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évêque d'Espagne. Il n'a point produit saint Athanase, dont il y a apparence que les ouvrages étoient rares en Occident, et n'avoient point été traduits; mais il n'est pas moins exprès que les autres Pères; puisqu'il dit que le genre humain avoit prévariqué en Adam, que de là nous étoit venue la concupiscence (1): que Jésus-Christ étoit mort sur le Calvaire, où les maîtres des Hébreux, et leur tradition, marquoient le sépulcre d'Adam, afin d'abolir son péché (2), non-seulement dans sa personne, mais encore dans toute sa postérité (3). Ainsi le péché d'Adam n'étoit pas seulement le sien, mais celui de tous ses enfans. Nous avions tous péché en lui selon cet in quo de l'apôtre, que nous trouvons trop souvent pour avoir besoin dorénavant de le répéter; et si ce Père raconte dans la suite que Jésus-Christ nous délivre de la mort, c'est après avoir présupposé qu'il nous délivre, aussi bien qu'Adam, du péché même qui en est la cause.

CHAPITRE XXXII.

Saint Basile et saint Grégoire de Nazianze.

SAINT Augustin nous fait paroître dans la suite du quatrième siècle, comme les deux yeux de l'Orient, en la personne de saint Basile et de saint Grégoire de Nazianze. Il cite à la vérité un beau passage du premier, où il paroît que nous avons été intempé

(1) 1. Tom. Orat. cont. Gent. pag. 456. (2) De Incarn. 57. (3) De Pass. et Cruc.

y

rans en Eve et en Adam, et chassés en eux du paradis (1). C'est quelque chose de fort; puisqu'on voit non-seulement la mort et les autres peines du corps, mais le péché même d'Adam et l'exclusion du paradis; c'est-à-dire, la mort de l'ame, et l'exclusion de l'éternelle félicité passée à tous ses enfans. Mais qui veut voir la vérité toute nue, sans avoir besoin ni de former un raisonnement, ni de tirer une conséquence, n'a qu'à lire ce passage du livre premier du Baptême (2): Ces paroles de notre Seigneur, IL FAUT NAÎTRE ENCORE UNE FOIS, signifient, dit-il, la correction et le changement de notre première naissance dans l'immondice des péchés, selon cette parole de Job: Nul n'est pur de tache, pas MÊME L'ENFANT D'UN JOUR (3); et celle-ci de David: J'ai été conçu en iniquité (4), etc., et cette autre de saint Paul: TOUS ONT PÉCHÉ ET ONT BESOIN DE LA Gloire de Dieu (5); où il parle si clairement d'un véritable péché, que ce seroit obscurcir cette vérité que de l'expliquer davantage. Il dit ensuite que naître de l'eau, c'est, selon saint Paul, mourir au péché; d'où il s'ensuit, conformément à la décision du concile de Carthage (6), que la forme du baptême seroit fausse dans les enfans, s'il n'y avoit un péché auquel ils doivent mourir dans ce sa

crement.

Pour saint Grégoire de Nazianze, saint Augustin en rapporte des paroles claires (7), et entre autres celles d'une oraison sur le baptême que nous n'avons

(1) Hom. 1. de jejun. T. 1. 322. Aug. lib. 1. cont. Jul. v.— (2) Ibid. t. 1. cap. 11. p. 649, 650.. (3) Job. xiv. 4. · (4) Ps. v. 7. — (5) Rom. 11. 23. (6) Can. 11.- (7) Ibid.

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plus, où il prouve, comme vient de faire saint Basile, la vérité de cette sentence de notre Seigneur : SI L'ON NE RENAÎT DE L'EAU ET DU SAINT-ESPRIT, etc., parce que c'est dans le baptême qu'on lave les taches de notre première naissance, dont il est écrit: Nous SOMMES CONÇUS DANS LE PÉCHÉ, etc. Mais nous avons entre les mains ses autres ouvrages, où il appelle le péché d'Adam notre premier péché, et où il dit: Que nous avons goûté en Adam le fruit défendu: qu'en lui nous avons violé la loi de Dieu, et qu'aussi nous avons été chassés en lui du paradis, par où les Pères entendent toujours la vie et le séjour des enfans de Dieu. Il prouve aussi, par cette raison, qu'il faut baptiser les petits enfans en cas de péril (1), et il répond à ceux qui prenoient occasion de différer leur baptême à cause que Jésus-Christ n'a été baptisé qu'à trente ans, qu'il a été libre de prolonger son baptême à celui qui étant la pureté même n'avoit rien à purifier, à qui par conséquent le baptême n'étoit pas nécessaire; mais qu'il n'en étoit pas ainsi de nous qui étions nés par la corruption (2). On trouve aussi dans le même lieu (3) la pratique des exorcismes qui préparoient au baptême, ce qui n'étoit autre chose qu'une reconnoissance publique que tous ceux qu'on baptisoit, et par conséquent les enfans, puisqu'on ne les baptisoit pas dans une autre forme, étoient sous la puissance du démon.

On peut voir encore le premier discours, c'est-àdire, l'apologie de ce Père (4), où attribuant à (1) Orat. XL. p. 648, 653. (2) Ibid. 658.. (3) Ibid. 657.-. (4) Orat. 1. p. 11, 12.

l'homme avant le baptême tout ce qu'Adam a fait de mal, et à l'homme depuis le baptême tout ce que Jésus-Christ a fait de bien, il montre que le péché qui nous vient de l'un est aussi véritable en nous, que la justice qui nous vient de l'autre; ce qui est le raisonnement de tous les Pères, à l'exemple de saint Paul.

CHAPITRE XXXIII.

Saint Grégoire de Nysse.

Il n'est pas possible que saint Grégoire de Nysse, dans une matière si essentielle à la religion, se soit séparé de saint Basile son frère, qu'il appelle aussi son maître, et de saint Grégoire de Nazianze avec lequel il étoit uni, comme tout le monde sait. Cependant on pourroit être étonné de trouver dans son grand Catéchisme une longue instruction sur le baptême, dans laquelle il n'entre pas un mot du péché originel. Il y tourne toute sa pensée à l'instruction des adultes, qui faisoient peut-être alors le plus grand nombre de ceux que l'on baptisoit; mais ce qu'il ne marque pas dans l'explication du baptême, il le marque dans l'explication de l'eucharistie, où pour expliquer pourquoi Jésus-Christ entre en nous par la manducation réelle et substantielle de son corps, il dit que comme le mal a pénétré au dedans, lorsque nous avons goûté le fruit défendu, il falloit que le remède y entrát aussi (1). Il prononce ailleurs

(1) Catech. magna. c. xxxvII. T. 1. p. 102, et seq.

que

que

la chair est assujettie au mal à cause du péché: la mort est venue par un homme, et le salut par un homme aussi (1) : ce qui étend aussi loin la perte en Adam que le salut en Jésus-Christ: qu'une femme (la sainte Vierge) a délivré une femme, c'est-à-dire, Eve et ses enfans, et qu'en introduisant la justice en Jésus-Christ, elle a réparé le péché qu'une autre femme avoit introduit: que Jésus-Christ a reçu le baptême afin de relever celui qui étoit tombé, et de confondre celui qui l'avoit abattu, c'est-à-dire le diable, qui, dit-il, a introduit le péché. C'en est assez pour montrer qu'il ne dégénéroit pas de la doctrine de l'antiquité, qui paroît si manifeste dans ceux de son siècle avec qui il avoit le plus de liaison.

Je ne crois pas pouvoir ajouter rien de considérable aux passages de saint Hilaire et de saint Ambroise, que saint Augustin a rapportés, et ainsi il ne me reste plus, pour achever le quatrième siècle, que d'examiner avec lui les endroits de saint Chrysostôme, ce qui fera la principale matière du livre suivant.

(1) De Virg. ibid. 152.

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