et cela qu'est-ce autre chose que le fond du péché originel; 'puisque, selon saint Augustin (2), c'est à ce fond qu'adhère la tache qui est effacée dans le baptême.

CHAPITRE XXVII.

Que la concupiscence est mauvaise; que par elle nous sommes faits un avec Adam pécheur; et qu'admettre la concupiscence, c'est admettre le péché originel : doctrine mémorable du concile de Trente sur la concu piscence.

İL faut donc ici remarquer que tous les passages (qui sont infinis) où nous trouvons la concupiscence, comme un mal venu d'Adam, inhérent en nous, nous montrent dans tous les hommes le fond

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